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Informations générales

Événement : 86e Congrès de l'Acfas

Type : Colloque

Section : Section 300 - Lettres, arts et sciences humaines

Description :

La liberté de pensée est le fondement de la philosophie. Dès ses origines, la philosophie a revendiqué de s’affranchir de la tutelle des mythologies et des religions afin de poser les problèmes de la connaissance sur un plan rationnel. Cette volonté de penser librement s’est aussi manifestée dans un désir de transmission des idées et de liberté de parole. L’histoire de la philosophie nous montre que l’exercice de cette liberté nécessite du courage et expose les penseurs aux risques. Les intellectuels sont souvent parmi les premières cibles des régimes tyranniques et totalitaires; et si, à défaut d’être pris pour cible, ils ou elles collaborent, qu’en est-il alors de leur liberté de pensée? Celle-ci peut-elle aller de pair avec l’exercice du pouvoir ou encore avec les accointances de celui-ci?

Réfléchir à la liberté de pensée et de parole, c’est ainsi se questionner sur les risques souvent encourus par ceux et celles qui la pratiquent. C’est aussi s’interroger sur l’état actuel de la liberté de pensée et de parole, voire de la liberté intellectuelle, ici et ailleurs, et notamment, dans un monde dominé par les médias sociaux. Et cette liberté est-elle partagée de la même manière entre tous et toutes? Qu’en est-il de la prise de parole des femmes dans l’espace public et médiatique ou de celle des personnes appartenant à des minorités (racisées, religieuses, sexuelles)? Certains débats amènent aujourd’hui à se demander qui a le droit de parler, qui est autorisé à traiter de certaines problématiques (les questions relatives au féminisme, à la race, au colonialisme…). On pourrait aussi se pencher sur l’insertion des philosophes dans les autres disciplines, comme les sciences, la littérature ou les arts. Comment leur parole est-elle reçue? La liberté de pensée et de parole nécessite-t-elle certains privilèges et, si oui, lesquels? Elle exige certainement de réfléchir à ces questions : qui parle et de quel lieu? Qui défend la liberté d’expression et dans quel contexte?

Dates :
Responsables :

Programme

Panel / Atelier

Liberté de pensée et de parole : l’héritage d’Athènes

Salle : P1-5050 — Bâtiment : UQAC

Communications orales

Science, morale et religion à l’époque moderne 1

Salle : P1-5030 — Bâtiment : UQAC
  • Communication orale
    Cartésianisme et tolérance: quels fondements possibles?
    Aurélien Chukurian (UdeM - Université de Montréal)

    L’intervention s’attachera à proposer une nouvelle généalogie du concept de tolérance en remontant à Descartes et à Spinoza. D’un côté, la conception cartésienne de la générosité et la lettre à Régius pourraient former les indices d’une pensée cartésienne de la tolérance. De l’autre, les réflexions issues du TTP sur la paix civile, ainsi que la place décernée à la générosité dans l’Éthique, pourraient fournir le socle d’une conception spinoziste de la tolérance. La thématique de la tolérance serait alors une nouvelle façon d’entrevoir la relation entre Descartes et Spinoza comme deux précurseurs de la modernité.

  • Communication orale
    Le principe de raison suffisante dans le De Deo
    Adrien Saucier (UdeM - Université de Montréal)

    Une sorte de dislocation entre ontologie et éthique hante la pensée de Spinoza. Au premier regard, la critique du finalisme métaphysique qu’il articule en radicalisant les postulats mécanistes de la philosophie cartésienne s’accorde difficilement avec la reconduite d’une téléologie pratique dans les deux derniers livres de l’Éthique. Or, il se pourrait bien que ce semblant de divorce soit déjà en germe dans le traitement que le De deo réserve au principe de raison suffisante. Se demander comment Spinoza peut faire place à une certaine contingence des séries causales finies tout en affirmant en même temps l’absolue nécessité de toute chose à l’égard de Dieu compris comme cause immanente nous met déjà sur une voie de résolution du problème. Cette élucidation de la relation entre fini et infini nous permettra de voir en quoi une éthique commande une forme de savoir dont le degré de certitude autorise encore quelque usage de la téléologie pour la conduite de la vie.

  • Communication orale
    Sophie de Hanovre sur la psychologie rationnelle
    Christian Leduc (UdeM - Université de Montréal)

    Sophie de Hanovre (1630-1714) est principalement connue aujourd’hui pour deux raisons : d’une part, comme duchesse électrice de Hanovre, dont les enfants deviendront respectivement reine de Prusse et roi d’Angleterre; d’autre part, comme correspondante de Leibniz. À ce sujet, on considère la plupart du temps que sa contribution aux débats philosophiques fut mineure et que l’échange est plutôt l’occasion pour Leibniz d’expliquer ses propres positions de manière détaillée. Or il appert qu’elle y défend aussi ses propres thèses et arguments et qu’on peut même tenter de les reconstruire en une doctrine originale. La présente communication s’intéressera aux idées de Sophie de Hanovre concernant le rapport entre l’âme et le corps. Critique de l’harmonie préétablie leibnizienne, elle maintient en réalité une forme d’interactionnisme, mais qui évite en même temps les apories d’une métaphysique trop spéculative.


Communications orales

Communications libres 1

Salle : P1-5010 — Bâtiment : UQAC
Présidence : François Claveau
  • Communication orale
    L’agressivité du dialogue : un problème ou une nécessité ?
    Laurence Godin-Tremblay (UQAM - Université du Québec à Montréal)

    D’un côté, dialoguer librement et sainement paraît commander d’enrayer toute forme d’agressivité et de violence. De l’autre côté, les conversations sans confrontation semblent stériles, incapables de faire surgir de nouvelles idées. Comment concilier ces différents constats ? L’agressivité du dialogue est-elle un problème ou une nécessité ? Cette communication vise à montrer qu’une lecture attentive du livre VIII des Topiques d’Aristote peut donner des pistes de solution à cette problématique. Le philosophe, en effet, attache au dialogue une part nécessaire d’agressivité, tout en la distinguant de celle qui fait la gloire des sophistes et des chicaniers. Pour le voir clairement, il importe toutefois de distinguer deux types de dialectique chez Aristote, à savoir la dialectique en elle-même (διαλεκτικὴ καθ᾿ αὑτήν) et la peirastique (πειραστική). Ces dialectiques comprennent des formes différentes d’agressivité, et doivent toutes deux être distinguées de la sophistique, ennemie réelle de la liberté de parole et de la saine discussion.

  • Communication orale
    Conscience, physicalisme et concepts phénoménaux
    Rémi Tison (UdeM - Université de Montréal)

    Dans le présent travail, je discute du problème de la conscience en philosophie de l’esprit analytique contemporaine. Plus spécifiquement, je m’intéresse ici à la question des concepts phénoménaux et à la stratégie physicaliste des concepts phénoménaux, qui consiste à soutenir que les concepts que nous utilisons pour penser à l’expérience consciente sont indépendants des concepts d’états de choses physiques, mais qu’ils réfèrent tout de même à des états de choses physiques. Je présente dans un premier temps les arguments épistémiques de Jackson (1982) et Chalmers (1996), qui ont conduit certains physicalistes à développer en réponse la stratégie des concepts phénoménaux, avant de présenter la stratégie des concepts phénoménaux elle-même et de montrer comment elle permet de traiter les arguments épistémiques. Dans un second temps, j’introduis et j’explique l’importante objection que Goff (2011) avance contre la stratégie des concepts phénoménaux. J’expose dans un troisième temps la réponse qu’offre Elpidorou (2016) à l’argument de Goff et je la commente ensuite brièvement. Je conclus qu’à moins de développer substantiellement cette réponse, l’argument de Goff continue de poser un important problème à la stratégie des concepts phénoménaux.

  • Communication orale
    Nous sommes tous faillibles : pour l’amour de la vérité, tolérons-nous!
    Gilles Beauchamp (UdeS - Université de Sherbrooke)

    Quelle place convient aux arguments épistémiques pour la tolérance? Sont-ils appropriés à la justification publique d’un principe politique de tolérance? Est-ce qu’une tolérance basée sur le faillibilisme implique que la finalité du politique est la vérité?

    Afin de répondre à ces questions, dans cette communication, je présente d’abord les arguments faillibilistes de John Stuart Mill pour la liberté de pensée et la libre discussion tirés de son œuvre De la liberté (1859). Je présente ensuite la critique de Marc-Antoine Dilhac qui affirme que le faillibilisme n’est pas est inapplicable politiquement parce qu’il fait de la tolérance un bien instrumental au service de la vérité alors que la vérité n’a pas de place légitime en politique.

    Je défendrai ensuite que le faillibilisme peut jouer un rôle dans la justification publique d’un principe politique de tolérance parce que cette doctrine épistémologique ne repose pas sur une doctrine compréhensive particulière et que le faillibilisme peut servir de justification à la tolérance même sans faire de la vérité une finalité du politique. De plus, je défendrai que le faillibilisme a une place légitime dans la justification et la motivation morale d’une vertu personnelle de tolérance, ce qui est moins litigieux parce que les contraintes de justification publique ne s’appliquent pas ici.


Communications orales

Conférence plénière

Salle : P1-5050 — Bâtiment : UQAC
  • Communication orale
    Liberté de pensée et liberté de parole : l’héritage d’Athènes au regard des enjeux contemporains
    Jean-Marc Narbonne (Université Laval)

    Au sein de l’ensemble des civilisations anciennes, la tradition politique et culturelle d’Athènes fait figure d’originalité. Aucune autre cité de cette époque n’a produit un nombre aussi impressionnant de figures intellectuelles, sans oublier une succession de réflexions de nature politique d’une portée incomparable. Qu’on en réfère comme jadis au fameux « miracle grec » (Renan) ou comme récemment à l’« exceptionnalisme grec » (Ober), le phénomène global à décrire demeure le même, soit celui d’un éthos-rationaliste-critique nouveau. Comment faire état d’un tel éthos critique et de son influence pérenne dans l’histoire, d’une telle pratique de l’agôn, c’est-à-dire de la concurrence des points de vue et de la remise en cause des données traditionnelles ?

    Après avoir fait état des liens unissant la tradition démocratique grecque et le franc-parler (parrhèsia), nous défendrons l’idée d’un continuum idéologique prévalant entre la culture critique grecque et la nôtre, en insistant sur les points suivants :

    - l’existence d’une ressemblance entre la démocratie d’origine et l’open society moderne.

    - l’existence d’une sorte de « tolérance religieuse » communément partagée.

    - le rattachement doctrinal du christianisme à la tradition grecque.


