Informations générales
Événement : 82e congrès de l'Acfas
Type : Colloque
Section : Section 400 - Sciences sociales
Description :Ces dernières années, les questions autour de la place de la religion dans nos sociétés contemporaines ainsi que celles portant sur les relations entre le religieux et la sphère publique prennent de plus en plus d’importance. Ce colloque propose d’examiner certaines de ces questions en favorisant une approche interdisciplinaire et comparative. L’événement regroupera des étudiants à la maîtrise, au doctorat et au postdoctorat provenant de différentes disciplines (p. ex. sciences des religions, science politique, sociologie, droit) travaillant sur les manifestations contemporaines du religieux à travers des études de terrain en Europe, en Amérique du Nord ou en Asie. Cette perspective comparée et interdisciplinaire se propose d’offrir non seulement un éclairage sur les grandes questions liées aux rapports entre la religion, la société civile et l’État, mais aussi d’identifier des enjeux plus spécifiques à chaque région. Elle permettra également de mettre en perspective les récents débats québécois.
Dates :- Amelie Barras (UdeM - Université de Montréal)
- Solange Lefebvre (UdeM - Université de Montréal)
Programme
La religion dans la sphère publique
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Mot de bienvenueSolange Lefebvre (UdeM - Université de Montréal)
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Mot de bienvenueAmelie Barras (UdeM - Université de Montréal)
Religion et sociétés : exemples canadiens et québécois
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La place de la religion hindoue chez des réfugiés bhoutanais népalophones réinstallés en région au QuébecBéatrice Halsouet (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Depuis 2008, environ 2 000 réfugiés bhoutanais népalophonessont arrivés au Québec. Les tribulations de cette ethnie sont méconnues: alors que le Bhoutan a vu le sud de son pays défriché depuis des générations par des agriculteurs d'origine népalaise (la plupart obtenant la citoyenneté en 1958), le pays change radicalement de politique vers 1990, avec le quatrième roi, la Loi de la citoyenneté et les recensements subséquents. Les Bhoutanais népalophones deviennent alors majoritairement « non national » et 100 000 d'entre eux doivent quitter le pays en direction du Népal. Après un confinement dans des camps financés par l'UNHCR, la seule solution vient, en 2007, de huit pays occidentaux qui ouvrent leurs portes à ces apatrides, dont le Canada. Dans ce contexte deréétablissement,quel rôle joue leur religion?Notre étude s'est appuyée sur une observation participante de trois ans et sur six entrevues des trois générations présentes à Saint-Jérôme. En bref, la religion, majoritairement hindoue, est "an anchor" au sens de Beyer (2008), mais l'absence de temple rend sa pratique collective plus difficile, malgré une initiative mésosociale (Barth, 2000) pour organiser le transport vers un temple montréalais. La pratique individuelle et familiale reste primordiale et se traduit dans des rites quotidiens ou des fêtes annuelles, et dans des rites de passage où les personnes font parfois appel à des membres de substitution afin de pallier l'éclatement familial à travers le monde.
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Traversant les ténèbres d'un désert : les négociations des jeunes évangéliques catholiques de la société canadienne séculaire et diversifiéePaul Gareau (Université d’Ottawa)
L'Église catholique, depuis les derniers 20 ans, lutte contre la laïcité de la société canadienne afin de diminuer la perte croissante de ses membres et pour démontrer son importance dans le domaine politique et public. La conférence annuelle de Journey to the Father représente l'une des tactiques mises en place par l'Église catholique à cette fin. Cette activité rassemble entre 300 et 500 jeunes catholiques chaque année dans un hameau rural ontarien pour renouveler et faire redécouvrir une identité catholique évangélique chez les jeunes à travers une expérience religieuse émotive et charismatique. Les coordinateurs de l'évènement souhaitent ainsi convertir des catholiques culturels et indifférents en néophytes politiques. Cette présentation va démontrer comment Journey to the Father édifie un espace public alternatif favorisant l'inculcation d'expériences religieuses et de valeurs évangéliques auprès des jeunes catholiques afin de nier les influences libérales et séculaires de la société canadienne. Nous allons également comprendre comment ces jeunes négocient ces mêmes valeurs en espérant mieux accommoder leur identité évangélique aux réalités d'un Canada diversifié.
