Informations générales
Événement : 82e congrès de l'Acfas
Type : Colloque
Section : Enjeux de la recherche
Description :Ce colloque vise à définir les défis mais aussi les projets possibles pour l’intégration et la reconnaissance des savoirs autochtones au sein des institutions dans différents secteurs de la société : éducation (cursus scolaires et universitaires, accès aux études supérieures), patrimoines (arts, langues, projets muséologiques), développement économique, utilisation du territoire (exploitation des ressources, foresterie, tourisme), environnement, recherche.
Avec un regard international, interdisciplinaire et interculturel, les conférenciers s’intéresseront aux théories autochtones de la connaissance, aux processus de transmission des savoirs, aux cosmologies locales, aux conceptions de l’enfance et de la personne ainsi qu’aux stratégies de diffusion des savoirs en dehors des réseaux de circulation locale. Quelle est la place des savoirs autochtones dans les études supérieures, la musique, les spectacles, les arts, le tourisme, les musées et les collections multimédias ? En quoi la recherche participative peut-elle favoriser une plus grande prise en compte de ces savoirs dans les institutions et participer au développement de nouvelles pratiques et politiques institutionnelles (écoles, universités, musées, etc.)? Organisé avec l’appui du Centre d’études et de recherches sur le Brésil (CERB) (www.unites.uqam.ca/bresil), le Centre interuniversitaire d’études et de recherches autochtones (CIÉRA) (www.ciera.ulaval.ca) et le Núcleo de Estudos Sobre Povos Indígenas (NEPI) (http://nepi.ufsc.br), ce colloque vise surtout à comparer les contextes autochtones au Brésil et au Québec, mais valorisera également une réflexion sur des expériences dans d’autres pays.
Date :- Laurent Jérôme (UQAM - Université du Québec à Montréal)
- Antonella Tassinari (UFSC - Université Fédérale de Santa Catarina)
Programme
Lieux de mémoire, institutionnalisation des savoirs
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Mot de bienvenue
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Sous la tente, le monde : la ville événementielle et la tente de sudation du Jardin des Premières Nations à MontréalPierre-Mathieu Le Bel (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Souvent associées à des pratiques sur le territoire ou destinées à résoudre des problèmes sociaux et de santé communautaires, les pratiques spirituelles autochtones contemporaines prennent une toute autre dimension si on les considère du point de vue de cet espace de créativité, d'innovation et de résistances qu'est la ville. Sous l'influence d'un double processus, soit l'effet urbain et le fait urbain, les religions et les spiritualités autochtones ont tendance à se transformer et à s'adapter à de nouveaux contextes et à s'inscrire dans des logiques inédites de réseautage, de partage et de solidarité. Par ailleurs, les stratégies de développement urbain favorisées par les décideurs publics tablent de plus en plus sur des mégaprojets où l'événementiel joue un rôle important. Comment peut-on penser la spiritualité autochtone urbaine face à ce développement événementiel? La pratique du sweatlodge, comme d'autres pratiques spirituelles autochtones, est étroitement associée à l'univers forestier. Notre communication propose un regard sur la mise en place d'une loge à sudation urbaine à Montréal. Nous chercherons à faire ressortir comment la pratique de ce rituel peut être vue comme un point nodal où s'articulent les multiples échelles de la ville et où sont négociés implicitement et explicitement les savoirs et les pratiques des autochtones, des acteurs institutionnels mais aussi des touristes.
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Valoriser des savoirs et rapatrier des tubercules dans les Andes sud-péruviennesIngrid Hall (UdeM - Université de Montréal)
Les paysans andins ont contribué à la création de près de 3800 variétés de pommes de terres à l'échelle régionale. Cet effort est désormais officiellement reconnu et valorisé par des institutions internationales, telle la Convention sur la Biodiversité, qui mettent en avant la reconnaissance des savoirs pour l'obtention de droits de propriété sur les matériaux végétaux. Dans ce cadre, le Centre International de la pomme de terre, un Groupement consultatif international de recherche agricole qui abrite la banque mondiale de germoplasme de pomme de terre, a mis en place au Pérou un vaste programme de « rapatriement » de ses collections auprès des paysans des régions où les différentes variétés ont été collectées dans les années 1970. Ce faisant, l'importance des savoirs paysans pour la création et la conservation de ces variétés est mise en exergue. Nous nous pencherons sur leur prise en compte dans les pratiques de conservation, sur les processus de documentation de ces savoirs et le rôle des différents partenaires impliqués dans ce processus. Le cas plus particulièrement traité est celui du Parc de la pomme de terre de Pisac, situé dans la région de Cusco dans les Andes péruviennes, où sont impliqués, outre les paysans des communautés locales, une ONG péruvienne et divers organismes. Nous mettrons en perspective la formulation et la mise en avant des savoirs paysans en dehors de la communauté avec les pratiques de transmission de ces mêmes savoirs en interne.
