Informations générales
Événement : 83e Congrès de l'Acfas
Type : Colloque
Section : Section 400 - Sciences sociales
Description :Même si l’Europe s’est davantage intéressée au rapatriement des corps dans les pays d’origine des immigrants et aux demandes de terrain confessionnel par des communautés ethnoreligieuses, le Québec n’a réalisé que des avancées timides sur l’expérience du deuil, de la mort et de la fin de vie en contexte migratoire. Pourtant, les transformations sociodémographiques amènent sur la scène publique des préoccupations comme le respect des pratiques rituelles funéraires des immigrants dans une société majoritaire dite laïque, la spécificité du processus de deuil lorsque la mort se produit à distance et, enfin, la place des réseaux transnationaux lors de ces événements clés du cycle de vie.
Ce colloque s’intéresse donc au processus de deuil chez des immigrants (de religion chrétienne, hindoue et musulmane) ayant vécu la mort d’un proche à l’étranger et/ou en terre d’immigration, et est en lien direct avec une recherche CRSH (2013-2016). Il vise à mieux comprendre la place des réseaux, notamment des réseaux transnationaux, dans ce processus et à identifier le sens et la transformation des pratiques rituelles entourant la mort et le deuil des immigrants.
Trois aspects fondamentaux animeront la réflexion autour de ce sujet interdisciplinaire :
1) Le réseau de soutien, et spécifiquement le réseau transnational. Ce « champ de relations sociales » développé par les migrants, qui traverse les frontières géographiques, culturelles et politiques (Le Gall, 2005), est mobilisé lors des événements du deuil et de la mort. Quelles sont alors les formes de soutien qui circulent dans ces réseaux, notamment via les technologies de l’information et des communications (TIC)?
2) Les rituels, plus spécifiquement les rituels funéraires, ont une fonction essentielle dans le processus de deuil. Comment sont-ils aménagés dans le contexte québécois?
3) Du côté des praticiens, quelles seraient les stratégies d’accompagnement des immigrants endeuillés?
- Lilyane Rachedi (UQAM - Université du Québec à Montréal)
- Béatrice Halsouet (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Programme
Préambule
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Mot d'ouvertureLilyane Rachedi (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Ce mot d'ouverture permettra la mise en contexte des différents concepts en présence dans le colloque : deuils, migrations, pratiques rituelles funéraires et réseaux
Réseaux de soutien, spécifiquement transnationaux
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Les deuils au sein des réseaux transnationauxMichèle Vatz-Laaroussi (UdeS - Université de Sherbrooke)
Les chercheurs dans le domaine de l'immigration ont mis de l'avant les réseaux transnationaux comme des vecteurs de mobilité, de changement, de citoyenneté mais aussi de continuité voire parfois de pression. À partir de la recherche menée auprès de membres de familles immigrantes ayant vécu un deuil au Québec (Rachédi et al., CRSH: 2013-2015), nous nous intéresserons aussi aux fonctions remplies par les réseaux transnationaux des migrants dans ces situations de deuil. Nous posons l'hypothèse qu'ils apportent soutien et solidarité transgénérationnels, mais nous nous intéresserons aussi aux processus par lesquels les différentes générations touchées par le deuil investissent ces réseaux. En particulier, certains y réfèreront surtout sur le plan des racines et des origines alors que, pour d'autres, ces réseaux transnationaux seront les vecteurs permettant d'aller vers de nouveaux espaces-temps, ceux du pays d'accueil et de l'avenir. Cette présentation permettra dès lors d'articuler les résultats de la recherche en cours avec ceux d'une précédente recherche sur les transmissions intergénérationnelles entre trois générations de femmes réfugiées au Québec (Vatz Laaroussi et al., CRSH: 2009-2012). Nous utiliserons pour mener cette réflexion les concepts de nostalgie, de circularité et de mythe du retour.
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Discussion
Adaptation des pratiques rituelles funéraires
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Pratiques rituelles funéraires et postfunéraires hindoues : les prescriptions et leurs adaptations pratiques en contexte postmigratoireMathieu BOISVERT (UQAM - Université du Québec à Montréal), Béatrice Halsouet (UQAM - Université du Québec à Montréal)
La présentation s'intéressera tout d'abord aux pratiques rituelles funéraires et post-funéraires hindous dans une perspective générique. Les rites hindous pratiqués à la mort d'un individu sont en effet considérés comme des samskāra, c'est-à-dire des rites de passage ayant un rôle de purification (Kapani, 1992). Ils sont suivis de rites postfunéraires, les shraddha, très exigeants notamment pour les fils de la personne défunte et s'étalant sur plusieurs jours suivant le décès, puis sur plusieurs années. Ce portrait mettra tout de même en valeur la variété et la multiplicité de ces pratiques rituelles en territoire indien.En deuxième partie, seront dégagées les adaptations qui prennent place en contexte post-migratoire, au Québec. Les rites funéraires et post-funéraires y gardent toute leur importance, mais connaissent des transformations qui semblent inévitables aux pratiquants et paraissent acceptées par eux. En effet, ces dévots doivent faire face au rythme de vie et aux obligations professionnelles, doivent respecter les lois en vigueur et, enfin, composer avec l'éloignement du Gange, fleuve sacré qui est considéré comme le réceptacle idéal des cendres des ancêtres. Ces pratiques varient cependant au Québec également, selon le degré de conservatisme des pratiquants et selon la diversité des communautés concernées, à Montréal et en région.
