Informations générales
Événement : 80e Congrès de l’Acfas
Type : Colloque
Section : Section 300 - Lettres, arts et sciences humaines
Description :Depuis plusieurs années, les nouvelles technologies diversifient l’accès aux arts et à la culture. Elles peuvent avoir un effet cumulatif sur l’offre culturelle et favoriser la consommation des groupes déjà fortement dotés en capital culturel. Elles peuvent aussi contribuer à la spécialisation des publics. À cela s’ajoute l’effet de la composition démographique des sociétés occidentales qui comptent désormais des groupes issus de différentes communautés ethnoculturelles et linguistiques. On assiste, en effet, à la multiplication des réseaux dans lesquels des communautés de goûts réunies autour de certains produits culturels valident leurs choix et légitiment leurs pratiques culturelles. Comment interpréter le rôle traditionnel des pairs dans la transmission des goûts pour la culture dans ce contexte ? Les nouvelles technologies génèrent-elles systématiquement de nouveaux publics ? Comment les processus de médiation culturelle s’en trouvent affectés ? Ces questions invitent également à repenser à la proximité de l’artiste et de son public, au poids des industries culturelles et de la création indépendante dans cette nouvelle donne, aux objectifs de démocratisation et de démocraties culturelles des administrations publiques, mais aussi aux liens entre des référents culturels transmis par ces nouvelles pratiques et leur impact sur l’identité collective dans un espace sociopolitique donné. Ce colloque propose donc d’examiner les transformations des pratiques culturelles liées aux technologies numériques et leurs conséquences sur les différents acteurs des arts et de la culture.
Dates :- Anne Robineau (ICRML - Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiques)
- Christian Poirier (INRS - Institut national de la recherche scientifique)
Programme
Introduction
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Mot de bienvenue
Les industries culturelles : continuités et mutations
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La fin de la télévision ? Une étude de la consommation des publics de la télévision de rattrapageJean-Samuel BEUSCART (Orange Labs), Thomas Beauvisage (Orange Labs)
Les outils numériques ont multiplié les possibilités, pour le téléspectateur, de consommer les programmes télévisés à la demande, « où il veut, quand il veut ». Pour certains analystes, cette évolution marque « la fin de la télévision » comme pratique culturelle, conçue comme le fait pour une audience dispersée de regarder le même programme au même moment. Pour autant, la possibilité technique de consommer des programmes très variés à tout moment ne détermine pas la forme de la consommation.
Nous avons constitué, à partir d'outils informatiques ad-hoc, une base de données des audiences journalières de l'ensemble des programmes proposés à la consommation de rattrapage sur le Web par les chaînes de télévision françaises. Nous observons que, contrairement à ce que suppose la théorie de la « longue traîne », les audiences sont plus concentrées sur le web que sur le flux télévisé : la consommation à la demande est moins diversifiée que celle de la télévision classique. La consommation des contenus télévisés intervient dans les jours qui suivent immédiatement leur diffusion par la chaîne : les consommateurs de programmes à la demande restent donc attachés à la temporalité collective fixée par les chaînes. Ces deux observations conduisent à affirmer que la consommation à la demande n'annule pas la capacité de la télévision à réunir des audiences pour partager des contenus. Nous nuançons pour finir ces constats en fonction des différents types de contenus.
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La consommation de livres électroniques : de nouveaux lecteurs ou des lecteurs délaissant l'imprimé?Stéphane Labbé (UQTR - Université du Québec à Trois-Rivières)
L'émergence de l'édition numérique bouscule l'ensemble des acteurs de l'industrie québécoise du livre tout comme elle affecte chacune de leurs fonctions. La nature dématérialisée du livre numérique, ses prix publics plus bas que les éditions imprimées, sa production simple et accessible à la majorité tout comme sa vocation virtuelle qui n'a de frontière que celle de la langue, sont autant d'éléments affectant l'écosystème traditionnel du livre.
Dans un tel contexte, les taux de croissance des ventes de livres électroniques peuvent en faire jubiler quelques-uns et en affoler d'autres, la réaction étant déterminée selon que l'on pense que cette croissance provient du développement d'une nouvelle clientèle qui s'ajoute à celle des éditions imprimées ou, à l'inverse, que cette fulgurante progression des ventes n'est en fait qu'un simple déplacement des lecteurs vers ce nouveau format.