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Au rythme des eaux : sociétés et territoires autochtones en Amazonie brésilienneRobert Davidson, Laurent Jérôme (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Nous présenterons dans cette communication les objectifs théoriques et empiriques d'un nouveau programme court de niveau maîtrise. L'objectif de ce programme est d'introduire les étudiant.e.s à l'unité et à la diversité des identités, des cultures et des religions de l'Amazonie brésilienne. L'originalité de ce programme est de mettre l'emphase sur la manière dont les peuples autochtones et différents groupes humains de l'Amazonie brésilienne pensent leurs rapports à l'environnement et développent des discours, des pratiques et des savoirs environnementaux en lien avec leurs visions du monde. Il s'agira plus particulièrement de mieux comprendre la manière dont ces différentes sociétés perçoivent, conçoivent et vivent leurs relations avec les différents biomes amazoniens au sein desquels l'eau est omniprésente. Au coeur des enjeux politiques locaux et internationaux (construction de méga-barrages et inondation des territoires, avancée des fronts pionniers, pression des ONG et de groupes environnementaux, résistance des peuples autochtones…), les eaux de l'Amazonie brésilienne (fleuve, rivière, pluies abondantes, humidité) peuvent être considérées comme la pierre angulaire de dynamiques plus larges : elles influencent les types d'habitation, structurent les activités sociales, culturelles et rituelles, s'intègrent dans les cosmologies locales, rythment le temps et les modes de vie.
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Discussion
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Pause
Transmission des savoirs et actualisation de la mémoire : le rôle de la recherche
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Art et savoirs autochtones en Inde : les peintures rituelles de la communauté warliChristine Tougas (UQAM - Université du Québec à Montréal)
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D'autres savoirs, d'autres propriétaires de savoirs et d'autres modes de transmission des savoirsAntonella Tassinari (UFSC - Université Fédérale de Santa Catarina)
Dans les dernières décennies, les projets d'éducation interculturelle au Brésil ont mis l'accent sur l'inclusion des savoirs autochtones dans les programmes scolaires. Bien que les processus d'apprentissage indigènes ont été reconnus par la loi, peu d'attention a été accordée à la compréhension des formes autochtones de transmission des savoirs. Basé sur des recherches de terrain parmi le peuple Galibi - Marworno du bassin de la riviére Uaçá (Amapá / Brésil ), cette communication vise à analyser certaines caractéristiques de la transmission de connaissances spécialisées entre les peuples amazoniens, en mettant l'accent sur les réseaux de transmission des savoirs de sages-femmes. L'objectif est d'examiner l'importance de l'"ouverture à l'autre " dans le réseau de transmition des savoirs - comme il a été suggéré par l'analyse de la mythologie sud-américaine et de la parenté-, en montrant que cela se produit grâce à l'inclusion d'un élément extérieur : les savoirs des autres, d'autres propriétaires de savoirs ou d'autres moyens/modes de transmission des savoirs. Nous avancerons que les anthropologues, les travaux universitaires, les écoles et les universités peuvent être considérées comme faisant partie de ces réseaux autochtones de transmission des savoirs.
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Atikamekw kinokewin : bilan réflexif d'une recherche participative sur la transmission des savoirs en milieu autochtoneSylvie Poirier (Université Laval)
Dans cette communication, nous présenterons un bilan réflexif d'une recherche participative conduite, depuis 2006, en partenariat avec le Conseil de la Nation atikamekw et des membres des trois communautés atikamekw (Wemotaci, Manawan et Opitciwan). Dans un premier temps, nous réfléchirons sur cette expérience de recherche participative en milieu autochtone, sur ce que cela implique pour les chercheurs non-autochtones ainsi que sur les défis éthiques, épistémologiques et méthodologiques, et donc aussi résolument politiques, dans le sens large du terme, qui accompagnent ce qu'il est maintenant convenu d'appeler la décolonisation de la recherche. Dans un deuxième temps, nous présentons le contexte spécifique d'émergence et de mise en œuvre du projet Atikamekw Kinokewin (la « mémoire vivante ») dont les principaux objectifs sont la documentation, la valorisation et la transmission des savoirs (savoir-faire et savoir-être) de ce monde de chasseurs amérindiens et de leur relation intime avec l'univers forestier boréal. Nous terminerons avec une brève présentation des principales activités et réalisations de cette recherche participative avec les Atikamekw, dont la création d'un site internet documentant les savoirs atikamekw. Nous discuterons de la réception d'un tel site par les Atikamekw, jeunes et moins jeunes, et de son potentiel comme outil éducatif et pédagogique.
