Informations générales
Événement : 82e congrès de l'Acfas
Type : Colloque
Section : Section 600 - Colloques multisectoriels
Description :Ce colloque propose une exploration multidisciplinaire des thèmes actuels de recherche sur les enjeux vécus par les personnes de la minorité sexuelle, soit toute personne qui s’identifie comme lesbienne, gaie, bisexuelle, transsexuelle/transgenre, intersexuelle, queer ou en questionnement, issue d’une famille homoparentale ou perçue comme différente en raison de son expression de genre ou de son association avec des individus de minorités sexuelles. Ainsi, ce colloque vise à aller au-delà de l’homosexualité pour examiner la pluralité des identités des personnes qui forment cette minorité sexuelle hétérogène, notamment les personnes bisexuelles, transgenres et intersexes. L’exploration proposée sera faite sous trois axes, soit : 1) en abordant les concepts distincts et interreliés des catégories et des étiquettes chez les personnes de la minorité sexuelle; 2) en traitant des enjeux propres aux personnes « minoritaires » de la minorité sexuelle (soit celles qui tombent dans les zones grises exclues dans une vision dichotomique homosexualité/hétérosexualité); et 3) en explorant le débat actuellement en cours dans le domaine, à savoir si les jeunes de la minorité sexuelle sont maintenant « post-gais » et les implications de ce phénomène pour la santé et le fonctionnement socioaffectif des jeunes de la minorité sexuelle.
Date :- Marie-Aude Boislard (UQAM - Université du Québec à Montréal)
- Hilary Rose (Université Concordia)
Programme
Mot de bienvenue (Marie-Aude Boislard)
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Mot de bienvenue
La bisexualité
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Ni une « phase », ni une « mode » : données probantes des deux dernières décennies sur les tendances bisexuelles des adolescentsElizabeth Saewyc (UBC - University of British Columbia)
Tout comme la théorie sur l'identité bisexuelle à l'adolescence demeure limitée, plusieurs des informations qui circulent actuellement sur les jeunes bisexuels ne sont pas basées sur des données probantes provenant de recherches rigoureuses. Dans cette présentation, les tendances des comportements et des identifications bisexuelles depuis 1992 seront examinées à partir des données provenant des enquêtes à grande échelle menées dans les écoles secondaires en Colombie Britannique et au Minnesota. Les variations dans les prévalences, les différences de genre, l'intersectionnalité des identités, la concordance entre identités et comportements et l'identification possiblement plus précoce des jeunes dans les enquêtes seront présentées. Les résultats de mes recherches seront discutés et mis en lien avec les discours contemporains sur la bisexualité, afin de vérifier dans quelle mesure les idées populaires sur les jeunes bisexuels sont confirmées ou infirmées par les données populationnelles en Amérique du nord.
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Les paradigmes de Pepper appliqués à l'étude de la bisexualitéHilary Rose (Université Concordia)
Il a déja été discuté que le modèle métathéorique des paradigmes (i.e., worldviews) du philosophe américain Stephen Pepper a des implications profondes sur nos théories, nos recherches et notre pratique. Brièvement, Pepper (1942) a décrit quatre paradigmes: le formisme, le mécanisme, l'organicisme et le contextualisme. La valeur d'un tel modèle est de nous permettre d'identifier les hypothèses sous-jacentes, basées sur les métaphores du fond, de ces quatre paradigmes (et donc nos théories sociales), ainsi que leurs forces et leurs faiblesses. Autrefois, on a appliqué ce modèle aux théories de l'interaction familiale et aux théories de la sexualité humaine. Dans cette présentation, ce modèle métathéorique sera utilisé pour analyser les théories de la bisexualité. En particulier, les quatre paradigmes de Stephen Pepper seront employés pour examiner les théories de la bisexualité, dont celles de Storm (1980) et de Brown (2002).