Dîner

Dîner

Salle : Dîner libre — Bâtiment : UQAC

Communications orales

Communications libres 2

Salle : P1-5010 — Bâtiment : UQAC
Présidence : Virginie Simoneau-Gilbert (UdeM - Université de Montréal)
  • Communication orale
    Les processus de régulation des contenus sur les réseaux sociaux : quelle autorité morale pour le web participatif ?
    Ivan Bricka (UQAM - Université du Québec à Montréal), Denis Carlier (UQàM)

    Cette communication vise à expliquer comment les réseaux sociaux régulent les propos et les comportements des utilisateurs. Nous entendons dans un premier temps présenter l’évolution de la notion d’« espace public » associée à l’émergence des réseaux sociaux. Nous montrerons ensuite comment cette évolution nécessite que soit repensée l’incarnation légitime de l’autorité morale dans l’espace public numérique. Il sera démontré que les réseaux sociaux créent une normalisation des propos par le biais de deux mécanismes complémentaires, à savoir les algorithmes informatiques et le travail des employés modérateurs. Finalement, nous verrons que ce processus de régulation nécessite la participation massive et souvent involontaire des utilisateurs des réseaux sociaux pour pallier les limites techniques des algorithmes quant à l’interprétation sémantique des contenus et la rigidité des critères moraux définis en interne. Nous conclurons ainsi que les mécanismes parfois dénoncés comme restreignant la liberté d’expression sur les réseaux sociaux résultent en fait d’une injonction à l’expression du plus grand nombre, symptomatique de la nécessité économique d’une collecte massive de données.

  • Communication orale
    La reconnaissance politique des minorités nationales dans le droit international
    Xavier Garneau (UQTR - Université du Québec à Trois-Rivières)

    Le but de la communication est d’évaluer la manière dont le principe de la reconnaissance mutuelle que développe Michel Seymour peut être appliqué au domaine international et l’utilité que peut avoir ce principe pour justifier la reconnaissance d’un droit à l’autodétermination spécifique pour les minorités nationales dans le domaine international. Tout d’abord, je vais faire une courte présentation des éléments principaux du principe de reconnaissance de Michel Seymour. Parmi ceux-ci, il y a notamment les deux dimensions de la reconnaissance soit le respect, soit un traitement statutaire égal pour les peuples et les personnes, et l’estime, soit un traitement différencié pour les nations et les individus. Puis, j’examinerai l’approche générale qui est utilisée par le droit international pour traiter des minorités nationales. Finalement, je présenterai la manière dont le concept de reconnaissance politique formelle de Seymour peut être appliqué au droit international pour justifier l’attribution de droits importants à l’autodétermination pour les minorités nationales. Cette argumentation reposera principalement sur la réalité des minorités nationales, les similarités entre les peuples autochtones et les minorités nationales et l’importance de la reconnaissance politique faite par les institutions du droit international pour la protection des minorités territoriales.


Communications orales

Science, morale et religion à l’époque moderne 2

Salle : P1-5030 — Bâtiment : UQAC
  • Communication orale
    Faut-il sentir pour penser ? Se livrer à une expérience de pensée au XVIIIe siècle
    Angela Ferraro (UdeM - Université de Montréal)

    « On demande, supposé qu’on trouvât un homme né aveugle, sourd et muet, qui n’eût aucun sentiment de goût, ni d’odorat, qui ne sentit ni douleur, ni chatouillements ; en un mot, qui n’eût aucune sensation ; tout cela supposé, si un tel homme serait capable de penser, ou si l’idée qu’on en a est chimérique ». Cette question, proposée la première fois au public aux années 1720, n’est pas sans rappeler le célèbre problème de Molyneux et, tout comme celui-ci, elle n’a pas manqué de susciter un vif débat. Une revue de l’époque [Suite de la clef, ou journal historique sur les matières du temps, 1724-1727] et un recueil de la fin du XVIIIe siècle [Les Songes physiques, 1781] ont gardé les traces des réponses données par les représentants de courants philosophiques variés, voire opposés entre eux. Dans ma contribution, je me propose d’abord de retracer de façon détaillée les étapes de cette querelle que la littérature critique a négligée jusqu’à présent. J’examinerai ensuite les positions des différents interlocuteurs, en mettant au jour leurs systèmes de référence respectifs (cartésien, lockéen etc.). On pourra ainsi envisager dans une perspective originale et, en même temps, mettre à l’épreuve les principaux modèles de théorie de la connaissance et du rapport esprit-corps qui s’affrontaient dans la première moitié du XVIIIe siècle.

  • Communication orale
    Classification des savoirs et téléologie historique chez Katib Chelebi
    Jean-Philippe Bombay (Université McGill)

    Les réseaux de savants et de transmission de la connaissance dans l’Empire ottoman du XVIIe siècle sont longtemps passés sous les radars de la recherche en histoire des sciences. À ce titre, Katib Chelebi et sa classification des sciences demeurent méconnus. Auteur de la volumineuse encyclopédie keshfü’l-zunûn, cet érudit ottoman divisa les sciences en deux catégories, soit les sciences théoriques et pratiques. Son œuvre fut influencée d’abord par les traditions islamiques qui avaient divisé les sciences de telle sorte que d’un côté la science théorique étudierait les phénomènes sur lesquels les humains n’ont aucun pouvoir d’agir, et de l’autre, la part pratique qui explorerait les zones où l’humanité peut intervenir. La classification des sciences, donc, détermine le potentiel de l’agentivité humaine. Tout en se revendiquant de la conception cyclique de l’histoire chez Ibn Khaldun, Chelebi propose des solutions afin d’intervenir contre la fatalité de la chute des empires. Ainsi, se mobilisant contre une loi supposée universelle, l’intellectuel va jusqu’à s’opposer à sa propre taxinomie des sciences. Qu’est-ce qui lui permet de modifier l’apport théorique des sciences universelles d’Ibn Khaldun sans la trahir? Nous nous proposerons d’explorer la tension entre théorie et pratique afin de mettre à jour le problème de la fatalité temporelle qu’elle sous-tend chez Chelebi.


Communications orales

Conférence plénière - Comité équité

Salle : P1-5050 — Bâtiment : UQAC
  • Communication orale
    L’Autre de l’Occident moderne
    Soheil Kash (Université Laval)

    En limitant son analyse à l’âge classique occidental dans son travail sur l’histoire de la folie, Foucault ne pouvait qu’identifier l’Autre de la modernité occidentale au « fou » occidental lui-même. Il ne pouvait assigner une place à l’Orient ou à l’Arabe sans sortir de l’Occident pour rejoindre l’autre comme étant l’envers de l’Occident. Ce changement de terrain théorique nous révèle l’Autre de l’Occident capté, non par le seul langage de la psychiatrie, mais plus fondamentalement interné dans celui de l’ethnologie et de l’orientalisme, formes de savoir occidentales par lesquelles la raison occidentale s’approprie le sujet (l’Autre) pour le transformer en objet. Et nous voilà pratiquement sur un autre terrain de questionnement qui nous mène directement de l’envers de la modernité (l’Arabe, l’Islam, l’Asiatique, l’Africain), à la modernité elle-même tel qu’elle est formulée par le discours philosophique contemporain représenté par Hegel comme fondateur du récit européocentriste de l’histoire de l’humanité.


Cocktail

Cocktail de la Société de philosophie du Québec

Salle : P0-4050 — Bâtiment : UQAC

Communications orales

La liberté d’expression : fondements et applications

Salle : P1-5050 — Bâtiment : UQAC
  • Communication orale
    Liberté d’expression et vérité
    Olivier Santerre (Université Laval)

    Dans De la Liberté (1859), John Stuart Mill propose une défense bien connue de la liberté d’expression. Pour lui, l’absence de contrainte sur ce plan est nécessaire à l’émergence et à la diffusion des idées vraies. Pour Mill, interdire l’expression de certaines idées sous prétexte qu’elles sont fausses présuppose l’infaillibilité de celui ou celle qui émet l’interdiction, et prive potentiellement les membres de la société de certaines vérités. Aussi, toujours selon Mill, une croyance vraie qui n’est pas un simple dogme doit être confrontée à la fausseté si elle veut conserver sa vigueur. Pour Alvin I. Goldman et James C. Cox (1996), Mill est un des représentants de ce qu’on pourrait nommer la thèse de l’autorégulation du marché des idées. L’une des principales prémisses de cette thèse est celle-ci : la libre circulation des idées est suffisante et nécessaire pour que le maximum de croyances vraies soit porté par les membres d’une société. Dans cette présentation, je m’intéresserai à cette prémisse en particulier. Mon objectif sera de montrer pourquoi je crois qu’elle est fausse. Pour ce faire, je m’intéresserai, entre autres, à la littérature portant sur les biais cognitifs, et celle portant sur les injustices épistémiques. Je défendrai que s’il s’avère que notre société est parcourue par un ensemble d’injustices épistémiques, et qu’un certain nombre de biais affecte notre traitement l’information, on doit remettre en cause la thèse de l’autorégulation du marché des idées.

  • Communication orale
    Qu’est-ce qui cloche avec Charlie? La liberté d’expression en contexte multiculturel
    François Toutée (UQAM - Université du Québec à Montréal)

    Suite aux attentats contre Charlie Hebdo du 7 janvier 2015, une question s’est vite imposée dans le débat public : fallait-il republier les caricatures qui avaient provoqué la colère des terroristes? Mon travail vise à éclairer ce dilemme en tentant de déterminer ce qui peut être moralement problématique dans les caricatures de Charlie Hebdo, mais aussi celles du Jyllends-Posten. Pour ce faire, je vais d’abord me doter d’une théorie de la liberté d’expression adaptée au problème. Je vais examiner l’argument de la démocratie sous sa forme originale, comme un argument fondé sur le principe de souveraineté qui débouche sur un droit à l’information, puis y ajouter un second argument, fondé sur le principe d’égalité et l’impératif de participation de tou-te-s à la délibération publique, qui débouche sur un droit à l’égale influence.

    Par la suite, je vais tenter de démontrer que les caricatures en question sont moralement problématiques, car elles sont stigmatisantes, c’est-à-dire qu’elles font circuler des stéréotypes qui vont contribuer à « raciser » les personnes musulmanes. De plus, j’avancerai que ces stéréotypes peuvent affaiblir la liberté d'expression effective des personnes ciblées en faisant référence aux injustices épistémiques de Miranda Fricker et à la notion de considération de Caroline West, ce qui ferait en sorte que l'intégration des personnes musulmanes et donc le fonctionnement juste des démocraties multiculturelles seraient compromis.