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Le deuil de l'immigrant africain au Québec : expérience de minorités dans un contexte culturel majoritaireJean Boanerger Fouda Manga (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Lorsque la mort d'un proche survient en contexte d'immigration ou au pays d'origine, l'immigrant n'a pas toujours la possibilité de le vivre selon ses croyances, situation qui n'est pas sans conséquences sur le processus de deuil. Les rituels prévus dans une tradition peuvent jouer un rôle réparateur et faciliter le travail de deuil. Au Québec (culture majoritaire), comme dans la plupart des sociétés occidentales dites laïques, les minorités culturelles doivent faire face aux défis de la ritualité funéraire suite à un décès. Nous voulons ouvrir une piste de réflexion sur ces défis en nous appuyant sur l'expérience du deuil de l'immigrant africain vivant au Québec, où les acteurs ont souvent des visions et des pratiques qui se prêtent difficilement à une conciliation avec l'univers de sens de ces populations ethnoculturelles. Nous tenterons dans cette communication de mettre en évidence la nécessité d'engager tous les acteurs concernés à une réflexion sur la prise en compte du dispositif culturel des immigrants, dans lequel les rites funéraires jouent un rôle clé, afin d'adapter conséquemment l'offre de soutien.
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Pause
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Mourir au Québec : entre normes et pratiques, le point de vue des leaders musulmansYannick Boucher (UdeM - Université de Montréal)
La mort en migration soulève une série de questions complexes mettant à l'épreuve à la fois le cadre législatif et les pratiques funéraires du pays d'accueil d'une part, et, d'autre part, les codes culturels de l'individu décédé, ceux de sa famille et, par extension, ceux de sa communauté. Au cours de ce pré-terrain, des données ont été recueillies par le biais d'entretiens semi-dirigés auprès de leaders religieux de diverses nationalités (Maroc, Algérie, Tunisie, Égypte, Liban,Sénégal) et confessions (sunnite, chiite, soufie, mouride), et ce, dans plusieurs régions du Québec(Saguenay, Québec, Sherbrooke, Brossard, Longueuil et Montréal). Nous nous sommes questionnés sur le rôle des leaders religieux dans la gestion de la mort en contexte d'immigration. Quelles idées de la « bonne mort » les imams se font-ils? Est-il possible d'appliquer les rites funéraires selon les normes de l'islam à la législation du Québec? Bref, comment ces normes sontnégociées en contexte d'immigration par les imams? Les leaders musulmans s'appuyant sur lessources coraniques tendent à présenter les rituels de la mort d'une manière tout à fait unitaire (norme), pourtant les interprétations des pratiques rituelles musulmanes se révèlent être beaucoup plus diversifiées. Quels renseignements ces attitudes nous donnent-elles quant à la recomposition du corpus religieux en situation d'immigration? Notre objectif est donc de faire émerger, par souci de comparaison, la diversité au sein de cette religion.
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Perception d'un imam iranien sur l'expérience de deuil de familles immigrantes à MontréalVahideddin Namazi (UdeM - Université de Montréal)
Afin de mieux comprendre l'expérience du deuil des immigrants installés à Montréal, cette communication tente d'examiner le vécu de la « communauté iranienne » dont la majorité est de confession musulmane. Depuis la deuxième moitié des années 1990, l'Iran comptait parmi les dix premières sources d'immigrants au Canada. Ce pays a gardé cette position même au cours de la première moitié des années 2000 jusqu'à aujourd'hui (CIC, 2015). L'Iran a trouvé une place similaire dans l'immigration au Québec. Autrement dit, si cette tendance continue, on pourrait s'attendre à ce que l'immigration de l'Iran trouve une place importante dans la politique d'immigration du Canada, à cause de son influence potentielle sur la formation de la structure nationale et ethnique de la population immigrante du Canada (Kazemipur, 2004 : 27). Ainsi, à partir de l'expérience d'un « représentant » religieux musulman de cette communauté, cette présentation développera la question des pratiques rituelles funéraires, de leurs transformations, des difficultés rencontrées et des stratégies mises de l'avant. Afin d'avoir une plus grande flexibilité et un meilleur approfondissement de ce sujet, la technique utilisée sera l'entrevue semi-dirigée basée sur la technique de récit de vie.
