Informations générales
Événement : 82e congrès de l'Acfas
Type : Colloque
Section : Section 400 - Sciences sociales
Description :La sécularisation rapide du Québec, jumelée à la mobilité croissante des personnes – natives comme migrantes – et des ressources symboliques, expliquent la diversité religieuse de la métropole (Meintel et Mossière, 2013). Cette diversité est souvent erronément perçue comme un phénomène uniquement métropolitain et le fait exclusif des immigrants. S’opposeraient à cette diversité les régions du Québec, bastions d’un catholicisme culturel (Lemieux, 1990) porté par une démographie monoculturelle. Or, par suite des politiques de régionalisation de l’immigration (Poirier-Grenier, 2007; Simard, 1996), les régions se sont non seulement diversifiées culturellement (Quimper 2005, 2006), elles sont également entrées dans un régime de pluralité religieuse (Meunier et Wilkins-Laflamme, 2011).
Si Montréal entretient d’elle-même une image de diversité qui joue sur la production et la performance de celle-ci (Radice, 2013 : 19), qu’en est-il des régions du Québec dont l’image d’homogénéité ne correspond plus à leur diversité émergente (Gélinas et Derocher, 2012; Boucher, Meintel et Gélinas, 2013; Moisa, Meintel et Géinas, 2013)? Loin d’une logique centre-périphérie (Beyer, 1998), nous comptons élaborer un portrait des régions pour elles-mêmes. La diversité religieuse des régions demande à repenser le clivage anticipé par les politiques de régionalisation (Girard et Manègre, 1989) et à réfléchir aux spécificités propres des régions.
Les dynamiques religieuses des régions répondent-elles aux tendances montréalaises? Aurions-nous ici un nouveau portrait de la diversité religieuse proprement québécois? Ou doit-on plutôt envisager la diversité religieuse selon une logique spécifiquement régionale? Les régions partagent-elles un schème de diversité religieuse commun ou entretiennent-elles des dynamiques propres, contingentes de leur position géographique et de leur histoire? Le colloque, parrainé par le Centre d’études ethniques des universités montréalaises (CEETUM), mettra en commun les expertises de chercheurs s’étant intéressés à la diversité religieuse et aux régions pour aborder ces questions.
Date :Programme
Accueil
Singulières diversités religieuses : études de cas
-
Mot de bienvenue
-
Être une jeune fille népalaise hindoue au Québec, en région : du rituel collectif aux pratiques plus intimes, cadre de référence doctoral et premières analysesBéatrice Halsouet (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Depuis 2008, environ 1200 des 6500 réfugiés bhoutanais népalophones que le Canada se propose d'accueillir se sont réinstallés, par vagues successives, dans quatre villes du Québec: Joliette, Québec, Saint-Jérôme et Sherbrooke. Ces familles sont majoritairement hindoues et leurs jeunes, qui sont nés dans des camps au Népal et qui s'affirment "Népalais", s'intègrent peu à peu, notamment par le biais de l'école.
Dans ce contexte de réinstallation en région, au Québec, quelle place ces personnes accordent-elles à leur religion? Particulièrement pour les jeunes filles, quels sens donnent-elles aux rites collectifs et aux prescriptions intimes? Ma recherche docotrale s'appuie sur une observation participante entamée depuis trois ans à Saint-Jérôme et sur des entrevues individuelles auprès de mères et de jeunes filles. J'en présenterai ici le cadre de référence et les premières analyses.
Tout d'abord, l'absence de temple en région a un impact sur tous et toutes, mais les rites collectifs restent nombreux, surtout à l'échelle de la famille, particulièrement à Dasai et à Tihar. Et ce, même pour la jeune génération. Ensuite, des pratiques plus intimes comme le vrata (jeûne votif) et les prescriptions autour des menstruations rythment la vie de ces jeunes filles hindoues, même au Québec. Enfin, leur conception du mariage, le vivaha, semble encore très imprégnée de la conception hindoue de ce rite et de leur appartenance au groupe ethnoconfessionnel (Castel 2010).
-
Le groupe Bwi : à la recherche de l'Arche perdueVirginie Duceppe-Lamarre (UdeS - Université de Sherbrooke)
Nous présentons nos résultats de recherche concernant un groupe spirituel situé en région, réservé aux femmes. Ce groupe, que nous nommerons Bwi, se caractérise la confidentialité qui est de mise lorsque des femmes deviennent membres du groupe. Les résultats que nous présentons réfèrent à des informations qui n'étaient pas jugées confidentielles.