  • Communication orale
    Femmes et multiculturalisme: les conditions du débat
    Anne Iavarone-Turcotte (Université McGill)

    Cette présentation a pour thème la liberté de pensée et de parole dans le contexte des débats sur le multiculturalisme, et en particulier des discussions sur le sort des femmes dans les minorités religieuses. Ces discussions suscitent généralement deux questions préliminaires. D’abord, peut-on/doit-on en parler? Certaines personnes prônent le silence au nom de la paix sociale et de la lutte aux préjugés, d’autres y voient un acte de censure et de capitulation. Ensuite, qui peut en parler? Qui dispose de la légitimité et de la crédibilité pour le faire? Existe-t-il un monopole en cette matière? Cette question concerne le positionnement des personnes engagées dans le débat.

    Je me propose d’étudier ces questions à travers une approche interdisciplinaire, qui s’attarde en particulier sur les enseignements du féminisme intersectionnel et du féminisme postcolonial. À mon avis, ces courants féministes suggèrent de répondre à ces questions en y ajoutant une troisième: comment parler des femmes dans les minorités religieuses? Ainsi, les critiques formulées par les féministes intersectionnelles et postcoloniales peuvent être comprises comme des guides structurant la pensée et la parole plutôt que comme des fins de non-recevoir s’y opposant. Dans cette optique, toute question peut être posée et toute personne peut tenter d’y répondre, pourvu que ces interventions soient balisées.

  • Communication orale
    La hiérarchisation des activités expressives protégées par la liberté d’expression au Canada : filet de sécurité ou choix risqué?
    Louis-Philippe Lampron (Université Laval)

    La liberté d’opinion et d’expression est l’une des garanties fondamentales ayant le plus vaste objet de protection au sein de l’ensemble des droits civils et politiques. Paradoxalement, cette très large définition de son objet de protection fait de la liberté d’expression l’un des droits fondamentaux auquel il est le plus simple de porter atteinte en droit canadien, qui permet généralement à l’État de démontrer que toute violation à un droit fondamental peut être justifiée dans une société libre démocratique. Dès les premiers arrêts impliquant l’interprétation de l’article 2b) de la Charte canadienne, la Cour suprême a reconnu qu’une portion importante des activités expressives protégées peuvent être considérées comme étant « éloignées » des valeurs qui représentent le cœur de cette liberté fondamentale pour la Cour suprême du Canada (soient : la recherche de la vérité, la participation au processus démocratique et l’épanouissement personnel) et partant, plus faciles à limiter. Cette présentation nous permettra d’explorer, de manière pragmatique, les sources de cette véritable hiérarchisation des activités expressives protégées par la liberté d’expression en droit canadien ainsi que ses risques potentiels pour la participation aux débats qui doivent structurer une société démocratique.


Communications orales

Enjeux contemporains en philosophie des sciences 1 – LEIPS

Salle : P1-5010 — Bâtiment : UQAC
  • Communication orale
    Analyse critique de la dysfonction préjudiciable
    Simon Goyer (UQAM - Université du Québec à Montréal)

    Plusieurs philosophes tentent de formuler une conception adéquate du trouble mental (ex : Bolton2008 ; Graham 2013). Parmi ces conceptions, la dysfonction préjudiciable (DP) développée par Jerome C. Wakefield est certainement l’une des plus influentes aujourd’hui (Wakefield 1992, 2011). Une des hypothèses de Wakefield est que toutes les conceptions du trouble mental — conséquemment, la DP — doivent s’harmoniser avec les conceptions des troubles mentaux qu’adoptent les gens en général et les cliniciens (Wakefield 1992, 374). Dans cette présentation, je critique la DP. Premièrement, je soutiens, suivant Roe et Murphy (2011), que la conception de la fonction (et de la dysfonction) que Wakefield adopte est problématique en physiologie, en médecine et, plus précisément, en psychiatrie et que, pour cette raison, il faut adopter une autre conception de la fonction. Deuxièmement, je soutiens, suivant Cooper (sous presse), qu’on ne peut pas déterminer ce qui est préjudiciable suivant les standards culturels d’une société. Troisièmement, suivant Kirmayer et Young (1999), je montre que la DP ne correspond pas aux conceptions que les gens et que les cliniciens entretiennent en regard du trouble mental. Quatrièmement, je montre qu’il n’est pas nécessaire que la DP ou toute autre conception du trouble mental s’accorde avec ces conceptions des profanes et des cliniciens. Avant de faire cette analyse critique et d’expliquer plus en détail en quoi celle-ci consiste, je présente la DP.

  • Communication orale
    Le concept de santé mentale: socialement construit et objectif
    Anne-Marie Gagné-Julien (UQAM - Université du Québec à Montréal)

    En philosophie de la médecine, un débat de longue date concerne la définition de la santé mentale. La maladie mentale devrait-elle être définie comme une condition que les scientifiques découvrent comme normale ou en tant que condition idéale qui reflète des normes sociales ou morales. Au cœur de cette controverse se trouve l’enjeu de la place des valeurs dans la définition de la maladie mentale. Rejetant les extrêmes qui poseraient le concept de santé mentale comme purement construit ou purement scientifique, plusieurs auteurs ont proposé des conceptions de la santé mentale dans laquelle les faits scientifiques et les valeurs sociales ont leur place (e.g. De Vreese 2016; Ereshefksy 2009; Kingma 2013, 2014, 2017). Bien que ces nouvelles avenues semblent prometteuses, la manière exacte selon laquelle les faits et les valeurs entrent en jeu dans la définition de la santé mentale demande encore à être clarifiée. Dans cette présentation, je veux défendre l’empirisme contextuel critique (ECC) développé par Longino (1990, 2002, 2015) dans le but de clarifier l’interaction entre faits et valeurs dans le cas de la santé mentale. Mon argument sera découpé en deux parties. D’abord, je vais défendre l’application de l’ECC à la définition de la santé mentale. Ensuite, je vais élaborer la manière selon laquelle un concept de santé mentale peut être dit objectif selon le concept d’objectivité sociale (Longino 1990, 2002).

  • Communication orale
    La classification dans le contexte de la pratique scientifique et la tradition des espèces naturelles
    François Papale (UdeM - Université de Montréal)

    La tradition des espèces naturelles est le vecteur majeur de la philosophie occidentale en ce qui a trait à l’étude de la classification en sciences. Selon cette tradition, les espèces naturelles sont nécessaires à la réalisation de processus inductifs et détiennent un statut ontologique privilégié. Dans cette présentation, nous remettons en question ces deux propositions afin de démontrer que les objectifs de la science sont mieux servis par des descriptions graduelles plutôt que par des descriptions mobilisant des catégories. Pour ce faire, nous allons tout d’abord analyser l’argument récent de Slater (2014) selon lequel le statut ontologique privilégié des espèces naturelles s’explique exclusivement par leur capacité à soutenir des inférences inductives, une conception pragmatiste des espèces naturelles qui contraste avec les approches essentialistes et basées sur des mécanismes homéostatiques. Après avoir rejeté cette position sur la base du rôle superflu dans l’induction que jouent les catégories en contraste avec les propriétés postulées, nous proposerons une analyse du gain épistémique qu’apporterait la reconnaissance de l’hétérogénéité des occurrences associées à une catégorie ainsi que la réalisation variable des propriétés étudiées. Cette analyse critique permet d’envisager le rôle des catégories en sciences à la lumière de leur rôle dans la pratique scientifique.

  • Communication orale
    Philosophie mécaniste et espèces naturelles
    David Montminy (UdeM - Université de Montréal)

    La tradition des espèces naturelles en philosophie des sciences (Quine 1963; Hacking 1991) joue un rôle prépondérant dans les questions entourant les pratiques classificatoires et leurs implications réalistes. La tradition mécanistique en philosophie (Machamer et al. 2000) occupe une place importante dans les débats concernant l’appréhension des systèmes naturels. Nous montrerons dans cette présentation que les outils issus de la tradition mécanistique permettent un nouvel éclairage des problèmes concernant les espèces naturelles. Selon la tradition mécanistique, un système complexe gagne à être simplifié en sous-systèmes dynamiques que l’on considère comme des mécanismes. Ces mécanismes contiennent des composantes (entités) et des processus (activités) et leur aspect dynamique se traduit par le fait que les entités sont réputées avoir des fonctions. La tradition des fonctions comme rôle causal (Craver 2013) conçoit les attributions fonctionnelles de matière purement pragmatique c’est-à-dire que la postulation d’un modèle (système, mécanisme) dans lequel on attribue des statuts d’ entités à des composantes et celui d’activité à des processus sert à expliquer le comportement du système étudié. Nous montrerons qu’il est possible d’omettre l’utilisation des espèces naturelles afin appréhender un tel système naturel à l’aide d’attributions fonctionnelles pragmatiques, et ce faisant, nous argumenterons en faveur d’une compréhension antiréaliste des pratiques classificatoires.


Communications orales

Métaphysique et philosophie : regards sur une polémique vitale 1

Salle : P1-5030 — Bâtiment : UQAC
  • Communication orale
    La détermination du rapport de l’homme à l’être comme Seinserstrebnis dans l’interprétation heideggérienne du Théétète
    Gabriel Côté (Université Laval)

    Le caractère polémique de la métaphysique est attribuable selon Martin Heidegger à la distinction sujet-objet, laquelle finalise le divorce de l’être et de l’homme. La philosophie de Platon, en étant à la fois le dernier témoignage de la pensée grecque initiale et ce qui donne le coup d’envoi à l’histoire de la métaphysique, doit permettre d’un côté de voir comment, par voie de dérivation, la métaphysique en est venue à se mouvoir dans l’horizon de la distinction sujet-objet, et d’un autre côté, de remonter vers « l’unité liant originairement » l’homme et l’être (GA34, 71). Nous pourrions ainsi dire que la philosophie platonicienne offre à Heidegger les outils pour penser la réconciliation de l’homme et de l’être. Nous chercherons à montrer que cette réconciliation s’opère par une reprise des notions platoniciennes de psyché et d’Éros, - lesquelles déterminent chez Platon le rapport de l’homme à l’être – notamment au fil de différentes lectures du Théétète entre 1926 et 1934. Le Théétète fait en effet signe selon Heidegger vers un rapport de l’homme à l’être déterminé comme « aspiration à l’être » (Seinserstrebnis)(GA34, 200), par laquelle l’homme se saisit de sa possibilité essentielle la plus propre, la paideia, que Heidegger comprend comme « la possibilité d’être tenu » (Gehaltenheit) et « accordé » dans l’être (GA34, 114).

