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Informations générales

Événement : 83e Congrès de l'Acfas

Type : Colloque

Section : Section 400 - Sciences sociales

Description :

Une diversité importante de religions, chrétiennes et autres, caractérise les sociétés québécoise et canadienne actuelles. Cette pluralité suscite davantage de débats depuis une quinzaine d’années, dans lesquels semble se dessiner une polarisation entre une conception de la citoyenneté qui inclut l’expression publique de l’appartenance religieuse et une conception de l’incompatibilité entre la religiosité « apparente » et la sécularisation avancée de la société. Si on se réfère aux questions des accommodements raisonnables pour motif religieux et au débat sur la Charte de la laïcité au Québec, on semble de moins en moins en mesure d’adopter, dans les discours publics, un positionnement médian quant à la représentation de la religion. La religiosité manifeste est même le plus souvent associée à de l’intégrisme religieux, mettant en péril les acquis de la modernité laïque.

Ce colloque multidisciplinaire et comparatif propose de réunir des experts reconnus et des jeunes chercheurs afin de se pencher sur l’hypothèse d’un clivage qui serait de plus en plus marqué entre le religieux et le séculier. À partir d’analyses théoriques et de recherches empiriques dans les domaines social, politique et juridique, ce colloque sera l’occasion d’aborder les questions suivantes : les pratiques et les attitudes spécifiques au religieux et au séculier se différencient-elles de plus en plus ou ont-elles en commun des processus de radicalisation? Quels sont les indicateurs qui nous permettent de caractériser les positionnements des différents acteurs par rapport à la religion et au séculier? Les dynamiques entre le religieux et le séculier se répercutent-elles sur les politiques publiques et la sphère juridique? Peut-on évaluer l’impact des représentations réciproques entre les individus religieux et séculiers? Comment le Québec se compare-t-il au reste du Canada et à d’autres pays quant à l’acceptabilité sociale de la diversité religieuse?

Date :
Responsables :

Programme

Communications orales

La polarisation entre religieux et séculier dans les représentations des Québécois et Canadiens (partie 1)

  • Mot de bienvenue
  • L'usage social de la laïcité concernant les expressions de l'appartenance religieuse
    Micheline Milot (UQAM - Université du Québec à Montréal)

    Au Québec, depuis une dizaine d'années, la référence à la laïcité a pris une place inédite dans les registres discursifs, tant social que médiatique et politique. Pourtant, la notion de laïcité fut longtemps mal-aimée dans la société québécoise qui en a fait peu de cas pendant tout le processus historique d'affranchissement de l'État des normativités religieuses. Que recèle cette appropriation récente et quels enjeux sociaux sous-tendent celle-ci? Lorsqu'une notion émerge ainsi dans le cadre langagier usuel, on peut supposer qu'elle révèle des attentes, des inquiétudes ou des perceptions sociales nouvelles à l'égard des phénomènes qu'elle entend signifier. Nous examinerons les usages de la notion de laïcité et ce qu'ils nous révèlent de la perception de la diversité religieuse dans la société québécoise.

  • Entre le religieux et le séculier : les apories de la gestion de la diversité
    Marie-Claude Haince (University of the Witwatersrand)

    Comment cette tension entre le fait religieux et le sécularisme influence-t-elle la mise en œuvre des politiques de gestion de la diversité? Quels enjeux le fait religieux représente-t-il concrètement? Comment penser la gestion du vivre-ensemble par-delà cette dichotomie? Quels paradigmes seraient les plus à même de prendre en compte cette diversité religieuse pourtant inhérente aux sociétés contemporaines? Afin de répondre à ces questions et saisir toute la mesure de cette tension, le cas québécois sera examiné et particulièrement les récentes orientations mises de l'avant dans l'élaboration de la nouvelle politique québécoise d'immigration qui est en cours.

    La gestion de la diversité est un enjeu de taille dans les sociétés d'accueil occidentales et les modèles sont nombreux pour tenter de maintenir une certaine cohésion sociale au sein de celles-ci. Au Canada, le multiculturalisme a été le modèle privilégié, alors que le Québec a opté pour l'interculturalisme. Ces paradigmes présentent néanmoins des limites que le fait religieux ne cesse de mettre à l'épreuve. En effet, au cours des dernières années l'on assiste, particulièrement au Québec, à une tension croissante entre le sécularisme, principe fondateur des politiques pluriculturelles, et le religieux, souvent relégué au domaine de la croyance et du symbolisme.

