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Informations générales

Événement : 80e Congrès de l’Acfas

Type : Colloque

Section : Section 300 - Lettres, arts et sciences humaines

Description :

La notion de désir a jusqu’ici été pensée comme appartenant au masculin, tandis qu’au féminin il incombe d’incarner l’objet du désir de l’homme. Depuis peu, les femmes s’approprient le discours érotique. Émancipées qu’elles sont des injonctions à la pudeur, elles projettent désormais la possibilité d’une subjectivité désirante.
Dans la mesure où les textes littéraires reconduisent les scripts sexuels (Gagnon) dominants, reposant sur la dyade Homme-sujet-actif-désirant/Femme-objet-passif-désiré, on peut affirmer, avec De Lauretis, qu’ils constituent une technologie du genre – cela se reflète tant dans la syntaxe érotique (« Il la prit », « Elle se donna à lui ») que dans la représentation des scènes sexuelles et, plus largement, dans la façon dont circule le désir.
Aussi, ce colloque se penchera sur la figure de la femme désirante dans les productions littéraires et médiatiques contemporaines, celles-ci entendues dans leur sens large, incluant aussi bien la culture des médias que celle des arts médiatiques.
Les productions culturelles se voient-elles transformées par la prise de parole des femmes? Les créateurs masculins prennent-ils acte de cette nouvelle possibilité d’une subjectivité désirante au féminin, la mettent-il en jeu dans leurs textes littéraires et autres productions culturelles?

Dates :
Responsables :

Programme

Communications orales

Désir et autofiction

  • Mot de bienvenue
  • Femmes, désir(s) et autofictions : comment s'auto-représenter et bénéficier des médias en le faisant?
    Karen Ferreira-Meyers (Université du Swaziland)

    Le Moi se trouve dans une position centrale dans les écritures autofictionnelles contemporaines. L'autofiction, mélange habile d'autobiographie et d'écriture romanesque, propose aux écrivaines des 20ème et 21ème siècles un espace de prédilection d'autoreprésentation et d'évocation de leurs désirs. Dans cette présentation, je propose d'analyser plusieurs textes autofictionnels beyaliens (L'homme qui m'offrait le ciel, 2007), bouraouins (en particulier, Mes Mauvaises pensées, 2005, Avant les hommes, 2007, et Appelez-moi par mon prénom, 2008) et nothombiens (par exemple, Ni d'Ève ni d'Adam, 2007 et Une forme de vie, 2010) afin de voir comment les autofictionnaires combinent désirs et médias dans un souci de vérité-mensonge postmoderne. Les aspects médiatiques des persona littéraires de l'auteure belge Amélie Nothomb, de l'écrivaine franco-camerounaise Calixthe Beyala et de l'auteure franco-algérienne Nina Bouraoui ont été soulignés plusieurs fois (voir, par exemple, Lee, Mark, Les Identités d'Amélie Nothomb : de l'invention médiatique aux fantasmes originaires, Amsterdam: Rodopi, 2010 ou Hitchcott, Nicki, Performances of migration: Calixthe Beyala, Liverpool : Liverpool University Press, 2006). Le lien entre l'écriture du désir et l'autofiction reste à être éclairé.

  • Homosexualité et alter ego : Nina Bouraoui ou l'inversion du rôle sexuel
    Feriel Bougherara (Université Concordia)

    Les écrivaines s'approprient de plus en plus le discours portant sur leur corps et leur sexualité, ce qui a été abondamment commenté, au cours des vingt dernières années, dans les études féministes et les gender studies. En effet, de plus en plus d'auteures expriment une subjectivité érotique féminine, se dissociant ainsi de la tradition machiste qui les a si longtemps reléguées au rôle d'objet désiré. Cette communication sera l'occasion de proposer une réflexion sur la manière dont l'écrivaine française, Nina Bouraoui, expose le désir féminin dans Garçon manqué (2000), Poupée Bella (2004) et Avant les hommes (2007) : comment définit-elle le désir? En quoi la présence masculine est-elle nécessaire dans cette nouvelle conception du désir? Par quels moyens l'auteure permet-elle au sujet féminin de devenir à la fois sujet désirant et objet de désir? Comment l'écriture arrive-t-elle à réconcilier sexualité et identité? On verra que Nina Bouraoui réinvente d'une certaine façon la notion de désir en incarnant à la fois le protagoniste masculin et féminin pour finalement projeter l'image d'une sexualité pluriforme, androgyne et hybride.

