Informations générales
Événement : 82e congrès de l'Acfas
Type : Colloque
Section : Section 400 - Sciences sociales
Description :Quels sont les apports des femmes racisées à la recherche féministe? Cette rencontre du Réseau québécois en études féministes vise à explorer les différentes facettes de la réalité de la recherche féministe au Québec en lien avec les femmes racisées, et à en rendre compte. Dans un premier temps, le colloque s’intéresse à la contribution qu’apportent les femmes racisées à la recherche féministe au Québec : où sont-elles, sur quels sujets travaillent-elles, comment contribuent-elles à l’analyse féministe au Québec? Dans un second temps, l’objectif est de donner la parole à l’ensemble des chercheures féministes qui travaillent sur les femmes racisées au Québec et de cerner les problématiques, questions et enjeux qui émergent de leur démarche. Dans quels termes la recherche féministe produite au Québec aborde-t-elle les femmes racisées? Quels sont les principaux axes de recherche? En quoi le fait de porter attention au processus de racialisation permet-il de générer de nouvelles connaissances sur les réalités des femmes en recherche et des femmes comme sujets de la recherche? Y a-t-il des réticences à l’élargissement du sujet-femme au centre du féminisme québécois? Le colloque entend faire un bilan de la contribution des travaux par et sur les femmes racisées à la recherche féministe au Québec. Comment cette recherche contribue-t-elle à enrichir les connaissances sur les femmes et sur la société québécoise? Par le biais de ce colloque nous aimerions mettre en lumière les nouvelles perspectives d’analyse qui émanent de ces travaux et leur contribution à l’enrichissement des études féministes au Québec. En quoi les perspectives intersectionnelles, antiracistes et postcoloniales viennent-elles éclairer les débats et quelles sont les limites de ces approches? Comment le « Black feminism », le féminisme musulman et le féminisme autochtone sont-ils reçus par le féminisme québécois ?
Dates :- Chantal Maillé (Université Concordia)
- Geneviève Rail (Université Concordia)
- Naïma Hamrouni (Université Laval)
Programme
Ouverture du colloque : Francine Descarries, Naïma Hamrouni et Chantal Maillé
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Mot de bienvenueFrancine Descarries (UQAM - Université du Québec à Montréal)
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Mot de bienvenueChantal Maillé (Université Concordia)
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Mot de bienvenueNaïma Hamrouni (Université Laval)
Les femmes racisées comme sujets et objets dans la recherche féministe au Québec
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Réflexion autour des conditions de légitimité de la recherche féministe québécoise sur les femmes raciséesCléa Benoliel (UdeM - Université de Montréal)
Nous poserons comme première hypothèse de notre intervention que la recherche sur les femmes racisées implique, au sein même du courant féministe québécois, de dévoiler et de déconstruire les biais épistémologiques et conceptuels qui peuvent résider et se poser dans le cadre d'une recherche sur les femmes racisées. Notre analyse nous conduira alors à mettre en évidence les apports de cette recherche pour le féminisme québécois, lesquels nous apparaissent de prime abord dépasser la seule dimension exégétique. Enfin, nous aborderons la question des exigences méthodologiques supposées par la recherche sur les femmes racisées. Cette question, qui engage également les conditions de légitimité de la recherche féministe québécoise sur les femmes racisées et qui soulève notamment le problème crucial du « speaking for others » (Alcoff, 1992), nous amènera alors à considérer, dans la lignée de la démarche de ce colloque, les outils et les contours spécifiques d'une approche dialogique des femmes racisées.