  • La polarisation religieuse : nouveau paradigme dans l'étude des religions au Québec
    Sarah Wilkins-Laflamme (University of Waterloo)

    Depuis les années 1960 au Québec, on note un déclin des indicateurs traditionnels de religiosité parmi la population générale. De nouvelles générations naissent et grandissent dans un contexte social bien plus sécularisé qu'auparavant. Toutefois, cette tendance générale n'implique pas une disparition du religieux de la société. Certains groupes religieux connaissent une vitalité importante quant à leurs pratiques et leur nombre d'adhérents, nourris surtout par la rétention de leurs enfants et une immigration non occidentale grandissante. Au cours des derniers quinze ans, ces deux mondes du séculier et du religieux semblent se confronter et se cristalliser dans les débats publics et médiatiques, ainsi que dans les représentations des individus. Le cadre théorique naissant de polarisation religieuse nous offre des outils conceptuels afin de mieux saisir cette dynamique dialectique en modernité avancée. En analysant des données statistiques récentes en ce qui concerne les pratiques religieuses et les représentations des individus par rapport aux religions, le but de cette présentation sera de faire ressortir les apports et les limites de cette idée de polarisation religieuse en contexte québécois.

  • Pause

Communications orales

La polarisation entre religieux et séculier dans les représentations des Québécois et Canadiens (partie 2)

  • La sécularisation au Québec à l'épreuve du genre et de la race
    Leïla Benhadjoudja (Université d’Ottawa)

    Depuis une décennie au Québec, des acteurs socio-politiques appellent à limiter l'expression publique de l'appartenance religieuse, particulièrement le foulard islamique, car elle constituerait une menace pour la sécularisation. Si certaines formes de religiosité, notamment le catholicisme, sont perçues comme inscrites dans la modernité religieuse, l'islam apparait telle une religion incompatible à la matrice séculière. Plusieurs auteurs ont problématisé l'opposition récurrente entre « islam » et « sécularisation » dans différents contextes occidentaux. Ils ont mis en évidence les enjeux politiques qui sous-tendent cette opposition et la nécessité de s'interroger sur la définition même de la catégorie religion. D'autres approches appellent à repenser la théorisation de la sécularisation à la lumière du genre et de la sexualité afin de voir à l'oeuvre d'autres phénomènes séculiers invisibilisés par les normativités dominantes (Woodhead, 2007). À partir d'une épistémologie féministe postcoloniale, je propose une analyse des différentes formes de sécularisation au Québec, constituées par les rapports de pouvoir de genre et de race. En effet, l'articulation de la race/racisation et de la sécularisation reste un impensé dans les analyses. Ainsi, il s'agira de voir si les controverses relatives au foulard des femmes musulmanes seraient symptomatiques d'une « confrontation » de différentes pratiques séculières.

  • Les féministes et « la religion » au Québec : la visite du pape Jean-Paul II à Montréal en 1984
    Caroline Jacquet (UQAM - Université du Québec à Montréal)

    Selon nos recherches, plusieurs conceptions féministes de « la religion » catholique coexistent alors. Une première tendance considère « la religion » comme un bloc monolithique, patriarcal et archaïque. La démarche des femmes qui cherchent à allier féminisme et catholicisme leur semble donc vouée à l'échec. Une seconde n'investit pas le « combat contre la religion », mais reconnaît plutôt la distinction entre les prescriptions de l'Église officielle et la religion vécue par les chrétiennes, s'ouvrant ainsi aux femmes croyantes. Une troisième comprend les féministes chrétiennes qui portent le combat féministe au sein de l'Église institutionnelle et de la théologie.

    Les féministes au Québec se sont-elles battues « contre la religion » ? Cette question se pose dans un contexte où l'appartenance à une religion (surtout minoritaire) est régulièrement considérée comme un obstacle à l'égalité entre les hommes et les femmes. Dans cette perspective, les mobilisations féministes lors de la visite du pape Jean-Paul II à Montréal en 1984 représentent un prisme d'analyse intéressant. Les groupes féministes sont parmi les seuls à critiquer les conditions de cette visite (financement public, emballement médiatique); les revues féministes publient des numéros sur l'Église catholique et des féministes chrétiennes et agnostiques/athées participent conjointement à cette ébullition.

  • Les effets inattendus de la mobilisation de la laïcité et de l'égalité hommes-femmes dans les politiques publiques
    Valérie Orange (UQAM - Université du Québec à Montréal)