  • Discussions sur les genres : des lectrices de la génération X parlent d'autofiction au féminin
    Karine Bellerive (UdeM - Université de Montréal)

    Les récits autofictionnels publiés par Marie-Sissi Labrèche (Bordeline 2000 et La brèche 2003), Nelly Arcan (Putain 2001 et Folle 2004) et Mélikah Abdelmoumen (Le dégoût du bonheur 2001) ont obtenu un écho considérable dans la sphère médiatique et dans les milieux de la recherche universitaire. Les observateurs notent de façon générale que ces récits présentent des modèles de femmes qui rompent avec les représentations largement véhiculées dans les médias: les narratrices sont assujetties aux désirs des hommes, elles cherchent maladivement à rencontrer les idéaux de féminité et de beauté, tout en les dénonçant, elles exposent sans tabou leur sexualité. Pour les universitaires et pour la plupart des critiques, l'autofiction, telle qu'elle est pratiquée par Labrèche, Arcan et Abdelmoumen, constitue un espace de contestation.

    En effectuant cinq entretiens collectifs qui ont réuni chacun trois ou quatre lectrices de la génération X, j'ai cherché à savoir comment ces dernières interprètent les récits sur le plan des thématiques qui y sont explorées, dont la pression sociale liée aux normes de beauté et de féminité, l'hypersexualisation de l'espace public et la sexualité féminine. Certaines se sont identifiées aux narratrices, d'autres ont été troublées, même choquées, par les comportements sexuels des héroïnes et, surtout, par l' «impudicité» des auteures.

  • Pause

Communications orales

Désir lesbien

  • La contre-attaque des corps et des plaisirs. Jane Delynn contre le désir de se savoir
    Nathanael Wabled (UQAM - Université du Québec à Montréal)

    À travers la mise en scène de pratiques sadomasochistes, il ne s'agit pas pour l'écrivaine américaine Jane Delynn de décrire une sexualité perverse entre des femmes. Dans la nouvelle « The Duchess of L.A. », elle met en particulier en scène la possibilité de corps qui existent et ont une sexualité sans que cette relation ne soit celle de positions symboliques ou sociales les faisant signifier et les spécifiant dans une définition fixe d'elles-mêmes. Dans l'ordre sexuel normal, ce que Michel Foucault nomme la sexualité, ce ne sont en effet pas des corps qui sont en relation dans l'acte amoureux mais des fonctions et des identités symboliques. C'est ce qui fait dire à Lacan qu'il n'y a pas de rapport sexuel.

    Delynn met en scène le passage rituel de cet ordre sexuel à un autre où les corps des femmes semblent au contraire pouvoir se rencontrer et se toucher en imprimant mutuellement leurs marques les uns sur les autres. Ce n'est ainsi plus une femme définie symboliquement qui a un rapport sexuel, mais bien un corps qui se donne dans une dynamique d'échange. Ils se modifient et se mettent en jeu au contact d'autres corps au lieu de jouer leur rôle ou leur fonction prédéfinie. Ils sont donc bien dans un rapport et, en tant que tel appartiennent à un autre ordre que celui où les rapports sexuels sont impossibles. L'amour ne se passe plus entre deux sujets mais entre deux corps.

  • L'expression du désir lesbien dans les poèmes de Tatiana de la Tierra
    Sophie Cabaloue (UNILIM - Université de Limoges)

    La vision psychanalytique du désir féminin passif qui vit dans la nostalgie du manque phallique est clairement tombée en désuétude, à fortiori quand il s'agit de relations lesbiennes. Malgré les diverses remises en cause de l'ordre patriarcale, l'image de la femme désirante est souvent liée au fantasme masculin. C'est pourquoi, l'écriture lesbienne semble être un des espaces libres pouvant rendre compte de la figure féminine désirante libérée de tout type d'asservissement. L'œuvre poétique de Tatiana de la Tierra, une auteure colombienne contribue à la construction identitaire de la femme lesbienne mais également à l'affirmation du désir féminin en deçà des frontières imposées par l'ordre phallocentrique. Ses poèmes sont une ode au désir féminin. La femme choisit, pense, désire et fait l'amour sans complexe. La figure de cette femme tout puissante s'éloigne alors de l'image de la femme lesbienne construite par le fantasme masculin.