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Des charrettes et des hommes : la question du transport pour le « Old Order » dans le sud ontarienRaphaël Mathieu Legault Laberge (UdeS - Université de Sherbrooke)
Dans les sociétés nord-américaines, l'espace routier représente définitivement un espace publique. En ce sens, les codes de la route viennent poser des balises aux comportements des usagers et des standards en ce qui concerne la sécurité publique. Par ailleurs, lorsqu'il est question du Old Order, on fait référence au Old Order Amish et au Old Order Mennonite. L'utilisation des chevaux est pour ces minorités religieuses, encore aujourd'hui, monnaie courante et s'avère même pour eux un marqueur identitaire. L'hypothèse sur laquelle je me concentrerai affirme que la construction de ce marqueur identitaire s'effectue par des relations de négociation et de compromis entre la minorité religieuse concernée et les instances étatiques responsables de la sécurité routière. Je tenterai de démontrer cette hypothèse en combinant une approche ethnographique menée auprès de la minorité religieuse et une étude du code de la route de l'Ontario. Je présenterai dans un premier temps les croyances et les comportements distincts du Old Order. Dans un second temps, je m'attarderai aux modifications apportées au code de la route ontarien en fonction de la présence de ces minorités religieuses. Troisièmement, en effectuant un retour sur l'hypothèse de départ, j'apporterai quelques éléments de réflexions en discutant les implications de cette situation particulière au plan de la sécurité publique et de la liberté de religion.
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L'affaire Multani par-delà les jugements de la Cour : les enjeux (sikhs) du religieux dans la sphère publique québécoiseMarc-André Morency (UdeM - Université de Montréal)
Cette présentation s'inscrit dans les tout débuts d'une recherche doctorale sur les sikhs québécois dans la cadre de notre laïcité (mouvante). Mon objectif est humble: soulever des pistes de réflexion allant dans le sens d'une problématisation. Cet effort repose d'abord sur l'affaire Multani dont le point de chute, en 2006, permettait à Gurbaj Singh de porter son kirpan à l'école suite au jugement de la Cour Suprême du Canada. L'enjeu parapluie des symboles religieux dans l'espace public, au Québec, n'était pas clos pour autant. À l'été 2013, la Fédération Québécoise de Soccer bannissait le turban des terrains de soccer sous l'argument de la sécurité, comme dans le cas Multani. La FIFA devait contrecarrer cette décision quelques mois plus tard. Pensons ces actions juridico-politiques comme des avatars de la laïcité, pensée dans les termes d'une frange politique québécoise et d'une certaine partie de la population. À la lumière de ces situations, je suggère de réfléchir sur les enjeux de la laïcité québécoise, sur la judiciarisation de « problèmes » à portée collective, et plus largement sur la notion de sécularisation. D'autre part, j'utiliserai deux entretiens que j'ai menés avec Gurbaj Singh Multani pour examiner et exposer son discours, étape parfois escamotée dans les débats publics concernant le religieux.
Religion, genre et sexualité
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Lorsque les droits fondamentaux entrent en collision : la liberté religieuse et l'égalité des personnes LGBT dans les écoles publiquesYves Goguen (Université McGill)
Depuis la reconnaissance de l'égalité formelle des gais et des lesbiennes, des situations surgissent où l'exercice du droit à la liberté de conscience et de religion se heurte à la protection nouvellement acquise contre toute discrimination fondée sur l'orientation sexuelle. Le débat sur l'adoption par le gouvernement de l'Ontario de mesures favorisant la diversité sexuelle dans le milieu scolaire permet de cerner certains des enjeux juridiques, politiques et sociaux inhérents à la coexistence des droits au sein d'une société diversifiée. Alors qu'au Québec les écoles publiques ont été déconfessionnalisées en 1998, le financement public des écoles catholiques ontariennes demeure enchâssé dans la Loi constitutionnelle de 1867. Pour la minorité linguistique dans cette province, le « choix » de fréquenter une école catholique pourrait se confondre à celui de fréquenter une école francophone. Les conseils scolaires catholiques auraient-ils le droit de proscrire du programme d'éducation sexuelle la légitimation de l'homosexualité ou d'empêcher la formation de groupes parascolaires « alliances étudiantes gai-hétéro »? La liberté religieuse des parents protège-t-elle le droit de retirer leur enfant des cours d'éducation sexuelle? Qu'en est-il des obligations de l'État en matière d'éducation et de son devoir de maintenir un environnement inclusif et sécuritaire? Ces questions seront examinées par l'entremise d'un survol des principes juridiques émanant du droit canadien.