  • Communication orale
    Georg Lukács et la métaphysique bourgeoise : une perspective gramscienne
    Thomas Vachon (Université d’Ottawa)

    Dans son célèbre ouvrage, Histoire et conscience de classe, Georg Lukács s’attaque à la métaphysique moderne, plus précisément celle déployée par Kant et l’idéalisme allemand. Pour Lukács, toute cette philosophie, ainsi que tout ce qui en découle, n’est que l’articulation d’un jeu de concepts antinomiques tentant de se répondre les uns aux autres. Ce jeu antinomique, ainsi que les tentatives subséquentes de le dépasser, dit-il, ne sont que l’articulation philosophique de l’idéologie bourgeoise, l’articulation des antinomies et des contradictions de cette même société bourgeoise. Si l’hypothèse de Lukács ainsi que sa lecture de Kant sont à prendre au sérieux, il convient de se poser la question fondamentale de l’origine de l’incrustation de ces contradictions dans l’entreprise kantienne. Pourquoi ces antinomies se retrouvent-elles dans une philosophie se voulant pourtant la plus pure possible ? Quelques années avant Lukács, un autre penseur issu de la tradition marxiste, Antonio Gramsci, présenta un concept permettant d’expliquer pourquoi certaines choses semblaient aller de soi dans la conscience et la pensée occidentale : celui d’hégémonie. C’est de cela qu’il sera question ici. Nous tenterons de rendre compte de ces « antinomies bourgeoises » dans la pensée kantienne en mobilisant le concept gramscien d’hégémonie afin de faire toute la lumière possible sur la question.

  • Communication orale
    Les Logische Studien de Friedrich-Albert Lange : psychologie, métaphysique et logique
    Samuel Descarreaux (Université d’Ottawa)

    Dans l’Histoire du matérialisme, Friedrich-Albert Lange soutient « que la logique traditionnelle, par suite de sa connexion naturelle avec la grammaire et le langage, contient encore des éléments psychologiques qui [...] diffèrent beaucoup de la portion réellement logique de la logique. » (trad. Pommerol, vol. II, p. 61) Plus exactement, il reproche à la logique traditionnelle d’origine aristotélicienne d’être avant tout une classification pragmatique qui rend accessible et communicable la réalité en changement. Il souligne en ce sens que la notion de substance constitue le produit d’un penchant naturel à la personnification et de la structure grammaticale du langage. Quant à la causalité, elle trouve son origine dans les dispositions psychophysiques humaines et constitue possiblement le produit du « mécanisme du mouvement réflexe et de l’excitation sympathique. » (trad. Pommerol, vol. II, p. 52) Cette critique mène Lange, dans les Logische Studien, à une redéfinition extensionnelle de la logique qui qualifie à la fois l’extension d’une figure dans l’espace et une classe d’objets contenus dans un concept général. Cette esquisse fournit les prémisses de notre présentation qui doit démontrer comment une redéfinition extensionnelle de la logique contourne les implications spéculatives de la psychologie et de la métaphysique.


Communications orales

Conférence plénière

Salle : P1-5050 — Bâtiment : UQAC
  • Communication orale
    « Je ne suis pas raciste mais… » : liberté d’expression et antinomies de la raison raciste
    Hourya Bentouhami (Université Toulouse 2 Jean Jaurès)

    Que veut dire « libération de la parole raciste » ? En quoi consiste ce sentiment de confort et d’autorité d’une parole à la fois experte et ordinaire qui prend l’aspect dans des démocraties dites post-raciales d’une dénégation de son contenu raciste ? Mon objet ne consistera pas à traiter du rapport entre liberté d’expression et discours de haine à partir de la question normative d’usage : le discours de haine doit-il et peut-il être prohibé dans des démocraties où coexistent différentes conceptions du Bien ? Autrement formulée ainsi : comment concilier en droit liberté d’expression et protection des victimes du racisme ? Ma démarche s’inscrit plutôt dans la lignée des travaux de Colette Guillaumin et des études de la théorie critique de la race pour comprendre en quoi consiste le pouvoir et la violence des mots racistes à une ère où nos démocraties se disent non seulement non-racistes mais antiracistes ou anti-discriminations. Cette analyse mêle donc à la fois les apports de la psychanalyse sur la dénégation et la mélancolie raciale, les outils théoriques du féminisme sur la compréhension performative des discours de la haine de l’Autre, et les contributions de la philosophie du droit sur l’importance d’une approche conséquentialiste en termes de lutte contre le racisme dans la législation sur la liberté d’expression.


Dîner

Dîner

Salle : Dîner libre — Bâtiment : UQAC

Communications orales

Enjeux contemporains en philosophie des sciences 2 – LEIPS

Salle : P1-5010 — Bâtiment : UQAC
  • Communication orale
    Taxonomie des modèles d'intégration en biologie
    Kevin Kaiser (UdeM - Université de Montréal)

    Les modèles d'intégration/unification sont légion en philosophie de la biologie. Des théories interchamps proposées par Darden et Maull (1977) en passant par les relations de raffinement conceptuelle et d'extension explicative rapportées par Kitcher (1984); propositions auxquelles s'ajoutent les théories intégrées interniveaux de Kincaid (1990), le pluralisme intégrateur de Mitchell (2002) et l'unité comme interconnexion de Grantham (2004); et, récemment, O’Malley et Soyer (2012) mettant de l'avant la diversité des types d'intégrations ou Nathan (2015) les subsumant sous un type, les risques de confusions conceptuelles sont évidents. Au cours de cette présentation, une taxonomie de ces différents modèles sera proposée, taxonomie inspirée par la recommandation de Grantham (2004): «[p]hilosophers studying the process of scientific unification need to be clear about (1) the entities which enter into the process of unification, and (2) the precise relation(s) which constitute their ‘‘unification.’’» (p.134). Pour ce faire, ces différentes propositions seront analysées pour préciser les (1) et (2) impliquées dans chacune d'elles. Ainsi, une première taxonomie pourra être offerte en fonction de la simple similarité/dissimilarité des propositions. Suite à cela, celle-ci sera reconfigurée en une seconde taxonomie incluant une composante de "parenté" des modèles, i.e. selon la filiation conceptuelle. Les gains/pertes épistémiques de ces propositions pourront alors être discutés.

  • Communication orale
    Structuralisme aujourd’hui en théorie de l’évolution?
    Anda Danciu (UdeM - Université de Montréal)

    De nombreux philosophes de la biologie soulignent la nuance innovatrice qu’apporte la biologie développementale évolutive (évo-dévo) à la théorie de l’évolution, ainsi que les frictions qu’elle engendre auprès des théories actuelles (Love 2003, Love 2006, Lewens 2009). Parmi les questions soulevées est la ressemblance des explications données dans le domaine du évo-dévo avec certaines explications du XIXème siècle, qu’on qualifie de typologiques (exemple : les philosophes de l’école de Iéna) (Hoβfeld et Olsson 2003, Laubichler 2009, Lewens 2009). Peut- on tracer des parallèles entre le évo-dévo et la biologie structuraliste du XIXème siècle? Je propose dans un premier temps de présenter les grandes lignes de l’explication de l’innovation biologique chez un biologiste moléculaire contemporain, Sean B. Carroll (Carroll 2005). Ensuite, je souhaite présenter de manière générale les théories structuralistes en morphologie au XIXème siècle, telles que chez Geoffroy Saint-Hilaire, Oken ou Owen, et d’en dégager leur essence (Gould 2006, Schmitt 2004). Le but de cette présentation sera de questionner la compatibilité des différents types d’explications exposées, sujet de la troisième partie de la présentation. Le parallèle entre le évo-dévo et la morphologie évolutionnaire peut-il être effectué? Quels sont les sous-bassements philosophiques dans les deux cas?

  • Communication orale
    Les services écosystémiques et le fonctionnement des écosystèmes
    Sophie Bretagnolle (UQAM - Université du Québec à Montréal)

    L’écologie scientifique est généralement définie comme l’étude des relations des organismes avec leur environnement (Barbault, 2008). Elle s’intéresse donc essentiellement à des fonctions d’où la diversité des concepts liés à cette notion. Dans un article de 2005, Jax tente de faire une synthèse de quatre concepts en déterminant les différents sens du mot « fonction » en écologie. Ces concepts sont la biodiversité, les fonctions écologiques, le fonctionnement des écosystèmes et les services écosystémiques. C’est ce dernier qui sera au cœur de ma présentation. Définis comme les bénéfices tirés par les humains des écosystèmes (Millenium Ecosystem Assessment, 2005 ; Maris, 2014 ; Roche et al., 2016), les services écosystémiques présentent la particularité de désigner les liens explicites entre les écosystèmes et les humains. Ce concept est donc un point d’articulation majeur entre les connaissances sur le fonctionnement des écosystèmes et la manière dont ils influencent la vie et les activités humaines. Je propose d’analyser ce concept afin de mettre en lumière 1 - pourquoi il est important de le maintenir distinct des autres concepts énoncés, 2- quel apport il permet à la fois dans le domaine de l’écologie scientifique, mais aussi dans l’élaboration de la transition écologique.

  • Communication orale
    Les structures d’interaction métaboliques peuvent-elles évoluer?
    Antoine C. Dussault (Centre interuniversitaire de recherche sur la science et la technologie (CIRST))

    Dans leur article « It’s the song, not the singer », Doolittle et Booth (ci-dessous D&B) proposent une manière innovante de relever le défi consistant à formuler une théorie évolutionnairement fondée de l’individualité biologique des holobiontes. Leur proposition s'articule autour de l'idée selon laquelle, bien que les holobiontes eux-mêmes – que D&B comparent aux fins d’illustrations à des groupes de chanteurs – ne soient pas des individus biologiques, les structures d'interaction métaboliques réalisées par les organismes qui les composent – que D&B comparent à des chants polyphoniques – peuvent être conçues comme des réplicateurs étendus au sens de Sterelny et al. (1996). Ces réplicateurs étendus se répliquent selon D&B via un processus d'assemblage écologique dans lequel des espèces fonctionnellement équivalentes en viennent à occuper des niches similaires au sein de l’holobionte, ici conçu comme un écosystème. Ma présentation vise à souligner un défi important auquel la proposition de D&B est confrontée. Je le ferai principalement en distinguant deux conceptions de la niche écologique et deux modes correspondants de classification fonctionnelle développés en écologie. Ceci me conduira à réaffirmer la nécessité d’établir un contraste entre deux notions d’individualité biologique, l’une ancrée dans ce que Mayr (1961) appelle la biologie de l’évolution et l’autre ancrée dans ce qu’il appelle la biologie fonctionnelle (cf. Godfrey-Smith 2013; Booth 2014).