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Discussion
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Dîner
Arts et nouveaux médias : vers de nouveaux espaces de valorisation et de transfert?
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La réappropriation historique par l'illustration de mémoires graphiques et collectives : 500 Years of Resistance Comic Book (2010) de Gordon HillEmanuelle Dufour (UdeM - Université de Montréal)
En réponse à la méconnaissance générale des cultures et de l'histoire des peuples autochtones au Québec et au Canada, Gordon Hill, membre de la nation kwakwaka'wakw, s'est lancé dans une recherche historique afin d'illustrer l'ampleur de la résistance autochtone à travers les Amériques depuis la colonisation. Il est ainsi question de contrer la discrimination telle que définie par Sayard (2006), celle qui finit par se naturaliser et par devenir accoutumance par un regard indifférent sur ces « choses qui vont de soi » : l'Indien étant marginalisé, stigmatisé, vulnérable, victime de l'histoire et réduit à l'impuissance. La praxis de Hill, en tant qu'outil d'éducation populaire, s'articule ainsi autour d'une réappropriation historique qui s'inscrit à merveille à l'intérieur du concept de souveraineté visuelle de Michelle H. Raheja (2007). De ce fait, elle constitue une solution alternative pour contrer les effets pernicieux d'une représentation réductrice et eurocentrique des Premières nations, en plus de légitimer un sentiment de fierté auprès des peuples autochtones grâce à une relecture historique et ainsi, inspirer les générations futures à continuer de défendre leurs droits ancestraux et patrimoines culturels contre les agressions colonisatrices du présent.
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Comment reconnaître, valoriser et transmettre la culture guarani : le design et la recherche action-création à la rescoussePierre De Coninck (UdeM - Université de Montréal), Pablo FERREIRA (Agence Brésilienne de coopération), Elisabeth KAINE (UQAC - Université du Québec à Chicoutimi)
En 2008, l'équipe de recherche «Design et culture matérielle» (DCM) de l'UQAC et de l'UdeM a effectué un projet de recherche action-création auprès de 14 artisans et artisanes autochtones Guarani de l'État de Rio de Janeiro (Sapukai, Brésil) ainsi des représentants d'organismes publics que sont la FUNAI et le Museu do índio dans un objectif de développement social et durable des individus et des communautés. Un an après cette mission, DCM souhaitait connaître quels en étaient les retombées tant au niveau des participants (autochtones, représentants des organismes partenaires) qu'au niveau des cinq communautés et des deux organismes partenaires. Une mission d'évaluation a donc été entreprise dans la communauté de Sapukai. Les résultats de la mission montrent que les impacts en terme d'empowerment ont été réels et significatifs auprès des participants autochtones, en tant qu'individus. Mais ce volet positif a suscité certaines réserves auprès de certains chefs de communautés tout comme auprès des représentants des organismes partenaires qui se percevaient à certains égards contester au niveau de leur autorité et de leur leadership. Bien que cette contradiction soit inhérente à l'approche d'empowerment, DCM propose certaines recommandations aux principaux partenaires afin de ne pas contrecarrer l'objectif de développement social des individus et des communautés autochtones.
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Le CyberPointdeVue : un projet de restitution de données immatérielles en collaboration avec les Kaingang du BrésilRobert Crépeau (UdeM - Université de Montréal), Annick HERNANDEZ (UdeM - Université de Montréal)
L'accès aux nouvelles technologies de l'information et de la communication et plus particulièrement à l'Internet dans les communautés autochtones du Canada et d'ailleurs est en voie de modifier profondément le rapport qu'entretiennent les jeunes générations avec le savoir et la tradition autochtones. Depuis 2007, nous travaillons au développement d'une nouvelle méthode de transfert des connaissances en anthropologie, le CyberPointDeVue. En collaboration avec la Première Nation Kaingang du Brésil, nous avons ainsi pu développer un modèle de transfert de ressources immatérielles en anthropologie qui permet à des usagers autochtones de s'approprier le savoir des aînés de leurs communautés. Le CyberPointDeVue est un modèle de transfert qui s'appuie sur une base de données de ressources immatérielles en anthropologie et sur un outil de création de page Web pour restituer le contenu de la base, inter-reliés, autour duquel se greffent des activités de co-construction de connaissances et de création de récits. Dans cette communication, nous discuterons des enjeux et des difficultés qu'un tel projet comporte.