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« Êtes-vous mariée? » : genre, statut matrimonial et foi dans la recherche de terrain ethnographiqueHélène Thibault (Université d’Ottawa)
La proposition s'intéresse à la positionnalité du chercheur dans la recherche ethnographique en la considérant comme un atout. La positionnalité réfère à la façon dont le jugement des interlocuteurs affecte les interactions, la qualité et le type de données recueillies à diverses étapes de la recherche (Warren et Rasmussen 1977, 349). Cette proposition vise à explorer comment la foi (agnostique), le genre (féminin) et l'état matrimonial (célibataire) ont influencé mes recherches sur les identités religieuses au Tadjikistan en 2010 et 2011. Être une femme dans une société patriarcale n'est pas nécessairement handicapant. Cela peut s'avérer être un avantage car cela permet un accès presque égal aux cercles féminins et masculins, devenant ce que les chercheurs ont souvent qualifié de « troisième sexe » n'étant pas affecté par les rapports de genre. Pourtant, les chercheures sont aussi jugées sur leur apparence et leur « disponibilité sexuelle ». Ceci peut faciliter les interactions avec les hommes mais aussi créer des malaises avec les femmes pouvant se sentir menacées. Enfin, mon intérêt pour l'islam a souvent été perçu comme une ouverture potentielle vers la conversion, ce qui créait un intérêt chez mes interlocuteurs. Les chercheurs ont avantage à être conscients de leur propre position et subjectivité. Ils se doivent d'être attentifs et sensibles afin de maintenir des relations authentiques avec leurs interlocuteurs et poursuivre efficacement la collecte des données.
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L'effet « Big Love » : analyse d'un changement dans la représentation des femmes mormones fondamentalistes à la télévision américaineMathilde Vanasse-Pelletier (UdeM - Université de Montréal)
Cette présentation a pour point de départ la question suivante : « De quelle manière l'évolution des représentations des trois sœurs-épouses dans la télésérie Big Love (HBO 2006-2011) a-t-elle contribué à la modification de l'image des femmes mormones fondamentalistes à la télévision américaine, en engendrant le passage d'une image uniforme de victime à une représentation plurielle de ces femmes comme agentes de leurs choix et impliquées activement et volontairement dans ce type d'union matrimoniale? ».?? Il sera question de la manière dont, à partir de la mise en ondes de la télésérie de fiction Big Love en 2006, les femmes mormones polygames ont cessé d'être représentées comme uniquement victimes, et la façon dont certaines d'entre elles ont choisi de défendre leur mode de vie dans les médias américains, malgré la menace de persécution légale. La variété des expériences représentées par le parcours des trois sœurs-épouses dans Big Love semble à la fois avoir préparé le grand public à recevoir les témoignages de mormones fondamentalistes convaincues, mais également donné un élan à une nouvelle vague de revendications pour la décriminalisation du mariage plural. Depuis la fin de la série en 2011, plusieurs reportages et émissions télévisées, notamment deux séries de télé-réalité, et font en quelque sorte suite à Big Love en présentant une image positive et surtoutnormale de la famille polygame typique.
Religion et éducation
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Éthique et culture religieuse au primaire : identité et citoyenneté?Christine Cusack (Université d’Ottawa)
Dans le cadre de ma recherche, je propose une étude qualitative du programme d'éthique et culture religieuse dans les écoles primaires du Québec, visant à explorer en quoi les politiques éducatives contribuent à la compréhension des étudiants de leurs rôles en tant que citoyens et citoyennes dans une société où règne la diversité religieuse.