Communications orales

Métaphysique et philosophie : regards sur une polémique vitale 2

Salle : P1-5030 — Bâtiment : UQAC
  • Communication orale
    Phénoménologie et métaphysique
    Alexandre Leduc Berryman (Université d’Ottawa)

    Edmund Husserl situa sa phénoménologie naissante dans l’horizon d’une critique radicale de ce qu’il nommait des « présuppositions métaphysiques » (Hua, XIX, 2). Pour se ménager un accès aux choses mêmes, il faut d’abord mettre hors circuit la métaphysique, qui s’empêtre dans l’obscurité de ses contradictions (Hua, II, 1). Cependant, sitôt formulée, cette ascèse méthodique se heurte au puissant héritage de la tradition qu’elle cherche à évacuer : au nom de la pureté de la description phénoménale, Husserl réintroduit un vocabulaire chargé métaphysiquement (Taminiaux, 1998). Que l’on objecte que les notions d’essence (eidos), d’intentionnalité, d’immanence ou de transcendance subissent une reconfiguration fondamentale et non métaphysique dans le cadre de la phénoménologie ne change rien au fait que le retour aux choses mêmes qui constitue le motif central de l’entreprise de Husserl est nécessairement médiatisé par des logoi sans lesquels il serait impossible de dire le phénomène. Mieux encore, la phénoménologie de Husserl finit elle-même par rencontrer la métaphysique qu’elle fuyait à ses débuts : le telos spirituel de l’Europe, conçu comme idée infinie (Hua, VI), n’est-il pas une rémanence de l’idéalisme allemand ? Nous chercherons, dans cette présentation, à examiner ce geste husserlien initial de rejet de la métaphysique, afin d’en comprendre le sens critique et d’en évaluer la portée.

  • Communication orale
    Strauss élève de Heidegger : l’historicisme et l’horizon premier de la philosophie
    Jean-Christophe Anderson (Université d’Ottawa)

    Dans sa correspondance avec Hans-Georg Gadamer, Leo Strauss admet avoir du mal à saisir le rôle central qu’occupe le concept d’« histoire de l’action » (Wirkungsgeschichte) au sein de Vérité et méthode. L’interprète, selon Strauss, ne fait jamais l’expérience de l’action de l’histoire ; l’imposer à la situation de l’homme reviendrait donc curieusement à thématiser ce qui est premier « pour nous » à la lumière d’une connaissance discutable de ce qui est premier « par nature ». Ce reproche, qui demeure peu détaillé, rappelle la critique qu’adresse le corpus straussien dans son ensemble à Martin Heidegger : la figure par excellence de l’« historicisme radical » aurait, en raison d’un penchant excessif pour l’Être, négligé l’horizon premier de toute philosophie, et partant, de toute ontologie, à savoir l’horizon du Bien. L’accusation de désordre dans la pensée heideggérienne, à première vue naturelle de la part d’un penseur politique, retient toutefois notre attention dans la mesure où Strauss n’a jamais caché la dette qu’entretenait son retour à la philosophie socratique envers le projet déployé par Heidegger dans les années 1920. Il s’agira donc d’élucider ce paradoxe : la philosophie politique de Strauss semble dépendre de l’ontologie heideggérienne pour affirmer en sens inverse le primat chronologique de la philosophie politique sur la métaphysique.

  • Communication orale
    L’être et son miroir chez Gadamer : en quel sens la langue est-elle spéculative ?
    Thomas Anderson (Université Laval)

    La troisième et dernière partie de Vérité et méthode est sans conteste la plus énigmatique de l’ouvrage de Hans-Georg Gadamer. L’auteur se propose de mettre au jour la primauté du langage (Sprache) dans l’expérience humaine du monde pour procéder du même coup au « tournant ontologique » de l’herméneutique et à l’universalisation de son champ. On ne manque pas de remarquer que cette reconduction de l’herméneutique à l’ontologie semble – que ce soit là un défaut ou un mérite – réhabiliter une certaine métaphysique, avec laquelle le xxe siècle allemand avait voulu rompre. Ce verdict provient sans doute de la fameuse thèse énoncée par Gadamer au début du chapitre final de Vérité et méthode : « L’être qui peut être compris est langue (Sprache). » [478] Je tenterai de déterminer quelle charge métaphysique il convient de prêter à cette formule en me penchant sur le chapitre qui la précède immédiatement : « Le centre de la langue et sa structure spéculative ». Gadamer y reconnaît renouer avec la dimension d’un problème « posé par la métaphysique classique » [464] en même temps qu’il tente de se distancer « du grandiose oubli de soi qui la marque » [461]. La question qui guidera notre présentation est donc : Gadamer peut-il affirmer un tel lien entre être et langage sans retomber dans l’oubli de la finitude de notre expérience du monde censé caractériser la métaphysique ?

  • Communication orale
    Hubris et métaphysique. Réflexions à partir de Paul Ricœur
    Sophie-Jan Arrien (Université Laval)

    Faire de la métaphysique un objet polémique à l’intérieur de la philosophie et de son histoire, c’est pour une part essentielle, peu importe la façon qu’on a de définir ladite métaphysique, faire de la philosophie elle-même, pour elle-même, un objet de discussion, de débat, voire de combat. Des penseurs comme Heidegger et le premier Derrida ont mené ce combat jusqu’au point de sembler vouloir dissoudre, non seulement la métaphysique, mais toute philosophie à venir dans leur tentative critique. Sans vouloir dénier toute fécondité de cette dernière, j’y vois un geste « d’hubris philosophique » qui mériterait d’être opposé à d’autres possibilités de la pensée « post-métaphysique ». La pensée de Paul Ricœur m’apparaît certainement incarner l’une de ces possibilités, en ce qu’elle a su se dégager (tout comme, de façon bien différente, Foucault et Deleuze) de l’« obsession » de la philosophie pour elle-même (serait-ce sous le mode d’une critique de la métaphysique), pour plutôt retourner aux « positivités » (les « choses mêmes » et les discours particuliers qui s’y rattachent). Je tenterai dans ma présentation de circonscrire le geste et la méthode philosophique de Ricœur comme caractéristiques d’une pensée résolument « post-métaphysique », où, à l’hubris du philosophe se substitue la figure d’un philosophe devenu phronimos.


Communications orales

Penser l’égalité et le féminisme avec Louise Marcil-Lacoste

Salle : P1-5050 — Bâtiment : UQAC
  • Communication orale
    Quelle généalogie de la philosophie féministe au Québec?
    Marie-Anne Casselot-Legros (Université Laval)

    Louise Marcil-Lacoste aurait-elle été la première philosophe québécoise à réfléchir au sexisme en ayant une posture féministe ? Dans La raison en procès : essais sur la philosophie et le sexisme (1987), Marcil-Lacoste s’est donné la liberté de penser les racines philosophiques du sexisme à une époque où la communauté philosophique québécoise ne réfléchissait pas encore à ses biais implicites quant à la « question des femmes ». Dans son livre, Marcil-Lacoste retrace les éléments conceptuels justifiant le sexisme philosophique de David Hume et de Jean-Jacques Rousseau en plus d’étudier les enjeux de l’égalité et du féminisme dans ses articles. Pourquoi alors l’héritage de Marcil-Lacoste résonne-t-il si peu aujourd’hui ? D’abord, j’établirai une généalogie de la philosophie féministe en situant l’apport de Marcil-Lacoste en philosophie et dans les études féministes. J’examinerai quelques hypothèses pour répondre à cette question : 1) la résistance réciproque entre la philosophie et le féminisme ; 2) l’interdisciplinarité des études féministes a peu atteint la philosophie ; 3) l’essor anglo-saxon de la philosophie féministe versus la culture franco-française de la communauté philosophique québécoise ; 4) l’enjeu politique de la sous-représentation des femmes et du climat en philosophie (Di Croce, 2015) ; et finalement 5) le cantonnement de la philosophie féministe aux marges des réflexions philosophiques (Haslanger, 2008).

  • Communication orale
    Louise Marcil-Lacoste et la polysémie de l’égalité
    Marie-Eve Jalbert (UdeM - Université de Montréal)

    Louise Marcil-Lacoste s’est démarquée pour avoir été l’une des premières philosophes québécoises à traiter de la question du sexisme en philosophie. On ne peut passer outre son intérêt pour la notion d’égalité, laquelle fut le sujet de nombreuse de ses publications. Son lexique La thématique contemporaine de l'égalité : répertoire, résumés, typologie (PUM, 1984) recense plusieurs centaines de conceptions de l’égalité, mettant ainsi en lumière la polysémie et les contradictions inhérentes aux discours qui mettent de l’avant cette notion abondamment utilisée. Pourquoi existe-t-il un gouffre si grand entre la persistance des inégalités au 20e (et 21e) siècle(s) et l’appareil théorique qui nous permet de justifier l’abolition de ces inégalités ? Marcil-Lacoste est d’avis qu’il faut penser ce paradoxe à même la tension qui subsiste entre les théories de l’égalitarisme et du féminisme. Celle qui affirme qu’«il est strictement impossible de parler d’égalité générale si on exclut les femmes du champ spécifique de son applicabilité» croit qu’il ne faut pas pour autant renoncer à la notion même d’égalité. Au courant de cette présentation, je présenterai l’approche de Marcil-Lacoste que je qualifie d’«optimiste» : pour la philosophe, les théories féministes amorcent une véritable révolution au sein des théories de l’égalitarisme, lesquelles constituent pourtant le fleuron de la philosophie politique du 20e siècle.

  • Communication orale
    Faire équipe pour philosopher sur le féminisme
    France Giroux (Cégep Montmorency)

    Dans le contexte d'une vaste étude sur les théories de l'égalité depuis le 18ème siècle, Louise Marcil-Lacoste fondait une équipe de recherche sur les liens à établir entre égalitarisme et féminisme. En 1986, la philosophe dirigeait la publication des Actes d'un colloque international organisé seulement par les étudiants que nous étions. Sous le titre Égalité et différence des sexes, il y avait, entre autres, des textes signés par Nicole Brossard, Françoise Collin, Mary Daly et Marisa Zavalloni.

    L'intégration dans une équipe de philosophie, c'était l'occasion décisive pour nous, en rédaction, de délibérer entre «féministes au féminin et au masculin». Par son travail intellectuel, le féminisme partage-t-il la charge de l'efficience avec ces théories classiques afin que leur propre recherche d'égalité n'échoue pas? Faut-il revendiquer la différence autant, voire davantage, que l'égalité? Appréhender la domination masculine par ces notions couplées contribue-t-il à faire cesser les blocages cognitifs, chez toute femme et tout homme, dans la perception des rapports sociaux qui les engagent? Que devrait-on imaginer, dans le monde de la pensée et celui de tous les jours, pour y produire les conditions favorables à la généralisation des rapports libres et égaux?

    L'accès égal aux études et aux postes étant loin d'être une affaire réglée, telles sont les questions dont l'équipe discuterait encore aujourd'hui avec vous.


