Informations générales
Événement : 81e Congrès de l'Acfas
Type : Colloque
Section : Section 400 - Sciences sociales
Description :Ce colloque s’intéresse aux multiples manières par lesquelles les nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) modifient l’accès à la culture. Plus particulièrement, il cherche à identifier l’évolution des relations entre formation du goût et dispositifs de prescription ou de recommandation, compte tenu de l’émergence de nouveaux réseaux sociaux dans leurs dimensions tout autant interactives que technologiques. La recherche sociologique a pris acte depuis plus d’une quarantaine d’années de la démultiplication des rapports à la culture et la montée de l’éclectisme en matière de passion et d’intérêt culturel. Le numérique est venu à la fois renforcer et problématiser ces phénomènes. La multiplication des contenus oblige en effet à des processus poussés d’éditorialisation, ce qui tend à accentuer plutôt qu’à éliminer les logiques et dispositifs de prescription (recommandation, découverte, évaluation et classement). Filtres et relais culturels se reconfigurent, posant de la sorte à nouveaux frais la question des rapports de force et des inégalités au sein du champ culturel. Qu’advient-il du jugement et de la critique au sein d’une culture marquée par la montée des « prosommateurs » et où se brouillent les frontières conventionnelles entre professionnels et amateurs? Qu’en est-il du rôle de prescription des groupes de pairs au sein des nouvelles communautés virtuelles? Qui sont et que font ces nouveaux tastemakers et gatekeepers de l’ère numérique : agrégateurs et sites de recommandation de toutes sortes? Comment favorisent-ils un accès différencié à l’information et aux contenus culturels? Les modes opératoires des nouveaux prescripteurs étant conditionnés par l’architecture des sites Internet (interface et algorithmes), dans quelle mesure ces nouvelles « lois » de programmation agissent-elles comme filtres?
Dates :- Jonathan Roberge (INRS - UCS - Institut national de la recherche scientifique - Urbanisation Culture Société)
- Guy Bellavance (INRS - Institut national de la recherche scientifique)
Programme
Mot de bienvenue
Conférence d'ouverture
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Les effets incertains de la recommandation en ligne sur les goûts et les marchésJean-Samuel Beuscart (À déterminer)
Éditorialisation, participation et espace public numérique
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Tendances et enjeux de la prescription numérique : entre algorithmes et curation, marketing et critiqueJonathan Roberge (INRS - UCS - Institut national de la recherche scientifique - Urbanisation Culture Société)
Il s'agira ici de poser certaines bases pouvant servir à mieux cerner ce qui peut être entendu par « nouveaux prescripteurs et transformation des goûts à l'ère numérique ». Quatre logiques semblent aujourd'hui se déployer, mais aussi entrer en conflit ou du moins tenir dans un équilibre instable. La première est l'émergence d'outils techniques de plus en plus raffinés afin de prescrire des contenus culturels. Des géants comme Google ou Itune personnalisent leurs recommandations et classements en créant ainsi une véritable culture algorithmique (Striphas). Contre cette logique accusée de limiter et d'enfermer les consommateurs, une nouvelle tendance voit le jour qui se pense ou se justifie en tant que curation. Il est question de découverte et de partage, à savoir d'une éditorialisation de contenu qui soit humaine et non technique. Or voilà, ce discours auto-légitimant n'est pas non plus sans difficulté et donne à voir une troisième logique perpétuellement à l'œuvre : celle du marketing, de la vente derrière la prescription. Les curateurs aussi font la promotion de certains produits et « traquent » leurs clients à l'aide d'outils techniques de type google analytique. Au final, si la critique culturelle se voit récupérée par les trois précédentes logiques (Boltanski), elle se pose elle-même comme logique et enjeu, c'est-à-dire comme une certaine obligation à réfléchir à la, ou aux manières dont elle peut se réinventer à l'intérieur du nouvel environnement numérique.