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La « neutralité » des enseignants du programme Éthique et culture religieuse et le projet de loi 60 : pratique pédagogique et réflexions d'enseignants du secondaireStéphanie Gravel (UdeM - Université de Montréal)
Le projet de loi 60 propose d'interdire le port de signes religieux ostentatoires des enseignants du Québec (proposition 3) afin de promouvoir la neutralité religieuse du personnel de l'État (proposition 2). Comme son slogan l'indique clairement, « Parce que nos valeurs, on y croit. », ce projet de loi désire promouvoir les valeurs québécoises. Au-delà des considérations théoriques, il est important d'éclairer ce débat social à partir de l'expérience des enseignants concernés. Pour ce faire, nous nous demanderons comment les enseignants du programme Éthique et culture religieuse conjuguent-ils avec l'exigence de promouvoir les valeurs québécoises tout en maintenant leur neutralité pédagogique en classe. Afin d'éclairer cette question, nous présenterons les premiers résultats de notre recherche doctorale intitulée « L'impartialité et le programme Éthique et culture religieuse (Québec, 2008) ». Cette recherche étudie la mise en pratique de l'exigence d'impartialité de 12 enseignants d'Éthique et culture religieuse (ECR) au secondaire à partir d'observations non participantes en classe et d'entrevues semi-directives, et ce, dans différents milieux socioculturels d'écoles privées ou publiques de Montréal et de l'extérieur du grand Montréal. Seront présentés notre méthodologie de recherche ainsi que nos premières analyses portant sur le lien entre le projet de loi 60, les valeurs québécoises et l'exigence d'impartialité des enseignants d'ECR.
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L'évolution de la représentation de la religion au sein des manuels scolaires à Taïwan : quelle éducation à la diversité?Andréanne Laverdière (Université d’Ottawa)
L'éducation joue un rôle important dans la socialisation des jeunes. Elle peut expliquer en partie les façons de concevoir la diversité dans une société et témoigne des politiques de sa gestion par un État. À cet effet, Taïwan est un endroit très intéressant pour entreprendre l'étude de la relation entre la diversité religieuse et le développement d'une démocratie. Par l'analyse de manuels scolaires provenant de périodes politiques distinctes, l'objectif de ce projet est de faire l'analyse des discours sur les identités religieuses à Taïwan, tout au long de sa démocratisation. En outre, il s'agit d'en apprendre davantage sur l'articulation de l'éducation à la citoyenneté, concernant la diversité religieuse, dans le contexte des efforts consacrés à la définition d'une identité nationale à Taïwan. Tout en rappelant l'intérêt de cette recherche pour l'expérience démocratique taïwanaise, cette présentation a comme but d'exposer quelques résultats préliminaires, ainsi que certaines pistes potentielles d'analyse.
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Le religieux vu par le droit : le traitement juridique du port de signes religieux dans les établissements scolaires au Canada et en FranceBertrand LAVOIE (UdeM - Université de Montréal)
Au cours des dernières années, deux décisions juridiques différentes ont traité du port de signes religieux dans les établissements scolaires. La Cour suprême du Canada, dans l'arrêt Multani en 2006, a conclu que l'interdiction de porter le kirpan à l'école pour un élève sikh n'était pas justifiée en droit, reconnaissant une obligation d'accommodement raisonnable. En France, le législateur a adopté en 2004 une loi qui interdit explicitement le port des signes religieux ostentatoires dans écoles, collèges et lycées publics. Comment expliquer ces différences d'un point de vue juridique? Les recherches effectuées actuellement démontrent que ce qui peut être plus profondément en jeu, ce sont deux conceptions différentes du religieux. En droit constitutionnel canadien prédomine une compréhension du religieux que l'on peut nommer le religieux comme identité. La religion renvoie surtout à des croyances profondes fondamentales de l'identité personnelle. Il est fusionné à l'identité et « central » pour l'individu : il marque ses valeurs, sa morale et guide les choix qui façonnent sa vie. Pour le droit public français, est dominante depuis 2004 une conception du religieux que l'on identifie comme étant le religieux comme volonté d'appartenance. Selon cette compréhension, en exprimant la volonté de porter un signe religieux, l'individu rappelle surtout qu'il désire appartenir à sa communauté religieuse et à un ensemble d'obligations elles aussi religieuses.