Nous discuterons de la « spiritualité à la carte » qui caractérise ce groupe et qui nous apparaît être fait en partie en réponse à un rejet de l'institution catholique. Ceci se traduit en un amalgame religieux où il s'agit de resituer la femme. Ce constat fait état de l'observation d'une grande variabilité des croyances sipirituelles au sein de ce groupe. En extension à ce constat, nous abordons le thème de l'identité de groupe. Nous arrivons à la conclusion que l'identité de groupe nous semble être fragilisée en raison de la variabilité entre les membres dans leur manière de remplir les obligations liées au groupe, ce qui se traduit par l'absence d'une véritable unité dans la multiplicité des pratiques du groupe. Par ailleurs, cet effritement identitaire est contenu par la confidentialité qui permet de maintenir un principe de cohésion au sein du groupe, et ce en vertu de leur différenciation par rapport au reste de la société. À long terme, cette confidentialité ne nous semble cependant pas garante de la pérennité du groupe puisqu'elle contribue à la très lente expansion du groupe, autant à l'échelle provinciale qu'à l'échelle mondiale.
-
La quête de soi par l'interprétation des rêves : recherche ethnographique dans un centre EckankarVincent Brillant-Giroux (UdeM - Université de Montréal)
Eckankar est un mouvement religieux fondé aux États-Unis dans les années 60. Son fondateur a puisé à diverses traditions religieuses, notamment l'hindouisme et le soufisme, pour mettre au point un système de croyances et de pratiques dans lequel on cherche par la méditation et la visualisation à entrer en contact avec ce que l'on nomme « la lumière et le son de Dieu ». À l'été 2012, nous avons réalisé une recherche ethnographique dans un centre Eckankar de la région de St-Jérôme au cours de laquelle nous avons réalisé plusieurs entrevues. La plupart des membres, nés au Québec, avaient délaissé la religion catholique au cours de leur vie avant d'adhérer par la suite à Eckankar, parfois à un âge assez avancé. Suivant les recommandations du mouvement, les membres s'adonnaient quotidiennement à l'analyse minutieuse de leurs rêves, en quête d'images devant leur révéler ce qu'auraient été leurs vies antérieures, afin d'expliquer les épisodes de leur vie présente. Pour plusieurs membres assez âgés, la voie spirituelle proposée par Eckankar leur permettait d'appréhender la mort avec une forme de confiance et de sérénité en la concevant comme un passage vers une vie nouvelle. Cette enquête nous a permis d'appréhender la trajectoire de Québécois ayant adhéré à un mouvement religieux au sein duquel ils ont pu investir un espace interprétatif d'exploration spirituelle qui les aurait menés, selon leur témoignage, vers une meilleure compréhension du monde et de leur propre vie.
-
Pause
-
Les groupes de dévotion laïcs : indices d'une réappropriation du catholicisme au Québec dans la région de SaguenayLaurie Savard (UdeM - Université de Montréal)
Comme le révèle Routhier (1996), depuis les années 1990 et peut-être même avant, la soi-disant sécularisation de la société par des processus étatiques combinés à des statistiques de délaissement des églises a produit un discours dominant où le Québec est représenté comme de plus en plus athée. Or, nos recherches au sein du GRDU démentent vivement cette hypothèse. En effet, la participation des croyants catholiques à des groupes de dévotion laïcs semblent démontrer une réappropriation de la foi catholique dans le Québec contemporain où l'institution n'est plus un critère pour avoir un discours religieux cohérent. Ne pas prendre en compte cette réalité tend à encourager un discours de déchristianisation du Québec basé majoritairement sur des données quantitatives de fréquentation des églises qui simplifie une situation très complexe. En ce sens, nos données empiriques récoltées dans la région de Saguenay au courant des étés 2011, 2012 et 2013 et complétées de quelques retours sporadiques tendent à montrer que le Québec est plus laïc que séculier (Lefebvre 2012).