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Prescriptions et transformations des processus éditoriaux d'une émission de radio consacrée à la culture numériqueOlivier Thevenin (Université Sorbonne-Nouvelle (Paris 3))
Le magazine hebdomadaire « Place de la Toile » est une émission radio de France Culture qui traite de la question d'internet et des nouvelles technologies, et de leur rapport à la société. L'émission se compose de deux parties sous forme de débat ou d'entretien autour des mutations qu'entraînent les nouvelles technologies dans la société et la culture, sous des angles variés (politique, philosophie, économie, sciences...). Le producteur et journaliste Xavier de la Porte propose également lors de l'émission une lecture (mise en ligne parallèlement sur son site Internet) et invite un chroniqueur représentant le ressenti des « geeks ». En nous appuyant sur des observations, des entretiens et des correspondances d'auditeurs, nous proposons d'étudier comment, depuis cinq ans, l'émission génère des échanges et transforme l'inclination du journaliste. Nous aborderons par ailleurs la manière dont l'expertise se négocie à la suite de la réception de l'émission - en flux ou par podcast - et la façon dont les individus réagissent par mail ou sur les réseaux sociaux. Pour ce faire, nous nous intéresserons à quelques situations d'infléchissements occasionnées par la réaction d'auditeurs, de pro-amateurs et de pairs qui se manifestent auprès de Xavier de La Porte. Au final, il s'agira d'aborder à travers une sociologie des usages, les modes d'écoute, de participation et d'appropriation radiophonique ainsi que les sociabilités des personnes engagées dans diverses formes d'expression.
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Période de questions
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Pause
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Surveillance des goûts : les dystopies de la participation sur InternetNathalie Casemajor Loustau (UQO - Université du Québec en Outaouais)
Ce qu'il est convenu d'appeler la « recommandation décentralisée » ou « co-production de la promotion » s'exerce de manière privilégiée sur les réseaux socio-numériques qui exploitent le bouche à oreille électronique à l'intérieur de cercles sociaux construits et définis par l'utilisateur. Le réseau social Foursquare permet de partager des recommandations de lieux de sortie à son cercle de contacts en exploitant les fonctions de géolocatisation des téléphones dit « intelligents ». Pour l'utilisateur, l'accès et la création d'un compte sont gratuits, mais le modèle d'affaire du site consiste à collecter des informations sur son profil socio-démographique et celui de ses contacts, enregistrant ses comportements en ligne, ses préférences et ses goûts afin de créer de gigantesques bases de profils revendus par la suite. Foursquare a récemment annoncé qu'il divulguera davantage d'informations privées avec les commerces visités par les utilisateurs : l'activité de recommandation par les pairs se double ainsi d'une activité de commercialisation. Dans ces conditions, les idéaux d'accessibilité et de participation que l'on associe au web « 2.0 » apparaissent bien naïfs. Plutôt qu'un espace public de type habermassien, ne faudrait-il pas décrire le Web comme un espace surveillé et marchandisé ? En centrant mon propos sur l'idéal de la participation, j'interrogerai la pertinence d'une approche théorique de ces phénomènes sous l'angle de la « participation dépendante » (Touraine).
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Revue Orsai, l'édition autrement : prescripteurs culturels à contrecourantNicolás Rodríguez Galvis (Université Paris-Nord (Paris 13))
En 2011, la revue culturelle Orsai, vend, en moyenne, sept mille exemplaires de chacun des quatre numéros de 2010. De plus, « les pdf gratuits de ces éditions furent téléchargés plus de 600 000 fois. » Aujourd'hui, les ventes continuent à être tout aussi exceptionnelles et d'autres projets sont venus s'ajouter : une maison d'édition –où les lecteurs, à travers la communauté virtuelle sont aussi éditeurs- et deux bars/centre culturels (Barcelone et Buenos Aires) –financés par la même communauté-. En trois ans, la revue Orsai, créée à Barcelone par deux argentins et distribuée dans le monde, réussi son pari de modifier les gestes éditoriaux traditionnels par la création d'un modèle économique et communicationnel à contrecourant qui conjugue habilement la qualité, la durabilité et la rentabilité. Orsai ne demande pas des subventions, refuse la publicité, a créé un système de distribution piloté via Internet où les lecteurs deviennent des distributeurs, propose sa revue à un prix en accord avec les revenus moyens du pays du lecteur et a réussi à créer et à fidéliser une communauté de lecteurs à travers leur blog. Cette communication se propose d'analyser le potentiel d'innovation d'Orsai, tant dans les processus de production que dans les dispositifs organisationnels placés au cœur d'une économie de la création qui est principalement basée dans le rapport dynamique que les éditeurs lient avec une cybercommunauté de lecteurs qu'adhère, participe et fait vivre ce projet inédit.
