Informations générales
Événement : 81e Congrès de l'Acfas
Type : Colloque
Section : Section 400 - Sciences sociales
Description :Ce colloque sera l’occasion de discuter des pratiques émergentes de l’ethnographie organisationnelle et de souligner sa contribution à la compréhension des organisations. Les travaux de recherche relevant de l’ethnographie organisationnelle ont contribué à explorer, au quotidien, les pratiques des acteurs, et plus précisément de « voir les organisations de l’intérieur » (Laude, 2012) que ce soit des entreprises privées, des hôpitaux, des organisations gouvernementales ou non (Orr, 1996; Grosjean et Lacoste, 1999). Or, les organisations contemporaines se complexifient et évoluent dans un environnement mouvant et incertain. Elles sont devenues plus complexes, fragmentées, dispersées (Borzeix et Cochoy, 2008). Pour tenter de saisir et comprendre toute cette complexité, les chercheurs adoptent une conception dynamique de l’organisation (Langley et Tsoukas, 2010), celle-ci apparaissant alors comme le produit d’un travail continu d’« organizing » (Czarniawska, 2009). Le but est alors de mieux comprendre comment une organisation se constitue, évolue, se transforme, innove, apprend, négocie ses tensions internes et parfois s’effondre, en se positionnant au cœur de l’action, au cœur de l’organisation. Les chercheurs font l’hypothèse que la compréhension des pratiques effectives des acteurs organisationnels, de la manière d’agir et d’être d’une organisation passe par un travail de type ethnographique. On constate que les méthodes mises en œuvre dans des travaux récents se diversifient et évoluent afin de rendre compte du travail d’organisation (« organizing ») qui s’accomplit au quotidien, et de saisir toute la complexité des organisations (Ybema et al., 2009; Yanow, 2009; Watson, 2011). On voit émerger de nouvelles formes d’ethnographie organisationnelle telles que : le shadowing, l’ethnographie multimodale, la photoethnographie, l’autoethnographie, etc.; autant de pratiques émergentes que nous souhaitons discuter dans le cadre de ce colloque.
Dates :- Sylvie Grosjean (Université d’Ottawa)
- Carole Groleau (UdeM - Université de Montréal)
Programme
Conférence plénière (1)
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Mot de bienvenue
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Ethnographie organisationnelle : d'hier à demainLinda Rouleau (HEC Montréal)
Dans les dernières années, on assiste à un retour en force de la démarche ethnographique dans les études en management et en théories des organisations. Alors que la démarche ethnographique avait été centrée sur l'analyse de situations organisationnelles spécifiques, elle donne maintenant lieu à une diversité de nouvelles formes et pratiques de recherche adaptées au contexte contemporain des nouvelles formes organisationnelles. À partir de mes expériences de recherche, cette présentation discute des apports, des enjeux et de l'avenir de cette méthode de recherche. Elle prendra comme point de départ mes démarches ethnographiques dans une entreprise et lors d'une expédition en milieu extrême. La comparaison des points communs et divergents de ces formes d'ethnographie permettra de montrer pourquoi l'ethnographie organisationnelle est une méthode de recherche privilégiée pour quiconque s'intéresse à la mise en action des savoirs locaux et des pratiques organisationnelles. De plus, cela permettra de réfléchir sur les enjeux associés au développement des nouvelles formes de démarche ethnographique. Enfin, la présentation se terminera en abordant les enjeux reliés à la diffusion des travaux réalisés à partir d'une démarche ethnographique.
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Période de questions
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Pause
Shadowing d'acteurs / Shadowing « spatialisé » : suivre le travail d'organisation
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Approcher la fabrique quotidienne du parlement canadien : de l'intérêt de la combinaison des principes de l'ethnographie et de la sociologie pragmatisteMariève Forest (Université d’Ottawa)
Considérer le parlement canadien comme une organisation complexe permet d'introduire une approche de sa densité en mouvement. Lors de cet exposé, c'est via le bourdonnement quotidien des activités d'une députée que j'introduirai une compréhension originale des valeurs, règles et compétences privilégiées au sein des structures organisationnelles proches de la chambre des communes. Il s'agira en outre d'expliciter l'intérêt du croisement entre certains principes de la sociologie pragmatiste et la technique du suivi d'une personne (shadowing) en ethnographie. Ce faisant, des mises en récit portant sur des épreuves et arènes publiques spécifiques seront présentées en insistant sur les moments quotidiens d'incertitude qui, au final, renseignent sur les ordres normatifs donnant forme quotidiennement au parlement canadien.
