Informations générales
Événement : 80e Congrès de l’Acfas
Type : Colloque
Section : Section 300 - Lettres, arts et sciences humaines
Description :L’ouverture généralisée des frontières disciplinaires depuis les dix dernières années s’est traduite par une réflexion renouvelée sur les conditions et les modalités de la recherche interdisciplinaire en traductologie. Il convient alors de s’interroger sur la nature des relations entre la traductologie et les autres domaines de recherche. En effet, la traductologie s’est historiquement définie par rapport aux disciplines connexes, en s’appropriant des problématiques et des méthodologies exogènes. Faut-il en déduire pour autant que la pratique de l’interdisciplinarité se réduit à la simple importation de modèles théoriques variés? Dans quelle mesure la recherche récente en traductologie témoigne-t-elle de formes « réciproques » (Kaindl) de l’interdisciplinarité, où la mise en commun de ressources méthodologiques et théoriques résulte en un apport égal aux différentes disciplines en jeu? Comment favoriser de telles approches? Ce colloque invite à la réflexion sur la contribution actuelle et potentielle de la traductologie aux autres domaines de recherche en sciences humaines.
Dates :Programme
Ouverture
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Mot de bienvenue
Session 1
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La méthode traductologique : un récit polyphonique
Depuis la publication de « The Name and Nature of Translation Studies » (Homes, 1975), les recherches traductologiques sont hantées par la question de la méthode. Parfois, cette méthode est empruntée à des disciplines ayant fourni les bases théoriques pour la réflexion proposée. D'autres fois, cette méthode est moulée sur la base de l'objet qu'on cherche à étudier. Souvent la méthode conçue est de nature plurielle, c'est-à-dire qu'elle intègre les outils de plusieurs disciplines dont les voix résonnent dans les approches et les contributions avancées. Ma communication fait la chronique des choix méthodologiques faits pour étudier la traduction philosophique au Mexique entre 1940 et 1970. Il sera question de présenter les conséquences de ces choix et les réflexions liées à l'emprunt des outils des disciplines telles que la sociologie, l'histoire, l'analyse du discours et la traductologie. En somme, il s'agira de penser la méthode traductologique comme un récit polyphonique.
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Traduire l'Autre femme : pour une représentation éthique et une lecture conscienteSanaa Benmessaoud (UdeM - Université de Montréal)
Alors que l'autobiographie de la sociologue marocaine Fatima Mernissi, Dreams of Trespass (1994), a été applaudie par plusieurs critiques littéraires féministes du fait de sa remise en question des représentations orientalistes de la femme arabe, les critiques éditoriales en font une lecture très orientaliste, laquelle n'a pas été relevée par ces mêmes critiques féministes. De même, ces dernières ont passé sous silence l'aspect traductionnel du texte. Or, en tant que texte postcolonial, Dreams of Trespass est une traduction non seulement culturelle mais aussi linguistique. Par cette traduction, Mernissi s'engage dans un processus de représentation qui influence nécessairement la manière dont le lectorat perçoit la femme marocaine et, par extension, la femme « arabe ». Cette communication se penche justement sur les processus de traduction à l'œuvre dans l'écriture de Dreams afin de mettre au jour le lien potentiel entre l'aspect traductionnel du texte et les interprétations orientalistes exprimées dans les critiques éditoriales. Elle souligne en particulier les difficultés dont tout acte représentationnel est truffé, et revendique, de la part tant des écrivain(e)s que des critiques littéraires et postcoloniaux, une conscience plus aigüe de l'aspect traductionnel de l'écriture postcoloniale, et donc du mécanisme de re-présentation et de déplacement inhérent à cette écriture.