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Discussion
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Dîner
Transmission des savoirs et processus d'éducation : l'école en question
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Pour une meilleure compréhension de l'expérience scolaire de persévérants universitaires des Premières Nations : l'importance de l'acteur et du choix des méthodes de collecteJo-Anni Joncas (Université Laval)
Cette communication expose les résultats d'une recherche sur l'expérience scolaire de persévérants universitaires des Premières Nations, en mettant l'accent sur un outil de collecte de données adapté. La réussite scolaire des Premières Nations est en deçà des populations non autochtones. Au niveau postsecondaire, la principale différence entre ces populations réside dans la proportion de diplômés universitaires. En 2011, 8,7 % des Premières Nations du Canada avaient un grade universitaire comparativement à 26,5 % de la population non autochtone. Se basant sur les théories de l'action, cette recherche accorde une grande importance aux acteurs impliqués. Elle utilise des méthodes de collecte de données inspirées du paradigme de recherche autochtone qui privilégie la production de savoirs de concert avec les acteurs. Plus spécifiquement, la méthode du dessin-entretien a été utilisée. Elle a été développée afin de respecter le style de communication des minorités ethniques pour qui le silence, la narration en groupe et les représentations visuelles ont une grande importance. Elle se déroule dans un processus cyclique qui permet un temps de réflexion personnelle et d'échanges entre les participants. Les résultats permettent de comprendre comment ces persévérants construisent et donnent un sens à leur expérience scolaire.
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L'école, lieu de transmission des savoirs autochtones? Étude sur les institutions postsecondaires de la région montréalaiseLéa Lefevre-Radelli (Centre de recherche pour l'inclusion scolaire et professionnelle des étudiants en situation de handicap (CRISPESH))
Depuis les années 1970, les voix autochtones émergent pour revendiquer un système d'enseignement permettant la transmission des langues et des cultures autochtones à la nouvelle génération. Ces revendications, regroupées en 1972 par la Fraternité des Indiens du Canada dans La maîtrise indienne de l'éducation indienne, portaient l'espoir d'une éducation qui évoluerait « d'un outil d'assimilation à un instrument d'empowerment », selon les mots récents de Blair Stonechild (2006). Pourtant, en 2014, les instances gouvernementales sont toujours accusées par les organismes autochtones de favoriser un système d'enseignement à visée assimilatrice. Cette communication se propose d'analyser les initiatives des institutions postsecondaires montréalaises pour œuvrer à la diffusion des cultures autochtones. Comment ces institutions postsecondaires répondent-elle aux revendications autochtones, à quels obstacles se heurtent-elles? Cette question sera examinée à partir de données en cours d'analyse sur les écoles autochtones autour de Montréal (notamment le défunt collège Manitou) et sur les universités et cégeps montréalais. Cela permettra de s'interroger sur les conditions d'émergence de nouveaux lieux de transmission culturelle autochtone au sein du système d'enseignement.
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La culture autochtone est-elle soluble dans la forme scolaire? Les enjeux d'un enseignement de la culture kanak à l'école aujourd'hui en Nouvelle-CalédonieMarie Salaun (Université de Nantes)
Dans le cadre d'un processus d'émancipation politique de la République française, la Nouvelle-Calédonie est engagée depuis trois décennies dans une réforme en vue d'une « adaptation » de ses curricula aux réalités autochtones. Portée par un mot d'ordre politique (décolonisation) et un mot d'ordre de justice sociale (réduction des inégalités scolaires entre autochtones kanak et non-autochtones), la réforme visant à éloigner les contenus d'enseignement de leur référent français peine à voir le jour. Comment les savoirs autochtones peuvent-ils être coulés dans le moule des savoirs scolaires ? Comment les programmes effectivement mis en place arrivent-ils à résoudre la contradiction latente entre la « culture autochtone » et la « culture scolaire » ? Poser la question de la tension entre savoirs autochtones et savoirs scolaires revient à se demander ce que l'on fait à la culture autochtone quand on l'enseigne : il s'agit de prendre au sérieux les effets de tout changement dans le système de transmission des savoirs sur leur contenu, compte-tenu du fait que la transmission des savoirs autochtones s'est faite jusqu'à présent hors de l'école. Quelles peuvent être les conséquences sur la nature de ces savoirs du fait qu'ils soient transmis désormais par l'école ? Quel type de réflexivité les élèves autochtones vont-ils développer à l'égard de leur culture d'origine ? Quel type de collaboration entre pédagogues, anthropologues et représentants de la communauté peut-on ici mobiliser ?