Assemblée générale

Assemblée générale annuelle de la Société de philosophie du Québec

Salle : P1-5050 — Bâtiment : UQAC

Communications orales

Intellect, raison et volonté : la liberté humaine entre le moyen âge et la modernité

Salle : P1-5050 — Bâtiment : UQAC
  • Communication orale
    La prééminence de la raison face à la volonté dans la pensée de Gilbert Crispin
    Natalia Jakubecki (Universidad de Buenos Aires)

    Gilbert Crispin (c. 1045-1117), quatrième abbé de Westminster, a été un auteur provenant du milieu monastique dont sa pensée a fleuri vers la fin de XIème siècle. Comme on le sait, Gilbert a été un des disciples le plus célèbres d’Anselme du Bec. Probablement c’est la raison pour laquelle les médiévistes ont insisté à le comparer avec son maître et ami. Et même si cette approche n’est pas entièrement incorrecte parce que l’influence de l’archevêque est indéniable, l’« interprétation obsolète » – telle comme la désigne Bernd Goebel – n’a pas vu dans la production de l’abbé rien de plus qu’une copie de moindre qualité à celle de celui-là. Goebel non seulement a stimulé une nouvelle perspective pour analyser la pensée de Gilbert par rapport à celle d’Anselme mais aussi pour étudier Gilbert lui-même.

    L’un des écarts théoriques les plus remarquables entre les deux est donné par rapport au dynamisme animique. En effet, Gilbert a introduit une nouvelle expression, « abuti ratione » afin de rendre compte des nuances internes de l’exercice de la raison. Cette communication vise donc à analyser l’utilisation de ladite expression pour démontrer que, bien qu’il soit évident que la pensée de notre auteur est basée sur la tradition augustinienne et l’anselmienne, il s’en écarte dans la mesure où met l’accent sur le rôle de la raison précisément là où Augustin et Anselme avaient privilégié le rôle de la volonté.

  • Communication orale
    ‘Homo intellegitur’ : L’intellection des universaux dans un monde de particuliers, selon Pierre Abélard
    Roxane Noël (University of Alberta)

    Qu’intellige-t-on par une intellection du terme ‘homme [homo]’? Cette question n’est pas sans poser problème à Pierre Abélard, lorsqu’il élabore, dans le De Intellectibus, une théorie nominaliste de l’intellection des universaux. Sachant que les intellections, pour être saines (et non vaines), doivent viser [attendere] les choses telles qu’elles sont réellement, comment s’explique-t- on qu’il est possible d’avoir des intellections universelles qui soient parfaitement saines, comme « Le chien est un mammifère », en l’absence d’entité universelles qui y correspondraient? À première vue, il semble que les intellections portant sur les universaux soient comme celles qui portent sur les chimères et les bouc-cerfs : elles sont vaines, car dépourvues d’objet. Or, il n’en est pas ainsi : selon Abélard, les intellections universelles, comme celle de ‘homo’, visent la « nature [natura] » des choses. Comment comprendre cette affirmation dans un cadre nominaliste? Dans cette présentation, je soutiendrai qu’une lecture plausible de cette solution consiste à traiter le concept de nature comme un concept modal, tout en insistant sur le rôle de l’attention [attentio], acte volontaire, dans la formation d’intellections saines à propos des universaux.

  • Communication orale
    L’intellect et la volonté chez Jean Buridan
    Aline Medeiros Ramos (UQAM - Université du Québec à Montréal)

    L’éthique de Jean Buridan est souvent décrite comme une éthique intellectualiste (où la faculté intellectuelle est le guide de la volonté) qui utilise un vocabulaire volontariste, comme si Buridan n’était pas sûr de laquelle des deux facultés aurait la primauté sur l’autre. Ainsi, les interprétations standards nous disent qu’il s’agirait d’une approche « conciliatoire » entre intellectualisme et volontarisme – même si ce que cela veut dire n’est pas toujours clair.

    Beaucoup de ce qui est dit à propos de l’avis buridanien sur la moralité a pour base ce qu’il a écrit dans ses « quæstiones » sur le De Anima ou sur la Métaphysique. Quelques commentateurs qui prennent en compte son long commentaire (quæstiones) à l’Éthique à Nicomaque (QNE) ne se prononcent pratiquement que sur les livres VII et X.

    Dans ma communication, je propose que l’on abandonne ce discours d’ « approche conciliatoire » à travers une lecture attentive des QNE, plus précisément du livre VI, où il est question des vertus intellectuelles. C’est là où Buridan semble nous proposer un avis clairement intellectualiste lorsqu’il décrit le rôle de la prudence et de l’intellect (entre autres) parmi les vertus. C’est en ce sens-là que le maître picard paraît aller étonnement à l’encontre de l’avis de ses précurseurs franciscains les plus réputés, Jean Duns Scot et Guillaume d’Ockham, tous les deux volontaristes, pour s’aligner davantage à la tradition dominicaine intellectualiste d’Albert le Grand et de Thomas d’Aquin.

  • Communication orale
    Désir et nécessité dans le traitement humien de la volonté
    Manuel Vasquez Villavicencio (UQAM - Université du Québec à Montréal)

    Dans le Traité de la nature humaine, David Hume offre une des plus influentes conceptions de la volonté humaine. Il y attribue aux individus la capacité de percevoir ses volitions et ses actions comme étant librement causées. Toutefois, Hume signale également que toutes les volitions et les actions des individus sont soumises aux mêmes principes régissant les relations causales dans le domaine des objets externes. Ce principe est la conjonction constante de deux objets qui permet que l’esprit infère l’un à partir de l’autre. Cette explication rend compatibles deux aspects traditionnellement opposés : le caractère nécessaire de nos actions et l’attribution de liberté à nos choix. Pour Hume le désir est l’un des principaux motifs agissant sur la volonté. Le désir est conçu par l’écossais comme l’expectation de plaisir qui est suscitée à partir de la considération d’un objet absent. Cette expectation est en soi plaisante et, comme telle, doit agir nécessairement sur la volonté en vue de générer des volitions et des actions visant l’obtention de l’objet de désir. Pourtant, la volonté semble être capable de poursuivre ou d’abandonner certains désirs. Mais comment est-il possible de comprendre ce phénomène à la lumière du principe de nécessité qui gouverne la volonté? Cette communication vise à donner réponse à cette question à partir d’une lecture attentive de passages pertinents dans le Traité de la nature humaine.


Communications orales

La place problématique du scepticisme en société politique 1

Salle : P1-5030 — Bâtiment : UQAC
  • Communication orale
    Politique et ignorance : la réception du Discours de La Boétie
    Philip Knee (Université Laval)

    Le Discours de la servitude volontaire (±1548) de La Boétie a été mis au service de la cause des huguenots au XVIe siècle, de celle des révolutionnaires français à la fin du XVIIIe siècle, de celle de divers mouvements de révolte ou de contestation du pouvoir au XXe siècle… Ces lectures ont en commun d’avoir fait de la domination politique l’enjeu central du texte et d’avoir négligé ainsi l’énigme du renoncement volontaire à la liberté qui en est pourtant l’un des ressorts. En prenant appui sur la réception de ce texte célèbre, on se placera en amont de la question de cette table ronde – celle du scepticisme dans la société politique – afin de réfléchir sur notre capacité d’accueillir l’ignorance, et plus généralement de distinguer et d’articuler les exigences respectives du politique et du philosophique.

  • Communication orale
    Liberté de pensée, scepticisme et ordre social : la fragile conciliation du Testament de Fortin de La Hoguette
    Louis Laliberté-Bouchard (Université McGill)

    Le Testament ou Conseils d'un bon Père à ses enfants de Philippe Fortin de La Hoguette constitue un legs moral, politique et religieux destiné à l'ensemble des sujets français. D'abord publié en 1648 à la veille de la Fronde, le Testament encourage une obéissance complète envers l'autorité publique et un respect servile de la mode et des dogmes. On s'étonne pour cette raison de retrouver une influence marquée des Essais de Montaigne, et surtout, disséminés ça et là dans le Testament, des encouragements à la remise en question dans l'espace privé desdits dogmes auxquels il faut pourtant se soumettre. La possibilité d'un scepticisme, ou du moins d'une liberté de pensée, s'immisce ainsi dans l'œuvre. L'enjeu ne serait donc pas pour Fortin de condamner la liberté de pensée et le scepticisme hérité de Montaigne, mais bien de réfléchir à son mode d'expression : La Hoguette s'oppose à l'expression publique du scepticisme sans irrévocablement condamner la pensée sceptique. Notre communication se veut donc une réflexion sur les moyens par lesquels la liberté de pensée peut s'exprimer, alors qu'elle ne devrait justement pas l'être publiquement, c'est-à-dire en examinant davantage le rapport de Fortin de La Hoguette aux Essais de Montaigne et en mettant en lumière l'écriture de la dissimulation qu'il emprunte aux libertins érudits.

  • Communication orale
    La postérité d’un paradoxe rousseauiste : l’écartèlement du libéralisme français au XIXe siècle
    Simon Pelletier (Université Laval)

    Attentif aux interactions entre les passions du cœur humain et l’agencement des relations sociales, Jean-Jacques Rousseau a grandement réfléchi aux conditions d’une sociabilité saine. En liant la possibilité de celle-ci à l’action de passions aimantes issues de la pitié, Rousseau en est venu à accorder une importance cruciale aux opinions formant le socle de toute bonne éducation, tant civile que privée. Certaines opinions favorisent en effet l’identification à l’autre et se révèlent ainsi déterminantes pour le déploiement de la pitié. De là la présence simultanée dans sa pensée de branches difficilement conciliables : le postulat de la nécessité d’une reconnaissance sociale de l’égalité naturelle entre les hommes (qui mène en définitive au dogme de la souveraineté du peuple), et l’idée du danger de laisser le droit « d’opiner » et de « discuter » aux citoyens (Contrat social, IV, I). Ma présentation aura pour but de mettre en lumière ce paradoxe, et de suivre son transfert comme sa reconfiguration chez deux penseurs libéraux du XIXe siècle, chez qui l’on retrouve certains traits de l’analyse rousseauiste du cœur humain : Théodore Jouffroy et Alexis de Tocqueville. Tous deux se révèlent écartelés entre l’idée que toute imposition autoritaire d’une opinion est illégitime (parce que les hommes sont fondamentalement égaux), et celle que les sociétés ont pourtant besoin de croyances dogmatiques partagées.