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Discussion
Stratégies d'accompagnement des praticiens
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Deuils et morts des Congolais de Montréal : petits arrangements avec l'invisibleMarie-Rosaire Kalanga Wa Tshisekedi (UQAM - Université du Québec à Montréal)
L'invisible traverse les frontières sans encombre, il entoure la mort qui elle est sans discrimination. L'individu de par ses idées, ses pensées et son imagination traverse aussi les frontières sans encombre jusqu'à sa traversée physique. Lorsqu'une personne arrive à quitter les siens, pour s'installer ailleurs, elle laisse tout derrière elle. Cette séparation d'avec les proches semble bien s'assumer en général surtout si on en a fait le choix. Cela devient plus difficile lorsque survient la perte d'un être cher à distance. Vivre un deuil loin des siens est une épreuve difficile ou les idées, les pensées, l'imaginaire travaillent fort au delà de soi et des frontières. Comment faire se rapprocher la norme de sa culture dans un pays d'accueil lorsque le deuil frappe un individu qui est loin des siens ?. Dans le domaine de la mort cela peut parfois être très lourd à porter et surprenant étant donné que la mort est parfois taboue dans certaine partie de ses étapes pour certaines cultures. La communauté congolaise de Montréal a réussi à obtenir des arrangements avec la Maison Funéraire Magnus Poirier pour permettre à cette communauté de vivre son deuil relativement comme il faut et dans ces mêmes lieux où se retrouve aussi les québécois auprès de leurs morts.
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Un projet : les Néo-Sherbrookois confrontés à une maladie en phase terminale ou à un décèsJavorka Zivanovic-Sarenac (UdeS - Université de Sherbrooke)
Dans cette communication, vont être abordés les deux volets de ce projet : le premier volet, destiné à la société d'accueil, a consisté en une série des conférences sur les rites funéraires pratiqués dans le pays d'origine. Le deuxième volet, destiné aux communautés culturelles, a pris la forme d'une série d'ateliers qui a été donnée dans différents organismes de la région. Ces ateliers ont permis de développer une « trousse d'information » qui répond aux besoins des communautés culturelles de l'Estrie et dont nous présenterons le contenu durant la conférence. Finalement, des perspectives seront ouvertes vers des futurs projets. Même la Ville de Sherbrooke est reconnue pour sa grande diversité culturelle, les familles immigrantes ont peu de repères quand survient une maladie ou un décès dans leur entourage; en plus, ils trouvent peu d'informations sur les procédures à suivre et sur les services offerts. Quels sont les vécus et les besoins des communautés culturelles lors d'un décès à Sherbrooke? Mis en place en 2012, un Comité de partenariat entre le Service d'aide aux Néo-Canadiens, le CSSS-IUGS, le MIDI et la Coopérative funéraire de l'Estrie a mis en pied un projet destiné aux communautés culturelles ainsi qu'à la société d'accueil.
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Utilisation d'une capsule vidéo sur la mort et le deuil des immigrants comme outil pour les praticiens : le récit entre fiction, réalité et créativitéJosiane Le Gall (Csss de la Montagne), Catherine MONTGOMERY (UQAM - Université du Québec à Montréal), Lilyane Rachedi (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Cette communication s'attardera à la projection du cas d'une famille immigrante récemment arrivée au Canada et dont la mère vient d'apprendre le décès d'un proche au pays d'origine. Scénario reconstruit et inspiré des résultats d'une recherche portant sur le deuil des immigrants (CRSH-Rachédi et al.), nous montrerons comment ce support peut servir de déclencheur de discussions et de réflexions avec des praticiens. À travers cet exercice, nous souhaitons valoriser l'utilisation du récit comme technique de cueillette de données en recherche. Nous souhaitons aussi démontrer ses déclinaisons et « recyclages » possibles pour la pratique. La sensibilisation, la formation et la transformation sont donc au cœur des objectifs de la formule capsule-vidéo. Ainsi, seront mis en évidence les aspects suivants : la complexité de l'expérience de deuil pour des immigrants, la place des réseaux d'entraide et des TICs dans l'expérience de la mort, enfin, l'émergence de pistes pour favoriser un accompagnement adapté.
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Discussion
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Pause
Synthèse de la journée
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Synthèse de la journée et discussionBéatrice HALSOUET (UQAM - Université du Québec à Montréal), Lilyane Rachedi (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Cette communication permettra de réaliser la synthèse des échanges de la journée et de dégager les pistes à explorer comme perspectives de recherche et de pratiques en ce qui a trait aux deuils des immigrants vécus au Québec.
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Discussion