  • Dîner

Communications orales

Femmes désirantes? – 1

  • La difficile appropriation de la littérature érotique québécoise par l'Éros féminin : une étude du roman Jacinthe de Charlotte Boisjoli
    Vincent Landry (UdeS - Université de Sherbrooke)

    La ségrégation entre une « littérature érotique féminine » et une « littérature érotique » qui serait implicitement masculine témoigne du caractère traditionnellement phallocentré de ce genre littéraire et de sa composition relevant d'un univers fantasmatique genré où la femme est altérisée et réduite au statut d'objet. L'investissement massif d'écrivaines dans la mise en discours de la sexualité aura permis de donner un nouveau visage aux relations entre littérature, sexualité et rapports sociaux. Au grand dam de l'establishment masculin en édition de littérature érotique, nous assistons à une transformation des scripts sexuels (Gagnon) relayés par le genre érotique qui permettent désormais l'apparition d'une subjectivité désirante au féminin. Cette transformation ne se fait toutefois pas sans heurts dans un Québec fortement marqué par des instances phallocrates répressives. Le roman Jacinthe (1990) de Charlotte Boisjoli nous présente les premières traces d'un assemblage de scripts d'où la domination masculine est repoussée, sans être renversée, par une revendication du personnage féminin de sa sexualité comme réappropriation de son corps et de son identité sexuelle. Cette communication a comme objectif de se pencher sur les liens unissant les diverses représentations d'une figure de femme désirante d'un roman érotique non traditionnel et les prescriptions sexuelles associées aux scripts dominants, ceux du genre littéraire et de l'acte érotique en lui-même.

  • Christiane et Valérie : femmes désirantes « législatrices » chez Michel Houellebecq
    Isabelle Dumas (UdeM - Université de Montréal)

    La critique savante sur Michel Houellebecq s'est attachée bien davantage à étudier les narrateurs et personnages masculins que féminins des romans. On a notamment épinglé l'altérité comme un écrasement, vécue telle une tragédie sans appel, celle du corps désirant-déclinant, qui n'a, à notre époque, « pas le droit d'être vieux ». Cette dimension du rapport de l'individu houellebecquien à la femme et à l'atteinte de son corps est déjà bien exploitée ; désir-douleur innervent la conquête difficile du beau sexe, et souvent l'homme houellebecquien renonce. Dans les romans de Houellebecq, ce sont parfois les femmes qui initient l'acte de séduction par une invite franche, telle Christiane des Particules, ou qui entraînent leur partenaire dans des expériences érotiques variées au sein d'un amour authentique et réciproque comme le fait Valérie de Plateforme. Nous estimons que ces deux femmes expriment une sexualité pleinement affirmée qui se décline par des choix forts, sous-tendue par l'éthique d'une érotique solaire (Onfray) que leur partenaire partage avec bonheur. Elles se font désirantes, décideuses, législatrices. Nous souhaitons montrer que le « clavier sexuel » de Christiane et Valérie tend à rejoindre celui de leur partenaire masculin en recourant principalement à l'éclairage que portent les travaux de Michel Onfray précédé de Michel Foucault sur les nouveaux comportements sexuels.

  • Pause

Communications orales

Femmes désirantes ? – 2

  • Derrière le masque : Arcan
    Joëlle Papillon (University of Toronto)

    L'œuvre de Nelly Arcan interroge le désir masculin et féminin à plusieurs égards, mais ce qu'il m'intéressera d'étudier dans le cadre de cette communication est comment, chez Arcan, la femme semble tenue à distance de son propre désir par sa participation à l'entreprise de séduction – alors même que son apparence physique mime le désir. Burqa de chair (2011) expose différents « masques » revêtus par les femmes, notamment celui de la « jouissance grimaçante » qui est commandé par la pornification de l'espace social. Ce masque de jouissance, porté en réponse au désir (supposé) de l'homme, a pour double but de valider la performance sexuelle du partenaire, de même que la performance de la féminité de celle qui l'endôsse. Le masque jouisseur ne concerne pas que le visage, mais aussi le vêtement – notamment le déshabillé, devenu signe féminin par excellence dans les derniers textes d'Arcan –, et s'étend enfin sur l'ensemble du corps à travers la chirurgie esthétique et diverses techniques de discipline du corps; c'est ce qu'Arcan entend par son expression-choc « burqa de chair », développée dans À ciel ouvert (2007). Ma communication s'attachera donc, à travers l'exemple d'Arcan, à saisir les freins qui s'opposent toujours à l'accession de certaines femmes au statut de sujet désirant et les cantonnent dans la position d'objet désiré, en dépit d'un affichage presque criard de signes du désir.