Le marché du livre électronique est récent et il évolue rapidement. Il importe de faire le point à ce sujet, de mieux comprendre le marché du livre électronique ainsi que la nouvelle réalité des acteurs qui sont au cœur de celui-ci, de mieux saisir les tendances, les pistes qui pourraient guider la recherche.
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Les métadonnées musicales : un enjeu de diversité culturelleJean-Robert Bisaillon (INRS - UCS - Institut national de la recherche scientifique - Urbanisation Culture Société)
La présente communication a pour objet de livrer diverses observations techniques initiales illustrant le fort déterminisme technique à l'oeuvre lors de la constitution de bases de métadonnées musicales. Nous questionnerons les effets d'un tel déterminisme sur la diversité culturelle et les processus tant sociaux que politiques à l'oeuvre pouvant avoir une influence sur les biais induits par la technologie. Au Québec, nous sommes au lendemain de l'adoption d'un agenda 21 de la culture et à la veille de l'adoption d'une politique culturelle numérique. Comment résoudrons-nous l'enjeu de la numérisation de notre patrimoine et de la constitution des métadonnées associées? Userons-nous de mesures techniques, nous engagerons-nous au sein des arènes politiques supra-nationales? La société civile tranchera-t-elle cette question en adoptant une peuplonomie qui établira les règles? En sera-t-elle consciente ou non? Quel est le rôle que doit jouer le gouvernement dans cette arène? La société civile et les groupes culturels minoritaires ont un rôle à assumer en matière de gouvernance et de vigilance lors de la constitution de métadonnées culturelles. Les gouvernements nationaux sont responsables d'établir des politiques de numérisation conséquentes en regard des enjeux ici évoqués.
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Période de questions
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Internet et industrie de l'humour : une redéfinition de la création, de l'industrie et du contact avec le publicChristelle Paré (INRS - Institut national de la recherche scientifique)
Le parcours traditionnel du domaine de l'humour se résume souvent, chez ses acteurs, par un long détour dans les bars, les petites salles, la pauvreté et l'espoir qu'un jour, peut-être, un producteur les prendra « au sérieux ». L'utilisation d'Internet, depuis quelques années, change la donne. Si, à leurs débuts, les blogues et les sites d'échanges vidéo, tels YouTube, étaient surtout réservés à la pratique amateure, ces lieux virtuels sont devenus les nouvelles scènes et les nouveaux tremplins, mais aussi un moyen de rapprochement entre l'artiste et son public. Par exemple, il est maintenant impossible d'obtenir audience à Juste pour rire sans un vidéo sur Internet témoignant de son talent. En revanche, les artistes de la comédie se distancent de plus en plus de la structure de l'industrie de l'humour et prennent en mains leur propre destinée par le biais d'Internet, rompant les ponts avec les agents, les promoteurs et, parfois, les producteurs et distributeurs, se sentant, par le fait même, davantage « connectés » avec leurs fans. À l'heure où le monde de l'industrie de l'humour expérimente les nouvelles avenues du numérique, je propose de vous présenter différents témoignages et initiatives provenant des milieux américains, canadiens et québécois, analysés dans l'optique de la traditionnelle chaîne d'acteurs des industries culturelles (Ryan, 1992; Hesmondhalgh, 2007), ainsi qu'une réflexion basée sur les différents contextes de marchés de l'humour contemporain.
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Les industries culturelles sénégalaises à l'épreuve du numériqueHadj Bangali Cisse (Université de Lyon)
Les technologies de l'information et de la communication (TIC) ont profondément changé les habitudes de consommations médiatiques sénégalaises et contribuent à l'émergence des nouvelles communautés. Les médias ont saisi l'opportunité du web, pour diversifier leurs activités mais surtout aller à la conquête d'un public gagné par la mondialisation de l'information. Il en résulte des transformations au niveau des pratiques culturelles qui participent à l'émergence d'une nouvelle société où le numérique occupe une place prépondérante. Les médias s'alignent sur le Net pour la bataille des contenus, l'État s'active à définir les objectifs et les grandes orientations de la nouvelle société sénégalaise de l'information, tandis que les citoyens s'inventent de nouvelles formes d'appropriation de l'information. Les Sénégalais entendent saisir cette occasion pour participer au débat national et aller à la conquête de nouvelles cultures.
