Aller au contenu principal
Il y a présentement des items dans votre panier d'achat.
Jean-Bastien Lambert - Concours de vulgarisation - 2012
Lauréat

Jean-Bastien Lambert

UQAM - Université du Québec à Montréal

Arbres morts bien vivants

Source : Jean-Bastien Lambert

Ces restes sont en fait des arbres morts, vitaux pour tous les systèmes forestiers planétaires. Pour le règne végétal ou animal, ils rendent de généreux services écologiques.

L’un de ces services est de favoriser la germination des semis d’arbres, dont ceux du bouleau jaune. La raréfaction de ce bouleau dans nos forêts serait-elle alors liée au manque de disponibilité du bois mort sur les sites de coupe?

Forêts perturbées

En forêt « naturelle », c’est généralement sur les buttes créées par le déracinement des arbres, là où le sol minéral est exposé, que les graines du bouleau se développement en jeunes plants. Ils apprécient la lumière passant par les trouées dans le couvert des forêts feuillues.

En forêt « exploitée », le bouleau jaune a de la difficulté à compléter son développement. Et ce, même si on pratique les « coupes de jardinage », moins drastiques parce que les arbres à couper sont choisis individuellement.

Il importe donc de connaître où poussent les semis de bouleau jaune sur ces sites si l’on veut comprendre la cause de sa diminution et renverser cette tendance.

Économiser son carbone

Le bouleau jaune utilise parfois le sol minéral comme pouponnière, mais surtout le bois en décomposition. Mais pas n’importe lequel. Le bois de conifère et ses propres restes sont les plus propices à son établissement.

Pour comprendre l’intérêt du bouleau jaune à s’installer sur le bois mort, il faut s’attarder à la manière dont il « investit » le carbone capté par l’intermédiaire de la lumière. Où va ce carbone, vers les racines, la tige, les branches ou les feuilles?

Analyse des investissements

Nous avons trouvé que la quantité de racines fines, responsables de l’absorption des éléments nutritifs et de l’eau, est plus élevée pour les individus élevés sur le bois mort. À l’opposé, la croissance est beaucoup plus explosive chez les individus sur sol minéral.

Plus prompts à investir leur carbone dans des projets risqués, voici la stratégie des bouleaux jaunes sur sol minéral. Ils préconisent un large système foliaire, mais moins de racines fines. Bien que cet investissement soit payant à court terme et induit une forte croissance, il comporte des risques lorsque le « marché » de la lumière et de l’eau s’effondre.

À l’opposé, les individus sur le bois mort sont plus économes. Ils croissent lentement et investissent plus de carbone dans la construction d’un large système racinaire. Cette stratégie les rend moins susceptibles aux stress liés aux changements de lumière. Une rétention d’eau supérieure dans le bois mort viendrait également contribuer à un meilleur retour sur investissement. Il en ressort que des stratégies plus économes induisent une résilience accrue en période de crise.

Les individus poussant sur bois mort sont donc mieux outillés pour faire face aux conditions rencontrées dans les forêts aménagées par coupe de jardinage.

Faire du nouveau avec du vieux : leçons

De pouponnière à stimulateur de la survie des semis, le corps des arbres morts joue donc un rôle central; rôle qu’on a trop longtemps négligé. Si l’on veut s’assurer de conserver des forêts feuillues diversifiées, cet élément doit être considéré dans une démarche novatrice et moderne d’aménagement forestier. Rien n’est plus vivant que le bois mort, comme diraient certains spécialistes.