30 - Au-delà des partenariats, quelles collaborations réelles entre les acteurs des milieux universitaire et scolaire en formation initiale à l'enseignement? Bilan et perspectives

Le cadre de référence pour la formation des formateurs de stagiaires (Portelance et al., 2008) définit une compétence commune aux formateurs universitaires et aux formateurs de terrain relativement à la collaboration à établir en vue d'une formation cohérente des stagiaires. Cependant, force est de constater que les rencontres collectives de l'ensemble des uns avec l'ensemble des autres sont très difficiles à organiser. En contrepartie, chaque groupe de formateurs, pris isolément, reçoit des formations de la part des universités. C'est ainsi qu'ils sont amenés à réfléchir, entre autres, au concept de collaboration. Dans cette optique et considérant que la recherche de solutions en groupe fait partie intégrante du processus collaboratif (Portelance, Pharand, Borges, 2011), nous présenterons deux dispositifs de réflexion expérimentés à l'UQO avec les uns et avec les autres ainsi que les moyens utilisés pour améliorer, si possible, la collaboration mutuelle : l'un porte sur des situations fragiles de collaboration et l'autre concerne la complémentarité des rôles.

Depuis que les stages occupent une place importante dans la formation initiale à l'enseignement, la collaboration entre le milieu scolaire et l'université est devenue un incontournable (MEQ, 1994). En ce sens, le ministère endosse les initiatives qui mènent à des partenariats entre l'école et l'université, ainsi qu'au travail conjoint de terrain entre les enseignants associés, les superviseurs de stage. Les directeurs et leur équipe-école sont également convoqués aux fins d'un accompagnement plus soutenu des stagiaires (MELS, 2008). Différentes recherches corroborent également à cette idée (Desbiens, Borges & Spallanzani, 2009; Correa Molina, 2008; Gervais, 2008; Lepage & Gervais, 2008, Gervais & Derosiers, 2005). Mais de quel type de collaboration parle-t-on dans les écrits? Quelle forme prend la collaboration? Quels bénéfices apporte-t-elle? Dans cette communication, nous soulevons plusieurs questionnements sur la collaboration dans le cadre des stages. En nous appuyant sur la documentation ministérielle, ainsi que sur plusieurs recherches abordant le sujet, nous faisons état des définitions mises de l'avant par les chercheurs, des formes de collaboration convoquées, des bénéfices ainsi que des enjeux sous-jacents à la collaboration.

L'accompagnement offert par une personne enseignante associée (PEA) dans un stage en formation à l'enseignement est essentiel au développement des compétences du futur enseignant. Pour assurer un accompagnement de qualité, la PEA doit déployer des compétences différentes de celles qu'elle utilise au quotidien avec ses élèves. Nous mettons en place un projet de recherche action participative pour appuyer les PEA dans leur rôle et contribuer au développement de leurs compétences d'accompagnement. Le choix de l'approche de recherche action participative est ancré dans cette citation de Chevalier et Buckles (2009) : « Il nous faut aborder le champ du savoir différemment… Il nous faut plus que jamais convier tous et chacun à la création et à la mobilisation du savoir. Il nous faut mettre à contribution les connaissances, l'imagination, les compétences, la production de sens et le pouvoir de la raison de tous… » (p.10). Dans notre recherche, les PEA sont considérées comme des acteurs, des chercheurs et des créateurs de leur propre savoir sur leur rôle d'accompagnement, en collaboration avec les partenaires universitaires de leurs milieux. Ces derniers seront en situation d'action-recherche-création de leur propre savoir de formateur universitaire. L'objet de la communication portera essentiellement sur les défis que posent un tel projet avec des PEA évoluant dans des programmes de formation issus de cinq pays différents : Canada, USA, Belgique, Suisse et France.