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Théâtre, traduction et déracimilation. Marco Micone et l'expérience de l'écriture cathartiqueCecilia Foglia (UdeM - Université de Montréal)
Cette communication analyse l'expérience d'écriture du traducteur italo-canadien Marco Micone comme un phénomène de catharsis identitaire et culturelle. Micone s'approche de la traduction pour récupérer le capital littéraire (et linguistique) manquant, et ce travail traductologique sur le théâtre engagé l'aide à dépasser le traumatisme causé par l'émigration. Je proposerai ici le néologisme « dér-ac-imilation », pour expliquer le fait que les étapes de l'écriture miconienne passent à travers trois phases : le déracinement (raison pour laquelle il aborde l'écriture); l'acceptation (du nouveau contexte phénoménologique à laquelle il arrive par le biais du pouvoir cathartique de l'écriture théâtrale); et finalement, l'assimilation, qui ne suppose guère la suppression du passé immigrant mais qui, au contraire, existe dans la mesure où celui-ci reste incorporé dans le présent. Je voudrais donc réfléchir sur la traduction comme espace littéraire où renégocier et redéfinir le paradigme identitaire sans nécessairement renoncer à la culture source pour mieux s'intégrer dans la société d'accueil. Ce serait une assimilation qui voit dans la traduction, et donc, dans l'apport de nouveau capital littéraire et symbolique (dans ce cas, la traduction de pièces engagées italiennes), un moyen pour l'émigré d'ennoblir et réhabiliter sa figure. Un véritable passeport qui lui donnerait le droit de circuler ailleurs et d'exporter sa propre « marchandise intellectuelle/culturelle ».
Session 2
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La traduction à la barre des accusésMarie-Hélène Girard (UNIGE - Université de Genève)
Est-il un domaine où les erreurs de traduction peuvent avoir autant de conséquences que celui du droit? Préjudiciables et imprévisibles, les erreurs de traduction en droit peuvent être lourdes de conséquences, surtout lorsqu'elles ne sont décelées que dans le cadre d'un procès par des juristes avides de trouver la plus petite des failles dans les lois qui leur permettra de gagner leur cause. Dans cette présentation, nous exposerons un cas d'espèce concret qui démontre le genre de répercussions que peut avoir une erreur de traduction sur l'uniformité et l'intelligibilité du droit, mais aussi sur l'issue d'un procès. Nous établirons ainsi que de telles erreurs de traduction pourraient être évitées s'il existait une plus grande synergie entre droit et traduction.
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Outils technologiques et bien-être des traducteursJulian Zapata (Université d’Ottawa)
Dans cette communication, nous présenterons une partie des résultats de notre recherche portant sur l'utilisation actuelle des systèmes de reconnaissance vocale (RV) par les traducteurs professionnels. Nous avons constaté qu'un nombre croissant de traducteurs du monde entier choisissent d'intégrer ces systèmes à leur boite à outils pour de diverses raisons, ces dernières pouvant être, entre autres, des raisons d'ergonomie ou de santé mentale ou physique. À notre connaissance, très peu d'études traductologiques se sont concentrées sur les aspects humains des technologies langagières et sur les possibles impacts que ces dernières peuvent avoir sur le bien-être physique et psychologique des langagiers. Bien que les systèmes de RV ne soient pas conçus spécifiquement pour les traducteurs, ils ajoutent une touche de confort au flux de travail de ceux qui l'utilisent déjà. Ainsi, la recherche traductologique réclame la participation de spécialistes dans d'autres domaines des sciences humaines telles que l'ergonomie et la psychologie, dans le but de concevoir des outils de traductique mieux adaptés aux besoins de bien-être des traducteurs du XXIe siècle.
Session 3
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La question de la subjectivité dans le langage : point de croisement entre psychologie et traductologieStéphanie Roesler (Université Concordia)
Quand Théophile Gautier critique d'art nous offre son commentaire de l'œuvre qu'il visualise, il fait acte de traduction. Cette traduction intersémiotique relève du passage d'un système de signes iconiques à un système de signes symboliques, du visible au lisible. La question que nous nous poserons est : quelle est la trace du sujet dans l'observation d'un tableau et la compréhension d'un texte littéraire ? En quoi sa subjectivité est-elle palpable dans cette découpe du réel qu'est le texte de sa traduction? Quel est ce « Je » traducteur, point d'origine de l'énonciation traduisante ? Linguistes et traductologues parlent de style, certains de voix ; nous irons plus loin en faisant l'hypothèse de la subjectivité de tout acte traducteur. Pour cette raison, nous convoquerons certains outils de la psychologie dans nos réponses.
