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Olivier  Morisset - Concours de vulgarisation - 2008
Lauréat

Olivier Morisset

UQAM - Université du Québec à Montréal

Guerre biologique en verger de pommiers

Source : Olivier Morisset
Les chenilles du carpocapse endommagent la chair des pommes.

Concours de vulgarisation de la recherche 2008

Petite chenille, gros appétit

Le carpocapse de la pomme est un minuscule papillon brun détesté des pomiculteurs. Ses chenilles sont friandes des pommes et leur causent des dommages importants. Elles peuvent être responsables de plus de 80 %  des dommages dans un verger.Contrairement à certains ravageurs qui causent des blessures mineures aux pommes, les chenilles du carpocapse les endommagent sérieusement, les rendant invendables. Dès l’éclosion des œufs, qui sont pondus sur les fruits ou les feuilles voisines, les larves creusent un tunnel vers le cœur des pommes, où elles passeront l’essentiel de leur vie larvaire.Au mois de septembre, la majorité des pommes infestées par des larves de carpocapse tombent au sol. C’est alors que les larves rose pâle, longues de cinq millimètres, sortent de leur cachette afin de chercher un abri pour l’hiver. La plupart du temps, elles trouvent refuge sur l’écorce d’un pommier, où elles tissent un confortable cocon de soie. Elles se métamorphoseront ensuite en chrysalides et deviendront papillons l’été suivant.

Le carpocapse a un ennemi mortel : la guêpe de l’espèce Trichogramma minutum, aussi appelée trichogramme. Avec moins d’un millimètre de longueur, c’est le plus petit insecte au monde. Mais attention, cette minuscule guerrière peut semer la mort dans les rangs des carpocapses !Les trichogrammes sont des parasitoïdes oophages : ils tuent leurs hôtes en parasitant leurs œufs. Ils sont si petits qu’un œuf de carpocapse de la pomme peut contenir jusqu’à trois œufs de trichogrammes. Les larves émergentes se nourrissent du contenu riche en protéines de l’œuf de carpocapse.La larve se transforme d’abord en nymphe, puis en adulte. Au stade adulte, la guêpe sort de l’œuf parasité avec une seule ambition : s’accoupler et trouver d’autres œufs à parasiter. Elle n’aura pas de temps à perdre, car les guêpes ne vivent qu’une semaine !

Un allié sous forme de virus

Aussi efficaces soient-elles, les guêpes parasitoïdes ne parviennent pas à éliminer tous les carpocapses du verger. Elles ont donc besoin d’un allié efficace : le virus de la granulose du carpocapse.Ce virus, aussi appelé CpGV, existe de façon naturelle dans les vergers. Lorsqu’une chenille en avale une quantité suffisante, elle meurt après quelques jours en se liquéfiant. Le CpGV a été découvert en 1964 dans un petit village du nord du Mexique. Des centaines d’études ont été effectuées pour évaluer son potentiel insecticide contre le carpocapse.Rien de plus facile que de fabriquer un insecticide à base de virus… Il suffit d’élever de grandes quantités de chenilles, de leur imposer un régime alimentaire infecté au virus et, lorsqu’elles sont bien grosses, de les broyer ! Le virus peut ensuite être filtré et mis en bouteille. Dans le verger, le pomiculteur n’aura qu’à diluer la formulation dans de l’eau et à l’appliquer sur les pommiers avec un pulvérisateur conventionnel.

Au Québec, la majorité des pomiculteurs combattent les carpocapses à l’aide d’insecticides chimiques. Ces produits sont très efficaces, mais très nocifs pour les insectes bénéfiques, l’environnement et la santé humaine.L’utilisation des trichogrammes et du CpGV est une alternative écologique à grand potentiel. Le hic, c’est qu’il en faut beaucoup. Vraiment beaucoup. On doit relâcher au moins un million et demi de guêpes par hectare pour espérer diminuer une population de carpocapses. Pour ce qui est du virus, il en faut 3 x 1013 virions par hectare !Plusieurs traitements sont nécessaires pendant l’été pour éviter que les pommes soient attaquées par les carpocapses. À court terme, il en coûte deux fois plus cher au pomiculteur s’il adopte la lutte biologique dans son verger. Par contre, le coût environnemental sera nettement moindre, ce qui est avantageux à long terme.

Virage vert en pomiculture

La pomiculture est le secteur agricole qui utilise la plus grande quantité de produits chimiques. L’être humain n’est pas seul à convoiter les pommes. Pas moins d’une cinquantaine d’espèces d’insectes s’attaquent à ces fruits, sans compter les maladies comme la tavelure et la brûlure bactérienne. Un vrai casse-tête pour les producteurs! Malgré le défi que représente la lutte biologique, de plus en plus de pomiculteurs québécois se lancent dans l’aventure. Emmanuel Maniadakis, de Franklin en Montérégie, est l’un de ceux qui ont fait le saut vers la culture biologique. « J’en avais assez d’interdire à mes enfants de jouer dans le verger quand j’appliquais des produits chimiques. » Depuis l’année dernière, M. Maniadakis produit des pommes bio. Et il paraît qu’elles sont bonnes. « Encore meilleures que les pommes ordinaires ! » souligne-t-il avec fierté.          

L’être humain n’est pas seul à convoiter les pommes. Pas moins d’une cinquantaine d’espèces d’insectes s’attaquent à ces fruits, sans compter les maladies comme la tavelure et la brûlure bactérienne.