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Période de questions
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Dîner
La place des jeunes dans la transformation des goûts
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Dispositifs numériques et influences croisées chez les jeunes : découverte, transmission et légitimation des goûts culturels, Christian POIRIER (INRS - UCS - Institut national de la recherche scientifique - Urbanisation Culture Société)
Cette communication trouve ses sources à la fois dans les résultats d'une vaste étude de terrain portant sur les formes et les modalités de la participation culturelle des jeunes à Montréal ainsi que dans des réflexions exploratoires liées au développement d'une thèse de doctorat concernant les processus d'acquisition et de légitimation des goûts musicaux. Le terrain nous a permis de prendre la mesure de la complexification des systèmes de découvertes culturelles à l'œuvre notamment dans le cadre de l'utilisation des outils numériques. Ces nouveaux usages ne constituent en effet pas des ruptures totales vis-à-vis des formes traditionnelles de transmission et d'influence en culture (famille, pairs, milieu social, médias). On assiste plutôt à des influences croisées où la technologie vient soit compléter un intérêt culturel, soit ouvrir de nouvelles voies intermédiaires pour des goûts qui pourront être partagés et nourris avec les pairs ou encore la famille. Les jeunes rencontrés se situent alors souvent simultanément dans une multitude d'attitudes et de « mondes » : explorateurs, passeurs, suiveurs… Nous concentrerons notre regard sur les liens qui intègrent les dispositifs numériques aux autres processus de découvertes culturelles, de transmission et de légitimation des goûts.
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Le rôle d'Internet dans la formation du goût musical chez les jeunes : prescription médiatique ou instrumentalisation?Sylvain Aquatias (IUFM du LIMOUSIN)
La musique est devenue un intérêt majeur des jeunes français de 1997 à 2008. Dans le même temps, l'écoute de radio a baissé. Cette montée en puissance est donc probablement en rapport avec les nouveaux modes d'écoute musicale sur Internet. Les interprétations actuelles appréhendent la jeunesse soit comme passive et soumise aux influences médiatiques, soit comme constituée de consommateurs aguerris et critiques2. Qu'en est-il réellement et quelle importance a pris Internet dans la formation du goût musical des jeunes français ? C'est ce que je propose d'examiner à partir d'une recherche articulant données quantitatives et qualitatives. L'enquête quantitative a été menée en 2009 auprès d'une population représentative d'élèves du Limousin (1114 questionnaires). L'enquête qualitative correspond à une vague d'entretiens avec des jeunes nés en 1994, en filière générale ou professionnelle, garçons et filles, portant sur la construction des goûts (trente entretiens). Les données recueillies montrent des compétences de niveaux variés et une relative instrumentalisation des ressources d'Internet pour asseoir des intérêts existants ou ouvrir sur une plus grande variété de musiques. C'est donc davantage les profils d'adolescents qui nous intéresseront selon qu'ils utilisent plus ou moins le web pour former leur goût musical.
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Les nouveaux prescripteurs dans la construction de l'identité culturelle estudiantineStéphanie Pourquier-Jacquin (Université d'Avignon et des pays de Vaucluse)
À un moment ou le jeune adulte acquiert autonomie et indépendance, la construction de son identité culturelle s'ancre à présent dans une actualité et une époque, offrant de fait de nouvelles perspectives dans sa pratique culturelle future. Il devient, en affichant ses goûts, un acteur de sa pratique mais aussi maillon incontournable de l'économie numérique des biens culturels.
