Informations générales
Événement : 86e Congrès de l'Acfas
Type : Colloque
Section : Section 600 - Colloques multisectoriels
Description :La mort ou la disparition des animaux soulève aujourd’hui des enjeux éthiques, juridiques, politiques, sanitaires, affectifs et économiques cruciaux. Conditions d’abattage des animaux d’élevage, dénonciation de la surpêche, introduction de la notion de sensibilité animale dans les textes juridiques, émotion suscitée par le « meurtre » d’un rhinocéros du zoo de Beauval en France afin de dérober sa corne… il ne se passe pas un jour sans que s’impose dans le débat public et les médias l’idée que nous serions confrontés à un véritable « problème animal ». L’une des raisons des sensibilités actuelles à la condition animale est certainement le caractère inédit et parfois irréversible des pressions que les sociétés contemporaines, industrialisées, urbanisées, globalisées et technicisées font peser sur le vivant. Ce colloque entend explorer la multiplicité et les transformations des morts animales dans les sociétés d’aujourd’hui. En partant de diverses catégories d’animaux (de rente, de ferme, d’assistance, de compagnie, de spectacle, d’expérimentation, de refuge, de zoo, sauvages, « nuisibles » ou « indésirables », etc.), il s’agira d’examiner la confrontation avec différents types et contextes de mort des animaux.
Ce colloque, qui réunira chercheurs et étudiants, a pour objectif de présenter les formes de la mort animale telles qu’envisagées et pratiquées dans divers contextes culturels, selon des imaginaires et traditions (religion et ritualité, pratiques économiques et écologiques, etc.) variés, parmi lesquels figurent la chasse ou le sacrifice (De Heusch, 1986; Cartry, 1987; Bonte et al., 1999; Givre, 2015). Il sera l’occasion d’aborder les diverses modalités de la « fin des bêtes » (Rémy, 2009) que sont l’euthanasie, l’abattage, l’expérimentation, l’élimination sanitaire, etc., ou encore l’ensemble des contextes sociaux (et historiques) des morts animales (guerres, combats, jeux, etc.), ainsi que les représentations, usages et conflits dont elles font fréquemment l’objet.
Remerciements :Nous souhaitons adresser nos remerciements les plus sincères au Centre de recherches Cultures – Arts – Sociétés (CELAT), à la revue Frontières, à l'Université Lumière-Lyon2, à l’unité mixte de recherche Environnement, Ville, Société (EVS, CNRS 5600), à l’École de dessin Émile Cohl et au Service des communications de l’Université du Québec à Montréal, qui ont tous rendu cet événement possible.
Date :Programme
Les environnements des morts animales : modalités relationnelles et interactionnelles
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Communication orale
Introduction "Morts animales en perspectives"Mouloud Boukala (UQAM - Université du Québec à Montréal), Olivier Givre (Université Lumière Lyon 2)
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Communication orale
Du troupeau au gibier : faire coexister différentes moralités autour de la mise à mort d'animaux domestiques et sauvages en MongolieBernard Charlier (Fond national de la recherche scientifique-Université catholique de Louvain-la-Neuve (Belgique))
Ma communication propose d’analyser différentes attitudes et discours moraux a priori contradictoires actualisés autour de la mise à mort d’animaux domestiques et sauvages parmi des éleveurs nomades de Mongolie. La mise à mort d’un animal domestique (mouton, chèvre, cheval, vache), contrairement à celle d’un animal sauvage (loup, sanglier, bouquetin, mouflon, marmotte), est toujours empreinte de sobriété. Elle se déroule discrètement à l’écart de la yourte en l’absence des femmes. Le silence et surtout l’absence de rires sont de mise. Pour les éleveurs, selon les fragments d’une idéologie bouddhiste en vigueur, la mise à mort d’un animal domestique est associée aux idées de pollution (buzar) et de péché (nügel). Il est important à travers la technique de mise à mort employée que l’animal ne souffre pas trop. Les éleveurs récitent silencieusement une prière pour que son esprit (süns) se réincarne correctement et ne devienne pas un esprit errant malveillant. De manière contrastée, la mise à mort d’un animal sauvage, et plus particulièrement d’un loup, fait l’objet d’une grande joie. L’animal abattu est exhibé, sa peau pendue sur un mur de la yourte ou fixée sur le capot d’une voiture. A travers les différentes attitudes manifestées envers la mise à mort des animaux domestiques et sauvages, j’aimerais analyser la coexistence de différents types de moralité liés à ces actions et aux personnes qui les effectuent.
