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Informations générales

Événement : 82e congrès de l'Acfas

Type : Colloque

Section : Section 300 - Lettres, arts et sciences humaines

Description :

L’avant-garde a-t-elle un sexe? Si nous pensons qu’il dépasse en théorie les catégories de genre, le concept d’avant-garde reste le plus souvent associé à un imaginaire masculin dans la culture visuelle et littéraire. Centrée sur la figuration, métaphorique ou non, d’une posture empruntant beaucoup aux origines militaires du concept, l’écriture de l’histoire des pratiques culturelles et de l’offensive intellectuelle de l’avant-garde reste entachée d’une « virilité originelle », tandis que l’on investit la posture féminine d’une dimension exploratoire sentimentale et intime, même lorsqu’elle se positionne volontairement dans l’espace public. Ceci n’est pas sans reproduire des clichés en vogue depuis le 19e siècle qui voudraient cantonner le féminin à l’affectif et le masculin au politique. En outre, dans le discours historique en littérature, en arts ou en cinéma, les productions féminines se situent dans un champ para-artistique : les femmes « ouvrent la voie », elles montrent un « domaine nouveau », mais semblent ne pas remettre en question, comme c’est le cas pour les hommes, les conventions esthétiques et les idéologies du champ culturel − exception faite des productions à saveur féministe qui, elles aussi, sont considérées « à part ».

Réunissant des chercheurs émergents et établis, ce colloque propose d’interroger l’avant-garde de manière théorique et méthodologique en ce qu’elle constitue un système de représentations des genres sexués. Au-delà d’études monographiques, ce sera l’occasion de poser un regard critique sur l’état du discours universitaire sur les pratiques culturelles des mouvements sociaux et politiques, tant historiques que contemporains. Comment se construit un mouvement avant-gardiste dans sa réception critique? Quelle place cette réception fait-elle à la différence sexuelle? L’histoire doit-elle réinterpréter les « mouvements féminins » isolés, non plus comme des productions féministes mais comme parties prenantes d’une avant-garde mixte?

Dates :
Responsables :

Programme

Communications orales

Quelques avant-gardes féminines

  • Mot de bienvenue
    Anne-Marie Bouchard (Musée national des beaux-arts du Québec), Adrien RANNAUD (Université Laval)
  • Réflexions sur le néoromantisme féminin au Québec : réalités historiques et problèmes théoriques d'une avant-garde poétique
    Adrien Rannaud (UdeS - Université de Sherbrooke)

    Pendant l'entre-deux-guerres, les femmes investissent massivement le champ littéraire canadien-français, notamment par la poésie. Légitimées par leurs pairs et par l'institution, Simone Routier, Alice Lemieux, Jovette-Alice Bernier, Éva Senécal entre autres occupent une position centrale dans la vie littéraire de l'époque et ouvrent « un domaine nouveau à la littérature québécoise » (Lemire, 1981) : le champ de l'amour. Pourtant, ces écrivaines ont quelque peu été oubliées par le récit historique. Et si cette génération littéraire de jeunes femmes bénéficie actuellement d'un regain d'intérêt de la part de la recherche en histoire littéraire et en études féministes, il n'en reste pas moins difficile de se délester d'une appellation qui confine leur production littéraire à une marge historique : le néoromantisme féminin. Ma communication souhaite questionner les malaises théoriques apparents que pose le néoromantisme féminin dans la production d'un discours historique. Quels sont les éléments qui justifient l'existence discursive d'un mouvement littéraire féminin en apparence uniquement tourné vers l'amour ? Comment peut-on réinterpréter les écrivaines et les œuvres de cette époque en regard des problématiques masculines qui leur sont contemporaines ?

  • Ces femmes qui osent montrer : la diffusion des avant-gardes artistiques
    Geneviève Lafleur (UQAM - Université du Québec à Montréal)

    Notre communication aura pour sujet les femmes actives dans le milieu de la diffusion des arts visuels durant la première moitié du vingtième siècle à titre de galeristes, gestionnaires de centres d'art, fondatrices de musée ou bénévoles. En nous intéressant à des figures actives sur les territoires géographiques de la France, des Etats-Unis et du Canada, nous soutenons que plusieurs femmes ont joué un rôle déterminant dans le développement des arts visuels en promouvant des pratiques contemporaines inconsidérées par les milieux officiels de l'art, ainsi qu'en fondant ou gérant des espaces de diffusion alternatifs.?? Nous supposons que leur statut de femmes a été utilisé à l'époque de manière positive pour expliquer et justifier le caractère novateur de leurs interventions dans le milieu artistique, qui ont été situées dans une prolongation des rôles traditionnels féminins. Mais nous croyons également que leur statut de femmes a contribué à la dévalorisation de leur rôle et apport à la discipline de l'histoire de l'art. En faisant un survol de la réception critique des activités de quelques-unes de ces figures, nous comprendrons que le caractère novateur et l'élément de risque des pratiques de diffusion de ces femmes a été justifié, naturalisé, puis minorisé par leur sexe.