Le Web 2.0 et les réseaux sociaux contribuent de plus en plus à établir une proximité entre le(s) public(s) et les producteurs d'objets culturels. La promotion des œuvres passe à présent par les réseaux communautaires puis par le public qui devient à son tour prescripteur auprès de ses différents cercles d'appartenances. De la même façon, les artistes, acteurs en leurs noms-propres sur ces réseaux sociaux, semblent établir par le biais des informations, des photos ou encore des « tweets » une proximité avec leur public en contournant les lieux traditionnels de rencontres artistes-public. Cette communication se propose d'étudier, au regard des premiers résultats d'une enquête menée sur les pratiques cinématographiques des étudiants de l'Université d'Avignon, les nouvelles modalités de prescriptions et l'importance que ceux-ci ont pris dans leurs rapports à la Culture. Désormais, la prescription cinématographique ne se résume pas aux critiques de la presse mais passe par de nouveaux médias : photos, vidéos, forums et parodies sont les moyens actuels de montrer son attraction – ou non- pour une œuvre.
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Période de questions
Chaîne de valeur et réintermédiation culturelle
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La prescription littéraire sur les réseaux socionumériques de lecteursLouis Wiart (Université Paris-Nord (Paris 13))
Les réseaux socionumériques réactivent la pratique des clubs de lecture en lui conférant visibilité et envergure. Des sites proposent aux lecteurs des espaces de communication en ligne qui leur sont dédiés et sur lesquels ils peuvent interagir en fonction de leurs goûts. Au sein de ces sites, la mise en visibilité des pratiques de lecture et leur inscription dans un modèle relationnel conduisent à valoriser la consommation littéraire (prescription de la consommation), tout en stimulant la participation (prescription de l'action). L'internaute est encouragé à lire et à partager autourde ses lectures, ces activités étant amenées à s'alimenter. Nous avons mené une étude sur trois réseaux de lecteurs francophones importants (Babelio, Booknode et Libfly) en prêtant attention aux modalités de déploiement de la participation (outils, fonctionnalités, dispositifs) eten recueillant lestraces d'usageà l'aide d'outils statistiques. Nous constatons que laparticipation sur les réseaux delecteurs est peu engageante. Si cesréseaux prescrivent dans leurs dispositifs beaucoup d'usages, ce sont essentiellement ceux requérant le moins d'effortqui se traduisent par de l'activité, entre autres parce que l'attention est hyperconcentréesur une poignée de titres.Ceci va à rebours de deux éléments de discours souvent véhiculés par les entrepreneurs du Web : celui qui considère que les lecteurs sont fortement impliqués, et celui avançant que les réseaux constituent des vecteurs de diversité littéraire.
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Médiation et prescription du livre à l'ère du numérique au QuébecStéphane Labbé (UQTR - Université du Québec à Trois-Rivières)
L'émergence du numérique au sein de l'industrie québécoise du livre aura stimulé, voire réactivé, les processus de l'intermédiation, de la désintermédiation et de la réintermédiation. Ces processus peuvent avoir des impacts sur les formes de prescription, notamment la sélection éditoriale de l'éditeur, comme sur le rôle même des acteurs de la chaîne du livre en termes de prescription, notamment celui du libraire. À l'heure où toute la chaîne du livre réfléchit sa propre structure afin de répondre à l'émergence du numérique, il importe d'identifier les formes de prescription et les rôles des acteurs à cet égard, et d'observer les processus d'intermédiation, de désintermédiation et de réintermédiation dans l'objectif de mieux comprendre leurs éventuels impacts sur les formes de prescription du livre et sur les rôles des acteurs impliqués.