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Les bisexuelles : questionnements et enjeuxRosine Detournay Horincq (ULB - Université Libre de Bruxelles)
Peu de recherches concernent spécifiquement les personnes bisexuelles. Pourtant, les études récentes montrent que la bisexualité est souvent associée à davantage de problème de santé mentale, comparativement à l'hétérosexualité et à l'homosexualité. Mieux appréhender les réalités et les besoins des personnes bisexuelles permettrait différents apports: 1) au sujet des personnes elles-mêmes (i.e. santé, bien-être, reconnaissance, intégration sociale), 2) au sujet de la compréhension de leurs trajectoires et les questions qu'elles soulèvent, puisque celles-ci interrogent les modèles de coming out, du fait que leurs identités existent à l'extérieur des constructions traditionnelles binaires de genre et de sexualités, 3) au sujet des identités sexuelles en général, 4) au sujet de l'intersectionnalité (sexe, genre, sexualités) et 5) au sujet des contraintes sociales spécifiques à leur égard. Plusieurs sources d'études seront examinées pour amener un questionnement sur les filles et les femmes bisexuelles et leurs vécus en présupposant qu'une analyse différenciée soit nécessaire avec les hommes et les garçons qui se sentent/se vivent comme bisexuels, mais sans que nous puissions, au stade actuel, approfondir cette intuition de recherche. Une exploration des différents points de vue et des interrogations de personnes qui se définissent comme bisexuelles, qui ont des relations affectives et/ou sexuelles avec des hommes et des femmes ou qui se questionnent sur la bisexualité sera exposée.
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Pause
Au-delà de l'homosexualité
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Identités intersexes : émerger des chassés-croisés entre pratiques naturalistes hétéropatriarcales et politiques constructivistes féministes/queersJanik Bastien Charlebois (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Les trajectoires identitaires intersexes remettent en question le postulat d'absolue nécessité d'une concordance «corps sexué normatif/identité de genre normative» sur lequel la médecine se fonde pour procéder à la transformation des corps d'enfants intersexes, de même que pour leur assigner un sexe/identité de genre. Plusieurs personnes intersexes ainsi assignées affirment plus tard une identité de genre dans lequel elles n'ont pas été socialisées et regrettent la perte de leur corps d'origine. Qu'elles effectuent une transition ou non, bon nombre ne s'estiment pas moins légitimes d'être «homme» ou «femme», ni ne considèrent leur corps sexué «ambigu». Certaines encore présentent une identité hors genre ou hermaphrodite. Se désigner comme intersexe se décline à plusieurs sens, de l'identité (complémentaire) à l'affirmation politique. Cependant, les réflexions constructivistes féministes et queers se sont davantage servies de l'existence intersexe qu'elles ne se sont intéressées aux sujets intersexes, donnant lieu à la production de projets politiques pouvant comporter des risques pour les personnes intersexes, qui ont leurs propres voix à faire entendre.
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Herméneutique du pénis : irruption scandaleuse de la vérité dans le discours technoanatomique des transmasculinités homosexuelles et bisexuelles au QuébecAlexander Antonopoulos (Université Concordia)
Dans le cours qu'il consacre à L'Herméneutique du sujet (2001), le philosophe de l'histoire de la sexualité Michel Foucault présente une enquête sur le "dire-vrai" et "souci de soi," qui, bien plus que le fameux "Connais-toi toi-même", organise les pratiques de la philosophie. S'appuyant sur une relecture de la philosophie antique, Foucault propose une analyse des pratiques de subjectivation, dont le "dire-vrai" apparaît comme forme spécifique de connaissance impliquant une transformation de soi. Inspirée de Foucault, cette présentation examinera les techniques, procédures, et finalités historiques, légales et médicales, via lesquelles un sujet transmasculin se constitue dans une transformation et un rapport à soi déterminé. Débordant le cadre de la stricte philosophie, cette étude s'appuie sur les travaux de Foucault et s'inscrit dans le contexte historique québécois actuel de subjectivation des transmasculinités homosexuelles et bisexuelles. La fonction du "dire-vrai" en pratiques politiques sera questionnée en considérant son irréductibilité à un certain nombre de droits, consensus, et privilèges hétéronormatifs masculins lorsque risque, courage, vulnérabilité, résilience, et conviction.