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Communication orale
Représentations et expériences des femmes chasseures et rapport à la mort sur Internet : une étude exploratoireViviane Lew (CSSSHG - Centre de santé et de services sociaux de La Haute-Gaspésie)
Parmi les tendances contemporaines concernant la chasse, plusieurs recherches rapportent l’augmentation de l’implication des femmes, bien que les pourcentages restent encore minimes, entre 9 et 15% de l’ensemble des chasseurs. Elles se heurtent cependant à des résistances quant à leur entrée dans le domaine de la chasse liées aux représentations qui les associent à la nature, la vie et la compassion, des valeurs incompatibles avec le fait de tuer des animaux, un acte violent reflétant plutôt la maitrise masculine de la nature. Les études empiriques montrent que les modalités de la socialisation associées à la chasse s’inscrivent dans des itinéraires distincts (Boglioli, 2009) selon le genre et peu de différences marquées quant aux motivations sous-jacentes à la participation à la chasse (Gigliotti et Metcalf, 2016), l’acceptation de la mort des animaux chassés, l’exposition des trophées ou l’expression des affects face à la mort. Dans la perspective ouverte par ces travaux, notre étude vise à approfondir les représentations sociales des expériences des femmes chasseurs, leurs motivations et leurs réactions psychologiques la mort des animaux, de même que celles du public face à leur engagement dans cette activité. À cette fin, un corpus d’articles de magazines, de récits d’expérience de femmes chasseures présentés sur des sites et de commentaires, a été établi à partir de mots clefs de recherche en français et en anglais sur Internet.
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Communication orale
La mort animale au zoo : un grand récit biopolitique ?Jean Estebanez (Université Paris Est-Créteil)
Les zoos contemporains occidentaux sont des dispositifs qui tendent à mettre en scène la vie sans la mort concrète, alors bien sûr qu’elle y est quotidienne. Celle-ci est invisibilisée par une série de techniques qui l’euphémisent, la soustraient aux yeux du public et l’évacuent. Les réactions choquées voire accusatrices des visiteurs à la vue d’un corps sans vie signalent combien la mort incarnée est indésirable, malgré des variations significatives. Les zoos, comme les abattoirs, de ce point de vue, tendent à organiser, pour le public, une boite noire dans laquelle la mort est totalement désolidarisée de la vie et du vivant. La mort est pourtant bien présente mais sous des formes ritualisées, par des statues, des panneaux voire des tombes pour de rares animaux vedettes. Elle est surtout mobilisée, en tant que grand récit de légitimation. L’histoire de l’extinction des espèces est une mort désindividualisée et désincorporée mais dont le corollaire, les espèces en voie de disparition et la nécessité de les protéger, justifie l’existence des zoos face aux critiques morales et éthiques concernant l’enfermement des animaux. Cette communication, fondée sur une série de terrains approfondis dans des zoos français, visera à interroger les régimes de mobilisation et de justification de la mort au zoo et leur mise en tension, en étant sensible à la pluralité des pratiques, par des acteurs aux positions très différentes, transformant le statut des animaux considérés.
Dîner
Représentations et imaginaires des morts animales
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Communication orale
Voir et montrer la mort animaleJean Gardin (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne), Olivier Givre (Université Lumière Lyon 2)
Les régimes de visibilité et d’invisibilisation, du cacher et du montrer, sont particulièrement significatifs en matière de mort animale. Alors qu’il est fréquent de considérer l’abattage comme une ellipse entre l’animal et la viande, des pratiques comme le sacrifice ou la chasse se présentent à l’inverse comme des actes nécessitant de rendre la mort visible et attestable. Au statut différent de morts « bonnes à voir » ou « à cacher », s’ajoute aujourd’hui la question du traitement médiatique de la mort des animaux, dont les images possèdent un impact puissant, à l’instar notamment des vidéos des mouvements animalistes et des reportages télévisés. L’expérience de la mort animale n’est pas non plus sans affecter le chercheur, amené lui-même à interroger son propre rapport au fait de voir et montrer la mort animale. Au croisement de réflexions issues de nos propres pratiques scientifiques et d’exemples issus d’une production audiovisuelle, littéraire et artistique foisonnante sur ce thème, nous nous interrogerons sur les différents régimes d’images des morts animales et sur les rapports entre le visible et l’invisible, le montrable et le caché.