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Période de questions
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Pause
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La communication du vin sur les réseaux sociaux : une dynamique relationnelle et situationnelle complexeMarie-Caroline Heïd (Université Montpellier Sud de France)
L'institutionnalisation du métier de « community manager » participe à une reconfiguration des métiers, avec parfois « des reconversions ou des diversifications de tâches » (Michel). Nous proposons de mener une analyse des pratiques des communicants dans le secteur viti-vinicole, sur un réseau social spécifique : les « pages fans » sur Facebook. Les professionnels chargés d'initier la promotion de leur domaine sur les médias sociaux, pour la plupart autodidactes, prennent souvent appui sur leurs pratiques micro-sociales ordinaires pour les adapter au cadre professionnel (De Lavergne, Heïd). Cependant, cette activité apparaît comme complexe dans le sens où elle découle de besoins organisationnels variés. Elle nécessite aussi d'adapter la communication d'un produit du terroir aux logiques contemporaines du web social tout en prenant en compte les besoins des usagers. Nous analyserons cette dynamique au travers de trois pôles : les interfaces de ces pages qui proposent un rôle et des pratiques spécifiques aux internautes, les enjeux des professionnels, déclinés sur plusieurs niveaux, et enfin les pratiques des usagers qui vont s'engager sur ces médias. Dans cet objectif, nous prendrons appui sur des données recueillies dans le cadre d'entretiens semi-directifs menés auprès de communicants du secteur viti-vinicole dans le Languedoc-Roussillon. Nous complèterons par des observations approfondies des prescriptions d'actions relevées sur les pages Facebook qu'ils animent.
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Métadonnées informatiques et mobilisation des connaissances de l'industrie culturelle de la musiqueJean-Robert Bisaillon (INRS - UCS - Institut national de la recherche scientifique - Urbanisation Culture Société)
Les métadonnées constituent un outil devenu incontournable pour identifier et sélectionner les contenus culturels numérisés en ligne, ainsi que pour comprendre les comportements de consommation qui y sont associés. Les métadonnées sont aussi à la base des logiques de perception et de répartition des droits de propriété intellectuelle des produits culturels circulant sur ces réseaux. Elles permettent de lier l'offre à la demande en ligne, et de faire fonctionner les moteurs de recommandation. La visibilité de l'offre culturelle en ligne repose de la sorte sur un usage éclairé des métadonnées. Cette nouvelle condition de visibilité interpelle en outre la politique culturelle de numérisation, posant notamment l'exigence de conformité aux normes et standards mondiaux d'interopérabilité d'une offre désormais planétaire. L'objectif de cette communication est d'exposer les étapes d'une mobilisation de l'industrie de la musique enregistrée autour de la création d'un prototype de logiciel d'indexation de métadonnées et d'un entrepôt de sauvegarde de celles-ci. Ce projet baptisé TGiT, en cours de co-construction, mobilise près d'une douzaine d'acteurs professionnels de l'industrie musicale québécoise. L'exposé décrira les enjeux, contraintes et opportunités d'un tel exercice en regard de la situation particulière de l'industrie musicale et des institutions culturelles québécoises chargées de la conservation et de la promotion d'un répertoire culturel québécois et francophone.
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Le Web 2.0 et l'industrie de l'humour québécoise francophone : créativité, diffusion et rapports de forceChristelle Paré (INRS - Institut national de la recherche scientifique)
L'industrie de l'humour au Québec vit présentement de grandes transformations et le Web 2.0 en est en partie responsable. On y retrouve de tout : promotion de spectacles, vente de billets, sketches, séries web, porte folios, podcasts, sites personnels, spectacles diffusés en direct, etc. Malgré un certain retard, et ce comparativement aux industries de l'humour américaine et anglo-canadienne, les artistes de l'humour québécois, et tout particulièrement la relève, commencent à investir ce territoire. On peut notamment repérer que le Web 2.0 influence la créativité et sa diffusion, qu'il s'agisse des nouveaux outils qu'il met à contribution ou de l'accès direct au public qu'il permet, tout en présentant la possibilité, plus répandue mais encore parcimonieuse, d'y faire quelque profit. Le Web 2.0 joue également sur les rapports de force présents entre les acteurs de l'humour. Ceux qui le maîtrisent obtiennent une meilleure visibilité, et parfois même une meilleure crédibilité. On note aussi que des conflits peuvent y éclater, par sites Web interposés. Le tout peut rapidement entraîner dans la mêlée les admirateurs des parties impliquées et même conduire parfois à de l'autocensure suite à de trop grandes pressions, voire menaces, de la part de certains fans. Notre présentation permettra d'explorer l'ascendant du Web sur l'industrie de l'humour au Québec, et ce à l'aide d'entretiens semi-dirigés, d'une recherche documentaire et d'articles de presse.