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Accéder à l'espace au cœur des pratiques organisationnelles : les apports de la méthode des parcours commentésAnni BORZEIX (PREG-CRG de l’Ecole Polytechnique), Nathalie Raulet-Croset (Université Panthéon-Sorbonne (Paris 1))
Cette communication s'intéresse à une méthode ethnographique spécifique, celle des parcours commentés, et défend l'idée qu'elle permet d'appréhender la dimension spatiale des pratiques dans les organisations. La méthode s'appuie sur un « shadowing » spatialisé, dans la mesure où le chercheur marche avec la personne observée, et converse avec elle, pour analyser son rapport à l'espace. L'espace est analysé en tant qu'il est constitutif des pratiques organisationnelles et en particulier de la coordination entre acteurs. L'espace joue sur la coordination, car il se crée sur l'espace des frontières matérielles et symboliques, qui créent des cohésions ou peuvent au contraire repousser certains acteurs. Le cas empirique est celui de la prise en charge des phénomènes d'incivilités urbaines, au sein d'organisations mouvantes et éphémères, qui réunissent des acteurs autour de ces phénomènes considérés comme volatiles et récurrents.
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Pause
Ethnographier les organisations politiques/militantes
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Du caractère innovant et socialement situé de l'ethnographie organisationnelle : l'analyse du mouvement Terre de liens en FranceElsa Pibou (Université de Toulouse II - le Mirail)
L'enquête ethnographique et l'engagement du chercheur sur son terrain facilite sinon permet l'observation in situ des logiques et conflits à l'œuvre dans une organisation. Pourtant la construction de l'objet de recherche, les méthodes utilisées et la posture même du chercheur de terrain ne sont pas neutres et font de la recherche à l'œuvre un processus socialement situé. Au regard de l'analyse de l'organisation Terre de liens en France, mouvement alternatif dans le paysage foncier agricole - qui grâce à de l'épargne citoyenne achète et loue des terres agricoles à des porteurs de projets qui ne sont pour la plupart pas issus du monde paysan - nous proposons d'interroger nos modalités d'investigations et d'adopter une posture réflexive. Il s'agira in fine de réfléchir à ce qui est susceptible de faire innovation pour l'ethnographie organisationnelle.
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Ethnographie des institutions partisanes. Plaidoyer pour un renouvellement de l'étude des organisations politiques par une ethnographie des institutionsJulien Fretel (Université de Picardie)
Une analyse des partis politiques en tant qu'institutions promeut une réflexion qui pose une double question : quels rôles partisans autorisent telle ou telle institution partisane d'une part, et quels types d'institutions partisanes se choisissent d'investir tels ou tels partisans d'autre part ? Cette problématique dialectique exige de mettre en œuvre une ethnographie des organisations relevant trois défis. Le premier, demande de combiner approche « micro/macro » pour saisir de quelle façon chaque partisan investit le groupement qui l'enrôle. Le second impose de savoir réaliser un jeu d'échelle local/national pour tenir ensemble les fils constitutifs du parti, en son siège comme dans ses différents territoires. Le troisième est stratégique et éthique en ce sens qu'il invite le chercheur à imaginer une observation assidue et intense pour devenir un familier sachant garder les bonnes distances.
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Dîner
Conférence plénière (2)
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Le suivi matériel-sémiotique d'agencements : l'observation de l'« organizing » dans l'analyse de la fiabilité organisationnelleEddie Soulier (UTT - Université de Technologie de Troyes)
Le projet REACT a pour but de favoriser la réactivité à l'imprévu par la reconstruction collective du sens de la situation. Le terrain d'expérimentation met en scène le Groupe de Ravitaillement en Vol (GRV), petit collectif composé de 4 membres (pilote, copilote, opérateur de ravitaillement en vol et navigateur) auxquels s'ajoutent des contrôleurs aériens et des centres techniques et disposant d'un simulateur de vol d'avion ravitailleur Boeing C-135. L'approche s'appuie sur la notion d' « agencement » qui permet le suivi des coordinations et l'expérimentation d'une solution standardisée pour l'encodage et l'analyse des comportements, en vue de leur (re)représentation sous forme d'hypergraphes permettant l'exploration des données.