  • Communication orale
    La ruse de Benassis: religion et politique dans Le médecin de campagne de Balzac
    Antoine Blais-Laroche (Université Laval)

    Véritable catéchisme social, Le médecin de campagne (1833) contient l’essentiel de la pensée politique et sociale de Balzac. Proposant une apologétique renouvelée, adaptée à l’incrédulité du temps, le roman fait la promotion du christianisme au nom du maintien de l’ordre social. Sans n’être jamais qualifié de « sceptique », le médecin Benassis semble consentir à la religion moins par piété que par principe, en faisant de la foi un art de croire salutaire, capable de contrer les méfaits de l’individualisme et du philosophisme. Si Benassis s’est détourné de l’ « incrédulité moqueuse » de ses jeunes années, c’est avant tout parce qu’il a reconnu la nécessité politique et l’utilité morale du christianisme. Car « religion veut dire lien » et « constitue la seule force qui puisse relier les Espèces sociales et leur donner une forme durable ». Ainsi, la religion ne trouve plus sa justification dans une métaphysique révélée, mais bien dans ses effets politiques et moraux. C’est cette articulation particulière entre religion et politique que la présente communication se propose d’explorer. Influencé par la pensée de Bonald, Balzac, c’est ce que nous montrerons, n’est par ailleurs pas éloigné des analyses tocquevilliennes sur la religion et la démocratie, qui paraîtront dans la même décennie. Par la ruse qui consiste à (se) convaincre de croire, Benassis (et à travers lui Balzac) déjoue le scepticisme ambiant.


Communications orales

Quelles prétentions épistémiques peuvent avoir les fictions aux 18e et 19e siècles?

Salle : P1-5010 — Bâtiment : UQAC
  • Communication orale
    Les fictions exploratoires de Fontenelle
    Mitia Rioux-Beaulne (Université d’Ottawa)

    Si les Entretiens sur la pluralité des mondes (1686) n’inventent pas au sens propre un genre nouveau – le dialogue philosophique naît avec la philosophie – d’aucuns y ont vu un exercice exemplaire et inaugural de sa refonte « moderne ». L’accent est alors mis sur les caractéristiques liées à la mise en scène : présence marquée d’une femme dans le dialogue (dont le rôle ne se réduit pas à celui d’auditrice passive); exercice de vulgarisation appuyé sur un usage heuristique des ressources de la rhétorique, réflexivité philosophique appliquée à l’histoire et la sociologie des sciences, etc. Un aspect mérite cependant un peu plus d’attention : le rôle de certaines des fictions qui sont utilisées par les interlocuteurs pour approfondir la réflexion philosophique, tirer les conséquences des théories, éprouver les frontières du vrai et du vraisemblable. C’est à cet aspect de l’écriture fontenellienne de la science et de la philosophie que nous nous arrêterons ici, faisant ensuite le pont entre les Entretiens et certaines des stratégies discursives à l’œuvre dans l’Histoire de l’Académie royale des Sciences, à laquelle Fontenelle a œuvré durant 40 ans.

  • Communication orale
    Dispositif fictionnel et philosophie dans Cleveland de Prévost
    Maud Brunet-Fontaine (Université d’Ottawa)

    Nombreux sont les romans du XVIIIe siècle qui intègrent des éléments philosophiques. Les romanciers y mettent en scène des personnages de philosophe, y insèrent de longues digressions philosophiques dans la bouche d’un de leurs personnages ou encore présentent des discussions et dialogues philosophiques. Il suffit de penser à Thérèse-philosophe, à Paul et Virginie à Candide, à La Religieuse, aux Lettres persanes. Or, ces intégrations d’aspects philosophiques suffisent-elles pour défendre qu’il s’agit là de textes pleinement philosophiques ? Serait-il possible de rendre ce qui est philosophique dans ces textes sous une forme non fictionnelle ?

    Pour nous intéresser à la question de l’apport spécifique de la fiction – et dans notre cas de la fiction littéraire –, nous nous intéresserons donc à ce qui est transmis par la fiction elle-même et qui ne pourrait être rendu autrement. Nous chercherons donc à voir s’il est possible de tirer une moelle philosophique du dispositif fictionnel de Le Philosophe anglais ou Histoire de M. Cleveland, fils naturel de Cromwell de Prévost, l’un des romans les plus lus du XVIIIe siècle. Une fois que nous aurons déployé la philosophie du roman, nous nous demanderons aussi si, finalement, un tel roman peut bien fournir un apport épistémique au lecteur ou s’il le place plutôt dans un déséquilibre sceptique impossible à remplir.

  • Communication orale
    Diderot et la fiction romanesque : réflexions autour de Jacques le fataliste
    Anne Marie Lussier (UdeM - Université de Montréal)

    De L'Éloge de Richardson à Jacques le Fataliste, la réflexion de Diderot autour du roman et de son pouvoir didactique connaît un développement significatif. Parti d'une volonté de renouveler un genre narratif jusqu'alors conçu comme « un tissu d'évènements chimériques et frivoles, dont la lecture [est] dangereuse », Diderot se revendiquera d'abord d'une conception de l'écriture romanesque qui relève d'une esthétique de la participation. À l'instar de ceux de Richardson, dont il dit qu'ils « élèvent l'esprit, [et] touchent l'âme », les romans se doivent de s'adresser à l'imagination du lecteur afin de toucher sa sensibilité et de l’élever. Mais cette première conception du pouvoir d'action de la fiction romanesque sera rapidement mise en doute par Diderot; les passions soulevées par l'œuvre fictionnelle ne semblant pas suffire à modifier durablement le cœur des hommes. Le Paradoxe sur le comédien, la préface-annexe de La religieuse, ainsi que la postface des Deux amis de Bourbonne sont autant d'écrits qui pointent vers une nouvelle conception du potentiel d'action du roman. S'il demeure essentiel d'imprimer des images sensibles dans l'esprit du lecteur, il demeurera indispensable de briser ensuite radicalement l'illusion romanesque, afin que le lecteur puisse se distancer de l'œuvre et poser un jugement critique. Nous nous proposons donc ici de jeter un regard sur la portée et les limites de la fiction romanesque, et ce à travers une lecture de Jacques le Fataliste.

  • Communication orale
    Kant et la vérité symbolique des récits bibliques
    Adam Westra (Université d’Ottawa)

    La valeur de vérité des récits bibliques est problématique, et ce, particulièrement dans le contexte de la philosophie des Lumières. Alors que la théologie du XVIIIe siècle élabore encore un système de doctrines à partir des Écritures Saintes, la vérité factuelle de ces dernières n’est cautionnée ni, a priori, par la raison théorique ni par la science empirique. Si la philosophie de l’époque considère alors certains de ces récits comme des fictions, perdent-ils tout contenu de vérité pour autant ? Cette communication s’intéressera à l’approche que propose Kant dans ses écrits tardifs sur la religion, à savoir une méthode proprement philosophique d’exégèse scripturale qui permettrait d’interpréter les « fictions » de la Bible comme de puissants symboles de vérités relevant d’une morale indépendante et rationnelle.

  • Communication orale
    Lange et Schiller : la fiction esthétique
    Samuel Descarreaux (Université d’Ottawa)

    Dans l’Histoire du matérialisme, Friedrich-Albert Lange explique que le libre jeu de l’esprit poétique doit informer l’esprit d’une époque à l’aide d’une série de fictions dont la valeur se trouve au sein du monde phénoménal « d'après lesquelles nous trouvons ici un jeu insignifiant, là un acte sérieux et supérieur. » (trad. Pommerol, vol. II, p. 71) Cet esprit doit produire des représentations symboliques qui servent l'édification morale et spirituelle de l'homme en lui donnant l’occasion d'approfondir sa connaissance de lui-même. Ce principe se veut avant tout heuristique et donc historique, et non transcendantal. Ainsi observe-t-on un décalage entre le propos de Lange et les thèses de Kant qui en forment pourtant l’horizon de compréhension et qui se comprend à l’aune de la critique des thèses kantiennes de Schiller dans ses Lettres sur l’éducation esthétique. Pour faire court, il argumente que le libre jeu de l’esprit poétique doit permettre la mise en relation de deux instincts antagonistes l'un formel, chargé de rendre l'homme libre par l’introduction d’une harmonie dans la diversité de ses manifestations, et l'autre sensible, chargé d’inscrire l'homme au sein de limites temporelles historiques. À partir de ces quelques prémisses, nous nous proposons d’étudier le concept fiction poétique chez Lange à travers l’appropriation des thèses kantiennes par Schiller.


Communications orales

Conférence plénière

Salle : P1-5050 — Bâtiment : UQAC
  • Communication orale
    Comment la censure affecte-t-elle le progrès philosophique?
    Sandra Lapointe (McMaster University)

    Les raisons qu’ont les philosophes de dénoncer la censure sont d’abord et avant tout d’ordre moral. Cependant du point de vue de l’historienne de la philosophie, si la censure est néfaste c’est souvent aussi en raison de ses conséquences soi-disant néfastes sur le progrès de la discipline : on peut supposer que l’auteur dont l’œuvre fait l’objet d’une interdiction, en plus d’être l’objet d’une injustice aura un impact différent.

    En histoire des idées, les développements philosophiques sont compris comme le résultat de transformations dont la cause est d’ordre doctrinal ou théorique. Cependant, la censure n’est pas un facteur d’ordre philosophique. La question sous-jacente est donc celle générale de savoir si l’histoire de la philosophie doit faire fi des facteurs qui, comme la censure, sont d’ordre sociologique. Dans la négative – que je défendrai – le défi est par conséquent de présenter une approche à l’histoire de la philosophie qui rende justice au fait que l’évolution d’une discipline dépend tant de facteurs philosophiques que de facteurs sociologiques et que, par conséquent, la distinction entre « histoire des idées » (ou « généalogie conceptuelle ») et « sociologie de la connaissance » ne présente pas une véritable dichotomie, mais deux extrêmes sur l’éventail de choix méthodologiques à la portée de l’historien.


Dîner

Dîner

Salle : Dîner libre — Bâtiment : UQAC

Communications orales

Communications libres 3

Salle : P1-5050 — Bâtiment : UQAC
  • Communication orale
    Hétérodoxie alléguée de l’ontologie d’Hervé de Nédellec. Une réévaluation des preuves.
    Geneviève Barrette (Cégep Montmorency)

    Les avis sur la conformité de la pensée d’Hervé de Nédellec (m. 1323) au regard de l’enseignement de Thomas d’Aquin (m. 1274) sont mitigés. Si plusieurs le considèrent de la première école thomiste, défenseur du patrimoine doctrinal de son illustre confrère contre les effets des condamnations institutionnelles et attaques diverses dont celui-là fait l’objet, d’autres voient une franche rupture entre certains éléments théoriques développés par Hervé et la position de Thomas sur ces mêmes questions. Ce serait notamment le cas de leurs ontologies, dont l’étude d’Allen (1958) fait état de la radicale antinomie. Bien que je sois encline à reprendre les conclusions d’Allen à cet effet, je montrerai ici la faiblesse de la preuve qu’il présente à la défense de cette thèse et examinerai l’idée selon laquelle Hervé éviterait de prendre position sur la distinction réelle entre l’être et l’essence dans ses Quaestiones In Sent., (suggérée par Allen 1958, relayée par de Rijk 2013). Je situerai historiquement le travail d’Hervé dans le contexte des récurrentes ordonnances d’enseignement de Thomas d’Aquin par les chapitres généraux dominicains et signalerai une preuve prometteuse dans le sens du caractère inconciliable des ontologies des deux prêcheurs.

