Élise Smith
Dans plusieurs domaines, les auteurs d’une publication scientifique apparaissent en ordre décroissant, selon l’importance de leurs contributions. Cela ne permet pas cependant d’évaluer la contribution réelle des signataires, et si de plus, ces derniers proviennent de différentes cultures de recherche... Existerait-il de meilleurs moyens de s’y reconnaître? Ce type de problématique est tout à fait dans les cordes de la lauréate, une spécialiste en « éthique de la publication ».
Élise Smith a intitulé sa thèse de doctorat : La responsabilité des auteurs dans les collaborations multidisciplinaires : étude exploratoire des méthodes de distribution de la reconnaissance dans les publications universitaires. Le sujet de sa recherche est évoqué ici tant par l’emploi de quelques expressions particulièrement saillantes – « distribution de la reconnaissance », « responsabilité des auteurs », « collaborations multidisciplinaires » — que par les thèmes qui naissent spontanément de leur entrechoquement : mérite, injustice ou plagiat.
La doctorante projette donc, au cours des prochaines années, de concevoir un modèle qui limitera les injustices liées à la distribution du droit d’auteur. Cet outil n’aura pas la forme d’un cadre rigide, comme une liste de contrôle, mais plutôt celle d’une suite de processus adaptatifs et de lignes directrices.
L’étudiante compte amorcer son travail par une revue de la littérature relative à l’éthique de la publication, de même qu’à l’éthique du droit d’auteur. De là émergeront les renseignements de base nécessaires à la création d’un questionnaire. Puis ce questionnaire sera à l’origine d’un sondage en ligne à l’échelle internationale auprès d’auteurs faisant partie d’équipes de recherche multidisciplinaire (issues des sciences de la santé, des sciences sociales et des sciences humaines et naturelles).
Ce qu’Élise Smith souhaite dégager de cette enquête, c’est par exemple la fréquence des conflits relatifs à la reconnaissance effective de chacun des chercheurs ayant contribué au travail et à la publication; c’est aussi la mesure de la part consentie, par les scientifiques, à l’utilisation et à l’acceptation des politiques concernant le droit d’auteur; c’est enfin la mise en lumière des opinions de ces mêmes chercheurs quant aux pratiques du droit d’auteur qu’ils ou elles jugent acceptables et équitables.
En bout de piste, un modèle éthique sera élaboré afin de fournir un outil pratique aux auteurs. Enfin, pour valider son modèle, la doctorante le soumettra à une évaluation critique auprès de diverses organisations scientifiques internationales (comme l’Association américaine pour l’avancement des sciences, de même que des organismes d’encadrement de l’intégrité de la recherche (comme Santé Canada ou encore l’Office of Integrity in Research (ORI).
On estime que les cinq articles, dont Élise Smith est co-auteure, et qui sont déjà parus dans des revues avec évaluation par des pairs, témoignent de sa capacité à passer de la cueillette des données de terrain à leur analyse et à la rédaction d’articles. Fait intéressant : cette recherche qui, tout en utilisant des méthodes provenant des sciences sociales, combine à la fois une analyse philosophique et une approche d’éthique empirique, a tout du caractère multidisciplinaire, celui-là même qui vient poser problème lorsqu’il s’agit de reconnaître chaque signataire d’un article… à son mérite!