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Période de questions
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Pause
Photoethnographie / vidéoethnographie / autoethnographie : travail visible/invisible en organisation
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L'autovidéoethnographie : une exploration méthodologiqueNicolas Bencherki (State University of New York at Albany)
Je propose ici une exploration de la méthode autovidéoethnographique, à savoir celle où le chercheur est lui-même présent dans les enregistrements vidéo qu'il fait d'un terrain donné. À partir de la littérature concernant l'ethnographie, l'autoethnographie et la vidéoethnographie, je propose d'initier une réflexion méthodologique concernant la combinaison de ces approches. Cette approche prête flanc aux critiques des trois méthodes, mais apporte-t-elle aussi des réponses ? Je suis particulièrement intéressé à la possibilité d'une analyse d'interaction dans ce contexte, en posant une attention particulière au rôle de la connaissance préalable du chercheur du « contexte » de l'interaction.
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Quelle épistémologie visualiste pour l'ethnographie organisationnelle? L'aire du photographiable et l'aire du photographié sur le terrain d'organisations policières et militairesMichaël Meyer (UNIL - Université de Lausanne)
Cette communication pointera la question de la prise de vue photographique comme ressource d'une ethnographie « visualiste » des organisations armées. Elle évoquera pour cela deux modes d'instrumentation des images durant l'enquête de terrain : la prise de vue embarquée et la photographie comme support d'entretien. La photographie en tant qu'objet de curiosité, de discussion et de confrontations intersubjectives peut en effet profiter au chercheur dans son engagement sur des terrains organisationnels de plus en plus soucieux de leur « image publique ». Elle devient une ressource d'« échange de vues » et un outil pour faire émerger les arrière-plans du travail des membres des organisations étudiées. À travers l'exemple d'une ethnographie de la police en Suisse (2005-2011) et secondairement d'un projet similaire d'ethnographie de l'Armée Suisse (dès 2012), la communication proposera un compte-rendu méthodologique sur trois enjeux liés à l'introduction d'une épistémologie visualiste dans la boîte à outils de l'ethnographie organisationnelle : la négociation des images, la perturbation des situations mises en image et la stimulation des enquêtés.
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Champ et hors champ : le « comment mourir » dans un service hospitalierCaroline LAMBERT (HEC Paris), Marie-Astrid Le Theule (CNAM - Conservatoire national des arts et métiers)
A l'hôpital, la question du processus du mourir est une décision qui est prise au niveau des médecins au cours des négociations avec l'équipe médicale, avec la famille et quelquefois avec le patient. Pour répondre à la question comment est gérée la mort dans un service hospitalier ?, nous avons été pendant deux ans dans un service de gériatrie en soins palliatifs et soins aigus deux jours par semaine. Et nous avons filmé pendant 15 jours (y compris le week-end et la nuit) la vie du service. La caméra devient le témoin de ce travail auprès des patients, des négociations entre les médecins, infirmiers, aides-soignants, famille et patient. A l'aide des carnets de notes et des séquences filmés, nous décrirons le parcours de deux patients, les négociations, les choix de décisions entre médecins, famille et patient. Le travail ethnographique permettant de créer la confiance, et d'être au plus proche de situations délicates, le film est le témoin de ce travail invisible auprès des patients.
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Pause
Ethnographier les « manières de faire », « manières de dire », « manières d'être » : construire et déconstruire les pratiques organisationnelles
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Vers une ethnographie organisationnelle « constructiviste » et orientée « pratique »Pascal Lievre (UdA - Université d'Auvergne), Géraldine RIX-LIÈVRE (Clermont Université)
L'objet de cette contribution est de donner un cadre théorique à une posture ethnographique de l'organisation que nous avons développée depuis plusieurs années dans le cadre d'une investigation des projets dans des environnements extrêmes, tels que les expéditions polaires. Nous décrivons cette posture d'ethnographie organisationnelle comme «constructiviste» et orientée «pratique».
