Informations générales
Événement : 83e Congrès de l'Acfas
Type : Domaine
Section : Section 300 - Lettres, arts et sciences humaines
Description :À partir d’approches conceptuelles, théoriques et empiriques, les communications associées à ce domaine de recherche abordent des enjeux sociologiques, éthiques, philosophiques et historiques associés à la vie humaine.
Dates :- Dominique Leydet (UQAM - Université du Québec à Montréal)
- E. Allyn Smith (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Programme
Logique, herméneutique et cartésianisme
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La théorie cartésienne des idées : rupture et continuité avec la scolastique médiévaleFrancis Proulx (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Il est difficile de ne pas voir dans le concept cartésien d'idea, par cause du tournant subjectiviste qu'il introduisit dans la pensée moderne, le signe d'une rupture vis-à-vis du réalisme médiéval des essentiis de Thomas d'Aquin. Bien que révolutionnaire par ce premier côté, l'ontologie des idées de Descartes ne s'est cependant pas développée sans subir, par un autre côté, l'influence de la métaphysique scolastique de Suárez. Une question se pose alors: la théorie cartésienne des idées est-elle au final tributaire ou non de la philosophie scolastique? Face à ce problème, les commentateurs se sont traditionnellement rangés au côté de l'une ou l'autre de deux interprétations, l'une discontinuiste et l'autre continuiste. C'est en contribuant au dépassement de cette dichotomie que notre thèse proposera une solution alternative. L'atteinte de cet objectif suivra une démarche méthodique en deux temps: (1) la doctrine cartésienne de l'idea sera tout d'abord comparée à celle thomasienne de la forma substantialis pour (2) ensuite être contrastée avec celle suarezienne du double conceptus. La conclusion qui résultera de cette analyse comparative sera celle-ci: il y a entre la conception cartésienne et la tradition scolastique à la fois continuité (les idées cartésiennes empruntant leur double réalité d'esse objectivum et d'esse formale à Suárez) et discontinuité (la subjectivation cartésienne des idées impliquant un rejet du réalisme thomasien de la forma substantialis).
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La structure de la représentation chez Descartes : l’idée comme acte et objet intentionnelsFrancis Proulx (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Avec la révolution cartésienne, le statut ontologique accordé aux idées a subi d'importants changements. Chez Descartes, en effet, toute idée cesse de s'identifier aux formae qui, dans la scolastique thomiste encore, étaient conçues pour exister en dehors du sujet pensant. Désormais, la métaphysique du cogito fera correspondre les idées aux représentations mentales. Assimilées ainsi à des états subjectifs internes à l'esprit, les idées n'existeront plus qu'au sein d'un rapport de dépendance à l'égard de la cogitatio. Mais alors, comment Descartes peut-il faire coexister au sein des idées sensibles la double réalité d'une esse subjective et d'une esse objective? La solution à ce problème passe ici par une thèse inspirée de la phénoménologie brentanienne: les idées cartésiennes consistent en une structure qui unit en elle la réalité duale d'un (a) acte subjectif de pensée (une realitas formalis) intentionnellement dirigé vers (b) un contenu objectif de représentation (une realitas objectiva). Pour démontrer ce résultat, une démarche en deux points sera suivie: (1) les idées sensibles de Descartes seront d'abord définies via une taxonomie des pensées (2) pour ensuite être soumises à une analyse qui en présentera la dualité ontologique. Au final, cette interprétation de l'esse formale et de l'esse objectivum des idées comme acte et objet intentionnels contribuera à retracer la continuité historique qui doit lier la tradition brentano-husserlienne à celle de Descartes.
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Le statut de l’idée-limite dans les philosophies critiques de l’histoire de Raymond Aron et de Paul Ricœur : de la raison au raisonnableGeneviève Gendreau-Beauchamp (Université d’Ottawa)
Raymond Aron et Paul Ricœur ont tous deux développé des philosophies critiques de l’histoire, condamnant les totalisations des philosophies spéculatives de l’histoire (Hegel, Marx, Comte…). À partir de perspectives différentes, ils ont cherché à historiciser la raison, en déployant une pensée nécessairement compréhensive et pétrie du caractère contingent de l’histoire. Ils ont donc cherché à arrimer Raison et Histoire : Aron à partir d’un questionnement épistémologique sur l’histoire et Ricœur, d’une herméneutique de la narration historique. La fin de l’histoire, d’eschatologique qu’elle était, sous les philosophies spéculatives de l’histoire, a ainsi pris le sens d’une visée et d’une intention de raison, indissociables de la réflexivité du savant sur sa propre condition. Notre communication s’interrogera sur le statut que revêt, chez eux, la raison, en regard de ces inflexions du rationalisme et de l’idéalisme. Elle y prend la double forme, complémentaire plutôt que contradictoire, d’un idéal, voire d’une utopie nécessaire, ainsi que d’une raison incarnée dans le travail du savant, qu’il tire des raisons d’agir au sein du monde vécu. Situation paradoxale, mais non aporétique, où la Raison devient l’objet d’une croyance, d’un acte de foi et d’espérance, et guide la réflexion sur l’histoire. Aron et Ricœur ont en effet pensé une idée de la raison comme horizon régulateur et idée-limite kantienne, tout en prenant la pleine mesure des limites du rationalisme et de l’idéalisme.
