Informations générales
Événement : 81e Congrès de l'Acfas
Type : Colloque
Section : Section 500 - Éducation
Description :Le morcellement des champs d’investigation en psychologie du développement et en didactique résulte en une absence de débats et d’investigations ouvertes, tout en acceptant, sans les remettre en question, certains paradigmes (Horowitz, 1987; Resnick, 1996). Pourtant, les recherches se poursuivent et les apports se multiplient (Eich, Kihlstrom, Bower, Forgas et Niedenthal, 2000; Karpov, 2005; Kozulin, Gindis, Ageyev et Miller, 2009; Meltzoff et Prinz, 2002; Valsiner, 2005; Van Oers, Wardekker, Elbers et van der Veer, 2008). À la lumière de ces avancées spécialisées, ce colloque se veut l’occasion de relancer le débat sur les rapports entre l’apprentissage et le développement humain dans ses différentes dimensions, tant cognitives qu’émotionnelles. Nous cherchons ainsi à dégager des fondamentaux dans les processus d’apprentissage/développement à différents âges, de l’enfance à l’âge adulte, et dans différents contextes, de la famille à la formation professionnelle en passant par la scolarité obligatoire.
Ce colloque vise à permettre d’amorcer une remise en question des liens entre l’apprentissage et le développement selon trois grands axes de recherche : 1) Comment peut-on aborder et conceptualiser les processus de développement humain et leur lien avec l’apprentissage à la lumière des nouvelles avancées expérimentales et théoriques? 2) Quels sont les points communs entre les divers modes d’intervention sur les processus d’apprentissage et de développement à diverses étapes du développement et dans différents contextes (scolaires, professionnels, formels, informels)? 3) Comment peut-on prendre en compte la conceptualisation des rapports entre apprentissage et développement, dans le champ de la didactique?
Dates :- Alexandre Buysse (Centre d’intervention sur le développement Culture et Art Pour Toi)
- Marie-Françoise Legendre (Université Laval)
Programme
Apprentissage et développement : une perspective globale (1re partie)
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Mot de bienvenue
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Quels développements pour quelles transmissions de savoirs? Une approche génétique des médiationsAlexandre Buysse (Université Laval)
L'appropriation d'un savoir permet de nouvelles acquisitions de connaissances qui n'auraient pas été envisageables sans cette intériorisation préalable. Nous nous demandons dans quelle mesure de nouveaux savoirs entraînent l'élaboration de processus différents. En effet, ceux-ci ne diffèrent pas nécessairement entre un jeune adulte et une personne âgée. Or, si les savoirs étaient le seul vecteur du développement, les processus devraient être plus élaborés chez le sujet disposant de beaucoup de connaissances. Les savoirs ne sont donc pas seuls à l'œuvre à moins de réduire tout développement à un processus incrémental ou maturationnel. Dès lors que des médiations sont nécessaires à l'intériorisation du savoir, quel potentiel ont-elles d'influer le processus plutôt que le savoir ? Pour cela, nous distinguons dans les outils psychologiques, la part « informative » de la part « processuelle ». La part « informative », un véritable « quoi » qui permet l'élaboration du « nouveau » par le sujet, consiste notamment dans les concepts nécessaires à l'intériorisation, et la part « processuelle », un véritable « comment » qui propose des processus éventuellement nouveaux, consiste en différentes modalités des médiations proposées lors de la transmission. Nous interrogeons ainsi les propriétés mêmes du développement dans une perspective génétique et posons la question de quel genre de développement permettent la transmission du savoir et des médiations.
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Pause
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Le développement est-il dans la carte ou dans le territoire?Sabine Vanhulle (UNIGE - Université de Genève)
Nos travaux s'intéressent aux textes oraux et écrits dans lesquels des enseignants en formation sont incités à formaliser leurs savoirs professionnels. Ancrée dans la remémoration de l'expérience vécue en stages, cette formalisation est censée se détacher des seuls concepts quotidiens en visant un certain niveau de généralisation et d'abstraction. On postule que le langage médiatise cette construction de haut niveau. Cependant, le discours sur l'expérience n' « est » pas l'expérience : un principe de redoublement (Vygotski, 2003) est à l'œuvre. Ce redoublement relève d'un travail de sémiotisation, avec mise en abyme : la personne biographique « délègue » à un je linguistique la mise en intrigue de ses expériences, reconfigurant ainsi les apprentissages qui en émergent. Mais « la carte n'est pas le territoire » : Korzybski (2007) ne pouvait mieux dire. Dans nos propres analyses de ces textes, des indicateurs linguistiques nous permettent de saisir des processus réflexifs, cognitifs, affectifs, et langagiers, qui seraient à l'œuvre dans l'élaboration de savoirs, mais aussi d'un sens attribué par les étudiants à leur activité professionnelle. La question est alors : de quel développement, potentiel ou en cours, leurs discours sont-ils les témoins, ou les signes ? Les textes produits en formation permettent-ils d'avancer dans l'hypothèse que dans le langage, la conscience humaine se forge, permettant de tisser du lien entre l'activité discursive et les autres activités sociales ?