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Technographie des pratiques d'écriture en milieu hospitalier : regards croisés sur une pratique organisanteNathalie SOUF (Université de Toulouse), Marie BOMBAIL (Institut Claudius Regaud), Frédéric DESPIAU (Institut Claudius Regaud), Anne MAYÈRE (Université de Toulouse), Philippe Marrast (Université de Toulouse), Pascale ZARATÉ (Université de Toulouse)
Cette communication est une co-écriture entre chercheurs de trois domaines scientifiques et deux cadres de santé d'une organisation hospitalière spécialisée en cancérologie. Nous proposons d'explorer l'activité coopérative entre soignants et la matérialité des situations de travail dans les services de soin à travers une approche originale dérivée de la grounded theory et centrée sur les pratiques d'écritures. Nous utilisons la théorie de l'instrumentalisation pour analyser la situation de tension entre pratiques d'écriture liées au script ambiant et celles liées à la pré-scription informatisée. Dans le cadre de cette « technographie » des pratiques d'écriture, nous proposons d'explorer plus particulièrement les pratiques d'annotations comme marqueurs pour caractériser les écrits organisationnels : l'écriture manuscrite comme frontière et comme instrument de l'organizing.
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L'ethnographie organisationnelle ou le désenchantement de l'organisationVincent Petitet (CNRS - Centre national de la recherche scientifique)
Le management contemporain trouve son efficacité dans sa capacité à « enchanter » les organisations. Cet enchantement se définit comme un dispositif d'idéalisation qui vise à produire une image idyllique de l'organisation, à la rendre enviable et à faire adhérer le salarié à son modèle. Or, l'ethnographie organisationnelle montre que cet enchantement est une construction qui se fonde sur une iconographie précise, un discours et un code corporel. Nous en étudierons les modalités en même temps que les méthodes de collecte ethnographique visant à décrire cet enchantement. En déconstruisant le dispositif enchanteur, l'ethnographie parvient de fait à désenchanter l'organisation, c'est-à-dire à en rendre visible le mécanisme d'enchantement qui se veut caché. Cette communication se fonde sur un travail terrain de trois ans au sein d'une importante organisation.
Conférence plénière (3)
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Mot de bienvenue
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L'ethnographe au pays des cliniciensAndré Côté (Université Laval)
En se référant à Rosen (1991), Linda Rouleau stipule que « l'ethnographie organisationnelle consiste à passer une période de temps suffisante dans une organisation pour être en mesure de comprendre comment les gens construisent leur monde social par le biais des multiples rencontres qu'ils effectuent au quotidien » (1993 : 53). En m'intégrant dans le quotidien des activités cliniques au sein d'un centre hospitalier universitaire, il m'a été loisible de comprendre l'importance prépondérante de la confiance dans la dynamique de changement. La comparaison systématique de deux dynamiques de changement, l'une sous l'égide de la confiance, l'autre dominée par des comportements de méfiance, a mis en évidence l'incidence déterminante de la confiance sur les structures sociales, les stratégies employées pour véhiculer le changement et la prédisposition des acteurs sollicités à y souscrire. Sa présence, où son absence explique la particularité de la dynamique de changement qui prend forme dans chacun des systèmes structurels d'interaction et fournit un éclairage sur la résultante du processus de transformation. Bref, l'observation du quotidien m'a permis de comprendre les subtilités des routines d'action et d'interaction et, conséquemment, de faire ressortir les détails qui, la plupart du temps, restent difficilement perceptibles au premier coup d'œil. L'objectif de cette présentation est de vous faire part de ce merveilleux périple au pays des cliniciens qui a duré près de cinq ans.