  • Communication orale
    Le concept de liberté politique chez Spinoza
    Andre Rocha (UQTR - Université du Québec à Trois-Rivières)

    Le concept de liberté politique dans le Traité Theologico-Politique s’applique à trois dimensions de l’expérience sociale et politique : la liberté d’un individu, la liberté d’une société et la liberté d’un État souverain. Ces trois dimensions sont corrélatives, mais chacune détient une autonomie relative. J’entends dans cette communication indiquer que cette corrélation des trois dimensions du concept est une construction logique et géométrique faite par Spinoza pour démontrer contre Hobbes que l’institution d’un État souverain forte ne serait possible que par un circuit institutionnel de reconnaissance et augmentation périodique de la liberté des individus.

  • Communication orale
    Un citoyen rhénan : Karl Marx et la liberté de presse
    Mathieu J. Lainé (Gouvernement du Québec)

    Le jeune Marx consacre une série d’articles à la liberté de presse dans la Gazette Rhénane. Il écrit à chaud, tandis que le gouvernement prussien resserre la censure. Caché derrière un pseudonyme révélateur — du moins, au regard de l’histoire —, Marx réclame du même souffle l’abrogation de la loi de censure et l’adoption d’une authentique loi de presse. Attaché à la tradition jusnaturaliste, il revendique une loi qui correspond à la véritable nature de la presse, c’est-à-dire une loi qui protège la liberté d’expression, la liberté de parole et la liberté de pensée. Engagé dans les débats intellectuels et politiques de son temps, Marx cherche à protéger la Rhénanie de la Prusse ; à l’instar de ses concitoyens, il réalise en effet très vite que l’Empereur Frédéric-Guillaume IV représente une terrible menace pour les acquis sociaux et politiques de la Révolution française. Sa défense de la liberté de presse se transforme ainsi en critique de l’État policier — l’État prussien, s’entend — et de la philosophie hégélienne du droit.

  • Communication orale
    Liberté de parole et liberté de pensée chez Nietzsche
    Joël Payette (UdeM - Université de Montréal)

    Le présent texte entend explorer la possibilité d’une approche nietzschéenne de la question de la liberté de parole. Son objectif principal est de développer un usage de la liberté de parole qui serait celui de la figure de l’esprit libre chez Nietzsche. Celui-ci est envisagé dans ce texte comme incarnant un idéal pratique de la liberté de pensée. Il sera donc question de voir comment une liberté de parole peut être dérivée d’une liberté de pensée souveraine pour donner naissance à ce que nous appellerons, suivant la terminologie nietzschéenne, une liberté de parole de maître. Par suite, l’objectif secondaire de ce texte sera d’étudier ce que nous appellerons une liberté de parole d’esclave et que nous associerons aux théories les plus connues sur la liberté de parole. Nous appliquerons la critique nietzschéenne de la modernité à ces théories afin de mettre en évidence un problème important, à savoir que ces théories font violence à la liberté de pensée par l’usage qu’elles proposent de la liberté de parole. Pour ce faire, nous procèderons à un développement en trois étapes. Nous exposerons les grands arguments et les grands principes qui sont propres à ces théories sur la liberté de parole. Nous appliquerons ensuite quelques éléments clés de la pensée nietzschéenne à ces arguments et principes afin de les invalider. Nous développerons enfin l’idée d’une liberté de parole de maître à partir de l’esprit libre en mettant en valeur ses attributs les plus pertinents.


Communications orales

La place problématique du scepticisme en société politique 2

Salle : P1-5030 — Bâtiment : UQAC
  • Communication orale
    Fanatisme et scepticisme. L'art d'écrire de Nietzsche et sa postérité
    Marc-Antoine Beauséjour (Cégep de Sainte-Foy)

    Écrivain de l'énigme, de l'exagération autant que de la nuance, Nietzsche a suscité les lectures les plus contradictoires. On retrouve dans son œuvre un penseur nuancé et sceptique, mais aussi un écrivain nourrissant les plus violents enthousiasmes. Certains en feront un moraliste apolitique, d'autres le maître à penser d'esprits radicaux, tantôt anarchistes, tantôt chauvins, toujours belliqueux.

    La réception fanatique devra beaucoup aux falsifications de partisans du nazisme, notamment sa sœur Élisabeth F.-Nietzsche. On retrouve en effet chez Nietzsche un grand nombre de textes critiquant le fanatisme, le nationalisme et le conservatisme. Il insiste : « Zarathoustra est un sceptique ». Cependant, force est de constater que l'œuvre porte cette possibilité, ce que remarquait F. Tönnies dès 1893 (Les Fous de Nietzsche (1893) et Le Culte de Nietzsche. Une Critique (1897)). Si la pensée de Nietzsche est faussée par sa récupération politique au XXe siècle, on doit reconnaitre qu'il a contribué à un climat moral et intellectuel dans lequel la pensée et l'action ont pu réaliser leurs possibilités extrêmes.

    À partir d'une lecture des textes de Nietzsche ayant pour thèmes le fanatisme, le scepticisme et l'art d'écrire, nous examinerons l'hypothèse selon laquelle Nietzsche, malgré sa critique du fanatisme, aurait pu anticiper et souhaiter ces lecteurs qui ne rendent pas justice à sa pensée, mais qui contribuent pourtant à leur manière au projet de dépassement du nihilisme.

  • Communication orale
    Passions et raison en politique : les dangers du populisme pour les démocraties libérales contemporaines
    Sébastien Lacroix (Université Laval)

    Deux ensembles de contraintes conceptuelles encadrent le régime politique québécois. D’une part, le Québec est une démocratie, c’est-à-dire que les décisions politiques sont soumises à la règle de la majorité. S’il va de soi que les décisions à l’Assemblée nationale doivent recevoir plus de votes favorables que de votes défavorables pour être valides, il en va de même pour les élections, où la personne élue est celle ayant obtenu le plus grand nombre de voix. Dans un monde pluraliste comme le nôtre, ce processus démocratique confère aux décisions politiques leur légitimité qu’elles ne peuvent plus tirer d’une quelconque doctrine compréhensive, religieuse ou métaphysique. D’autre part, le modèle québécois est libéral. Les droits et pouvoirs de la majorité démocratique sont limités : certaines sphères d’activités cruciales pour l’auto-compréhension et l’estime de soi des individus sont mises hors de la portée du législateur. Notons aussi qu’un régime politique peut être démocratique sans être libéral, et vice versa.

    Dans cette présentation, je m’intéresserai aux interactions entre démocratie, libéralisme et scepticisme. Ce dernier concept sera considéré en lien avec le populisme, qui peut tantôt être une idéologie sceptique remettant en question des présupposés sociaux et tantôt n’être qu’un vecteur politique d’idées reçues. Je discuterai de possibles bienfaits d’un certain populisme, tout en reconnaissant les limites d’une approche politique basée uniquement sur ce concept.


Communications orales

Le populisme en zones de droite ou d’extrême droite

Salle : P1-5010 — Bâtiment : UQAC
  • Communication orale
    Fascismes d'hier et populismes d'aujourd'hui
    Andre Mineau (UQAR - Université du Québec à Rimouski)

    Depuis quelques années, on assiste à une recrudescence de la visibilité et du succès des mouvements et partis politiques de droite, en Occident. Puisque ceux-ci se font les porte-drapeaux de nationalismes ethnocentriques et de populismes éventuellement xénophobes, d’aucuns cherchent à souligner les parentés idéologiques avec le fascisme, soit directement soit indirectement, en parlant par exemple d’un « retour aux années 1930 ». Il s’agira ici d’examiner les enjeux épistémologiques autour du transfert du concept de fascisme vers des réalités politiques immédiatement contemporaines. On verra que le terme « fascisme » peut devenir un concept sous certaines conditions particulières, celles-ci étant directement tributaires du contexte idéologique et politique de l’Europe des années 1920 et 1930. Sur cette base, on procédera à la définition du fascisme et à l’explication des grandes idées qui lui sont caractéristiques. On pourra ainsi établir un cadre ou une grille permettant d’évaluer jusqu’à quel point les mouvements, partis et politiciens d’aujourd’hui peuvent être dits « fascistes ». On prendra des exemples actuels dans la droite américaine.

  • Communication orale
    La nation au défi du populisme
    France Giroux (Cégep Montmorency)

    Le populisme est devenu populaire. Depuis 2010, la montée des populismes est observable dans la plupart des États membres de l'Union européenne ; au Royaume-Uni, le Brexit en est l'œuvre.

    La notion est éloignée de celle de peuple. Mais de l'appel au peuple, les mouvements populistes se réclament. Or, cet appel varie selon qu’il est de gauche ou de droite, européen ou états-unien. Le phénomène européen, lui, serait l'expression d'europhobes qui ont bien compris que « le référendum est devenu une arme létale contre l'Union ». Car, quel que soit leur objet, les référendums, qui ont eu lieu aux Pays-Bas ou en Hongrie, invitent l’UE à se redéfinir. Tel est l'effet du référendum britannique par sa synthèse de multiples crises européennes. D'un côté, n'avons-nous pas assisté à une croissance quasi inutile au sens où elle augmentait davantage les fortunes que les revenus de tous ? Cela n'a-t-il pas causé des frustrations, des impatiences, de la colère pouvant conduire à la xénophobie et au nationalisme primaire ? D'un autre côté, n'y a-t-il pas eu un manque complet de politiques en ce qui concerne la question des réfugiés ? Sans le souci de pallier les failles vis-à-vis des citoyens qui s'estiment perdants et sans projet d'inclusion des migrants dans la Cité, n'est-il pas vain d'en appeler à une union édifiante au sein des nations européennes ?

  • Communication orale
    Québec : quelques causes d’une droite récurrente
    Jean Bernatchez (UQAR), Jean-Claude Simard (UQAR - Université du Québec à Rimouski)

    On a souvent parlé du « mystère Québec ». Cette expression traduit un phénomène récurrent : cette ville vote systématiquement à droite, qu’on parle des plans municipal, provincial ou fédéral. Pour expliquer cette étonnante orientation, on met souvent en cause les radios parlées – que certains préfèrent appeler des radios-poubelles. Elles contribuent certes au phénomène, mais sans doute sont-elles plutôt de simples haut-parleurs, répercutant une tendance depuis longtemps présente dans la population (Parent, 2015). Aussi, pour rendre compte adéquatement de ce phénomène, faut-il adopter deux principes : le caractère multifactoriel de ce mystère et la nécessité de l’envisager dans la longue durée.