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Dîner
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Les liens entre apprentissage et développement : une simple relation dialectique?Gerardo RESTREPO (UdeS - Université de Sherbrooke), Michèle Venet (UdeS - Université de Sherbrooke)
Lorsqu'il affirme que tout bon enseignement doit précéder le développement et le susciter, Vygotsky pose d'emblée la relation dialectique qui les unit l'un à l'autre. Ainsi voit-il la zone proximale de développement comme l'endroit précis où celle-ci se manifeste : partant du niveau actuel de l'élève, l'enseignante lui fournit l'aide et la stimulation dont il a besoin pour atteindre son niveau potentiel, qui deviendra, par un processus d'intériorisation, son nouveau niveau actuel. Et ainsi de suite. Le développement est donc favorisé par la médiation effectuée sur le plan interpsychique dans le but de permettre une appropriation des apprentissages sur le plan intrapsychique, condition sine qua non du développement. Par ailleurs, Vygotsky nous propose également une vision dialectique des liens qui existent entre affect et cognition : l'un ne peut être étudié sans l'autre, nous dit-il, car ils sont en constante interaction dans l'être humain. Et, si ce qui réside en dernier lieu derrière la pensée est un désir, un vouloir, un sentiment (Vygotsky, 1997), il reste que la pensée contribue à la régulation des émotions (Vygotsky, 1997). Nous pensons quant à nous qu'il est impossible d'étudier la relation entre développement et apprentissage sans tenir compte de la relation entre affect et cognition et que les émotions constituent, sinon le seul, du moins un des facteurs clés du processus d'appropriation sur le plan intrapsychique. C'est ce que nous tenterons de montrer.
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Pause
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Quelques enjeux du développement précoce redéfini dans une perspective historico-culturelle : ses apports pour une réflexion plus globaleChristiane Moro (UNIL - Université de Lausanne)
Notre contribution ne portera pas sur le développement à l'âge scolaire mais sur celui, socle des développements ultérieurs, du bébé et du jeune enfant. Nos travaux qualifiés de Pragmatique de l'objet portent à l'origine sur la transmission-appropriation des usages culturels des objets et s'inscrivent dans les thèses sémiotiques du Vygotski de Pensée et langage. Si nous considérons avec Vygotski que le développement résulte d'élaborations sémiotiques, nous posons que l'investigation doit s'étendre à l'ensemble des systèmes sémiotiques de la culture, notamment ceux relevant de la matérialité.
Avec l'appui de vidéos, nous présenterons tout d'abord nos travaux princeps ainsi que nos travaux plus récents qui nous permettent de revisiter certains thèmes phares de la psychologie du développement aujourd'hui comme la communication intentionnelle, l'attention conjointe, les fonctions exécutives mais aussi d'avancer de nouveaux objets de recherche comme la gestualité dirigée vers soi.
Nous aborderons ensuite quelques questions relatives à l'argument du colloque, entre autres : quelle conceptualisation du développement à partir de ses prémices (eu égard à Vygotski, à Piaget et aux positions meanstream actuelles) ? quel rôle pour la matérialité extra-linguistique (redéfinie comme sémiotique) dans le développement psychologique ? quels apports des travaux sur le développement précoce pour l'étude du développement sur la scène scolaire ?
Table ronde : Apprentissage et développement : une perspective globale
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Synthèse
Apprentissage et développement : une perspective globale (2e partie)
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La compétence revisitée à l'aune du développementMarie-Françoise Legendre (Université Laval)
Depuis une quinzaine d'années, la notion de compétence, notamment celle de compétences transversales, a envahi le champ des sciences de l'éducation. Le recours à cette notion est souvent légitimé par un souci de conférer aux apprentissages, scolaires ou professionnels, une portée développementale plus large en les inscrivant dans des processus à long terme qui débordent à la fois l'espace de la formation et sa durée. Au fondement même de l'idée de compétence se retrouve donc la question des rapports entre apprentissage et développement, notamment celle des appuis développementaux à l'apprentissage et celle de la portée développemental des apprentissages. Ainsi, les compétences dites transversales semblent être à la fois de l'ordre de ce qui rend possibles les apprentissages et de ce qu'ils peuvent produire. À côté de cela, la compétence s'inscrit dans un contexte socioculturel qui lui confère un caractère normatif puisqu'elle renvoie à des attentes sociales devant orienter le développement, et ce faisant la formation, dans une certaine direction. Dans quelle mesure la compétence peut-elle être considérée comme ayant un caractère véritablement développemental et quelles en sont les incidences sur la formation, particulièrement en contexte scolaire ? Nous examinerons les éclairages que les perspectives développementales peuvent apporter à la manière de conceptualiser la compétence en tant que visée de formation, particulièrement en contexte scolaire.