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Période de questions
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Pause
Ethnography at home : perspectives anthropologiques/démarche ethnométhodologique en organisation
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Perspectives anthropologiques de l'ethnographie organisationnelle : les défis disciplinaires d'une recherche auprès des services de sécurité incendie québécoisKarine St-Denis (UQTR - Université du Québec à Trois-Rivières)
Bien que l'ethnographie soit la méthode de prédilection des anthropologues, l'ethnographie institutionnelle provoque de nombreux questionnements en anthropologie. L'étude des organisations de sa propre société peut-elle engendrer l'éloignement géographique et culturel garant du regard extérieur ? L'ethnographie organisationnelle doit-elle partager la démarche inductive et le séjour prolongé chez l'Autre posés comme caractéristiques des recherches anthropologiques ? Ces questionnements ne sont pas sans conséquence sur la reconnaissance disciplinaire des recherches organisationnelles et ce, d'autant plus, lorsque ces recherches sont effectuées en terrains locaux – anthropology at home. Cette conférence s'intéressera, premièrement, aux mécompréhensions au centre de ces débats anthropologiques. Deux de ces mécompréhensions seront abordées soit : le terrain éloigné en tant que rite de passage anthropologique et l'induction et le séjour prolongé comme voie de connaissance à privilégier. Deuxièmement, les conséquences des ces mécompréhensions sur la réalisation et la reconnaissance des ethnographies organisationnelles seront illustrées à partir de nos travaux auprès des services de sécurité incendie du Québec.
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L'université, étrange et ordinaire : contribution ethnométhodologique à une ethnographie de l'organisationPatrice De La Broise (Université Lille)
Cette proposition entend concilier le transitif (l'objet) et le réflexif (sujet) dans une ethnographie de l'organisation universitaire française. Ce faisant, l'auteur revendique une approche socio-sémiotique, d'inspiration phénoménologique et ethnométhdologique. L'université, lieu du savoir par excellence, forme aussi ce « tout petit monde » qui, dans le bain langagier et l'accomplissement bien compris des pratiques académiques ordinaires, parle et se meut de manière aussi étrange que convenue.
Ici, comme ailleurs, les ethnométhodes participent d'une communication organisante dont elles constituent des objets d'observation privilégiés. L'argument ethnométhodologique invite le chercheur à com-prendre — et donc à saisir les acteurs — dans l'indexicalité et la réflexivité de leurs pratiques ordinaires, considérant que, s'ils n'en ont pas nécessairement une théorie, nul ne peut leur dénier une sociologie, une grammaire, un droit…
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Ethnographie d'une organisation de coopération universitaire au développement : du siège au terrainVéronique Biquet (Ulg - Université de Liège)
Cette proposition rend compte d'une tentative d'ethnographie d'une organisation de coopération universitaire au développement, en prenant pour objet d'étude les logiques internes d'un programme de renforcement institutionnel en RDC. La démarche mise en œuvre relève une double originalité/contrainte méthodologique, à savoir, d'une part, s'intéresser à l'ensemble de la chaine du développement du siège au terrain, des « développeurs » aux « développés », et d'autre part, intégrer dans l'ethnographie un retour réflexif sur une expérience professionnelle vécue au sein de l'organisation. Sont notamment abordés les questions de la négociation de l'accès au terrain, du type de posture adoptée, de l'influence de celle-ci sur la nature des données produites ainsi que les principaux problèmes éthiques et épistémologiques qui en découlent.
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Pause
Ethnographie des organisations virtuelles
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Pour une ethnographie des organisations virtuellesOlivier Sarrouy (Université Rennes 2)
Un nombre croissant d'entreprises entendent aujourd'hui s'approprier les logiques collaboratives ouvertes commandant au fonctionnement du web 2.0. Nous souhaiterions donc discuter, dans cette communication, des spécificités et des enjeux d'une approche ethnographique possiblement adéquate à ces formes émergentes d'organisations dites « virtuelles ». Cette réflexion s'appuiera sur un travail de recherche ethnographique conduit depuis le mois de janvier 2012 sur la plateforme collaborative de Quirky, entreprise américaine déléguant la quasi-totalité de la conception, de la publicisation et de la vente de ses produits à la foule des internautes. Nous souhaiterions dans un premier temps mettre à l'épreuve de ce terrain une synthèse de différentes recherches se réclamant de l'« ethnographie virtuelle » et qui entendent, depuis quelques années, adapter les méthodes ethnographiques héritées à la spécificité de ces objets. Il s'agirait ensuite de discuter des analyses qu'une telle approche nous autorise à dégager quant à la singularité du mode d'existence des collectifs qu'assemblent ces dispositifs.