  • Pause

Communications orales

Ces sexes qui se montrent : genres, cinéma et avant-gardes

  • Représenter une sexualité qui dérange
    Yves Laberge (Université d’Ottawa)

    Comment évoquer sans montrer une sexualité qui dérange, qui sort des sentiers battus et des conventions, tout en évitant l'obscénité, la vulgarité, la pornographie, et en conséquence la censure? Depuis la création du Code Hays en 1933, le cinéma a tenté de trouver un équilibre entre d'une part les conventions morales et d'autre part les sexualités qui dérangent. Progressivement, le cinéma a mis en scène l'adultère, le détournement de mineure, l'homosexualité, le viol, l'inceste. A partir d'une analyse empruntant à la sociologie du genre, cette intervention utilisera quelques marquants de quelques cinéastes avant-gardistes d'envergure universelle (Bunuel, Bergman, Pasolini, Fassbinder) mais aussi québécois (Anne-Claire Poirier, Denys Arcand) pour ensuite esquisser quelques notions théoriques sur ce que je nommerai "les sexualités interdites". Les objectifs de cette recherche sociologique sont de saisir les mutations d'une société. Trois concepts sociologiques seront à la base de notre analyse: les représentations sociales, la sociologie du genre et la sociologie du cinéma. Una attention particulière sera accordée à l'éthique de l'image. L'approche méthodologique sera qualitative et comparative. Le cadre théorique de cette recherche est transdisciplinaire.

  • L'avant‐garde post‐pornographique : performance, résonance et force orgasmique
    Alain Ayotte (UQAM - Université du Québec à Montréal)

    Dans cette communication, je m'intéresserai à la montée depuis les années 1990 d'une avant‐garde artistique et philosophique dite post‐pornographique où la performance et la performativité du corps genré et sexualisé du créateur et du chercheur se manifestent comme un enjeu majeur. Selon Judith Butler, la performance est liée au concept de l'identité qui est une position stratégique qu'un sujet adopte dans le champ social alors que la performativité est associée au concept d'identification qui est une opération à travers laquelle le sujet se constitue. Déjà, en 1930, le surréalisme de Georges Bataille suggérait la notion de l'informe performatif ayant pour fonction de rabaisser et de déclasser les archives somatiques et sémiotiques du sujet. Selon moi, l'avant‐garde post‐pornographique puise dans ces pôles transgressifs et se révèle un outil de subjectivation (esthétique, érotique et politique) très puissant. Entre performance et performativité, entre identité et identification, entre survivance et subversion, entre résonance charnelle et force orgasmique, cette avant‐garde s'insère dans un nouveau régime de la sexualité où les frontières disciplinaires éclatent à travers l'agentivité (potentia agendi) de pratiques artistiques, de productions théoriques, incarnées et transformatrices. Mon objectif est d'affirmer que cette avant‐garde est plurielle, qu'elle s'inscrit, corps et conscience, dans une tradition fluide du genre et d'en démontrer la force créatrice.

  • Dîner

Communications orales

Décentrements et déformations littéraires

  • L'orgasme, souffrance ou rébellion? : les singularités littéraires de l'avant-garde tibétaine d'expression chinoise dans la description du sexe
    Yue Yue (UBO - Université de Bretagne Occidentale)