Religion et ethnographie
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Influer sur le sort dans la religion vécue des Roumains orthodoxes : l'exemple de l'eau bénite et de l'huile sainteMonica GRIGORE (UdeM - Université de Montréal)
??En partant d'une enquête réalisée en Roumanie en 2012, cette communication examinera comment l'interaction entre les artéfacts religieux et les croyances influence la conduite de vie des Roumains orthodoxes au jour le jour. Trouvés à l'intérieur de l'église, les artéfacts religieux n'ont pas une vie isolée; ils existent dans un réseau qui lie l'église et la vie quotidienne des individus en même temps qu'ils servent de médiateurs entre les individus et le surnaturel. En partant de l'observation participante faite dans plusieurs pèlerinages en Roumanie et de plusieurs entretiens réalisés à Bucarest avec des femmes qui se déclarent ou non pratiquantes, j'examinerai les croyances et les pratiques développées autour de deux artéfacts religieux : l'eau bénite et l'huile sainte. Utilisées par l'Église orthodoxe à différentes occasions, l'eau bénite et l'huile sainte se retrouvent aussi dans la vie quotidienne des individus qui s'approprient leur sens et leur utilisation. Par exemple, l'huile sainte est utilisée parfois comme protection contre les malheurs ou comme parfum. À travers de l'exemple de l'huile sainte et de l'eau bénite, mon travail cherchera à comprendre quel sens spécifique prend la conduite de vie du croyant orthodoxe soumis à deux contraintes : le désir d'influencer le sort et la résignation devant le sort.?
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Une tribu d'exclus : les membres de l'Église de Satan négocient un espace liminaire dans la sociétéCimminnee Holt (Université Concordia)
Les membres de l'Église de Satan se considèrent comme des agents autonomes, qui critiquent la société générale parce qu'elle est facilement influencée par les modes populaires. Pour ceux-ci, l'idéal est d'être un individu qui atteint du succès dans la vie, mais en gardant une tension entre leur mandat d'individualisme et le monde extérieure; c'est à dire, les Satanistes rejettent la notion de communauté mais adoptent un engagement calculer avec le monde pour mieux atteindre leur buts. En utilisant les théories de Paul Helaas (auto-religion) (1991), Victor Turner (rituel structuré et anti-structuré) (1969), et Roy Wallis (religions qui acceptent, rejetent, ou qui sont accommodante au monde extérieure) (1984), je présente une étude d'un nouveau mouvement religieuse (NMR), l'Église de Satan, dont les membres se considèrent comme des exclus, une position choisi autant qu'imposer, pour négocier une espaces liminaire dans la société.
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Le religieux confucéen du Kongshengtang de ShenzhenAlex Payette (Université d’Ottawa)
Contrairement au développement d'une littérature portant sur le Confucianisme politique ou encore sur l'institutionnalisation du confucianisme en tant que religion en Chine contemporaine, cette présentation, tirant ses conclusions de recherches de terrain et procédant d'un angle plus micro, mettra l'accent sur le volet empirique du renouveau religieux du confucianisme en abordant les pratiques religieuses du Kongshengtang (???) de Shenzhen ainsi que sa participation à la gouvernance locale. Nous expliquerons comment le Kongshengtang, groupe à but non lucratif d'intérêt public, ainsi que son maître à penser Zhou Beichen (???) viennent former une expression religieuse du Confucianisme. En examinant les pratiques et les rituels de ce groupe, nous démontrerons de quelles façons le Kongshengtang vient participer activement à la gouvernance morale ainsi qu'à l'environnement religieux local, malgré le fait que le confucianisme ne soit pas reconnu comme étant une religion en Chine continentale. Cette présentation se veut principalement une discussion sur les résultats de plusieurs recherches de terrain concernant les groupes confucéens locaux ainsi que sur la question du retour du confucianisme religieux en Chine (p. ex discours nationaux traitant du Confucianisme politique en opposition aux pratiques empiriques).
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La religion « en train de se faire » : le cas d'une activité de pastorale d'un centre de détention du QuébecEtienne Guertin-Tardif (UdeM - Université de Montréal)
Suite aux récentes études sur la religion en milieu carcéral, un constat s'impose : la religion est davantage pratiquée en prison qu'à l'extérieur. Bien que plusieurs d'entre elles fassent l'examen des tâches que l'aumônerie de prison réalise au quotidien, rares sont celles qui rendent compte de la pratique religieuse telle qu'elle se concrétise lors des activités de pastorale organisées. Dans cette communication, je présente le cas d'une activité de pastorale d'un centre de détention pour femmes du Québec. À partir d'observations et en m'inspirant de l'approche dramaturgique développée par Erving Goffman, je présente brièvement ce que les acteurs disent et font en situation, à travers les séquences d'actions qu'ils construisent mutuellement. Je porte un regard sur les gestes, les paroles et les comportements échangés qui tiennent lieu avant, pendant et après la représentation. Plus précisément, mon objectif est de cerner les interactions et les situations qui caractérisent la « dramaturgie » de l'activité présentée afin d'en éclairer le contenu et de mieux comprendre l'activité religieuse « en train de se faire » en milieu carcéral.