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Période de questions
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Dîner
Pratiques et participation culturelles : saisir les transformations
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Utilisation des technologies et de l'Internet dans les pratiques culturelles au QuébecAlexandra Roy (MCCCF - Ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminine)
Parmi l'ensemble des pratiques artistiques et culturelles en amateur, soulignons l'augmentation de la photographie entre 1989 et 2009, la plus élevée parmi l'ensemble des disciplines. Elle concernait 41,4 % de la population en 1989, alors qu'elle touche 54,7 % des gens en 2009. D'autres pratiques feront l'objet de la présentation dont celles de la lecture, de l'écoute de la musique et de la télévision en ligne.
Au programme, portrait général de la situation des technologies de l'information et des communications au Québec en relation avec le domaine de la culture (données de l'Observatoire des technologies médias). Suivi d'une présentation de statistiques provenant de l'Enquête sur les pratiques culturelles au Québec, menée par le MCCCF.
Ces données ouvrent la réflexion sur les différents modes de participation à l'art et à la culture dans un contexte de mouvance. Les technologies et l'Internet sont eu cœur même de ce contexte et offrent de nouvelles possibilités pour la pratique en amateur, particulièrement pour la création et la diffusion. Ces nouvelles possibilités permettent une prise en charge de son propre temps libre et ont probablement une influence dans la tendance vers la pratique libre par rapport au loisir organisé : 81,9 % de la population qui déclare pratiquer une activité artistique en amateur contre 11,1 % de la population qui déclare suivre un cours ou atelier d'art.
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Le temps des découvertesSylvain Martet (UQAM - Université du Québec à Montréal)
À partir d'un matériel recueilli à l'aide d'entretiens réalisés avec des adolescents québécois et français en 2009, cette communication s'emploiera à identifier les mécanismes de transmission de goûts et passions à l'intérieur des groupes de sociabilité juvéniles. L'étude des goûts adolescents, plus qu'un thermomètre des modes actuelles, est une véritable opportunité de compréhension de l'attachement des individus pour des objets culturels particuliers. Comment découvre-t-on ce que l'on aime et pourquoi, dans un temps où potentiellement tout peut être écouté, lu et/ou vu, nous attachons-nous à certaines productions culturelles ? Quels rôles jouent, dans ce processus de découverte culturelle les technologies de communication et de partage ? Quelle définition de la culture peut se dégager d'une telle mise en dynamique ? Nous nous pencherons sur quatre points éclairant l'origine et la fonction des goûts : la paternité de la découverte comme affirmation de sa singularité dans le groupe; les technologies de partage au centre du processus de découverte culturelle; l'influence de la famille sur le processus de découverte entre pairs; et la égitimation et disqualification, la distinction au niveau microsocial.
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La participation culturelle des jeunes à Montréal : questionner la jeunesse et le numériqueChristian Poirier (INRS - Institut national de la recherche scientifique)
L'objectif principal de cette communication est de présenter et discuter les principaux résultats d'une recherche inédite portant sur la participation culturelle des jeunes à Montréal, et ce en se concentrant spécifiquement sur la question du numérique. Effectuée en partenariat avec Culture Montréal et le ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminine du Québec, la recherche a pour objectifs de mieux saisir et comprendre la diversité des pratiques culturelles des jeunes (12 à 34 ans), les contextes dans lesquels ces activités sont réalisées, les raisons et motivations qui les inspirent, les individus et lieux associés à la transmission culturelle ainsi que les impacts sur les personnes et les communautés. S'intéressant à l'ensemble de la chaîne de valeur culturelle (création, production, diffusion, consommation/partage) et aux bouleversements que le numérique induit dans celle-ci ainsi que dans les frontières entre les différents secteurs culturels, cette recherche de nature essentiellement qualitative entend mieux comprendre la complexité des dynamiques en jeu.