  • Désir et agentivité énonciative au féminin : quand le vouloir détrône le devoir
    Fabienne Boissieras (Université de Lyon)

    Depuis une approche stylistique s'attachant à analyser les outils linguistiques (grammaticaux, syntaxiques) aptes à trahir/traduire l'expression du désir féminin (envisagé selon la doxa psychanalytique du point de vue dynamique, économique et topique) et en puisant des exemples dans des œuvres exemplaires, de Marivaux à Duras (pour qui cette question du désir féminin et de sa traduction littéraire est centrale), je m'attarderai sur l'expression du désir dans des récits contemporains (C. Millet, C. Angot, V. Despentes) qui informent le genre de façon singulière.

    Nous verrons qu'une des conséquences de cette parole féminine est d'abord linguistique. Plus de gaze pour nimber le désir comme à l'âge classique si obsédé par les bienséances qu'il place au premier plan le surmoi de la topique freudienne. La sélection des auxiliaires modaux s'en trouve révolutionnée : le vouloir détrône le devoir envahissant chez Madame de la Fayette par exemple où le désir féminin pourtant justifie seul l'intrigue romanesque. Nue ou crue, l'énonciation fait bien souvent, dans les textes contemporains que nous envisagerons, l'impasse même sur tout auxiliaire de mode. Vouloir qui intervient précocement dans la pensée et « laisse hors d'atteinte la liberté du sujet » (Moignet) déserte le texte pour une phrase économique, minimale, qui privilégie l'agir, l'acte en dehors de tout conditionnement subjectif (« je fixais l'homme », « elle embrasse ma bouche »).

Communications orales

Désir du sujet vieillissant

  • Mot de bienvenue
  • D'objet désiré à sujet désirant : trajectoire de Rena dans Infrarouge de Nancy Huston
    Isabelle Boisclair (UdeS - Université de Sherbrooke)

    Dans Infrarouge (2010), Nancy Huston met en scène le personnage de Rena, femme libre et autonome dans la cinquantaine. Celle-ci affiche tous les signes d'une subjectivité agissante, notamment sur le plan de la sexualité. Or, le cadre narratif expose la trajectoire de Rena depuis son enfance. Ce qui frappe notamment dans cette trajectoire, c'est le passage du statut d'objet impuissant, instrumentalisé par d'autres, à celui de sujet désirant, marqué par le refus du stigmate de la victime. À travers l'examen des scripts (Gagnon), nous nous pencherons sur les expériences sexuelles de Rena de façon à voir ce qui marque le passage entre le sujet impuissant qui est constitué en objet par les autres – notamment à travers les scripts de la violence sexuelle – et l'assomption, de même que l'exercice, d'une subjectivité désirante, où le sujet a la liberté, la capacité et le pouvoir d'inventer de nouveaux scénarios. Même si le roman n'offre pas une réponse unique à cette transformation – pas de magie libératrice, pas de précepte psychologique simpliste qui livrerait la clé –, nous tenterons de voir sur quoi elle repose.

  • Cet obscur tabou du désir… des femmes vieillissantes
    Julie Silveira (UQAM - Université du Québec à Montréal)

    Nous aborderons la question d'une sexualité que notre société « libérée » de ses tabous préfère encore taire, celle des femmes vieillissantes. Stigmatisées par des préjugés âgistes et sexistes, les femmes dont le corps porte la marque du temps ont longtemps été exclues du discours, ignorées et méprisées par les écrivains appartenant à la tradition littéraire. Nous nous pencherons sur les représentations de la femme vieillissante en tant que sujet désirant et objet de désir dans quelques productions littéraires et cinématographiques récentes, écrites et réalisées par des hommes.

    Nous étudierons la représentation du désir dans le film Vers le Sud de Laurent Cantet, inspiré de la nouvelle éponyme de Dany Laferrière, qui met en scène des femmes d'âge mûr qui s'approprient le discours, qui disent leur désir dans des récits à la première personne. Ces femmes mettent fin à leur misère affective et sexuelle en retrouvant à Haïti de jeunes amants qui les regardent comme plus aucun homme blanc n'ose le faire. Si ce récit et ce film ont souvent été analysés à partir d'une problématique critique du tourisme sexuel, pour notre part, les questionnements que nous soulevons seront les suivants : Comment ces récits représentent-ils la subjectivité et le rapport au corps de ces femmes? Comment les jeux du désir déstabilisent-ils les rapports de genre, d'âge, de classe et de domination?