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Communication orale
Le sacrifice animal biblique aura-t-il une place dans le futur ? Commentaires contemporainsJoseph Levy (RRSPQ - Réseau de recherche en santé des populations du Québec)
L’immolation des animaux constitue l’un des rituels centraux dans les systèmes sacrificiels de plusieurs religions du monde, obéissant à différentes modalités et raisons (de la repentance à la solidarité communautaire). Thème central dans le texte biblique et les traités talmudiques, le traitement, l’abattage et le sacrifice des animaux, font l’objet de nombreuses références, accompagnées d’injonctions visant à en encadrer les rituels complexes et à en définir ses fonctions (réparation face à des transgressions des commandements religieux, etc.). Ces règles organisaient le culte sacerdotal dans les temples hiérosolomytains jusqu’à la destruction du second temple par les Romains en 70 de l’ère courante. À partir d’un corpus de textes comprenant des commentaires en anglais et en français sur le sacrifice sacerdotal, recueillis sur internet à partir de mots clefs, les interprétations et les enjeux éthiques et spirituels principaux actuels ont été dégagés. Ils mettent en évidence la diversité des explications avancées pour fonder le sacrifice (à partir de cadres traditionnels ou empruntant des concepts aux modèles modernes) et les dissensus quant à son occurrence dans les temps futurs. Si certains commentateurs prédisent son maintien intégral lié aux injonctions divines révélées et inchangeables, d’autres suggèrent que le sacrifice animal sera remis en question et supprimé, compte-tenu qu’il ne répondra plus à la situation spirituelle et à l’ethos de la société future.
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Communication orale
Iconisation de l'ours blanc en martyr animal ou le retour d'une " animalité humanitaire "Vincent Lavoie (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Figure totémique, source de subsistance, motif de légendes, objet de curiosité scientifique ou trophée de chasse, l’ours polaire devient à la fin des années 2000 un symbole fort du réchauffement climatique. Au printemps 2008, après valse-hésitation, l’administration Bush accepte d’inscrire le plantigrade sur la liste des espèces menacées du Endangered Species Act (ESA), mais sans pour autant y reconnaître l’incidence des changements climatiques sur sa raréfaction. C’est alors que l’animal s’impose comme icône, à la faveur d’une imagerie médiatique insistant sur l’étiolement de la banquise comme métonymie de la disparition de l’espèce. C’est à l’analyse de cette récente iconisation du martyre de l’animal-sujet que cette communication est consacrée. Ces images de souffrance reconduisent les rhétoriques visuelles de la représentation humanitaire, laquelle s’est caractérisée par la mise en exergue d’un sujet en détresse, nu, extrait de son cadre social, dépourvu de ses attributs culturels, un sujet purement biologique, en fait un animal (Vollaire, 1995). La représentation humanitaire a été qualifiée d’antihumaniste justement au prétexte qu’elle réduisait l’homme à sa stricte animalité (Redeker, 1994). Quel statut accorder à cette « animalité humanitaire » dans les images de l’agonie animale, sachant que l’antihumanisme est parfois invoqué afin de minimiser la portée de la souffrance des bêtes ? Quelles sont les icônes de ce nouvel oxymoron ?
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Communication orale
Un bestiaire post-écocideBénédicte Ramade (UdeM - Université de Montréal), Magali Uhl (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Des dragons celtes aux licornes du Moyen-Âge ; du Jardin des délices aux chimères de Thomas Grünfeld, chaque période historique génère ses images d’animaux merveilleux et monstrueux qui incarnent l’imaginaire d’une société et les transformations qui l’affecte. À l’aune de la « Sixième extinction », la plus rapide et dévastatrice, quels seraient ces monstres animaliers aujourd’hui ? Le lien entre identité et altérité se reflète-t-il dans les hybrides qu’inventent et fantasment les artistes ? Comment composer avec cette généalogie du futur ? Quel serait le bestiaire de l’Anthropocène dont l’identité visuelle est à constituer ? Depuis l’empathie interspécifique, le culte de la « cuteness » animale jusqu’à la vision catastrophiste d’insectes ravageurs, voire de supers espèces génétiquement modifiées, quels imaginaires repère-t-on dans les représentations actuelles et que nous disent-ils de la société qui vient ? Entre études de cas et propositions de lectures transversales, ce panel cherche à spéculer autant qu’à analyser des ensembles symptomatiques.
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Communication orale
Présentation du projet Pense-BêtesJean Gardin (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne), Olivier Givre (Université Lumière Lyon2)
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Communication orale
Célébration du 30ème anniversaire de la revue FrontièresMouloud Boukala (Université du Québec à Montréal), Joseph Levy (RRSPQ - Réseau de recherche en santé des populations du Québec)