Le présent dossier a pour but de donner un aperçu des questions de culture scientifique, telles qu’elles se posent dans une dizaine de pays, ainsi que les actions lancées pour répondre aux problèmes distincts auxquels ils doivent faire face. Il présente aussi quelques expériences qui y sont menées.
[NDLR : Douze textes, en provenance de dix pays, composent le présent dossier.
Ces textes sont réunis en version imprimée, disponible
en format PDF, en bas de la présente page.]
La volonté de promouvoir et de valoriser la culture scientifique aujourd’hui s’appuie sur le constat maintes fois répété que les sciences sont au cœur de ce que nous ressentons être « la modernité » : elles modifient les valeurs tout comme elles transforment les modes d'organisation de la société. C’est pourquoi, il est posé en corollaire que les initiatives entreprises pour favoriser l’accès à cette culture et en optimiser le partage sont les conditions nécessaires pour que quiconque, concerné par les répercussions de l’impact des sciences sur la société, puisse en tout état de cause être partie prenante des débats que cette évolution suscite.
Mais, favoriser la participation du public à ces débats exige de repenser les modes d'interaction avec les acteurs sociaux, et d’en imaginer de nouveaux. Car, des demandes s'expriment pour un dialogue direct avec les chercheurs sur les questions éthiques, politiques ou économiques qui découlent de l'impact des sciences sur la société, mises sur le même plan que l'avancement des connaissances. Il s’agit aussi d’avoir une maîtrise dans les choix de société qui impliquent des politiques scientifiques très différentes si l’on veut espérer un avenir fondé sur le bien commun. La science est souvent moins associée à une vision transformatrice et émancipatrice de la société qu’à la possibilité de développer sans cesse de nouveaux marchés sans changer de modèle de société, et nombreux sont ceux, y compris parmi les scientifiques qui considèrent désormais que les progrès des sciences et des technologies servent des intérêts qui ne relèvent pas du bien commun. Comment alors s’adresser à ces publics, conscients des bénéfices qu’il y a à retirer du développement des sciences et des technologies, mais simultanément très inquiets des intérêts qui sont en jeu?
Dans ce contexte, comment rendre compte succinctement de la diversité des actions de culture scientifique et technique, conduites ici et là dans le monde? Comment mettre en évidence la créativité, l’inventivité, l’imagination exigées pour les concevoir? Comment reconnaître la détermination arrêtée dont il faut faire preuve pour les réaliser, et l’énergie requise pour persévérer? Comment appréhender leur nécessité et leur pertinence?
Les initiatives sont multiples, mais elles ont en commun d’être chacune ancrées dans une réalité concrète : se dérouler sur un territoire donné, à un moment précis, dans des circonstances particulières, pour répondre à des besoins distincts. Autant de conditions spécifiques qui font de chaque initiative un projet unique. Et c’est peut-être la prise de conscience de la singularité de chaque action qui caractérise aujourd’hui l’évolution des débats sur le partage de la culture scientifique. C’est pourquoi on parle plus volontiers de cultures de science – au pluriel – pour bien refléter à la fois la spécificité et la singularité des lieux, des contextes et des actions engagées.
Le présent dossier a pour but de donner un aperçu des questions de culture scientifique, telles qu’elles se posent dans une dizaine de pays, ainsi que les actions lancées pour répondre aux problèmes distincts auxquels ils doivent faire face. Il présente aussi quelques expériences qui y sont menées. Car, contrairement, à une conception universaliste qui a longtemps prévalu, l’attention se porte maintenant sur les conditions locales, et le développement de moyens d’intervention adaptés à ces conditions. Si la diversité des initiatives et des actions de publicisation des sciences témoigne de la conviction comme de la créativité de ceux qui s’y consacrent, elles rendent tout autant compte de la pluralité des conditions propres à chaque pays dans lesquels ils œuvrent. La richesse d’enseignement de ces pratiques découle de leur diversité même. Car l’effet de décentration, que provoque la rencontre avec d’autres façons de concevoir et de faire que les nôtres, est une source constante d’inspirations nouvelles pour chacun. Nous formons le souhait que ce survol stimule l’envie d’en savoir plus sur ce qui se fait ailleurs, et suscite une réflexion sur notre propre regard sur la publicisation des sciences.
Rappelons enfin que ce tour d’horizon accompagne les Journées internationales de la culture scientifique – Science & You, organisées par l’ACFAS – Association francophone pour le savoir. Elles font suite aux journées Hubert Curien qui se sont déroulées à Nancy (France) en 2012, et renommées Science & You en 2015.
Joëlle Le Marec
Bernard Schiele
- Joëlle Le Marec
Université Paris-Sorbonne
Joëlle Le Marec est professeure en sciences de l'information et de la communication au CELSA Paris 4 Sorbonne. Elle pilote l'axe Savoirs, cultures et communication de l'équipe de recherche GRIPIC. Elle a auparavant piloté le master de journalisme, culture et communication scientifique de Paris Diderot (de 2011 à 2015), et coordonné un cluster de recherche Enjeux et représentations des sciences, des technologies et de leurs usages (de 2007 à 2011) lorsqu'elle était professeure à l’École normale supérieure de Lyon. Elle a animé avec Bernard Schiele et Patrick Baranger le comité scientifique international de Science & You 2015 à l'Université de Nancy. Ses travaux portent sur les publics et leurs rapports aux institutions du savoir (bibliothèques et musées) et les discours médiatiques à propos de sciences, et sur les pratiques de communication dans les démarches de connaissances. Elle a ainsi travaillé plus particulièrement sur la condition de public et la dimension politique de la confiance, sur les savoirs du tact et du contact dans les enquêtes en sciences sociales, et sur les pratiques quotidiennes de chercheurs. Elle développe des travaux sur les alliances institutions/recherches (avec l'Office de coopération et d'information muséologiques). Enfin, elle dirige la collection éditoriale Études de sciences aux Éditions des Archives contemporaines.
- Bernard Schiele
Université du Québec à Montréal
Bernard Schiele Ph. D. est professeur à la faculté de communication de l’Université du Québec à Montréal (Canada). Conduisant des travaux sur la sociodiffusion des sciences et des technologies, il intervient fréquemment en Amérique du Nord, en Europe et en Asie. Il est membre de plusieurs comités nationaux et internationaux, et est fréquemment consulté sur les questions de culture scientifique par des organisations gouvernementales et non gouvernementales. Avec d’autres chercheurs, il a fondé le réseau PCST, et est membre de son comité scientifique. Récemment, il a présidé le comité scientifique international de pilotage du Nouveau musée de science et de technologie de Beijing (2006-2009); il a présidé l’édition 2012 des Journées Hubert Curien (renommées depuis Science & You); et a été membre du comité d’experts sur l’état de la culture scientifique au Canada (2013-2014) qui publié le rapport intitulé Science culture : Where Canada stands (Council of Canadian Academies, 2014). Il a fait paraître en collaboration au cours des dernières années : At the human scale : International practices in science communication (Beijing University Press, 2006); Communicating science in social contexts : New models, new practices (Springer, 2008); Science communication in the world: Practices, theories and trends (Springer, 2012); Science communication today: International perspectives, issues and strategies (CNRS, 2013); Les Musées et leurs publics: Savoirs et enjeux (PUQ, 2014); et Science Communication Today, 2015.
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