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Reconfiguration des pratiques culturelles et éclectisme de genre à l'ère des TICHélène Bourdeloie (Université Paris-Nord (Paris 13))
A partir d'enquêtes de terrain sur les usages des technologies de l'information et de la communication (TIC) et les pratiques culturelles, de loisirs et d'écriture numérique, nous nous intéressons ici à la façon dont les TIC favorisent l'éclectisme au sein des sphères culturelles individuelles, éclectisme s'exerçant différemment selon le genre (homme/femme). Force est d'admettre qu'en désenclavant la culture légitime, les TIC ont contribué à modifier les rapports à la hiérarchie culturelle et favorisé l'éclectisme dans les pratiques culturelles. Toutefois, au regard de la division sexuée des goûts et des pratiques culturelles et numériques, l'éclectisme revêt une forme différente selon le genre. Il faut d'ailleurs reconnaître que le désenclavement de la culture légitime n'est pas neutre sur ce plan. De plus, en concurrençant la culture légitime et en brouillant les hiérarchies traditionnelles, les TIC laissent place à une pluralité d'expressions culturelles qui contribuent à interroger la sexuation des pratiques. Il s'agit ici de montrer qu'en favorisant l'émergence de nouvelles expressions et légitimités culturelles, les TIC impliquent une transformation du rapport genré aux pratiques culturelles traditionnelles et à l'éclectisme.
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Période de questions
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Pause
Les arts visuels et médiatiques au prisme de l'espace public
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Les mondes parallèles (1969) de Maurice Demers : intégration des nouvelles technologies et apparition d'un nouveau publicAnithe De Carvalho (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Les mondes parallèles, l'environnement cinétique participatif et d'animation culturelle de Maurice Demers présenté à Terre des Hommes, a transformé la pratique artistique tout en annonçant le modèle de la démocratie culturelle; un nouveau public fut invité à contrôler les nouveaux médias au sein d'un art innovateur afin de mettre les nouvelles technologies au service d'un bien-être. Nous démontrerons cette hypothèse en établissant un parallèle entre les caractéristiques de la démocratie culturelle énoncées par Lise Santerre et le discours esthétique néo-avant-gardiste de Demers au regard de la notion de nouveau public de l'art, car tous les deux veulent l'atteindre et favoriser la production d'une culture populaire répondant aux nécessités des participant-e-s. Nous verrons, avec Les mondes parallèles, les enjeux des nouvelles technologies d'alors dans le champ des arts visuels, comme la vidéo par exemple, et les conséquences sur le développement d'un nouveau public. L'œuvre comporte désormais une nouvelle fonction sociale, soit l'intégration de l'individu dans la communauté du Village global. L'artiste joue un nouveau rôle, celui d'animateur. Le public est un participant essentiel à l'œuvre, car lui seul est responsable de son devenir : l'Homme nouveau.
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Seul dans la ville ? L'expérience de l'œuvre interactive en contexte urbainMariève K. Desjardins (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Un nombre grandissant d'artistes s'approprient aujourd'hui les nouvelles technologies comme médium de création et recourent aux principes de l'interactivité pour proposer des modes de relations à l'œuvre novateurs. L'art interactif, qui exige des individus qu'ils s'engagent activement dans le déploiement de l'œuvre pour que celle-ci puisse prendre tout son sens, se caractérise en outre par le fait qu'il privilégie une expérience de l'œuvre plutôt que d'en proposer une finalité. Une tendance s'est de surcroît développée à l'effet que ces œuvres, souvent présentées hors des musées, soient implantées dans le mobilier urbain, devenant ainsi dispositifs de médiation entre le spectateur et la ville. Dans ce cadre, c'est-à-dire le lieu public urbain, quel sens prend la participation de spectateurs dans le déploiement d'œuvres qui, de prime abord, ont la particularité de procurer des expériences individuelles et subjectives, parfois même solitaires? Alors que diverses industries (touristique, culturelles, etc.) ont recours à ce type d'œuvres à des fins de dynamisation et de revitalisation de la ville, peut-on toujours le considérer comme de l'art s'adressant surtout aux initiés ou s'agit-il désormais d'une culture de masse, destinée aux flux de passants curieux? Cette communication vise à répondre à ces questions et à cerner ainsi le statut du récepteur des œuvres interactives présentées en contexte urbain.
