Le prix Acfas IRSST – Maîtrise 2016 a été remis par l'Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail (IRSST) à Vanessa Dion-Dupont, inscrite à la maîtrise de recherche en microbiologie, spécialisation Bioaérosols et santé des travailleurs, à l’Université Laval.
Les centres de traitement des eaux usées (CTEU) comportent un ensemble d’étapes dont certaines sont reconnues pour générer d’importantes concentrations de bioaérosols. Ces particules, chargées en virus et bactéries, affectent la qualité de l’air des travailleurs qui s’y trouvent, d’autant que cet air demeure captif de ces milieux gardés fermés afin de ne pas incommoder le voisinage. Comme d’importantes lacunes perdurent quant aux connaissances relatives à la composition de ces bioaérosols et au niveau réel d’exposition des travailleurs, un risque certain d’atteinte à la santé subsiste. Afin de mettre fin à cette situation, Vanessa Dion-Dupont s’affaire au milieu d’une équipe dont l’objectif principal est de produire une caractérisation bactériologique de ce milieu aérien, pour ensuite établir des seuils d’exposition qui protégeront davantage les travailleurs qui y œuvrent.
De nombreuses publications scientifiques s’accordent sur le fait que l’inhalation ou l’ingestion de telles particules sont bel et bien impliquées dans de nombreux désordres respiratoires et gastroentériques. Une exposition prolongée à ces bioagresseurs – plus grave encore s’ils sont en forte concentration – risque de mener à une sensibilisation puis au développement de maladies professionnelles. À ce sujet, les données sont claires.
Divisé en trois sections, le projet consiste d’abord à caractériser les substances en cause à l’intérieur d’une dizaine de CTEU visités deux fois l’an. Divers paramètres sont alors mesurés à l’aide d’échantillonneurs stationnaires : bactéries totales et pathogènes, biodiversité, endotoxines et granulométrie ; on va même jusqu’à s’assurer, chez les bactéries en question, si elles sont porteuses ou non de gènes de résistance aux antibiotiques. Dans le contexte actuel, où de plus en plus d’antibiotiques sont devenus inopérants, un tel souci n’est pas dénué de signification, car en bout de piste, c’est un travailleur bien réel qui risque d’être gravement contaminé.
Et c’est justement là le second volet du projet : arriver à bien décrire le niveau d’exposition des travailleurs aux substances aéroportées. Pour ce faire, on a décidé de fixer des échantillonneurs au corps d’un certain nombre d’employés. Ces échantillonneurs personnels sont logés à proximité de la zone de respiration, pendant une semaine à chaque occasion – une fois durant l’été, l’autre durant l’hiver. Cela permet ainsi de déterminer la charge microbiologique qu’un travailleur est susceptible d’inhaler au cours d’une journée.
Le dernier volet de l’expérience prend la forme d’un questionnaire mensuel, disponible en ligne, rendant possible l’élaboration d’un répertoire des symptômes respiratoires et gastroentériques vécus par les participants. Fait inusité en science : on demande à chaque travailleur qui se prête à l’exercice, de recruter lui-même dans son entourage, comme point de comparaison, une personne-témoin de sexe, d’âge et de conditions socioéconomiques similaires à la sienne. Mais issue, il va sans dire, d’un milieu professionnel différent.
Ce type de caractérisation de l’air est loin d’être l’apanage exclusif des CTEU. Des études de détection de bioaérosols potentiellement nocifs sont aussi menées dans les fermes laitières et les poulaillers, de même que dans les milieux hospitaliers, endroits plus que propices à la convection des bioaérosols viraux, à l’origine des infections nosocomiales…
Cette recherche doit de déployer suivant un échéancier de quatre ans. Pour Vanessa, qui a lancé cette maîtrise en mai 2014, sa contribution est essentiellement de mettre en place la structure logistique du projet et de s’affairer à l’étape première. « Mais mon passage au doctorat est [d’ores et déjà] envisagé, mentionne-t-elle, afin de réaliser le projet dans sa totalité. »