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Traduction, psychologie et sciences de l'éducation : pour un travail interdisciplinaire au service de l'apprentissageChantale Marchand (UdeM - Université de Montréal)
Dans le monde du savoir, où l'interdisciplinarité est au centre de la discussion, on peut se poser la question suivante : comment traductologues, chercheurs en sciences de l'éducation et experts en psychologie cognitive peuvent-ils profiter d'un travail conjoint pour favoriser l'apprentissage chez les étudiants? Déjà, des traductologues se sont intéressés à l'aspect cognitif de la traduction, comme en font notamment état les travaux de Hansen (1999, 2002), de Jääskeläinen (1996, 1998) et de Robinson (1997, 2003). Les recherches accomplies en ce sens ont permis non seulement de pousser la réflexion sur l'activité des traducteurs, mais également de donner des repères aux formateurs. Les chercheurs ont aussi abordé les méthodes d'évaluation et le sujet de la compétence traductionnelle. Mais que reste-t-il à accomplir? Dans cette présentation, nous nous pencherons sur ces questions. Nous verrons entre autres certaines études liées à la formation et à l'apprentissage réalisées en psychologie cognitive, plus spécifiquement en cognition musicale, qui pourraient inspirer des recherches conjointes entre les traductologues, les chercheurs en sciences de l'éducation et les experts en sciences cognitives. Nous ferons par la même occasion un état de la question sur les manuels de traduction anglais-français et l'apport, dans ces ouvrages, des principes cognitifs et métacognitifs qui constituent l'instrument de travail des trois disciplines abordées.
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Les sciences de l'éducation et la formation des traducteurs : un lien interdisciplinaire pour produire des connaissances partagéesAlvaro Echeverri (UdeM - Université de Montréal)
Depuis que l'homme traduit, il y a toujours eu quelqu'un pour lui montrer la meilleure manière de le faire. Depuis que la traduction est entrée dans le contexte universitaire les traductologues tentent de proposer la meilleure manière de former les futurs traducteurs montrant ainsi leur souci de faire de leur discipline un champ de recherche en constant développement. Au Canada cette préoccupation pour l'innovation est très présente dans la formation des traducteurs. Malgré des excellents progrès dans ce sens, la recherche en pédagogie de la traduction pourrait bénéficier du lien interdisciplinaire qui peut s'établir entre la formation des traducteurs et la riche tradition de recherche en sciences de l'éducation.
L'objectif de notre présentation est, d'une part, de présenter quelques arguments en faveur de consolider les liens interdisciplinaires entre la traductologie et les sciences de l'éducation, et d'autre part, d'insister sur l'importance de fonder la formation des traducteurs sur une meilleure collaboration entre les formateurs de traducteurs et les fournisseurs de services de traduction au Canada.
Forum – La formation à l'Interdisciplinarité
Session 4
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Vers un modèle réticulaire de la traductologieRoch Duval (UdeM - Université de Montréal)
La traductologie s'est graduellement émancipée des disciplines matricielles qui ont présidé à l'élaboration architectonique et méthodologique de ce nouveau domaine du savoir. Toutefois, ce chemin vers une complète autonomie disciplinaire se caractérise parfois par un véritable dédale qui débouche sur des culs-de-sac ou bien encore forme un enchevêtrement inextricable, où la réduplication de l'information et des méthodes laisse entrevoir une confusion théorique. La traductologie est-elle une discipline condamnée à errer à l'instar d'un sans-abri (Cf. Anthony Pym) entre des disciplines déjà bien établies ou peut-elle se targuer de présenter une nouvelle forme de savoir, une sorte deΜῆτις, qui ferait de l'interdisciplinarité son principal vecteur. Nous proposons dans un premier temps de présenter les récents développements sur la notion d'interdisciplinarité (Jürgen Mittelstraß) et l'application de cette approche en traductologie (Doris Bachmann-Medick). Il s'agira d'établir les frontières épistémologiques entre l'interdisciplinarité, la transdisciplinarité et la transversalité (Wolfgang Welsch) afin de trouver une méthode idoine susceptible de caractériser la nature théorique et méthodologique de la traductologie. Selon nous, la solution se trouve vraisemblablement dans une application de l'approche réticulaire de Manuel de Landa à la traductologie.