-
L'ashram Sivananda, incubateur d'hybridité religieuseMarie-Noelle Doublet (UdeM - Université de Montréal)
Fondé en 1963, l'ashram de Val-Morin (Québec) est le siège social de l'organisation transnationale "The International Sivananda Yoga Vedanta Centres" qui propose une pratique du yoga ouvertement spirituelle et hindouiste. On peut cependant observer que de multiples pratiques spirituelles autres que le yoga circulent dans l'enceinte de l'ashram. La clientèle constituée d'étrangers de passage, d'immigrants et de Québécois a été identifiée comme une clientèle cosmopolite capable de développer des relations fondées sur une expérience commune en dépit des différences. Cette forme de sociabilité favorise l'hybridité religieuse qui est acceptée, voire encouragée, par l'organisation qui prône l'universalisme. Cette communication est basée sur les données d'une enquête ethnographique sur le pluralisme religieux au Québec effectuée en 2011 pour le GRDU et sur les données recueillies en 2011/2012 pour le mémoire de maîtrise de l'auteure portant sur le parcours de guérison de pratiquants du yoga Sivananda. Elle propose d'observer comment l'hindouisme et l'indianité servent de substrat à cette hybridité religieuse et comment celle-ci est activée par des facteurs tels que la transnationalité, le multiculturalisme, le cosmopolitisme, la mobilité et la multiplicité des pratiques spirituelles.
-
Période de questions
-
Dîner
Religiosités régionales : portraits et tendances
-
Mot de bienvenue
-
La santé comme vecteur du pluralisme spirituel : l'exemple de l'EstrieClaude Gélinas (UdeS - Université de Sherbrooke)
L'étude du pluralisme religieux actuel au Québec fait ressortir l'importance croissante du lien entre la santé et l'expression des spiritualités individuelles. La fréquentation de centres de santé proposant une perspective spirituelle ou la création de nouveaux groupes religieux axés sur une doctrine souvent multiconfessionnelle, mais ayant la santé comme premier objet de préoccupation s'avèrent les principales avenues par lesquelles un nombre croissant de Québécois cherchent ou parviennent à concilier ces deux réalités. Par contre, les raisons qui expliquent ce jumelage ainsi que la forme que prennent les activités spirituelles en lien avec le souci d'atteindre ou de maintenir une santé satisfaisante demeurent peu connues. À partir de données de terrain ethnographiques recueillies au cours des cinq dernières années dans la région de l'Estrie, nous proposons ici quelques éléments de compréhension en lien avec ce phénomène. Après avoir brossé un portrait quantitatif des ressources spirituelles axées sur une préoccupation de santé en Estrie, nous insisterons plus en détail sur les résultats de recherche qui permettent de mettre en lumière les principales motivations qui animent les adeptes de ces centres de santé et groupes religieux et sur les différents schémas de pensée par lesquelles ceux-ci parviennent à réaliser un tel amalgame entre les sphères de la spiritualité et de la santé.
-
La diversité spirituelle et religieuse dans la région de Lanaudière : entre le visible et l'invisibleDaniela Moisa (UdeM - Université de Montréal)
Contrairement à l'imaginaire commun, la chute de l'autorité de l'Église catholique au Québec est loin d'avoir laissé derrière elle un vide spirituel et religieux. Une recherche ethnographique menée en 2012 dans la région de Lanaudière sur la diversité religieuse au-delà de la métropole révèle un foisonnement spirituel inattendu. Depuis les années 1980, cette région accueille les adeptes du mouvement New-Âge, les évangéliques, les Templiers, les Travailleurs de la Lumière, les esséniens, mais aussi des adaptations des branches de la religion chrétienne, catholique ou orthodoxe. La diversité des spiritualités panthéistes vertes et des pratiques de guérison encadrées par les mouvements écologiques et environnementalistes représente un autre phénomène spirituel puissant. Ces nouvelles formes de religiosité flottent toujours entre le visible et l'invisible, entre la fascination et la stigmatisation, entre l'attirance et le rejet. Le portrait de la diversité spirituelle dans la région de Lanaudière nous permettra un requestionnement épistémologique et méthodologique de la recherche concernant les phénomènes religieux dans un contexte de la mobilité spatiale régionale et du retour de l'homme postmoderne à l'intérieur d'un écosystème culturel et spirituel en pleine redéfinition.