  • Pause

Communications orales

Désir du sujet postcolonial

  • Féminité, performativité et amérindianité dans le travail de Lori Blondeau
    Jonathan Lamy Beaupré (Inter, art actuel)

    D'origine crie et ojibwé, l'artiste multidisciplinaire Lori Blondeau détourne les stéréotypes associés à la féminité et à l'amérindianité. De manière à la fois féministe et postcoloniale, elle utilise des modalités de représentation conventionnelles afin de saboter l'efficacité du stéréotype, d'insuffler un peu d'humour et de subjectivité dans ces images préfabriquées. Dans une œuvre intitulée Cosmosquaw (1996), elle pastiche l'esthétique objectivante du magazine de mode pour se représenter dans une position de pouvoir par rapport à la représentation. L'artiste se moque, se venge de l'image, utilise les clichés pour leur désobéir. Dans The Lonely Surfer Squaw (1997), Blondeau pose en bikini (fait de fourrure de castor), avec une planche de surf (en mousse d'isolation rose), non pas sur la plage, mais dans la neige. Sur ces photographies, le sujet féminin résiste à sa condition passive, la dénonce et la déconstruit avec violence et humour. L'agentivité critique permet ici de se réapproprier sa propre image. Dans la performance Putting the Wild back into the West (2004-2010), réalisée en collaboration avec Adrian Stimson, les spectateurs devaient se déguiser pour poser avec les artistes dans un faux décor de Far West, mettant en scène des jeux de désir qui mélangent et transgressent les rôles, les identités culturelles, les positions de pouvoir et les genres sexuels.

  • Poétique du corps dans Moi, Tituba sorcière... noire de Salem de Maryse Condé
    Dulce Quiroz (UNAM - Universidad Nacional Autónoma de México)

    Dans le roman Moi Tituba sorcière... noire de Salem, l'écrivaine guadeloupéenne Maryse Condé construit un discours qui met en cause l'idée du corps liée aux forces du démon qui a été utilisée par les colonisateurs comme un prétexte pour soumettre les esclaves et tous ceux qui ont échappé à la norme chrétienne. Tituba, appelée sorcière par les puritains du XVII siècle, retourne du monde des morts pour faire le récit de sa vie, le périple d'un éros qui concerne la manière dont elle se met en relation avec la nature, avec son désir et avec son corps.

    Quand elle est jugée et qu'elle accepte d'avoir un rapport avec les forces du mal, ce qu'elle accepte est qu'elle habite son corps autrement. La manipulation des forces de la nature attribuée aux sorcières constitue la mise en œuvre d'un désir. C'est à cause de cette reconnaissance qu'elle est punie avec la mort. Le châtiment constitue la réponse à la peur que Tituba provoque lorsqu'elle fait une correspondance entre son désir et la matière du monde. Les puritains essaient de la réduire au silence et à l'isolement, mais elle échappe même au silence définitif car elle est capable de dépasser les frontières de la mort. La parole devient une manière de représenter son désir, de le mettre en scène et de remplir les trous de silence auquel on l'a condamné. Le corps et la parole sont réunis par la voix de cette sorcière, manifestation d'un désir, qui raconte son histoire après sa mort.

  • Dîner

Communications orales

Désir, art, image

  • Appel de marge : sexualités marginales et marges de l'art
    Philippe Dumaine (UQAM - Université du Québec à Montréal)

    Le corps féminin est disséminé dans une majeure section de l'histoire de l'art en tant qu'objet de désir masculin. Les grandes théoriciennes de l'histoire de l'art féministes (notamment Griselda Pollock) ont longtemps questionné, avec raison, cette position particulière de la femme à l'intérieur d'une discipline qui, bien que lui refusant la position d'artiste, lui ouvrait grandes ses portes en tant que représentation. Or, l'ouverture de cette brèche théorique s'est, force est de constater, faite conjointement avec de multiples remises en question de l'histoire comme mode d'invisibalisation, de sorte que les pratiques actuelles en art contemporain investissent la question des désirs «autres» de plein front. En me basant entres autres sur les écrits de Judith Halberstam (Female Masculinity, 1998; The Queer Art of Failure, 2011), je chercherai à comprendre comment l'introduction d'identités sexuelles «marginales» dans le monde de l'art tend à remettre en question les modes de légitimation mêmes de cette discipline. Je baserai notamment mon analyse sur la production photographique de Catherine Opie, qui cartographie différentes identités performatives queer.