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Le chapelet et la clé : la religion en miniatureSophie COULOMBE (UdeM - Université de Montréal), Barbara Thériault (UdeM - Université de Montréal)
Pendant une enquête de terrain dans une prison pour femmes de Montréal, un détail inattendu a interpelé la sociologue : la présence frappante du chapelet. Ce détail a été à l'origine d'une première réflexion. Dans une réflexion miroir, une deuxième sociologue se joint à la première. Elles se penchent sur le pendant séculier du chapelet, la clé. Si le chapelet avait d'abord attiré l'attention sur la clé, il est à penser qu'elle le précédait. Visible et discrète à la fois, la clé était là, portée autour du cou par les femmes incarcérées. Tout indique que le chapelet est porté parce que la clé l'y a invité, comme bijou, comme protection, comme gage identitaire complémentaires ou alternatifs. Parce qu'elle connaît intimement le chapelet, la clé met en lumière le rapport entretenu aux formes religieuses à la prison et au-delà de ses murs. Dans cette communication, deux questions retiennent notre attention : qu'est-ce que la clé en tant qu'artéfact ? Et jusqu'à quel point une fragile communauté carcérale se retrouve-t-elle condensée dans ce détail ? Les réponses à ces questions nous renseignent sur le contexte propre à la prison, l'étude de la religion aujourd'hui et l'importance des artéfacts.
Religion, politique et citoyenneté
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Doctrine sociale de l'Église et modernité politique : pour une « herméneutique de la réforme »?Stéphane Bürgi (UdeS - Université de Sherbrooke)
La modernité politique et ses principaux acquis (démocratie, droits de l'homme, libertés individuelles) sont souvent perçus à travers le prisme de la « sortie de la religion », c'est-à-dire comme le résultat d'une lutte contre le monopole qu'exerçait la pensée religieuse et théologique à une époque antérieure. De ce point de vue, la doctrine postconciliaire de l'Église est appréhendée sur le mode de la rupture, notamment en ce qui concerne la reconnaissance du droit à la liberté religieuse. Il est toutefois possible de proposer une lecture différente de cette évolution, une lecture que l'on peut qualifier d'« herméneutique de la réforme ». De ce point de vue, démocratie, droits de l'homme et libertés individuelles ne seraient pas apparus comme autant d'éléments intégrés dans le corpus doctrinal de l'Église de façon extrinsèque, opérant ainsi une rupture avec la tradition, mais comme le résultat d'un développement progressif, tirant peu à peu de nouvelles conséquences morales et politiques à partir de la tradition et de l'enseignement biblique. Cette lecture permet de mettre en évidence la cohérence du rapprochement qui s'est opéré entre les acquis de la modernité politique et l'enseignement moral de l'Église. À l'heure où la philosophie politique contemporaine se penche sur les défis des sociétés « post-séculières », la mise en évidence de cette cohérence doctrinale pourrait-elle conduire à de nouvelles avenues de réflexion sur les rapports entre religion et politique?
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Religion, État et citoyenneté : l'instrumentalisation du Shinto et le paradoxe de la laïcité japonaiseDavid Rangdrol (Université d’Ottawa)
La littérature sur le sécularisme comparé fait état d'un paradoxe présent dans certains régimes de laïcité où la loi impose une neutralité religieuse à l'État, mais où l'interprétation de ces lois permet néanmoins à l'État d'instrumentaliser la religion pour construire une notion exclusive de la citoyenneté au détriment des minorités (Calhoun, Juergensmeyer et VanAntwerpen. 2012). Ceci témoigne de la difficulté qu'ont les états à négocier les frontières entre la politique, la religion, la culture et l'identité nationale. Cette présentation propose de réfléchir à cette problématique à l'aide du cas du Japon. Nous verrons que si les clauses constitutionnelles garantissant la liberté de religion et la neutralité de l'État adoptées en 1947 sont demeurées intactes, le gouvernement japonais a graduellement réussi à incorporer des éléments de la religion Shinto aux notions de citoyenneté et d'identité nationale, tout en avançant que ces pratiques ne sont pas religieuses. L'étude focalisera sur l'impact de la conception institutionnelle et constitutionnelle du régime de laïcité japonais dans l'émergence de ce paradoxe, notamment sur les choix de formulations linguistiques et sur la présence de concepts ambigus, tels que la « religion ». L'accent sur la conception institutionnelle permettra de nuancer l'idée selon laquelle l'apparition de ce paradoxe est liée à la difficulté de transposer une dichotomie occidentale du séculier et du religieux dans un contexte asiatique.?
