Gabrielle Legendre
À Montréal plus du tiers de la population est née à l’étranger. Dans ce contexte de forte immigration caractérisant notre époque, l’intégration de ces nouveaux travailleurs devient un défi. Il est souvent compliqué pour eux de s’insérer et une fois embauchés, ils occupent généralement, et de façon précaire, des professions à plus haut risque. De plus, leur situation instable ne les incite pas à déclarer les incidents ou les accidents. Cette question délicate et complexe, la lauréate s’en est fait une vocation. En véritable actrice de changements sociaux, elle dédie sa carrière professionnelle et universitaire à sensibiliser les acteurs concernés par la santé et la sécurité au travail des immigrants.
Des petites entreprises aux travailleurs immigrantsC’est d’abord en tant qu’adjointe de recherche qu’en 2008, Gabrielle Legendre est introduite à la question. Elle collabore alors à un projet relatif aux « stratégies favorables au développement et au maintien de mesures de santé au travail (SAT) dans les petites entreprises (PE) du centre urbain montréalais embauchant une main-d’œuvre immigrante » (Gravel, Rhéaume, Séguin, Xenecosta).
Au cours de cette étude, trois sources de données sont exploitées :
- Des entrevues semi-dirigées menées auprès des répondants de santé et sécurité au travail (SST) des petites entreprises;
- Des entrevues semi-dirigées avec les professionnels en SAT des centres de santé et de services sociaux œuvrant dans ces entreprises;
- Un questionnaire auto-administré à des travailleurs.
Les résultats obtenus soulignent plusieurs obstacles à la participation des travailleurs immigrants aux mesures préventives, par exemple, la langue, les différences culturelles au niveau de ce qui est acceptable comme niveau de risque, la crainte de perdre son emploi s’ils adoptent une attitude revendicatrice, etc.
Ces constats suscitent l’intérêt des établissements de SST, des institutions publiques de protection des travailleurs, mais aussi des organismes voués à la défense et à l’insertion des travailleurs immigrants. Les recommandations qui s’en suivent mèneront à la constitution de la Table de concertation pour l’amélioration de la SST des travailleurs issus de l’immigration, en 2013, réunissant des partenaires de la SST, de l’immigration, de santé publique, de l’emploi, et du milieu patronal et syndical. Il en émergera des actions concrètes en transfert des connaissances qui pourraient mener à des changements de pratiques et à l’évolution des politiques publiques.
Aujourd’hui adjointe à la coordination des actions de cette Table, Gabrielle Legendre a su voir en ce projet de recherche une source d’inspiration pour son mémoire de maîtrise en administration des affaires, mais aussi pour sa thèse de doctorat interdisciplinaire en santé et société commencée à l’UQAM, en 2013.
Évaluer les activités de transfert de connaissancesSon projet de thèse consiste en l’évaluation des activités de transfert de connaissances proposées par chacun des quatre sous-groupes d’acteurs de cette Table. Ces activités concernent :
- la formation destinée aux représentants d’organismes communautaires et aux nouveaux immigrants;
- la formation destinée aux professionnels de SST;
- les outils d’information et de sensibilisation destinés aux petites entreprises;
- le plan d’action pour mobiliser les instances publiques concernant les inégalités sociales de SST.
Par ailleurs, dans le cadre de ses fonctions à la Table, elle participe activement aux actions menées par la Direction de la santé publique de Montréal afin de sensibiliser les instances publiques aux inégalités sociales de santé au travail.
En parallèle, la doctorante est aussi depuis 2011 coordinatrice adjointe à la direction du Réseau de recherche en santé et sécurité du travail du Québec (RRSSTQ). Ce réseau, constitué de chercheurs venant de champs disciplinaires multiples, lui a permis d’acquérir une expérience professionnelle hors du commun. Dès lors, Gabrielle Legendre se fait remarquer non seulement pour son habileté à interagir avec les diverses communautés de chercheurs, son sens critique, sa persévérance lors de la rédaction de demande de subvention, son sens organisationnel en tant que coordonnatrice de plusieurs événements au sein du réseau, mais aussi pour ses qualités rédactionnelles comme coéditrice d’un numéro spécial de la revue Relations Industrielles lancée en 2014.
Enfin, sa contribution au transfert des connaissances se démontre aussi en sa qualité de chargé de cours, depuis 2011, à l’UQAM, et à l’Université de Sherbrooke en gestion des ressources humaines, en gestion de la diversité et en gestion de la santé et sécurité au travail.