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Art pour tous, art sans art ? Internet et pratiques photographiques d'amateursSuzanne Paquet (UdeM - Université de Montréal)
Dans l'Internet et ses réseaux sociaux, des manières inédites de s'approprier les lieux et les choses – paysages, architectures, objets en tous genres – apparaissent, résultant d'une abondante production d'images et de la facilité à les faire voir et circuler. C'est ainsi que la photographie, que l'on croyait vouée à une mort certaine avec l'arrivée de l'image numérique, devient au contraire l'objet par excellence de création de communautés autour d'enjeux esthétiques ou patrimoniaux : elle se pose véritablement comme cet art pour tous qu'Arago décrivait dès 1839. Des collectifs de plus en plus nombreux, par exemple des groupes Flickr, se rassemblent autour d'images photographiques. Ces groupes tendent ainsi à constituer des répertoires gigantesques et désordonnés, créant des collections souvent porteuses de mémoire ou d'identité, largement disponibles, consultées et discutées, au même titre que celles des institutions. Avec ces pratiques d'amateurs – ou un art que l'on pourrait qualifier de populaire car une qualité artistique des images est revendiquée – le brouillage entre art d'élite et « goût vulgaire » semble s'accentuer, en même temps que la circulation des images et la confusion quant aux principes régissant leur reproduction.
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Période de questions
Explorer de nouveaux territoires
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La longue marche vers une appropriation cognitive du Web. Le cas de la bande dessinéeFrançoise Benhamou (Université Paris-Nord (Paris 13)), Nathalie MOUREAU (Université Paul-Valéry Montpellier 3), Stéphanie Peltier (UA - Université d'Angers)
Si une abondante littérature a été développée sur les spécificitésde l'information sur le web, peu de travaux ont traité de l'importance relative de l'acquisition d'information web et hors web et sur le rôle que joue l'expérience des individus tant vis-à-vis des biens convoités que des nouvelles technologies. L'objet de cette communication est d'étudier dans quelle mesure le numérique constitue un nouveau modèle de prescription à destination des lecteurs de bande dessinée. Nous montrerons, à partir, d'une enquête réalisée auprès d'un public d'étudiants, que dans l'ensemble les comportements sur le web se développent au plus près de la quête d'information dans le monde physique, avec des différences selon l'expérience des individus. Si les individus utilisent largement Internet dans leurs pratiques quotidiennes, les usages qu'ils en font varient selon leurs habitudes de consommation passées en vertu d'un effet d'apprentissage. Nous notons le cas spécifique du web 2.0 qui n'est pas parvenu à supplanter son homologue, le traditionnel bouche à oreille. S 'il offre de nouvelles opportunités de traitement de l'information (communication stockable et classable), celle-ci ne réussit pas à supplanter la perte de confiance induite du fait de la disparition de la rencontre physique des acteurs.
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Le « pirate » du Web comme agent transmetteur de la culture québécoiseMartin Tétu (UQAM - Université du Québec à Montréal)
L'expression «piratage» associée à Internet réfère spontanément aux pratiques de partage non autorisé et de téléchargement illégal de produits culturels. L'internaute, figure contemporaine du pirate, détourne non plus des bateaux mais contourne le copyright d'œuvres protégées et ce, à grande échelle. Le tiers du flux mondial d'Internet serait composé de tels échanges.
Cette conception du piratage numérique, axée sur l'illégalité des pratiques, mérite d'être interrogée à la lumière d'études récentes. Une première recherche au Québec observe concrètement ces pirates culturels (Tétu, 2010). Il appert que le piratage serait régulièrement utilisé – à la surprise des chercheurs de cette étude – pour transmettre des œuvres du patrimoine québécois autrement non disponibles. Au plan individuel, le pirate agirait donc comme agent transmetteur de sa propre culture. Au plan collectif, il contribuerait à sa façon à la constitution d'un corpus d'œuvres nationales numériques disponibles et à la circulation globale de celles-ci. Une nouvelle perspective émerge de ces pratiques numériques apparaissant comme un phénomène résolument multidimensionnel (Tétu et Bellavance, 2009). La communication proposée ici esquisse les bases de ce nouveau modèle de transmission de la culture, dans lequel un acteur hors institutions (le pirate) trouve un nouveau public en ligne et adopte une posture de diffuseur culturel traditionnellement réservée aux institutions publiques et aux médias de masse.