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Dîner
Table ronde : Regards réflexifs de chercheurs sur leur démarche ethnographique en organisation
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Dis-moi ce que tu écris, je te dirai qui tu es : matérialisation et visibilité du travail de recherche dans la pratique du shadowingCarole Groleau (UdeM - Université de Montréal)
L'ethnographie organisationnelle se décline en différentes pratiques sur le terrain, dont celle du shadowing qui sera l'objet de notre étude. Comme son nom l'indique, le shadowing implique que le chercheur devienne l'ombre de celui qu'il étudie en le suivant au cours de ses activités quotidiennes. Nous nous intéressons à la manière dont la prise de notes, contribue à moduler le rapport entre celui qui suit et celui qui est suivi, sur le terrain. Selon nous, la prise de notes est une pratique qui rend le travail du chercheur visible et accessible tout en matérialisant les données de terrain. Au-delà de leur contenu, nous croyons que les notes interviennent dans le processus d'observation mutuelle entre les partis engagés dans la recherche. À partir de nos diverses expériences de terrain, nous avons retenu une série de situations, présentées sous forme de vignettes, pour explorer empiriquement la prise de notes comme médiation de la relation qui s'installe entre celui qui suit et celui qui est suivi. Nous avons regroupé nos observations autour d'une série de thématiques dont la définition du statut et du rôle du chercheur, l'autorité, la confiance ainsi que la tension entre l'inclusion et l'exclusion.
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Suivre à la trace le travail d'organisation : contributions et enjeux du shadowingConsuelo Vasquez (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Traduit rarement de l'anglais, le shadowing, est généralement défini comme une méthode de recherche qui implique de suivre une personne comme son ombre – de « marcher dans ses pas » – à travers ses différentes activités et ses différents déplacements, tout en prenant de nombreuses notes de terrain. Dans le domaine de l'ethnographie organisationnelle, de part sa mobilité, sa flexibilité, et son caractère longitudinal, le shadowing s'avance comme étant une des méthodes privilégiées pour saisir des pratiques de travail de plus en plus distribuées, de même que pour mieux comprendre la nature dynamique des organisations (Czarniawska, 2007). À partir de nos expériences d'utilisation de cette méthode, nous proposons de réfléchir aux contributions et enjeux du shadowing pour suivre à la trace le travail d'organisation. Plus particulièrement nous nous attardons au rôle du chercheur – la place de cette ombre dans ce travail d'organisation – et à sa relation avec le sujet ou objet de son suivi.
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Le reportage ethnographique en contexte de conflit armé : restitution d'une expérience de 40 jours au sein d'une cellule de l'armée libre syrienneRomain Huët (UEB - Université européenne de Bretagne)
Entre juillet et août, puis décembre 2012, un projet de recherche sur les mouvements sociaux nous a embarqués au cœur de la résistance syrienne. Durant 40 jours, nous nous sommes plongés au sein d'une cellule de combattants de « l'armée libre » à Alep et sa région (Syrie). Le projet de cette enquête ethnographique était simple : il s'agissait de comprendre ce qui anime les combattants dans leur engagement dans une révolution armée. Plus encore, notre but était de pénétrer le mouvement de l'intérieur pour entrevoir leur quotidien, saisir leur vision du conflit armé, et pour prendre acte de quelques opérations qu'ils mettent en place une fois qu'ils parviennent à libérer un territoire, que ce soit un quartier ou une ville. Notre communication vise à discuter de la pertinence et des limites d'un tel projet ethnographique dans une situation insécurisée et peu habituelle dans le monde académique. Nous insisterons tant sur les potentialités d'analyses ouvertes par cette investigation pour saisir les mouvements sociaux (1), que sur la difficile mise en œuvre des principes méthodologiques ouverts par les enquêteurs de terrain (Cefaï, 2010) (2), et qu'enfin, plus généralement, sur la contribution de l'ethnographie organisationnelle à l'édification d'une pensée critique (3) (Boltanski, 2009; Dodier, 2005).