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L'intégration des femmes immigrantes maghrébines à Montréal et à Marseillesonia Ben Soltane (Université McGill)
Mon travail porte sur l'intégration des femmes immigrantes maghrébines à Montréal et à Marseille. Etant moi-même une femme immigrante maghrébine, dés le départ, j'ai ressenti la particularité d'être une chercheure « de l'intérieur », ainsi que l'aspect quasi psychanalytique de mon travail, et ce dans la mesure où il m'amenait à réfléchir à ma propre immigration, et que la distance académique devant méthodologiquement exister entre moi et mon terrain d'étude, s'estompait progressivement vers une situation d'intersubjectivité…
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Regards altérisés sur l'œuvre de Nelly ArcanKarine Rosso (UdeS - Université de Sherbrooke)
L'œuvre de Nelly Arcan a largement été étudiée dans les dernières années. Plusieurs féministes et professeures spécialisées en « gender studies » se sont intéressés à ses romans ou au rapport ambivalent qu'elle entretenait avec les médias[1]. Mais étudie-t-on l'œuvre d'Arcan de la même façon quand on provient d'une minorité culturelle ? Analyse-t-on les thèmes présents dans l'écriture d'Arcan (la prostitution, la pornographie, la chirurgie esthétique) avec les mêmes outils théoriques? Étant une femme non blanche d'origine colombienne, je tenterai de répondre à ces questions en décrivant la façon dont ma position dans l'institution universitaire m'a incitée à traiter autrement les questions soulevées par Arcan.
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Un terrain ethnographique parmi des femmes d'origine ouest-africaine à Montréal : théories postcoloniales et enjeux pour une ethnographe féministe raciséeDiahara Traoré
Cette communication présente les enjeux et les défis d'une approche féministe postcoloniale dans une recherche anthropologique menée par une femme racisée parmi des femmes racisées en contexte migratoire et minoritaire. La recherche discutée s'inscrit dans une démarche féministe postcoloniale pour comprendre le rapport au savoir religieux des femmes ouest-africaines musulmanes de mon étude dans le contexte de Montréal au 21ème siècle, sur la base d'un terrain ethnographique de 24 mois mené entre 2008 et 2010. La reconnaissance de la spécificité historique de mon objet de recherche, en tenant particulièrement compte de la postcolonialité comme condition sociohistorique, politique, culturelle et épistémologique de l'objet de recherche a fortement influencé mon travail et mes analyses. La recherche a fait particulièrement attention aux relations de domination héritées du colonialisme et présentes dans la subjectivité des femmes ouest-africaines étudiées
Table ronde − Intégrer la diversité dans l'enseignement, la recherche et la pratique : défis et expériences
Cocktail
Représentations
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L'égalité entre les femmes au Québec : analyse féministe postcoloniale des représentations sociales dans le matériel didactique d'éthique et culture religieuse au secondaireGaëlle Kingué Élonguélé (UQAM - Université du Québec à Montréal)
À travers une approche inédite en sciences de l'éducation, nous utiliserons la perspective féministe postcoloniale pour explorer et analyser les manuels scolaires d'ÉCR et déterminer si les représentations des femmes racisées sont stéréotypées et si l'égalité entre les femmes, quelle que soit leur origine ethnique, est valorisée. Nous documenterons ainsi l'écart entre les représentations que la société entend perpétuer à propos de son identité et de ses valeurs et les positions institutionnalisées autour de la question de l'égalité entre les femmes.
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Vieillir en terre d'accueil : expériences de femmes aînées immigrantes noiresMichèle CHARPENTIER (UQAM - Université du Québec à Montréal), Agnès Florette Noubicier (UQAM - Université du Québec à Montréal), Anne QUÉNIART (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Les analyses verticales et transversales mettent en exergue les caractéristiques et particularités de chacune de ces femmes aînées et font émerger une pluralité de vieillissements liés à leurs trajectoires de vie parsemées de «ruptures et de discontinuité».
La communication qui suit émane d'une recherche subventionnée par le CRSH et visant à explorer les expériences de vieillissement de femmes aînées immigrantes dans leurs rapports à soi et aux autres (Charpentier, Quéniart, Vatz-Laroussi, 2011-2014). Les travaux présentés s'appuient sur une partie de l'échantillon total de l'étude (90) composé ici de femmes aînées immigrantes noires des communautés ethnoculturelles caribéennes, haïtiennes et congolaises. Quatre groupes de discussion et quatre entrevues individuelles ont permis de connaître leur parcours de vie, leur représentation de la vieillesse, l'impact de la migration sur leur vécu en terre d'accueil et leur façon d'envisager la fin de vie. Les résultats mettent en relief une image polymorphe du vieillissement des femmes immigrantes noires. Ils révèlent aussi que nonobstant les difficultés auxquelles elles peuvent faire face, ces aînées s'ajustent, s'adaptent et peuvent même adopter de nouvelles habitudes de vie qui ne sont pas toujours en adéquation avec leur culture d'origine.