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L'extensibilité et la proportion dans le design de logiciel artistique : une production interdisciplinaireFrédérik Lesage (SFU - Simon Fraser University)
L'objectif de cette communication est d'élaborer un cadre conceptuel pour l'analyse du design de logiciel dans le contexte de disciplines artistiques numériques. Au lieu d'explorer comment les artistes utilisent des logiciels pour créer ou distribuer leurs œuvres, cette réflexion porte plutôt sur les projets artistiques collaboratifs où le design de logiciel constitue une composante essentielle des œuvres. Certaines investigations dans ce domaine misent sur une interprétation instrumentaliste du processus d'échange de connaissances entre artistes, experts en informatique, et leurs publics (Biswas 2008). Alternativement, nous pouvons interpréter ces échanges en tant que « productions interdisciplinaires » (Barry, Born, Weszkalnys 2008) où des logiques hétérogènes mais interdépendantes sont mobilisées dans le processus de design afin d'effectuer une « transformation ontologique des objets et de leurs rapports ». Afin de démontrer comment appliquer ce cadre conceptuel, cette communication se concentre sur « l'extensibilité » (« scalability ») en tant que logique dominante pour la discipline du design de logiciels sur le Web et sur la façon dont cette logique marche à l'encontre de la logique ontologique de pratiques artistiques contemporaines.
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Période de questions
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Cyber gastronomie ? Discours et pratiques de restaurateurs et d'épiciers montréalais sur la toileAlexandre Maltais (INRS - UCS - Institut national de la recherche scientifique - Urbanisation Culture Société)
L'art culinaire s'est considérablement transformé au cours des dernières décennies, profitant de la croissance des classes moyennes scolarisées et d'un éclectisme culturel grandissant chez les élites traditionnelles. L'engouement pour la gastronomie s'est par ailleurs répandu dans des régions jusque-là peu reconnues pour la qualité de leur cuisine. C'est notamment le cas de Montréal, où depuis les années 1990 les « bonnes tables », « épiceries fines » et autres détaillants de produits alimentaires haut-de-gamme ont connu une croissance importante.
Dans cette communication, nous proposons d'interroger le rôle d'internet dans le développement de cette nouvelle gastronomie montréalaise. À partir d'une analyse de contenu des comptes Facebook et Twitter de restaurants et de détaillants de produits alimentaires montréalais reconnus comme « fins » ou « haut de gamme », nous verrons comment les deux principaux sites de réseautage social virtuel permettent la formation et le maintien de liens avec 1) d'autres « créateurs culinaires » de Montréal et d'ailleurs, 2) avec une clientèle de gourmets (« foodies ») de plus en plus nombreuse et 3) avec les instances de validation incontournables que constituent désormais les critiques gastronomiques. Nous montrerons que ce faisant, ils favorisent la formation de communautés affinitaires et contribuent à la croissance et à la consolidation de la nouvelle gastronomie montréalaise.
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Immigration maghrébine au Québec : impacts du déploiement de services en ligne, de 2003 à nos joursSophie-Hélène Goulet (UL - Université de Lorraine)
Les différents gouvernements québécois, essentiellement à la fin des années 1960, ont mis en place une succession de politiques linguistiques, mais aussi des politiques d'immigration afin d'affermir symboliquement et objectivement le caractère français au Québec. Les deux principaux pays de naissance de la population immigrante au troisième trimestre de l'année 2010 étaient le Maroc (11.7 %) et l'Algérie (9.5 %). Depuis 2003, le Ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles a mis en place, des systèmes innovants, visant à déployer plus rapidement l'information et rendre celle-ci accessible à l'ensemble de ces citoyens et futurs citoyens via l'autoroute de l'information, l'Internet. De ce fait, les technologies de l'information ont donc été intégrées à l'intérieur des procédures mêmes d'immigration permanente dans la catégorie dite des travailleurs qualifiés. Nous tenterons donc d'analyser l'impact engendré par l'accessibilité de l'information, de même que les services offerts par ce gouvernement en ligne via la population immigrante d'origine maghrébine au Québec et surtout, les candidats à l'immigration potentiels en provenance de l'Afrique du Nord. L'interculturel est un changement de perspective et non forcément une réponse clé à toute forme de communication. Néanmoins le discours interculturel associé à un meilleur accès à l'information est forcément susceptible de favoriser la production de nouvelles idées communicationnelles et technologiques.