  • Femmes désirantes, images de la femme désirante ou dénonciation du désir des hommes : représentation de la sexualité en art contemporain par les femmes artistes
    Audrey LAURIN (UQAM - Université du Québec à Montréal), Julie Lavigne (UQAM - Université du Québec à Montréal), Sabrina MAIORANO (UQAM - Université du Québec à Montréal)

    La communication présentera les premiers résultats de notre projet de recherche intitulé Le rapport éthique à soi et à autrui dans les œuvres de femmes artistes : portrait de la représentation de la sexualité en art contemporain. L'étude se questionne sur la place réelle de la sexualité dans l'art des femmes, à l'heure où le phénomène de l'hypersexualisation prend une place importante dans les médias. Pour cette recherche, nous avons dépouillé dix revues d'art contemporain d'envergure internationale (de 1999 à 2009) et sélectionné toutes les œuvres de femmes traitant de sexualité ou de nudité. Il s'agit majoritairement d'une production dominée par la représentation du corps féminin, sexualisé à divers degré, proposant beaucoup moins d'actes sexuels explicites que nous l'avions anticipé. Pour cette présentation, nous proposerons un portrait global de cette production artistique, analysée notamment à l'aide de la théorie des scripts sexuels (Simon et Gagnon 1973 et Gagnon 1990), du concept d'objectivation sexuelle tel que travaillé par Nussbaum (1999) et de l'agentivité sexuelle (Hammers 2009 et Albanesi 2009). L'objectif est, d'une part, d'établir une catégorisation de cette production artistique et, d'autre part, d'analyser le degré d'agentivité et d'objectivation sexuelles des femmes représentées dans les œuvres du corpus.

  • Pause

Communications orales

Quel objet du désir?

  • Désirer l'indésirable : la double transgression au féminin dans Le premier été d'Anne Percin
    Catherine Dussault Frenette (UdeS - Université de Sherbrooke)

    L'adolescence est une période critique dans la vie des jeunes filles. Avant même qu'elles s'initient à la sexualité, leur corps acquiert une valeur sexuelle, déterminée par le discours masculin dominant. Ainsi, lorsque naît leur désir, celui-ci prend forme dans un corps déjà soumis à de multiples injonctions, un corps qui, somme toute, leur est étranger. D'un autre côté, dès les premiers émois, les scripts sexuels dominants (Gagnon) dictent aux adolescentes la place d'objet du désir passif et définissent leur sexualité en tant que réponse à la sexualité masculine. Dans un tel contexte, exprimer ouvertement son désir, pour les jeunes filles, relève de la transgression.

    Nous nous pencherons ici sur le personnage de Catherine, narratrice du roman Le premier été d'Anne Percin (2011). Nous visons à démontrer que le désir énoncé par celle-ci relève d'une double transgression. L'objet du désir féminin, dans le roman de Percin, est un jeune homme déficient vivant aux abords du village où séjourne Catherine. Le désir de l'adolescente pour celui qui, aux yeux de tous les villageois, est indésirable, subvertit en lui-même les codes traditionnels de la sexualité. Nous postulons également que ce désir permet de mettre en valeur, d'une part, la transgression des scripts sexuels établis et, d'autre part, l'expérimentation d'une sexualité inédite, liée à ce que la narratrice désigne comme « [s]a sauvagerie » (PE : 142).

  • Quel désir désirer ?
    Martine Delvaux (UQAM - Université du Québec à Montréal)

    Cette communication veut interroger la question du désir dans son lien au féminin comme « désir d'autre chose ». À partir des lieux communs entourant la sexualité des femmes - pudeur, tendresse, douceur - nous chercherons à voir si une certaine transgression féminine ne réside pas dans une économie différente du désir: rapport à l'objet, à la consommation, à la dépense, etc. L'ouvrage récent de Sophie Fontanel, L'envie, reçu comme une apologie du célibat et de la non-sexualité, servira ici de point d'ancrage: « Pendant une longue période... j'ai vécu dans peut-être la pire insubordination de notre époque, qui est l'absence de vie sexuelle. » (4e de couv) Nous ferons dialoguer l'ouvrage de Fontanel et le film Shame, de Steve McQueen, qui traite de la dépendance sexuelle, nous intéressant particulièrement à la différence de traitement du désir entre le protagoniste principal et le personnage de sa sœur, afin de réfléchir à un certain sens qu'on peut donner au désir: celui de ne rien posséder.

  • Mot de clôture

Cocktail

Activité spéciale – Lancement du n° 12 des Cahiers Anne Hébert