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Desiderio Navarro et la traduction de la théorie critique russe comme facteur d'avancement de la recherche en sciences humaines à CubaRaul Ernesto Colon Rodriguez (CREDP - Centre de recherche et d’enseignement sur les droits de la personne)
Desiderio Navarro est un polytraducteur cubain qui a traduit depuis les années 60 un énorme volume de textes théoriques russes, et d'Europe de l'Est. Il l'a fait, malgré les obstacles qui lui ont été imposés par la doxa néostalinienne, en ex-URSS et à Cuba. Navarro a également publié une œuvre théorique inspirée des nombreux textes théoriques qu'il a traduits. Notre communication tentera de répondre à des questions relatives à la trajectoire du traducteur, à l'appropriation de la théorie à travers la traduction, et de montrer comment les textes traduits par Navarro représentent, d'un côté, une lutte permanente contre des doxas tant nationales qu'internationales, et de l'autre, un effort soutenu de diffusion des nouvelles théories et des idées, et de stimulation interdisciplinaire de la création théorique et artistique à Cuba.
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La traduction : miroir d'une histoire de manipulationHasnaa Kadiri (UdeM - Université de Montréal)
Les références au philosophe marocain Ibn Khaldûn du XIVe siècle par des traducteurs français du XXe siècle dans un Maroc sous le protectorat français ne sont pas fortuites. Ces références intertextuelles, mettant en évidence l'imprégnation des traducteurs du discours dominant, jouent un rôle de véhicule et de légitimation de la présence coloniale de la France au Maroc.
Si les références rattachent les traductions à l'histoire du Maroc, elles interpellent les lecteurs-étudiants-fonctionnaires de tenir pour acquis les différences autant linguistiques qu'ethniques du peuple marocain. Il est bien évident que la ségrégation raciale sous-jacente à la politique française au Maroc, traduite sous forme d'un Dahir berbère en 1931, a trouvé sa raison d'être entre les lignes des traductions.
La recherche en traductologie permettra de dévoiler la face cachée de l'histoire coloniale au Maroc. Plus exactement, entre les lignes des textes ethnographiques traduits entre 1912 et 1956, se retrouve des explications sur des faits marquants de l'histoire du Maroc. Enfin, il est à souligner que cette recherche est à la jonction de plusieurs disciplines, dont ethnographie, linguistique, enseignement, histoire et traductologie.
Session 5
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Relecture de la presse historique dans une perspective traductologique : quelle pertinence ?Aura Navarro (UdeM - Université de Montréal)
La presse coloniale hispano-américaine a été amplement abordée par les historiens et les hispanistes. Elle constitue d'ailleurs une source précieuse qui a toujours accompagné l'émergence du discours historiographique. Bien que quelques historiens et hispanistes reconnaissent la présence des traductions dans la presse coloniale, celles-ci font rarement l'objet d'études. Cette absence d'études peut être liée à la complexité du corpus (presque toujours anonyme, la traductionapparaît sous plusieurs formes : résumé, un commentaire du texte source, paraphrase, etc.). Au Venezuela, la presse indépendantiste, l'un des meilleurs reflets de l'époque émancipatrice, recèle de nombreuses traductions dans la mesure où les équipes de rédaction faisaient largement usage d'informations provenant de périodiques publiés principalement en anglais et en français. Plusieurs auteurs ont signalé que la relecture de cette presse permettrait de renouveler nos connaissances sur les processus culturels et politiques de l'Amérique hispanique – François-Xavier Guerra (2003) et Catherine Poupeney Hart (2010), entre autres. Dans cette communication nous cherchons donc à faire une relecture de la presse indépendantiste vénézuélienne dans une perspective traductologique, particulièrement dans la Gaceta de Caracas. Bref, nous soulignerons la pertinence des méthodologies historiques pour la traductologie et étudierons, ainsi, les liens entre ces deux disciplines.
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Histoire nationale, république mondiale ou polysystème ? Vers un rapprochement entre traductologie et histoire du livreSusan Pickford (Université Paris-Nord (Paris 13))
Le but de cette communication est d'esquisser la pertinence d'un rapprochement entre les deux disciplines voisines évoquées en titre. En effet, les deux disciplines partagent nombre de traits communs (forte ouverture à l'interdisciplinarité, intérêt pour les enjeux méthodologiques…) qui faciliteraient a priori les passerelles entre les deux. Je me pencherai plus particulièrement sur le récent tournant transnational en histoire du livre qui a déplacé le point focal des recherches de l'état-nation, longtemps traité en entité autarcique, vers une vision plus sophistiquée des réseaux transnationaux en empruntant le vocabulaire critique de l'histoire croisée. Je verrai en quoi les apports de la théorie polysystémique peuvent être utiles aux historiens du livre, dont les travaux suivent plutôt le modèle casanovien d'une république mondiale des lettres où les transferts se font surtout selon un modèle centre-périphérie, dont la relative rigidité permet difficilement de rendre compte des échanges transnationaux qui emprunteraient d'autres chemins.