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Pratiques culturelles et enjeux linguistiques : les francophones hors Québec face au numériqueAnne Robineau (ICRML - Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiques)
Cette communication a pour objectif de montrer les principaux obstacles qui nuisent à l'accès et à la consommation de produits culturels en français via le numérique pour près d'un million de francophones vivant hors Québec. Une récente étude du Commissariat aux langues officielles (2009) révélait une baisse de la production et de la diffusion de contenus culturels canadiens en français, notamment à la télévision, au profit de contenus importés et traduits dans lesquels les francophones ne se reconnaissent pas toujours.
Confrontées à un problème d'assimilation, certaines communautés francophones en situation minoritaire constituent moins de 4% de la population de leur province (Statistique Canada, 2006). Le phénomène d'exogamie, c'est-à-dire où l'un des conjoints appartient au groupe anglophone, accentue le transfert linguistique vers l'anglais, ce qui se répercute ensuite sur la consommation de produits culturels et une préférence marquée pour ceux en langue anglaise. Après avoir présenté des statistiques sur la consommation culturelle et l'utilisation d'Internet chez les jeunes francophones en fonction de la langue d'usage dans leurs pratiques culturelles, nous nous interrogerons sur la capacité de la francophonie hors Québec de faire face aux défis du numérique.
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Dîner
Des alliances inédites : musées, patrimoine et numérique
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Entre pluralisme et nouvelles normes : les réseaux interdisciplinaires et la transformation des principes de préservation du patrimoine artistique à l'ère du numériqueJanet Marontate (SFU - Simon Fraser University)
Ce texte présente un examen d'une sélection d'initiatives internationales consacrées au développement des nouvelles stratégies de conservation-restauration de l'art récent, en misant sur les débats autour des défis posés par les œuvres numériques. Notre analyse porte spécifiquement sur les enjeux d'ordre pratique et déontologique ainsi que sur les défis socioprofessionnels exprimés par des participants (lors des entretiens et l'observation des réunions des groupes de travail (lors des réunions de membres de ces réseaux au Canada, aux É-U., et en Europe). Les nouvelles stratégies de préservation du ‘patrimoine numérique' impliquent des acteurs avec des préoccupations diverses (scientifiques et experts techniques, artistes, historiens d'art, archivistes, etc…). Les nouvelles pratiques de création artistique, d'archivage et de diffusion par la voie des technologies numériques soulèvent des questions fondamentales à propos des mandats des musées et des normes déontologiques des professions muséales. Cependant les ‘grand discours' présentés dans les rapports émis par ces initiatives ont tendance à mettre l'accent sur le consensus et masquent parfois les inquiétudes et les incertitudes inattendues exprimées par les participants.
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Un hacker dans les collections : « museo geeks », « hackathons » et données ouvertesNathalie Casemajor Loustau (UQO - Université du Québec en Outaouais)
Bricolage créatif fondé sur une logique d'appropriation informelle, le « hacking » est une pratique née dans le milieu de l'informatique, et qui sert aujourd'hui à qualifier différents arts de faire (de Certeau) de l'ordre de la tactique alternative, en marge des cadres institutionnels établis. Les « hackathons » exploitant des données culturelles, tel que celui organisé par la bibliothèque numérique européenne Europeana lors des journéesHack4Europe en juin 2011, sont le lieu d'une rencontre entre la culture populaire (ou subculture) du « hacking » et le monde des musées, bibliothèques et archives. Mais comment ces logiques d'usages inspirées des valeurs du « libre », cultivant une certaine méfiance vis-à-vis de l'autorité et des hiérarchies sociales établies, peuvent-elles coexister avec les mécanismes de contrôle qui régulent le fonctionnement des institutions patrimoniales ? Il s'agira dans cette communication de décrire comment se façonnent les modes d'encadrement de ces pratiques d'appropriation et de remédiation numérique (Bolter et Grusin).
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Période de questions
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Mot de clôture