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La révolution capillaire du naturel : perspectives et implications préliminairesIda Ngueng Feze (Université McGill)
Les études concernant les cheveux sont souvent confinées aux perspectives esthétiques ou scientifiques du discours dominant et touchent rarement aux explorations liées à l'absence dans les médias de la présence et l'expression des cheveux naturels des femmes d'origine africaine. Pourtant, l'histoire, le droit, l'économie et même la musique sont autant de domaines qui ont participé à la suppression de cette physionomie dans l'espace sociétal global. Cette lacune a récemment été remise en question par le phénomène de la révolution capillaire du naturel qui revendique une place de droit aux cheveux crépus. Plus qu'un mouvement esthétique, cette révolution rejette les pratiques qui mettent en danger la santé (physique et mentale) de certaines femmes et propose une réévaluation des implications profondes concernant cette texture capillaire particulière, sa contribution à la diversité humaine, à l'identité féminine et communautaire. Alors que le dialogue anglophone a pris son essor, une carence académique demeure dans le contexte interculturel et linguistique (francophone) et souligne le besoin d'intégrer plus de femmes concernées afin de prendre en compte leurs perceptions et les ramifications que celles-ci peuvent avoir sur leur santé et comportement sociétal.
Questions méthodologiques
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Femmes autochtones, itinérance et intersectionnalité : le test de l'étude des trajectoires de vieJulie Cunningham (UdeM - Université de Montréal)
Les histoires de vie des femmes autochtones convergent et divergent sous plusieurs aspects. En phase avec les processus de transformation sociale à l'œuvre globalement – plus particulièrement dans les villes-, les femmes autochtones d'aujourd'hui pénètrent et se distinguent dans des sphères d'action autrefois considérées inaccessibles, tant pour le meilleur que pour le pire. En même temps, ces histoires de vie sont toutes, quoique à degré variable, marquées d'une part par un passé colonial et ses politiques assimilatrices (dont la Loi sur les Indiens, les réserves et les pensionnats indiens ont été les incarnations à la fois les plus puissantes et les plus immuables), et d'autre part, par un héritage culturel, linguistique, épistémologique, spirituel et cosmologique carrément distinct du monde occidental. De quels outils une femme non-autochtone, qui au demeurant se considère féministe, dispose-t-elle pour aborder l'étude des trajectoires de vie de femmes autochtones en situation d'itinérance? Cette communication propose d'examiner les défis éthiques, épistémologiques, méthodologiques que pose une telle recherche pour ensuite porter un regard pragmatique sur la pertinence d'une approche théorique intersectionnelle.
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« Insider/Outsider » : construction de données auprès de femmes raciséesDominique DAMANT (UdeM - Université de Montréal), Laïty Ndiaye (UdeM - Université de Montréal)
Cette communication part d'une expérience de recherche auprès de 23 mères autochtones vivant à Calgary, Régina et Winnipeg et 21 immigrantes racisées vivant à Montréal. Elles ont toutes déclaré avoir été victimes de violence conjugale.
L'objectif de cette présentation sera de susciter, à travers la description du processus de construction de données, une réflexion sur les défis et enjeux d'une recherche tenant compte de la racialisation.