    Les attentats perpétrés en France en janvier 2015 ont conforté certains Québécois dans l'idée qu'une charte officielle garantirait la présence de la laïcité dans les politiques publiques, notamment celles orientées vers la lutte contre l'intégrisme religieux. L'exemple français permet d'observer les effets possibles d'un tel choix. Depuis 1989, laïcité et égalité hommes-femmes sont convoquées pour encadrer le port du voile, initialement marginal, mais jugé symptomatique d'une poussée intégriste. Jugeant le voile oppressif, tout en occultant sa polysémie, pourtant reconnue par les recherches, les pouvoirs publics français ont régulièrement pris des mesures d'interdiction, jugées stigmatisantes et discriminatoires pour les musulmans et les femmes (Baubérot et Milot, 2011). Or, malgré les (ou en raison des) représentations négatives associées au voile que ces décisions véhiculent, cette pratique ne cesse de se développer, et ce, pour des raisons variées, dont celle de « retournement de stigmates » (Goffman, 1975). L'évolution vestimentaire observée pourrait alors partiellement s'analyser à la lumière de l'évolution des politiques nationales. Le sachant, le Québec doit subséquemment envisager la possibilité d'effets inattendus induits par une telle orientation des politiques publiques, notamment sur la manière de représenter les femmes, musulmanes ou non (Dechaufour, 2008). Cette présentation exposera théories et observations empiriques illustrant ces effets.

  • Dîner

Communications orales

La polarisation entre religieux et séculier dans les représentations des Québécois et Canadiens (partie 3)

  • Jeunes et croyants dans une société fortement sécularisée
    Émilie Drapeau (Université d’Ottawa)

    Mon étude s'interroge sur les représentations sociales de la religion du point de vue de jeunes croyants de 18 à 25 ans qui adhèrent à différentes traditions religieuses. J'ai pour objectif de comprendre l'impact de ces représentations sur leur rapport à la religion et sur leur processus de construction identitaire. À partir de données issues d'une enquête de terrain et d'une douzaine d'entretiens semi-directifs, il ressort de l'analyse que l'environnement fortement sécularisé dans lequel ces jeunes évoluent les mène à adopter des stratégies discursives révélant une polarisation du religieux et du séculier. Je présenterai : 1) les stratégies de légitimation que suppose la définition de soi en tant que croyant, en montrant comment l'identification religieuse se construit, chez ces jeunes, à travers une série de négociations avec l'environnement séculier; 2) les difficultés qu'ils expérimentent, dans ce contexte séculier, lors de l'affirmation de leur identité religieuse. Nous verrons de quelle manière ces jeunes cherchent à se distancier des représentations négatives associées à la religion en proposant des voies alternatives pour décrire leur rapport au religieux. En nommant ce qu'ils présument être le regard que la majorité non croyante pose sur eux, ces jeunes croyants nous informent sur leur perception des représentations dominantes concernant la religion.

  • La place du religieux dans la pensée politique égyptienne : anciens débats et perspectives émergentes
    Wael Saleh (UdeM - Université de Montréal)

    En évaluant à quel point la religion peut être présente dans l'espace politique, avant et au cours du « printemps arabe », l'Égypte est-elle en enquête permanente sur son identité? La place du religieux dans l'arène politique égyptienne a-t-elle été profondément affectée par quatre années de dynamique « printanière »? Après plusieurs décennies d'un débat chronique, la déposition de Moubarak et ses séquelles, l'accession au pouvoir des Frères musulmans et ses répercussions, puis leur destitution et ses séquelles ont-elles initié ou accéléré de profondes transformations dans la pensée égyptienne contemporaine concernant le lien entre le religieux et le politique?

    Le principal objectif de cette communication est d'identifier et de contextualiser, en centrant l'analyse sur les cas qui nous semblent les plus théorisés et les plus représentatifs, les probables métamorphoses survenues dans la pensée égyptienne contemporaine dans sa conception du politique au prisme du religieux.

  • Foi, culte et bienfait social
    Luc Grenon (UdeS - Université de Sherbrooke)

    Malgré que le débat autour du fait religieux et des aspirations spirituelles connaisse une actualité sensible au Québec comme au Canada, on s'interroge peu sur l'ancrage fiscal des institutions religieuses et de leurs activités. Pourtant, des privilèges fiscaux considérables leur sont accordés, qu'il s'agisse d'exemption d'impôt ou de taxe municipale ou encore des crédits d'impôt consentis à leurs donateurs. Ces avantages fiscaux étant supportés par l'ensemble des contribuables (croyants ou pas), les fondements et finalités derrière ce financement étatique méritent d'être analysés, particulièrement à la lumière des principes de liberté et de neutralité de l'État en matière religieuse.

    Les discours politiques et juridiques ont offert un éventail d'arguments, à saveur utilitariste pour la plupart, dans le but de justifier ou du moins d'expliquer ces privilèges fiscaux. Par un exercice de déconstruction, le conférencier entend réfuter l'ensemble de ces arguments utilitaristes en mettant en évidence leurs incohérences et contradictions ou encore les postulats erronés sur lesquels ils reposent. Est-ce que foi et culte en dieu apportent, en soi et à eux seuls, un bienfait à la société?

  • Mot de clôture