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La définition de la notion de « signification-stimulus » dans Word and ObjectPier-Alexandre Tardif (Université Laval)
Usitée tant en théorie de la connaissance qu'en philosophie du langage, la notion de "signification" constitue un thème classique chargé moins par le poids du consensus que par celui de la pluralité des conceptions rivales alimentant maints débats. Nous souhaitons néanmoins porter notre attention sur un détail généralement passé sous silence dans la littérature, à savoir le statut logique de la notion de "signification-stimulus". Le naturalisme de Quine consiste à faire de la philosophie une partie de la science en substituant aux concepts mentalistes traditionnels des explications en termes de comportements verbaux. Or, dans Word and Object, Quine propose explicitement une définition de la notion de "signification-stimulus". Dans ces conditions, il est légitime de reconnaître si le système quinien permet à Quine d'être logiquement justifié à parler d'une définition de cette notion. Afin d'esquisser une réponse à cette question, nous proposons en premier lieu de procéder à une reconstruction de la notion de "signification-stimulus" en termes neurophysiologiques. Nous relèverons ensuite un emploi par Quine de la notion de signification. Ces considérations nous permettrons de mettre en lumière, d'une part, l'incongruité du caractère hybride de la notion de "signification-stimulus" ; d'autre part, le statut logique que l'on doit assigner à cette notion. En guise de conclusion ouverte, nous aborderons la possibilité pour le système quinien d'en offrir une définition implicite.
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Objectivité d’une herméneutique esthétiqueJulien Laberge (UQAM - Université du Québec à Montréal)
La sociologie se trouve de plain-pied impliquée au sein d'un processus d'interprétation, dès lors qu'elle se propose de comprendre un phénomène social. Pourtant, force est d'admettre que peu de théories herméneutiques satisfont aux critères d'objectivité auxquels cherche à adhérer la discipline. Les théories gadamérienne et ricoeurienne de l'interprétation, qui offrent à ce jour les percées les plus pénétrantes en matière d'herméneutique, s'avèrent d'un usage limité à l'égard de l'objet sociologique. Ces approches, en effet, accordent, selon nous, trop d'importance au vécu existentiel de l'interprète, négligeant de ce fait la valeur objective du fait social, tel que Durkheim nous invitait à le concevoir. Nous proposons, dans le présent article, de fusionner la théorie herméneutique ricoeurienne avec une conception dialogique du symbole, de manière à reconnaître, dans l'ethos, le principe directeur à partir duquel interpréter le phénomène social comme structure autonome, et donc objective.
Enjeux sociaux et biomédicaux : études de cas
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La légalisation de la prostitution au Canada : une étude sur l’opinion des danseurs et danseuses érotiquesMyriam BRASSARD, Sabrina Bédard (UQAC - Université du Québec à Chicoutimi), Karine Côté (UQAC - Université du Québec à Chicoutimi), Lagacé DELPHINE, Christopher Earls (UdeM - Université de Montréal), Andréanne GIRARD, Yaolie RIVERIN
La légalisation de la prostitution est au cœur d'un important débat dans plusieurs pays. Deux études ont évalué l’opinion de personnes offrant des services sexuels sur ce sujet. Ces études ont été menées dans des États où la prostitution est légalisée ou criminalisée alors qu’au Canada, la prostitution n’est pas illégale, bien que trois activités y étant liées sont interdites. La présente étude évalue l’opinion de 27 danseuses érotiques (M= 24,3 ans, ET= 3,8) et de 15 danseurs érotiques (M=27,1 ans, ET= 6,1) du même âge, recrutés dans des clubs ou des soirées de danses érotiques. Lors d’une entrevue semi-structurée, les participants ont d’abord mentionné sur une échelle Likert allant de 1 (totalement en désaccord) à 5 (totalement en accord) leur opinion sur la légalisation de la prostitution. Les résultats démontrent que les danseurs érotiques (M=3,5, ET=1,6) et les danseuses érotiques (M=3, ET=1,5) sont en accord avec la légalisation de la prostitution. Il n’y a pas de différence significative entre les deux groupes (t(36)=0,83, p=0,41). Les participants ont aussi expliqué les raisons de leur position. Par émergence pure, huit catégories de réponses ont été créées. Les réponses ont été codifiées dans les catégories via accord interjuges. La catégorie de réponses la plus fréquemment abordée (44%) est « Meilleur encadrement et conditions de travail », suivie par « Libertés et choix personnels » (25)%. Les retombées pratiques et théoriques de ces résultats seront discutées.