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Sur le rôle de la traductologie en histoire littéraire : la construction des généalogies littéraires dans l'Angleterre néoclassiqueMarie-Alice Belle (UdeM - Université de Montréal)
Bien que le « tournant traductologique » amorcé récemment en littérature anglaise ait donné lieu à une certaine réévaluation de la place des traductions dans l'histoire littéraire (Gillespie), ces dernières sont le plus souvent présentées comme des illustrations quelque peu « passives » (Pym) des grandes évolutions littéraires dont elles sont contemporaines. Ainsi, les retraductions de l'Enéide de Virgile dans la seconde moitié du 17e siècle ont été récemment abordées comme autant d'étapes vers l'affirmation progressive d'un classicisme littéraire anglais (Sowerby). Or le schème du progrès qui sous-tend une telle approche historiographique, ainsi que les critères d'analyse critique sur lesquels elle repose, reflètent eux-mêmes les stratégies de sélection et de récupération des précédents littéraires à l'œuvre chez les traducteurs néoclassiques. En analysant les récurrences du thème de l'"amélioration", tant chez les traducteurs du 17e siècle que chez leurs historiens, on montrera comment une lecture proprement traductologique du phénomène de la retraduction permet de complexifier l'analyse critique des traductions, et partant, de mieux évaluer leur rôle dans l'histoire littéraire et ses discours.
Session 6
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De Darwin à la génomique : entre l'expérimental et l'imaginaireSylvie Vandaele (UdeM - Université de Montréal)
Selon Michel Morange, « le terme de gène n'a jamais été autant utilisé qu'aujourd'hui: il est largement fait appel à lui pour décrire les résultats du séquençage du génome humain, sans que cet usage ne s'accompagne d'une quelconque référence à ses limites. ». De fait, contrairement à l'idée communément répandue, le concept a des limites floues et sa propre genèse est longue et complexe. Il a considérablement évolué depuis sa création par Johannsenn en 1911 : il dénote, tour à tour mais parfois plus ou moins simultanément, une entité abstraite caractérisée par une fonction, une unité de calcul, ou encore une molécule chimique, en l'occurrence un ou plusieurs segments d'ADN. Les limites de l'expérimentation ne cessant de reculer, cette notion multiforme ne cesse d'agiter la science, mais ce qui est transmis au grand public au moyen de la vulgarisation est souvent un mélange de conceptualisations obsolètes et de représentations nouvelles. Les textes traitant de génétique – maintenant de génomique – constituent donc un défi pour les traducteurs aux prises avec la multiplicité des imaginaires mobilisés depuis plus d'un siècle.
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La place de la traductologie en analyse des discours politiquesChantal Gagnon (UdeM - Université de Montréal)
Au fil des dernières décennies, l'analyse du discours politique (ADP) s'est taillé une place de choix en sciences humaines. Véritable carrefour de disciplines, l'ADP a désormais ses propres revues (notamment Les Mots et le Journal of Language and Politics) et les monographies sur ce sujet sont de plus en plus nombreuses. Cependant, comme l'a souligné Christina Schäffner en 2004, l'ADP pourrait davantage tirer profit de la traductologie qu'il ne l'a fait jusqu'à présent. C'est en particulier vrai dans un pays bilingue comme le Canada, où les discours politiques des dirigeants sont traditionnellement prononcés dans les deux langues officielles, le français et l'anglais. Au cours de notre communication, nous passerons en revue les grandes contributions de l'ADP (en français et en anglais) afin de bien évaluer l'apport de la traductologie dans ce domaine. Ensuite, à l'aide d'exemples tirés de discours politiques traduits, nous montrerons comment la traduction peut modifier la portée d'un message, en fonction du destinataire. En guise de conclusion, nous proposerons des pistes de solution pour favoriser une véritable interdisciplinarité entre la traductologie et l'analyse du discours politique.