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Période de questions
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Dîner
Communautés, réseaux et démocratisation de la culture numérique
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Les communautés Flickr et l'art public : nouveaux regards?Suzanne Paquet (UdeM - Université de Montréal)
Dans les groupes Fickr, la photographie rassemble de nombreux individus autour d'images d'un même motif. Il y a donc là dualité d'une posture d'amateur : on partage, d'une part, ses affections et ses réflexions sur l'objet photographié et, d'autre part, des savoirs sur la technique photographique et des commentaires sur la réussite des prises de vue. De cette dualité procède la formation de communautés de goût qui sont agissantes, la photographie devenant tout à la fois témoignage d'un double attachement et exercice même de cet attachement. La « pragmatique de l'amateur » décrite par A. Hennion ne saurait trouver meilleure illustration, comme si le goût se pratiquait littéralement. Hennion parle d'un goût en acte qui agirait comme « modalité d'attachement au monde », de co-construction « du collectif qui aime et du répertoire des objets aimés ». La photographie est ainsi l'instrument médiateur d'une passion qui s'expose et qui peut avoir un effet prescripteur. Afin d'examiner ce goût en acte, je propose de suivre quelques groupes Flickr créés autour de l'art public. Ce choix semble approprié car, avant l'arrivée du web 2.0, ce type d'art était sujet à discussions dans la sphère publique, des débats maintenant susceptibles de se poursuivre à une autre échelle. De très nombreuses communautés se rassemblent autour de l'art public de certaines villes ou régions et plusieurs d'entre eux ont des vocations spécifiques, comme les groupes « Bad Public Art » ou « Ugly Public Art ».
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Des sociabilités numériques pour une autre forme de prescription et de diffusion : le cas du panier cultureAlice ANBERRE (Université de Nantes), Anne-France Kogan (Université de Rennes 2)
Le secteur culturel connaît actuellement plusieurs questionnements : limites de la démocratisation/participation ; statut des artistes ; légitimité de l'intervention publique, etc. En réponse à cela, de nouvelles façons de créer et de diffuser émergent. Le modèle traditionnel d'une élite savante prescrivant le « bon goût » est complété par un modèle alternatif où la prescription est partagée au profit d'une nouvelle hiérarchisation. Internet est venu renouveler les figures de la démocratie. Une diversité de pratiques politiques se développe, comme celles liées au web participatif. Elles défient les conceptions classiques de la solidarité, en valorisant l'excitation pour le nouveau et l'exploration. Malgré leur diversité, elles incorporent une forme de vie démocratique qui leur est suffisamment idiosyncrasique pour leur être associée. Comment ces valeurs portées par Internet et le champ culturel se font-elles écho ? Permettent-elles de nouvelles modalités de prescription et de diffusion ou reposent-elles sur d'autres rapports de force ? Dans ce contexte, nous menons une recherche-action autour d'un cas précis : le panier culture. Cette initiative d'un circuit-court vise à désintermédier la diffusion culturelle et à développer des relations durables entre publics et artistes. Elle fonctionne selon le schéma suivant : Les premiers résultats présenteront les modalités organisationnelles expérimentées dans sa mise en œuvre, ses valeurs et la façon dont le numérique les modifie.
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Un nouveau moteur de prescription sur la Toile : l'externalisation ouverte et ses impacts sociauxLouis Melançon (INRS - UCS - Institut national de la recherche scientifique - Urbanisation Culture Société)
L'externalisation ouverte (crowdsourcing) est parmi les méthodes d'éditorialisation les plus ingénieuses qu'on ait élaborées en réponse au problème de la croissance exponentielle des contenus numériques. On observe sur les services web appliquant cette mécanique que la popularité et la diffusion de ces contenus s'autoalimentent comme par un formidable effet d'entrainement — la sociologie parle aussi de facteur de ralliement ou de bandwagon effect. Or, à l'aspect psychologique de ce phénomène vient s'attacher des facteurs économiques et surtout technologiques qui changent particulièrement la donne sur le web. En laissant par exemple presque exclusivement au soin des internautes cette tâche d'analyse et de prescription du contenu, le site web Reddit.com est rapidement devenu incontournable sur la Toile. L'observation de la communauté bâtie autour de Reddit sera ainsi l'occasion d'étudier l'intersection de trois nouveaux régimes : interactionnel, économique et technique. À travers l'évolution de la structure du site et de ses algorithmes, d'une part, ainsi que l'analyse du contenu partagé, de l'autre, apparaissent certaines tendances telles a) la prépondérance de l'image sur le texte, b) la vitesse croissante de transmission de l'information et c) la ludification (gamification) comme source de motivation et de contrôle — sur lesquelles il est essentiel de se pencher afin de mieux comprendre tout service web faisant appel de près ou de loin à l'externalisation ouverte.
