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Jean-Pierre Julien - Prix Acfas - 2013
Sciences biologiques et sciences de la santé

Jean-Pierre Julien

Université Laval

[À lire aussi, l'entrevue réalisée par Le Devoir]

Il peut paraître étrange, à première vue, de le dire ainsi; mais s’il y a un élément qui définit à merveille le parcours réalisé jusqu’à maintenant par notre lauréat, c’est bien son bilan exceptionnel en matière de création… de souris transgéniques. Dans le domaine qui est le sien, celui des maladies neurodégénératives, il a effectivement réalisé des avancées marquantes en produisant, par voie de transgénèse, de nombreux animaux modèles.

Il faut savoir que les chercheurs qui ajoutent ce type de pierre à l’édifice marquent à chaque fois un point crucial dans la genèse d’une recherche médicale, car à partir du moment où l’on dispose d’un animal modèle pour étudier une maladie, c’est toute l’étape de la recherche préclinique qui peut enfin s’amorcer et, avec elle, l’espoir de tester bientôt sur l’humain les premières pistes de traitement.

Le professeur Julien fut, en 1993, le premier chercheur au monde à suggérer – avec publication à l’appui (Cell) – que la désorganisation des neurofilaments pouvait être la cause de maladies neurologiques, telle la sclérose latérale amyotrophique (SLA), sa spécialité. Mieux connue sous l’appellation de « maladie de Lou-Gehrig », la SLA est caractérisée par une dégénérescence progressive des neurones moteurs du cortex cérébral. Les neurofilaments, quant à eux, forment essentiellement la charpente des neurones.

Quelques années plus tard, Jean-Pierre Julien a confirmé sa découverte en identifiant diverses mutations dans les gènes de filaments intermédiaires (un type de neurofilaments). Il créa, par la suite, de multiples lignées de souris transgéniques pour l’étude, justement, de la fonction de ces gènes. Ses travaux sur les souris « NF-L knock out », par exemple, ont fourni la preuve incontestable du rôle important des neurofilaments dans la croissance radiale des axones des nerfs périphériques. Les souris knock-out permettent d’étudier le rôle d’un gène en observant les conséquences de son inactivation.

Depuis l’obtention en 1982 de son doctorat en biochimie de McGill, et trois ans plus tard d’un postdoctorat réalisé à Londres au National Institute for Medical Research, Jean-Pierre Julien a poursuivi ses travaux de recherche de 1989 à 2003 au Centre de recherche en neurosciences de l’université McGill où il fut responsable de l’Unité de transgénèse à l’Hôpital général de Montréal; de 2003 à juin 2013 au Centre de recherche du Centre hospitalier universitaire de Québec (CHUQ) où il fut directeur de la Plateforme de transgénèse; et depuis juillet 2013 à l’Institut universitaire en santé mentale de Québec où il fut recruté comme directeur de l’axe Neurosciences intégratives et thérapies expérimentales.

Grâce à des approches génétiques et pharmacologiques innovatrices, Jean-Pierre Julien a contribué de façon importante à l’avancement des connaissances sur la pathogenèse de la SLA et sur le rôle de la neuro-inflammation dans les maladies neurologiques. Depuis 10 ans, plusieurs laboratoires dans le monde ont utilisé une lignée de souris qu’il a créée permettant d’éliminer de façon sélective les microglies et macrophages en prolifération pour l’étude du rôle de l’inflammation dans les maladies neurodégénératives et la régénérescence. Au cours des dernières années, Jean-Pierre Julien a généré de nouvelles souris transgéniques modèles de la SLA basées sur la découverte de nouveaux gènes. Ces modèles animaux servent à étudier les mécanismes de la neurodégénérescence et à tester de nouvelles thérapies, comme des approches d’immunothérapie ciblant la toxicité de protéines spécifiques.

Chose certaine, Jean-Pierre Julien ne semble pas vouloir ralentir le rythme : encore récemment, il faisait la manchette avec la découverte d’une nouvelle cible thérapeutique pour la SLA impliquant une protéine clé de la réponse immunitaire. Un inhibiteur expérimental de cette voie pro-inflammatoire s’est avéré efficace pour atténuer les symptômes de la maladie chez des souris modèles de la SLA. Cette percée pourrait mener dans un avenir prochain à la mise en place d’un traitement expérimental pour la SLA. Cette année, il a organisé la 9e édition du Symposium annuel sur la SLA de la Fondation André-Delambre où une centaine d’experts viennent discuter de la fine pointe de la recherche et des tests cliniques afin de venir en aide aux patients atteints de SLA. De plus, il participe chaque année à l’évènement Roulez pour la SLA pour amasser des fonds pour la Société de la SLA du Québec, organisme qui a pour mission d’améliorer les conditions de vie des patients atteints de la SLA. Excellent moyen, en outre, de ne jamais perdre de vue l’humain derrière la maladie.

Rédacteur : Luc Dupont