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Demain ne meurt jamais : anticipation personnelle du futur individuel et de l’avenir collectif de jeunes québécois(e)sPierre-Élie Hupé (Université Laval)
Mon exposé débutera par une courte présentation de la théorie des temporalités sociales (Mercure, 1995), un sujet assez marginal dans la sociologie, pour poser le problème de la projection dans le temps au sein des sociétés contemporaines. Cette introduction me permettra de souligner les limites inhérentes à une représentation linéaire des devenirs individuels, vision qui ne s'applique qu'à certaines sphères de la pratique significative et qu'il est nécessaire à prendre en compte pour élargir les possibilités de la collecte de données.
Je poursuivrai en exposant la méthodologie et des résultats auxquels a abouti l'analyse de 15 entrevues semi-dirigées menées entre septembre et novembre 2014 auprès de jeunes québécois(e)s âgées entre 20 et 25 ans. Les répondant(e)s sont réparti(e)s en quotas égaux entre diplômé(e)s universitaires, collégiaux et secondaires. Le cœur de la discussion tournera autour des formes d'organisation de l'anticipation du futur individuel, des valeurs personnelles ainsi que des contraintes sociales qui les orientent; de l'arrimage de ces formes à la projection dans l'avenir collectif et des paradoxes que cela occasionne dans les réponses de certain(e)s répondant(e)s. Pour terminer, je présenterai des conclusions préliminaires vers lesquelles pointent mes travaux.
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Les dessous de la séductionVirginie Duceppe-Lamarre (UdeS - Université de Sherbrooke)
La séduction présente un paradoxe notable : elle est omniprésente dans nos vies sans être définie de manière convenable. Elle révèle ainsi une tache d’ombre dans la démarche scientifique inter-disciplinaire : en effet, comment peut-on étudier un phénomène, même sous sa forme appliquée, si nous ne l’avons pas d’abord défini ?
C’est justement parce que la séduction est une constante dans nos vies et qu’elle a des retombées sociales qu’il devient intéressant de la considérer comme figure de cas. Tâcher de définir la séduction est d’autant plus d’actualité alors que nos liens sociaux se modifient en réponse aux nouvelles technologies et contraintes professionnelles : en effet, définir la séduction, c’est situer les individus dans une trame historique, tout en qualifiant leurs relations intra- et inter-groupes.
C’est ce que je me propose de faire en me basant sur les résultats de ma recherche doctorale : d’abord définir la séduction, pour ensuite prendre en compte les conséquences sociales et éthiques qui découlent de ma définition. Pour cela, j’étudie le phénomène de séduction dans un cadre comparatif où l’humain et les grands singes non-humains sont mis en relation. En établissant de la sorte des parallèles et divergences entre les espèces de grands singes (dont l'humain) en matière de séduction, nous serons amené à réfléchir au concept de communauté, d’identité et du vivre ensemble.
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Être concertiste de chevet en contexte de soins palliatifsMatthieu Léveillé (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Cette communication présentera les enjeux pratiques et méthodologiques d'une recherche en études et pratiques des arts. Cette recherche s'intéresse plus précisément à la pratique d'un musicien interprète qui travaille en interdisciplinarité avec une équipe de soins palliatifs à l'hôpital de Verdun. La thèse traite de la description et de l’analyse de cette pratique inédite ainsi que de ses retombées sur les principaux acteurs impliqués. Les dynamiques entre les cliniciens et l'artiste, la structure d'accueil et d'encadrement seront également abordées. En résumé, ce sont les grandes lignes d'un modèle d'intervention en développement qui seront à l'ordre du jour.