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Période de questions
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Pause
Vidéoethnographie et analyse des interactions en organisation
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Méthodes et techniques d'une entreprise ethnographique en environnement carcéralLucie Alidières (Université Paul-Valéry Montpellier 3)
Nous proposons de discuter des apports d'une étude en sciences du langage sur la réception des cours en environnement carcéral. Elle interroge le travail de terrain comme entreprise ethnographique au sens d'une logique de mouvement entre demande sociale, analyse linguistique et retombées applicatives. De sorte que les données ethnographiques relatives aux besoins techno-pédagogiques des formations universitaires à distance pour les personnes détenues sont produites de manière endogène par les participants en interactions. C'est pourquoi nous proposerons d'expliciter les diverses méthodes d'entrer en prison. Ensuite nous exposerons les techniques de recueil et de traitement des données avant de proposer un extrait du corpus. Il s'agira de pointer des caractéristiques de l'activité pédagogique en prison.
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Ethnographier et filmer la constitution de « practices of seeing » dans une organisation : « voir » et « faire voir » via la parole, le corps et la mobilisation d'objetsSylvie Grosjean (Université d’Ottawa)
Nous présenterons une étude ethnographique qui a eu lieu dans une compagnie d'arpenteurs-géomètres afin de montrer comment une « manière de voir » est négociée, partagée au sein d'une communauté de travail afin de soutenir la production de connaissances sur un espace donné (une propriété, un terrain). Nous nous proposons ainsi de contribuer à l'analyse de « practices of seeing » dans leur dimension située, incarnée et matérialisée. Plus spécifiquement, nous souhaitons montrer comment la constitution de « practices of seeing » spécifiques à un groupe professionnel s'accomplit à travers de multiples activités multimodales comportant des échanges verbaux, des déplacements corporels, des gestes, des regards, des manipulations d'objets (cartes, et autres formes de visualisations) et d'instruments. En portant notre regard sur la dimension multimodale de l'interaction, nos analyses reposeront sur des enregistrements vidéo des activités quotidiennes s'accomplissant au sein de cette organisation.
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Pause
L'ethnographe et l'organisation : processus de communication et négociation
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L'exigence de négociation en ethnographie organisationnelle : entre nécessité méthodologie et clé de compréhension des organisationsJulien Tassel (Université Paris-Sorbonne (Paris 4))
Il s'agira dans cette communication de montrer dans quelle mesure les pratiques de négociation entre le chercheur et son terrain son centrales dans la pratique de l'ethnographie organisationnelle. D'un point de vue méthodologique elles permettent l'accès et le maintien du chercheur sur le terrain et garantissent à un niveau réflexif son indépendance intellectuelle. Mais elles sont également essentielles quant à la compréhension de l'organisation contemporaine car elles mettent au jour sa dimension réticulaire. Seront ainsi passés en revue divers « moments » de cette pratique de négociation (accès au terrain, restitution, place et rôle du chercheur sur le terrain), à partir de récits de situations empiriques issues d'un terrain effectué dans un grand groupe bancaire.
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Ethnographie et étude des supports et processus de communication : plaidoyer pour la pluralité des méthodes et le flirt avec leurs limitesLucile Desmoulins (Université Paris-Est Marne-la-Vallée)
Nous nous proposons dans cette communication de faire un retour sur notre parcours de recherche depuis une première expérience d'ethnographie organisationnelle « juge et partie ». Le deuxième terrain proposé à la relecture permet d'aborder la question de la dissimulation de l'identité dans une expérience en rupture avec la tradition kantienne qui interdit au chercheur d'avancer masqué. Les notions de compétence et d'intégrité, de contrat et de confiance autant que la liberté inaliénable du chercheur à exploiter le fruit de ses observations sont au cœur de nos interrogations. Il s'agit en effet autant de développer les arguments d'un plaidoyer pour le pluralisme des méthodes où la communication organisationnelle ne serait pas une simple promesse étudiée par les SIC et sans cesse contredite par une réalité rendue accessible par un travail d'ethnographie. Nous défendons que la créativité doive se faire au prix d'un flirt avec les limites. Nous ouvrons donc la boîte de Pandore d'une réflexion épistémologique sur des pratiques « borderline » pour partir à la recherche d'une cohérence épistémologique mise à mal par des expériences aussi inconfortables et fructueuses.
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Synthèse