En Belgique francophone, la formation initiale des enseignants au secondaire est assurée par l'université dans un module restreint de trente crédits. Cette portion congrue du curriculum exige d'optimiser tous les moyens permettant de développer les compétences des stagiaires. A la Faculté des sciences de la motricité de l'UCL, une équipe de superviseurs a été progressivement constituée (2004-2014), avec pour mission d'établir des liens entre l'institut de formation et la dyade « enseignant-associé – stagiaire » opérant sur le terrain scolaire. Composer une équipe de superviseurs implique d'adopter des critères ancrés tant sur les compétences professionnelles que sur les qualités humaines et relationnelles. Sept collègues volontaires ont été recrutés parmi les enseignants associés collaborant avec la faculté. Ces collègues sont partiellement détachés de leur fonction en milieu scolaire pour assumer le rôle de superviseurs universitaires. Faire naître des références communes au sein de cette équipe a représenté un défi majeur pour le responsable du programme. Afin de créer une véritable communauté de pratique, des tables de parole ont permis d'affiner le cœur du métier. Celui-ci s'appuie sur les expériences singulières des praticiens, leurs arts de faire et leurs gestes professionnels. La présente communication a pour but de faire émerger les caractéristiques de ce dispositif qui ont conduit à l'efficience et à l'efficacité reconnues par les différents acteurs.

Lorsque la supervision de stage se fait à distance, les représentants de l'université ne se rendent pas dans les milieux scolaires afin d'observer les stagiaires en classe. C'est le cas à la maîtrise qualifiante en enseignement au secondaire (MQES) de l'Université de Sherbrooke qui compte deux stages pour lesquels la supervision s'effectue à distance. Malgré cette absence physique, en utilisant divers dispositifs numériques et pédagogiques, les superviseurs de la MQES semblent aptes à favoriser un sentiment de présence au sein de leur cohorte (Petit, soumis). Le modèle de la communauté d'apprentissage en ligne de Garrison, Anderson et Archer (2000) compte trois catégories de présence : enseignante, cognitive et sociale. Mais qu'en est-il de la relation avec les enseignants associés (ou mentors) qui accueillent les stagiaires dans leur classe? Par une «présence virtuelle», les superviseurs réussissent-ils à former des triades avec les stagiaires et les représentants du milieu scolaire? À partir des résultats d'une étude exploratoire-descriptive sur la création d'un sentiment de présence dans ce contexte particulier de formation à distance, nous présenterons différents cas de supervision en ligne ayant mené à une valorisation du rôle des personnes-ressources du milieu scolaire, incluant les directions d'établissement.

La complexité de l'environnement organisationnel et l'évolution constante du savoir ajoutées à des dynamiques de transformations structurelles, opérationnelles et culturelles incessantes nécessitent des modes apprenants complémentaires et nouveaux. Les groupes de codéveloppement professionnel (Payette et Champagne 1997) constituent une approche de développement destinée aux personnes liées par des expertises partagées ou complémentaires et persuadées d'apprendre par l'interaction entre elles afin d'améliorer leur pratique. La réflexion effectuée, individuellement et en groupe, est appuyée par une méthode d'apprentissage structurée axée sur les problématiques vécues par les membres du groupe. L'apprentissage se fait dans l'action. Il est cognitif mais aussi social. Au-delà de la résolution des problématiques individuelles par l'approche conseil, cette entraide mutuelle permet, en outre, de créer une culture de coopération et d'ouverture, de briser l'isolement, de tisser un précieux réseau d'entraide, de prendre du recul réflexif par rapport à l'urgence d'agir. La présentation portera sur les étapes de la démarche de codéveloppement (clarification conceptuelle), ses limites, les défis qu'elle pose pour l'animateur et les exigences pour les membres du groupe.

Dans le cadre d'un projet de Chantier 7 développé de concert avec trois commissions scolaires de l'Estrie, des modalités sont explorées pour renouveler et stimuler la formation continue des personnes enseignantes associées (EA) qui accueillent les stagiaires de nos programmes de formation à l'enseignement. Les groupes de codéveloppement en accompagnement de stagiaires semblent particulièrement prometteurs, notamment en raison de la grande cohérence (Desjardins, 2012) que présente l'approche de Payette et Champagne (2010) avec la posture d'accompagnement prônée au sein du projet et qui repose sur les principes d'une relation coopérative (St-Arnaud, 2003). Dans ce type d'approche, si le groupe est un levier important pour explorer la complexité des situations professionnelles en raison de la diversité qu'il permet, on peut toutefois penser qu'il est aussi un lieu où se négocie des valeurs et des intérêts parfois « divergents » avec la posture prônée. Dix personnes EA participant à ce projet préparent et animent, avec le soutien des formateurs universitaires, une rencontre de codéveloppement regroupant des EA de leur discipline ou de leur milieu respectifs. L'analyse de ces rencontres tente de mettre en relief les promesses et les défis de cette approche comme modalité « cohérente » pour la formation continue des EA : pourquoi cette approche? Pour quels apprentissages professionnels? Et quels ajustements pour favoriser un modèle pérenne?