Il s'agira d'une part de partager les choix méthodologiques et épistémologiques ayant sous-tendus le recrutement d'intervieweuses racisées. Et d'autre part, de revenir sur mes observations d'intervieweuse, immigrante et noire en lien au déroulement des entrevues et les effets de mes positions d'insider/outsider sur celles-ci. -
Différence, diversité… dominationSandrine Ricci (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Ma contribution vise à soulever certains des enjeux théoriques et sociopolitiques qu'implique le recours à la notion de « diversité ». Elle s'appuie sur les résultats d'une recherche qualitative, particulièrement une analyse des discours d'une cinquantaine de militantes et travailleuses féministes impliquées dans des groupes de femmes au Québec. Je me suis donc intéressée aux représentations concernant la diversité, une notion chargée d'ambigüité et aux contours souvent flous, enchâssant une série de problèmes : les différences culturelles, l'inclusion des femmes minoritaires dans le mouvement et ses priorités d'action ou les entrecroisements du sexisme, du racisme et du colonialisme. Je propose de discuter aussi la notion de différence, et voir comment elle fraye dans les eaux troubles de l'altérisation qui mène à la domination. Au travers de ces réflexions, se profileront certaines dimensions relatives au défi d'« accommoder » féminisme et diversité ethnoculturelle.
Questions théoriques
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Le blanchiment de l'intersectionnalitéSirma Bilge (UdeM - Université de Montréal)
La présentation prend pour objet l'effacement de la race dans la littérature intersectionnelle contemporaine et en examine les modalités et rationalités. Prenant l'université comme un site clé pour la gestion de la race et des savoirs minoritaires contre-hégémoniques par le capital transnational, elle postule que la saisie du blanchiment académique de l'intersectionnalité porte un éclairage sur le néolibéralisme racial et ses modalités d'accroissement qui s¹appuient silencieusement sur les conditions structurelles du racisme tout en faisant disparaître les catégories même permettant leur identification. L¹analyse se focalise sur deux modes de blanchiment : la disciplinarité et les ré-calibrations généalogiques.
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« Est-ce qu'on peut être racisées, nous aussi? » : rapports de pouvoir et construction de la race, les féministes blanches et le désir de racialisationGeneviève Pagé (UQAM - Université du Québec à Montréal)
En s'inspirant d'un cadre théorique postcolonial et matérialiste, cette présentation avancera que deux dynamiques principales sont en jeu dans cette réappropriation de l'identité racisée par les femmes blanches : a) la nostalgie de la lutte souverainiste, toujours présente dans l'imaginaire collectif, génère un attachement émotif à la position de subalterne puisque liée de près à l'identité collective ; et b) la perte de pouvoir causée par la décentralisation de l'expérience blanche dans le milieu féministe, notamment à travers la promotion de l'analyse intersectionnelle, pousse certaines femmes confrontées à leurs privilèges à se braquer, à répliquer et à se réapproprier les identités subalternes.
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Considérations éthiques et épistémologiques de chercheures raciséesRyoa Chung (UdeM - Université de Montréal)
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De la recherche sur le féminisme musulman : savoirs « des gens » et savoirs « érudits »Leïla Benhadjoudja (Université d’Ottawa)
Faire de la recherche sur des questions relatives aux femmes musulmanes au Québec dans un contexte polémique et controversé pose le défi de la permanence entre distanciation et proximité avec les controverses. Dans le cadre de ma recherche doctorale, où je m'intéresse au féminisme musulman au Québec, le défi a été d'autant plus grand que l'existence même de mon objet d'étude a été contestée par des acteurs sociaux et politiques. Cette remise en cause a mobilisé des savoirs ordinaires et experts. En effet, produire un savoir en menant une recherche sur le féminisme et l'agency des femmes musulmanes suscite parfois de l'incompréhension, du doute et de la méfiance quant à la « vérité » de ce savoir. Dès lors, les questions relatives aux rapports de pouvoir à l'œuvre dans les différentes formes de savoir (profane et scientifique) deviennent fondamentales.? Cela dit, qu'en est-il lorsque des savoirs au sujet des femmes musulmanes sont mis en doute car ils interrogent, questionnent et transgressent à la fois les savoirs « des gens », donc profanes, et les savoirs « érudits », donc institutionnels et scientifiques. Dans le cadre de cette communication, j'interroge les modalités de reconnaissance des recherches au Québec sur les femmes et le féminisme en islam comme savoir « vrai », tant par les institutions que par « les gens », dans un climat national et international où les discours sont polarisés entre « pro » et « anti » islam (Roy, 2004).