-
Pause
-
La diversité religieuse au-delà de la métropole : une ethnographie du religieux à SaguenayYannick Boucher (UdeM - Université de Montréal)
La problématique liée aux minorités religieuses en région québécoise est un sujet encore peu exploré par les sciences sociales en comparaison des travaux réalisés à Montréal. Que ces minorités soient le fait de l'immigration (islam), ou le fait des Québécois d'origine canadienne-française (groupes évangéliques, bahaïs, etc.), certaines régions composent elles aussi avec la réalité de la diversité et de la transformation démographique. Nos recherches, menées depuis 2007 sur le territoire de la ville de Saguenay, s'appuient sur une démarche qualitative basée sur des observations ethnographiques (directes et participantes) ainsi que sur des entretiens semi-dirigés. L'objectif de cette communication est d'apporter un éclairage sur les questions relatives à la diversité religieuse en dehors de la métropole montréalaise. Nous nous intéresserons à la visibilité du religieux, au rôle de la majorité sociale dans l'émergence d'un pluralisme religieux, et ce, aussi bien dans sa dimension sociale que spirituelle. Nous attacherons ici une attention particulière à l'espace régional afin d'y obtenir des points de comparaison avec les autres grands centres urbains du Québec. Nous considérons donc que les processus décrits en région, même s'ils touchent peu de personnes et qu'ils ne reposent que sur des microcommunautés, éclairent la réalité vécue par ces groupes et nuancent le portrait du pluralisme québécois.
-
Transformation de soi, transformation du social : deux dimensions de la guérison chez les groupes religieux de Saint-JérômeGuillaume Boucher (UdeM - Université de Montréal)
Dans le cadre du projet « Dimensions du pluralisme religieux québécois » mené par le Groupe de recherche Diversité urbaine sous la direction du professeur Deirdre Meintel, nous avons documenté la diversité religieuse se manifestant dans la région des Laurentides, plus particulièrement à Saint-Jérôme. Nous avons répertorié 48 groupes appartenant à différentes confessions ainsi que 7 réseaux ésotériques. 24 d'entre eux ont fait l'objet d'études ethnographiques ponctuelles au cours des étés 2012 et 2013.
Nous avons observé que malgré la grande diversité des expressions religieuses, la guérison était une préoccupation largement partagée par les acteurs de la région. La guérison en tant que transformation de soi est également un thème commun aux groupes religieux étudiés par le projet de recherche global (Meintel et Mossière 2011). Sous cet angle, la spiritualité de Saint-Jérôme s'insère donc dans la dynamique globale des groupes religieux étudiés par le projet.
Par ailleurs, le thème de la guérison s'étend aussi à la vie sociale de Saint-Jérôme, et cette mise en mouvement de la guérison du privé vers le public par les groupes religieux est une caractéristique particulière de la région. Nous présenterons ici les expressions privées de la guérison. Ensuite, les expressions de l'extension de la guérison à la sphère publique seront abordées. Nous conclurons en nous interrogeant sur la possibilité qu'une telle spiritualité puisse porter les germes d'une socialité cosmopolite.
-
Période de questions
Le Québec en religions, au-delà des idées reçues
-
Mot de bienvenue
-
Diversité en région, diversité entre régionsDeirdre Meintel (UdeM - Université de Montréal)
Nous comparons les résultats de notre recherche en équipe (2007-2014) concernant la diversité religieuse dans plusieurs régions : le Saguenay, Laurentides et la Lanaudière. Les chercheurs incluent Deirdre Meintel (directrice), Claude Gélinas, Josiane Le Gall, Khadiyatoulah Fall, Marie-Nathalie Le Blanc et François Gauthier. Les méthodes ethnographiques (observation participante, entrevues) ont été privilégiées dans la recherche. Les dimensions examinées dans cette présentation incluent la diversité religieuse présente, la visibilité de la diversité et les rapports intergroupes autour du religieux (rapports interreligieux, rapports interethniques), ainsi que la circulation religieuse. Nous concluons que la polarité souvent évoquée entre la diversité à Montréal et celle des régions est plutôt trompeuse puisque les régions connaissent chacune des pluralismes distincts et très variables. D'autre part, comme plusieurs présentations dans ce colloque le démontrent, les tendances constatées à l'égard de la diversité religieuse dans la métropole s'appliquent également aux diversités religieuses des régions.
-
Période de questions
-
Mot de clôture