En 1997, Payette et Champagne proposaient le groupe de codéveloppement professionnel comme approche de formation pour des gestionnaires en vue de l'amélioration de leurs pratiques professionnelles. Avant de déployer cette approche novatrice avec des groupes d'enseignants, il a fallu adapter la proposition de Payette et Champagne en tenant compte des conditions propres à la réalité des enseignants. Cette adaptation s'est faite en collaboration étroite avec un groupe d'enseignants associés engagés avec nous dans un projet de recherche collaborative. Par ailleurs, s'il est juste de penser qu'un travail en groupe de praticiens favorise le développement professionnel dès lors qu'il se centre sur l'analyse de situations vécues et le partage de savoirs pratiques, il n'en demeure pas moins qu'un tel type de travail, fondé essentiellement sur l'expérience, comporte des limites. C'est la raison pour laquelle l'équipe de recherche a jugé pertinent d'ajouter à son dispositif une dimension accompagnement qui introduit une autre perspective dans le travail mené en groupe puisque cet accompagnement est assuré par un chercheur universitaire du domaine de la formation pratique à l'enseignement. La communication sera l'occasion de présenter et d'expliciter ce dispositif élaboré à travers un dialogue et une dynamique de collaboration universitaires/ praticiens fondés sur une reconnaissance manifeste des enseignants en tant que professionnels.

Dans le cadre d'un projet de Chantier 7, nous développons un modèle alternatif de formation des enseignants-associés (EA) misant sur la constitution de groupes de codéveloppement professionnel (Payette et Champagne, 2010). Conçu davantage dans une logique d'accompagnement que dans une logique de formation, ce modèle favorise les échanges au sein de groupes non menaçants animés par un EA ressource. Il reconnaît l'expérience et le savoir-faire des EA, tire profit du cycle action-réflexion-action et vise l'établissement de liens entre les milieux de stages et l'université. Ce modèle alternatif de la formation des EA, souhaite rejoindre autant des EA débutants que ceux plus expérimentés. L'implantation d'un tel modèle se révèle extrêmement porteuse, mais il pose aussi des défis organisationnels de plusieurs ordres. Dans cette communication, nous présenterons ce modèle encore en développement, les défis organisationnels qu'il pose lors de son implantation, de même que les solutions qui se dessinent au fur et à mesure de l'avancement du projet.

En collaboration avec les commissions scolaires, l'université de Sherbrooke a mis en place des groupes de codéveloppement en accompagnement de stagiaires. Animés par des personnes enseignantes associées qualifiées de « ressources » (EAR), ces groupes de co-développement permettent aux personnes enseignantes associées d'enrichir leur répertoire professionnel à partir d'échanges centrés sur le partage de situations ancrées dans leurs pratiques d'accompagnement. L'EAR est désignée conjointement par l'université et le milieu scolaire, pour organiser et animer un groupe de codéveloppement professionnel. Pour mener à bien ce mandat, l'EAR est soutenu par une équipe de formateurs universitaires et participe à des rencontres de préparation et de suivi. Ce type de dispositif repose en effet sur l'appropriation d'une démarche structurée (Payette & Champagne, 2010) et nécessite notamment de faire appel à la fonction de « facilitation » (Saint-Arnaud, 2003) pour initier et réguler les échanges.

La présente communication fait état de l'expérience d'un enseignant-associé « ressource » au sein de ce dispositif. Les rôles d'organisateur et d'animateur seront principalement interrogés : quels défis a-t-il relevé pour recruter les PEA de son milieu ? Comment s'est-il approprié la démarche de co-développement ? Comment se perçoit-il dans son rôle d'animateur? Comment développer la posture de « facilitation » ? Autant de questions abordées selon le point de vue d'un enseignant participant.