    Est –il possible de choisir un roman tibétain, certes récompensé par un prix littéraire très prestigieux, mais traitant de sexualité, comme lecture proposée à l'intention des lyciens chinois? A la fin du siècle dernier en Chine, cette question est la cause principale d'un débat national dans le domaine éducatif. L'ouvrage en question est le roman intitulé (Chen‘ai luoding/Fixation des poussières). Une des particularités de ce roman est de traiter la sexualité d'une manière directe, aussi abondante que poétique. Cet ouvrage aborde la question du sexe, en explorant la vie intime et sentimentale ; cette démarche est une singularité de la littérature tibétaine d'expression chinoise à la fin du siècle dernier. Comparée aux autres littératures d'expression chinoise, la littérature tibétaine sinophone joue un rôle d'avant-garde dans la description du sexe. Elle se positionne à l'avant-garde, grâce aux nombreux des auteurs et des nombreuses œuvres évoquant la sexualité dans un lieu colonisé, avec un lexique et des symboles spécifiques. Sous la plume des auteurs avant-gardistes tibétains d'expression sinophone, le sexe devient un axe central du conflit politique et social. Etudiés sous différents angles, la sexualité ne se résume pas à une question d'orgasme, elle est un acte de revendication. Notre travail analysera les singularités de l'avant-garde tibétaine littéraire d'expression chinoise sur le sexe.

  • La chose que l'on appelle soi : une analyse de Blood and Guts in High School et Great Expectations de Kathy Acker
    Sophie Horth (Université Laval)

    Les deux romans de Kathy Acker traitent de la perception des corps féminins et masculins et de leur rôle dans la construction de l'Être. La lecture des œuvres les présente comme des miroirs déformants placés face à face, se répondant et créant une nouvelle vérité, vérité qui dépasse les attentes du lecteur. Le lecteur découvre que la perception du soi, de son corps, est une construction qu'il parvient à faire lui-même grâce à l'utilisation de l'art, de la culture. Cependant, ce qui est au centre de la réflexion, c'est l'interprétation personnelle des éléments culturels, tels que la langue, le corps et l'art, qui permet une appropriation qui est nécessaire si l'on souhaite se créer un «moi» subjectif pour se posséder réellement et complètement. Ce moi devenu subjectif ne permet plus exclusivement d'être un observateur du monde mais de le construire en commençant par l'image de soi-même. La vérité de l'esprit passe donc par plusieurs éléments confondus, à travers lesquels la notion de sexe, de genre, devient accessoire. Dans les romans d'Acker, et particulièrement Great Expectations, qui représente une continuation des points abordés dans Blood and Guts in High School, la différence sexuelle devient désuète grâce au personnage androgyne de Peter. Cette nouvelle façon de percevoir le corps et l'être fait des deux romans des œuvres revendicatrices de changement; elles dérangent parce qu'elles sont en marge de la pensée traditionnelle et parce qu'elles proposent une autre réalité.

  • Pause

Communications orales

Masculinités et médias

  • Le genre troublé des revues culturelles québécoises
    Anne-Marie Bouchard (Musée national des beaux-arts du Québec)

    À partir d'un corpus de recensions critiques faites sur des articles publiés dans les revues culturelles québécoises des cinq dernières années, la communication visera à mettre en évidence un certain nombre de biais discursifs récurrents dans les pratiques d'écriture sur l'art actuel.

  • À la recherche de son membre élu : de la « sur-masculinité » de Blaise Cendrars
    Andrew Dubrow

    Je propose d'explorer la distance que le poète Blaise Cendrars prend par rapport à l'avant-garde du début des années 1920, et comment cette prise de distance correspond à un processus de “sur-masculinisation” troublante dans son œuvre. À partir des analyses de textes et des correspondances de Cendrars, j'examinerai le lien entre l'avant-garde et la virilité. Dans un premier temps, je parlerai de l'élection par l'avant-garde (au début du XXe sièlce, au moins) comme transsubstantiation d'une virilité poétique. Dans un deuxième temps, j'évoquerai la perte de cette force virile chez Cendrars comme un processus de désubjectivation. Enfin, il sera intéressant de voir comment l'écriture, pour Cendrars, devient un processus de ré-subjectivation, de réconstruction d'une masculinité; écriture dont les traces subsistent dans les "mémoires" de cet auteur, par la construction du moi viril et le récit d'anecdotes évoquant l'hermaphrodisme et l'homosexualité.

Communications orales

Table ronde

  • Comment réécrire l'histoire des avant-gardes?
    Anne-Marie Bouchard (Musée national des beaux-arts du Québec), Adrien RANNAUD (Université Laval)

    Cette table ronde permettra de faire le point sur l'état actuel de l'intégration des corpus féminins dans les études historiques et culturelles. Il s'agira de discuter des pratiques institutionnelles distinctes dans plusieurs universités, afin de permettre à chacun de bénéficier des expériences pratiques de leurs collègues. L'objectif de cette table ronde est donc double: méthodologique, dans la mesure où chacun pourra se positionner sur la nécessité ou non de cette intégration; et institutionnel, par la mise en commun de l'état réel d'avancement de cette intégration