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Entre l'ethnos et le demos : analyse du concept de minorité au sein des commissions publiques sur la diversité culturelle et religieuseRuiz Giomny H. (UdeM - Université de Montréal)
Dans le cadre du vaste projet CRSH intitulé Diversité culturelle et religieuse dans quatre contextes nationaux : étude comparée de la dynamique identitaire et de la régulation de la religion (2012-2017), dirigé par Solange Lefebvre, il est question, entre autres, d'analyser comment la minorité est définie par les quatre rapports nationaux ayant abordé la difficile question de la diversité en Grande-Bretagne, France, Québec et Belgique. À l'aide d'un schéma théorique proposant des tensions entre le DEMOS et l'ETHNOS, deux catégories inhérentes au discours démocratique, cette présentation comparera et positionnera les modèles de minorité dans chacun de ces contextes spécifiques.
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Potentiel de support pour la démocratisation en Chine des églises protestantes domestiques chinoisesAlexandre Syvrais-Gallant (Université d’Ottawa)
La présentation vise à analyser certaines assomptions sur la compatibilitée de la religion chrétienne (protestante) et la démocracie. La croissance des protestants en Chine donne un espoir pour leur appui à la démocratisation dans ce pays. La question est: Comment évaluer ce potentiel? La présentation offre un cadre théorique basé sur les théories institutionnelles, spécifiquement la logique de l'approprié, comme méthode d'analyse. La thèse centrale est qu'on peut seulement évaluer et analyser ces groupes religieux et leurs actions lorsqu'on les examine comme des institutions avec leurs propres règles et identités, et non comme un groupe universelle. L'argument central de cette présentation est que même si la démocratisation de la Chine serait dans le meilleur intérêt des croyants protestants, le potentiel d'action est minime. Plusieurs de ces églises domestiques maintiennent que le comportement approprié est de ne pas aller contre l'état et de pratiquer leurs religions discrètement.
Religion, institutions et espace public
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L'islam dans la sphère publique taïwanaise : vers un état des lieuxYannis-Adam Allouache (Université d’Ottawa)
La première partie de ma thèse est d'effectuer une revue de la littérature afin de connaitre le comportement politique des communautés musulmanes à Taiwan. Il s'agit de faire un état des lieux : comment les Musulmans pratiquent-ils leurs religions à Taiwan? Quels sont les associations qui les représentent? Quels sont les clivages au sein de ces communautés? Quel est le degré de politisation de cette communauté? Dans le cadre de cette présentation, je propose de partager les résultats de ma revue de littérature sur l'Islam à Taiwan. La revue de littérature a pour but de démontrer (i) les multiples points d'entrée de l'Islam à Taiwan depuis le 17e siècle, notablement à la suite de la Guerre Civile Chinoise de 1949 et plus récemment suite à l'immigration récente de travailleurs originaires de l'Asie de du Sud-Est (ii) le pluralisme dans les orientations de la scène politique taiwanaise tel qu'articulé à travers son système de partis et au fait que leurs sociétés d'origines articulent également des réalités politiques différentes (iii) le rapport de marginalisation des communautés musulmanes dans la société taïwanaise qui est majoritairement bouddhistes, taoïstes et pratiquante d'autres religions chinoises traditionnelles. Ceci est dans le but de comprendre les mécanismes et la capacité d'adaptabilité de l'État taïwanais dans le contexte de sa société pluraliste car les débats entourant la laïcité sont d'actualité et impliquent souvent l'Islam comme un exemple primordial.?