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Dîner
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Les premières expériences sexuelles des jeunes attirés par des partenaires de même sexe : la disponibilité et l'utilisation de scripts sexuelsHenny M. W. BOS (University of Amsterdam), Kai J. JONAS (University of Amsterdam), Daphne Van De Bongardt (Utrecht University)
Selon la théorie des scripts sexuels, les interactions sexuelles sont guidées par des scripts sociaux reflétant à la fois les notions culturelles sur les comportements sexuels jugés appropriés (culturels), les préférences individuelles (intrapersonnels) et les échanges entre partenaires (interpersonnels). Or les plupart des scripts sexuels associés à la première relation sexuelle, comme la perte de virginité, semblent s'appliquer davantage aux expériences hétérosexuelles. Les scripts des premières expériences homosexuelles seront explorés, en questionnant l'applicabilité des scripts hétérosexuels aux expériences homosexuelles, la disponibilité et l'usage de scripts homosexuels, et la disponibilité de scripts sexuels neutres s'appliquant tout autant aux expériences homosexuelles qu'hétérosexuelles. Les conséquences possibles d'un manque de scripts sur les comportements homosexuels à risque et la négociation du plaisir et des mesures de protection dans les relations homosexuelles des jeunes seront aussi abordés. Des entrevues semi-dirigées ont été menées auprès de 14 gais, lesbiennes et bisexuel(le)s hollandais âgés entre 16 et 21 ans. Les résultats révèlent une application limitée des scripts hétérosexuels aux expériences homosexuelles et un accès restreint à des scripts strictement homosexuels. Cependant, les participants font preuve de flexibilité en créant leurs versions personnalisées de scripts hétérosexuels pour guider et réfléchir sur leurs expériences homosexuelles.
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Influences des comportements intériorisés, de la compétence sociale et de l'usage de substances psychotropes à l'adolescence sur les comportements bisexuels de jeunes femmes adultesMahault ALBARRACIN (UQAM - Université du Québec à Montréal), Marie-Aude Boislard (UQAM - Université du Québec à Montréal), Francois POULIN (UQAM - Université du Québec à Montréal)
La littérature sur les jeunes de la minorité sexuelle révèle chez eux une plus grande détresse psychologique, souvent associée à un nombre plus élevé de partenaires sexuel-le-s. Cependant, de récentes études montrent que les femmes ayant des comportements sexuels ou une attirance sexuelle pour d'autres femmes rapportent une plus grande estime corporelle et un meilleur sentiment d'efficacité sexuelle que les autres. D'autres auteurs ont observé que les jeunes compétents socialement sont plus populaires et actifs sexuellement, mais aucune étude similaire n'a été menée auprès de jeunes femmes bisexuelles. Cette présentation vise ainsi à explorer la contribution de la compétence sociale sur les comportements bisexuels de jeunes femmes adultes, tout en examinant les influences des comportements intériorisés et de la consommation de substances à l'adolescence. Une étude menée auprès de 177 québécoises suivies annuellement à partir de l'âge de 12 ans révèle que 27% d'entre elles rapportent avoir déjà vécu des expériences sexuelles avec des hommes et des femmes à l'âge de 22 ans. Ces jeunes femmes étaient perçues par leurs pairs comme ayant significativement plus de comportements intériorisés mais se percevaient elles-mêmes comme plus compétentes socialement que leurs pairs l'adolescence. Elles rapportaient également une consommation d'alcool et de cannabis plus importante à la fin de l'adolescence. Ces résultats seront discutés en fonction de leurs implications théoriques et appliquées.
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Pause
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L'impact de la victimisation homophobe dans l'intégration de l'orientation sexuelle chez des jeunes Québécois de minorités sexuelles de 14 à 22 ansMartin BLAIS (UQAM - Université du Québec à Montréal), Marie-France Goyer (UQAM - Université du Québec à Montréal), Martine Hébert (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Les jeunes de minorités sexuelles sont confrontés au défi d'intégrer positivement leur orientation sexuelle dans un contexte de stigmatisation sociale. Cette étude examine l'impact de l'intimidation homophobe sur 6 dimensions de l'intégration de l'orientation sexuelle à partir d'un échantillon non probabiliste de 262 jeunes de minorités sexuelles âgés de 14 à 22 ans (M = 17.9 ans). Un modèle de régression linéaire a été réalisé pour chaque dimension de l'intégration de l'orientation sexuelle, avec les variables indépendantes suivantes : victimisation homophobe, stratégies d'adaptation, âge, genre, trajectoire migratoire, milieu de résidence, attraction sexuelle et temps écoulé depuis la réalisation de la différence d'orientation sexuelle. La victimisation homophobe était associée à une plus faible affirmation de l'orientation sexuelle et à des scores plus élevés de dissimulation de l'orientation sexuelle, d'homophobie/biphobie intériorisée, de préoccupations relatives au jugement d'autrui, de confusion identitaire et de difficultés d'acceptation de l'orientation sexuelle. Les résultats appuient l'importance de poursuivre les efforts dans la lutte à l'homophobie/biphobie et de mieux outiller les jeunes à y faire face afin de soutenir l'intégration positive de leur orientation sexuelle.