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Pause
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Le développement de l'écriture des élèves dans le cadre du développement des compétences professionnelles des enseignantsJoaquim Dolz (UNIGE - Université de Genève)
Comment s'organise le développement des compétences professionnelles à propos de l'enseignement de la production écrite? Quels savoirs sont mobilisés et comment ces savoirs s'organisent-ils dans les séquences de formation des enseignants du primaire et du secondaire ? Comment le développement de l'écriture des élèves et le développement des compétences des enseignants sont-ils en résonnance ? Pour répondre à ces questions, nous avons conduit une recherche recueillant toutes les données dans l'ensemble des institutions de formation des enseignants de la suisse romande (7 institutions). Durant une année académique, nous avons filmé, transcrit et synthétisé toutes les séquences de formation portant sur l'enseignement de la production écrite. Nous avons ainsi identifié les activités de formation réalisées, les outils mis en place, les savoirs mobilisés et les principales catégories de savoirs transmis dans la formation et leur déploiement du début à la fin de la formation (auprès des futurs enseignants et auprès des élèves dans certains stages). Nous mettons en évidence le travail proposé à partir de l'analyse de textes d'élèves et la préparation et la mise en pratique de dispositifs dans les classes (savoirs praxéologiques). Nous analysons ainsi comment le développement de l'écriture des élèves est travaillé dans la formation des enseignants. Nous mettrons en miroir la conception du développement professionnel des enseignants avec le développement des capacités langagières des élèves.
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Dîner
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Acquérir des connaissances ou développer des compétences? Une réflexion inspirée de l'étude des interactions mère-enfant à la période préscolaireSophie Parent (UdeM - Université de Montréal)
L'intérêt pour la préparation scolaire [school readiness] des enfants a gagné en importance au cours des 20 dernières années, tant chez les chercheurs que chez les parents. Les parents perçoivent que les attentes du milieu scolaire ont augmenté et qu'un «bon parent» doit désormais s'affairer activement à préparer son enfant pour l'école (LeFevre, 2000). De nombreux organismes leur prodiguent des conseils quant aux stratégies à utiliser pour y arriver (voir par exemple Zero to Three National Center for Infants, Toddlers, and Families). Les résultats des recherches sur le sujet s'avèrent toutefois assez peu clairs. En particulier, quelles sont les stratégies parentales qui favorisent le mieux la préparation scolaire? En ce qui concerne la dimension cognitive de la préparation scolaire, le parent doit-il enseigner à son enfant des connaissances liées au domaine scolaire, de façon à favoriser l'acquisition de connaissances sur les lettres, les nombres, les formes géométriques, etc.? Le parent doit-il plutôt mettre en place des conditions qui favoriseront le développement des compétences de l'enfant, par exemple en l'exposant à une diversité d'opportunités de participation active à la résolution de tâches de type scolaire? Les travaux menés par notre équipe sur les interactions mère-enfant à la période préscolaire en lien avec le développement de la numération et de l'alphabétisation suggèrent quelques pistes de réponse et de réflexion sur ces questions.
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Pause
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Apprendre et devenir sous l'angle de Vygotsky : les trajectoires d'apprentissage et d'identité des jeunes dans des espaces éducatifs divers à travers le tempsAudrey LACHAÎNE (UdeM - Université de Montréal), Jrène Rahm (UdeM - Université de Montréal)
Le rapport entre le développement et l'apprentissage est central pour Vygotsky, de même que l'histoire de l'individu et son avenir. Pour Vygotsky, ces lignes de développement se croisent et se réunissent dans une relation dialectique et constituent conjointement les trajectoires d'apprentissage et d'identité. La présentation suivante propose un survol des concepts clés théoriques ancrés dans l'approche historico-socioculturelle de Vygotsky et des théories récentes inspirées de cette approche. Il s'agit d'explorer l'apprentissage et le développement identitaire des jeunes sous un regard horizontal (à l'intérieur d'un espace éducatif), mais aussi vertical (au travers des espaces éducatifs) et à travers le temps. Le recours à une telle vision globale soulève plusieurs questions tant au plan méthodologique qu'au plan théorique, qui seront abordées à travers la lecture d'études de cas qualitatives faites auprès de jeunes que nous avons suivis pendant quatre ans dans un programme parascolaire de science. Ce suivi témoigne de l'importance et de la portée des activités parascolaires dans la compréhension de la continuité développementale, et également pour comprendre le lien étroit entre l'apprentissage et le développement des jeunes dans une perspective de trajectoire.
Table ronde : Apprentissage et développement : quel avenir?
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Synthèse