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Diversité religieuse dans le milieu hospitalier : étude de cas en EspagneJulia Martinez-Arino (UdeM - Université de Montréal)
Depuis les dernières années, les pays de l'Europe occidentale ont vécu de fortes transformations sociales liées en grande partie à l'arrivée de personnes de différentes régions du monde. L'une de ces transformations est la diversification religieuse, visible dans la multiplication des lieux de culte des religions minoritaires, qui a mis la religion sur l'agenda politique des gouvernements. Cette nouvelle situation remet en question les modèles traditionnels de rapports église-état et pose des défis aux états démocratiques, qui ont l'obligation de garantir le droit à la liberté religieuse de tout citoyen et en même temps d'assurer la cohésion sociale et le vivre ensemble.
En prenant ces considérations comme point de départ et en m'appuyant sur un travail de terrain dans 4 hôpitaux publics espagnols, l'objectif de cette communication est d'analyser comment la diversité religieuse est gérée dans le milieu hospitalier en Espagne. De plus, j'examine aussi comment le patrimoine catholique est renégocié dans ces institutions. Cette communication montrera l'existence de tensions entre les tendances pluralisantes du régime légal et les logiques institutionnelles, lesquelles demeurent très liées au passé catholique de ces institutions. Elle soulignera aussi l'importance de prendre en considération les interactions quotidiennes et les actions des acteurs, principalement les aumôniers catholiques, pour mieux comprendre la gestion réelle de cette diversité.
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Le rôle des institutions religieuses dans la vie politique des BalkansAleksandar Prascevic (UdeS - Université de Sherbrooke)
À l'aube du XXIe siècle, les Balkans se définissent toujours comme un mélange de diverses nations, langues, religions et cultures. Il s'agit d'un carrefour entre l'Europe et le Moyen-Orient, et entre le christianisme et l'islam. Les spécialistes sont d'avis que les guerres de religion du sud-est de l'Europe trouvent leur origine dans les conflits entre les croyances et les cultures distinctes qui se sont rencontrées aux XIVe et XVe siècles. Les armées croisées ont traversé les Balkans pour libérer les lieux saints occupés par les musulmans (XIe-XIVe), tandis que l'occupation arabo-islamique, et islamo-ottomane du sud-est de l'Europe a débuté par l'invasion des pays balkaniques aux VIIIe et XIVe siècles. Les guerres politiques, civiles, religieuses et dynastiques ne sont pas que reliques du passé pour les Balkans, mais continuent encore d'être une réalité au XXIe siècle. L'influence des institutions religieuses est aujourd'hui présente dans la vie sociale, culturelle et politique des pays balkaniques. Il y a de nombreuses questions ouvertes autour de leurs actions durant les turbulences politiques dans cette région entre 1991 et 2013. Il s'agit d'institutions très puissantes qui influent sur la conscience des peuples balkaniques et sur leurs décisions politiques. Les représentants religieux sont souvent les instigateurs indirects d'actes politiques. La présente recherche propose de définir le rôle des institutions religieuses dans la vie politique actuelle.?
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Les conséquences de la loi française sur l'interdiction de la dissimulation du visage dans l'espace public sur les femmes musulmanesMarion Rebière (Université McGill)
La France a depuis longtemps une tradition laïque, qui lui a valu la séparation des Eglises et de l'Etat en 1905 puis un siècle plus tard, en 2004 d'introduire la loi visant à interdire le port de symboles religieux à l'école publique. C'est dans la même mouvance et suivant la volonté de sécularisation de la société que la loi interdisant la dissimulation du visage dans l'espace public, baptisée loi « antiburqa » par la société civile, a été introduite en 2010. Celle ci a produit des conséquences en particulier pour les femmes musulmanes portant le voile intégral, s'estimant les uniques destinataires de cette loi rédigée en termes neutres. Il s'agit donc d'analyser en termes juridiques à la fois les raisons de cette interdiction, les fondements juridiques, les diverses affaires qui ont été portées devant la justice française et devant la justice européenne, et finalement les conséquences pour les minorités musulmanes, essentiellement touchées par cette loi. Cette intervention pèse donc deux principes fondamentaux de la société française : la liberté de religion comprise comme la liberté de pratique sa religion dans la sphère publique, par rapport à la neutralité religieuse de l'Etat.