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Période de questions
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Pause
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Mes amis les pirates : analyse d'un réseau de socialité du piratage culturelMartin Tétu (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Le piratage n'est pas un phénomène qui évoque spontanément l'idée de socialité. Le piratage culturel, comme partage non autorisé de produits culturels via Internet, n'apparaît pas non plus comme une pratique de communication interpersonnelle en soi. D'abord, les millions d'internautes s'y adonnant (Liu et al.) semblent surtout motivés par l'acquisition de contenus numériques (films, livres, musique, etc.), contribuant à une nouvelle culture de la gratuité (Proulx et Goldenberg). Ensuite, le caractère potentiellement illégal de la pratique pourrait constituer un frein à une socialité large et soutenue. Or, une observation attentive du piratage culturel montre plutôt qu'existe là un véritable réseau de socialité (et peut-être même une sous-culture). Les ‘pirates' ont d'autres amis pirates, reconnus comme tel sur les plateformes numériques. Ils interagissent fortement entre eux via des commentaires, ainsi que par la participation à des forums ouverts. L'intérêt de dégager les dynamiques sociales à l'œuvre est multiple. On pourra identifier un lien possible entre popularité d'un pirate et sa qualité de trendsetter. On pourra aussi discerner la popularité d'un pirate sur la base des types de produits qu'il amène au réseau (action formelle) et sur son type d'interaction (qualité relationnelle).Cette présentation se veut ainsi une contribution à l'étude de la prescription des goûts et, plus largement, sur la recomposition de la socialité dans les réseaux du Web 2.0.
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De la boîte poussiéreuse à Google Streetview : Historypin et la contextualisation photographique des images du passéPhilippe Poliquin (INRS - UCS - Institut national de la recherche scientifique - Urbanisation Culture Société)
Notre présentation se situe dans la littérature sur le patrimoine pictural à l'ère du Web 2.0 et les motifs de contributions des usagers tout en exposant les hypothèses et résultats d'un cas de numérisation d'archives photographiques de particuliers à l'écomusée de Parc-Extension à l'hiver 2013. Le site Historypin permet d'intégrer une photographie sur Googlemaps par géolocalisation et, parfois même, de superposer une photographie d'hier sur le décor d'aujourd'hui. Ce site permet du coup de réfléchir sur la médiation culturelle «d'une poétique de l'ordinaire» (de Certeau) à partir d'images de la vie familiale. Au contraire d'organismes documentaires officiels (bibliothèques et musées) n'obtenant qu'une faible interaction avec l'usager, l'exposition du patrimoine photographique de particulier produit un mouvement d'entraînement participatif accru chez l'usager puisqu'il s'exprime sur un «soi» post-moderne via l'interactivité technique (Casemajor). À la recherche d'un projet mobilisateur, l'écomusée a choisi d'organiser des collectes de photographies prises dans le quartier entre 1940 et 2000. Nous évaluerons l'effet d'entraînement de cette initiative – par exemple, d'autres organismes ou particuliers déposeront-ils eux-mêmes des photographies de Parc-Extension ? ou encore, la fréquence de l'achalandage sur le site et les commentaires des internautes— et les motifs (nostalgie, sentiment d'appartenance au quartier) attenants à la participation de chacun.
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Période de questions
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Pause
Conférence de clôture
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Pour une typologie des métriques du webDominique Cardon (Orange Labs)
Conférence de clôture reprenant les éléments essentiels ayant été développés lors de ces deux journées de colloque.