Informations générales
Événement : 89e Congrès de l'Acfas
Type : Colloque
Section : Enjeux de la recherche
Description :Les processus de médiatisation de la science se sont transformés en accéléré avec l’avènement de la pandémie de COVID-19. L’image de la science dans les médias de masse s’est considérablement modifiée. Le métier de journaliste s’est également transformé, les journalistes généralistes devant solliciter au quotidien des notions scientifiques et développer des compétences qui étaient autrefois l’apanage des journalistes spécialisés. Des scientifiques – immunologistes, virologistes ou spécialistes de la santé publique – auparavant inconnus du grand public sont devenus des stars médiatiques. Enfin, le grand public a également pris part au débat, en remettant parfois en question l’autorité journalistique ou scientifique. Comment et dans quelle mesure la pandémie a-t-elle contribué à l’évolution du discours scientifique dans les médias et, plus largement, dans l’espace public? C’est la question que ce colloque propose de poser, en faisant interagir des scientifiques de multiples disciplines et des praticiens de la communication scientifique autour des axes suivants :
- La prise de parole du scientifique dans l’espace public.
- Le métier de journaliste à l’ère de la pandémie : de généraliste à spécialiste en devenir.
- L’éclipse médiatique d’enjeux scientifiques non pandémiques.
- Le rôle du public dans le discours médiatique sur la pandémie, la lutte à la désinformation et la remise en question de l’autorité scientifique.
- Quelle place réservée aux sciences sociales dans l’ordre du jour médiatique autour de la pandémie? Les intellectuels québécois ont-ils joué leur rôle de contre-pouvoir des autorités politiques?
L’INRS tient à remercier les femmes et les hommes de sciences qui ont participé au colloque ou qui, comme les membres du Service des communications et des affaires publiques de l’établissement de recherche et de formation, en ont soutenu l’organisation. Des remerciements particuliers à toutes les personnes qui ont animé l’une de nos séances et à nos partenaires scientifiques.
Date :- Luc-Alain Giraldeau (INRS - Institut national de la recherche scientifique)
- Geneviève Chacon (INRS - Institut national de la recherche scientifique)
- Julie Robert (INRS - Institut national de la recherche scientifique)
- Audrey-Maude Vézina (INRS - Institut national de la recherche scientifique)
- Sophie Laberge (INRS - Institut national de la recherche scientifique)
Programme
Session 1 : Le rôle de la recherche dans le débat public
Session 2 : La prise de parole des scientifiques et la lutte à la désinformation
Session 3 : Urgence, science et politiques publiques
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Communication orale
Experts et politique : conséquences de la cohabitationFrédéric Bouchard (UdeM - Université de Montréal)
En se fiant à diverses études nord-américaines, on constate que les experts scientifiques ont depuis plusieurs décennies une crédibilité du grand public plus grande que d’autres groupes qui eux ont vu leur crédibilité diminuer au cours de la même période. Il n’est donc pas surprenant que l’expertise scientifique ait été mobilisée d’une manière inégalée au cours de la pandémie. Toutefois, cette mobilisation se fit dans un contexte inédit soit une association soutenue à la prise de décision politique. Nous pouvons déjà émettre certaines hypothèses sur l’effet de cette mobilisation sur la crédibilité des experts. Nous discuterons de différentes théories de philosophie des sciences sur l’expertise, comment l’expertise est reçue différemment selon l’objet considéré, et comment la cohabitation avec les politiciens pourrait avoir des effets négatifs dans la durée sur la crédibilité des experts. Nous discuterons aussi de remédiations possibles : soutenir des institutions scientifiques fortes et autonomes, favoriser l’avis scientifique indépendant, mais aussi rappeler que les décisions gouvernementales sont prises par des élus et non des scientifiques et essayer de minimiser l’ambiguïté à cet égard.
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Communication orale
Grandeurs et misères des sciences en temps de criseMarc A. Bodet (Université Laval)
La pandémie mondiale de la COVID-19 a mis en lumière des dynamiques qui avaient déjà commencé à labourer les sciences naturelles et sociales depuis plus de vingt ans.
Parmi les phénomènes qui ont pu être observés, on notera premièrement une politisation des enjeux en santé publique qui a mené à une polarisation dichotomisante des positions. Chaque cas empirique et chaque intervention se voyant ainsi imposer un rôle et une couleur qui dépasse largement leurs natures propres. Deuxièmement, on a assisté à une sacralisation de la Science (avec un S majuscule) au détriment des savoirs et des discours que la démarche scientifique se doit de produire. On a ainsi oublié que la Science est avant tout une méthode qui invite à la critique et à la remise en question, et non un discours d’autorité avec ses dogmes et ses évangiles. Finalement, il y a eu transformation de l’usage qu’on fait de la recherche scientifique lors de la prise de décisions au profit d’une paramétrisation du débat public autour d’outils mal compris et mal utilisés. Les acteurs qui contrôlent la construction des modèles d’aide à la décision sont ainsi devenus tout puissants.
Au cours de cette intervention, je ferai l’argument que la communauté scientifique en sciences sociales et juridiques a été largement paralysé par ces phénomènes, ce qui a empêché les chercheuses et chercheurs de jouer leur rôle essentiel de contre-pouvoir.