Pétoncles et étoiles de mer sur le plancher du fleuve Saint-Laurent, à plus de 320 mètres de profondeur. Une première dans la prise d'images de qualité dans ces conditions.
Philippe Archambault, de l’Institut des sciences de la mer à Rimouski, se souviendra toujours de la photographie par laquelle tout a commencé. Celle qui l'a mené à développer aujourd’hui les activités de prises de photographie du fond marin dans l’Arctique canadien. Si, régulièrement, il rapporte des images inusitées des fonds du Saint-Laurent captées à plus de 320 mètres de profondeur, là où l’oxygène manque et la vie se raréfie, cette photographie de pétoncles et d'étoiles de mer reste une de ses préférées : « Cette image est une des premières des planchers du fleuve Saint-Laurent qui soit de cette qualité. Grâce à elle, nous avons démontré qu’il était possible de prendre des d’excellentes photos à des profondeurs auxquelles ne peuvent se rendre aucun plongeur, aucun photographe. »
Réalisée à 70 mètres sous la surface, en 2001, cette photographie pionnière a fait sensation dans le milieu scientifique océanographique québécois. Pour saisir ce moment d’intimité du fleuve, Philippe Archambault et son équipe ont bricolé un appareil photo capable de supporter la pression des eaux et imaginé un système de téléguidage par fibre optique pour contrôler en temps réel les mouvements et les réglages de l’appareil ainsi que l’intensité de l’éclairage. L’instrument, d’une valeur de 15 000 $, a été baptisé Bathypolypus, du nom de l’unique pieuvre du Saint-Laurent, laquelle est, par ailleurs, dotée d’une vision exceptionnelle.
Le Bathypolypus a appuyé les travaux de nombreux scientifiques canadiens avant de céder sa place au Benthos, un appareil plus performant offrant des photos de meilleure qualité et captées à de plus grandes profondeurs. Bientôt, celui-ci sera secondé par un sous-marin téléguidé qui sera testé pour une première fois dans l’Arctique à l’été 2014. Cette fois, c’est de la vidéo HD que l’on produira et la quantité d’information recueillie s’en trouvera décuplée. Qui sait où ces nouvelles images conduiront Philippe Archambault et son équipe?
Habituellement, pour observer les fonds marins et ce qui y vit, les scientifiques doivent racler la vase avec des chaluts sur de longues distances, puis étudier ce qu’ils remontent à la surface. Nous cherchions une méthode d’observation moins destructrice.
- Binh An Vu Van
Journaliste scientifique
Philippe Archambault est un océanographe marin qui se spécialise dans les organismes vivant sur les fonds marins. En poste actuellement à l’Institut des sciences de la mer de l’Université du Québec à Rimouski, il a développé les appareils dans le cadre d’un emploi précédent comme chercheur à Pêches et Océans Canada. Il est présentement l’un des codirecteurs d’un réseau du CRSNG (Canadian Healthy Ocean Network) en plus de codiriger un projet d’ArcticNet sur les hotspots de biodiversité arctique. M. Archambault est aussi en charge d’un programme présentement en évaluation au FQRNT : Initiative pour une approche écosystémique dans le cadre d’une gestion durable des ressources du golfe du Saint-Laurent. Il est aussi éditeur des journaux scientifiques PLOSONE, Marine Ecology Progress Series et Aquaculture- Environment-Interaction. Il faut également ajouter à la liste son rôle de codirecteur au sein de l’initiative internationale Life in a Changing Ocean.
Vous aimez cet article?
Soutenez l’importance de la recherche en devenant membre de l’Acfas.
Devenir membreCommentaires
Articles suggérés
-
Sondage - La responsabilité sociale de la communauté de la recherche : la perception des chercheuses et des chercheurs -
La professionnalisation des artistes : la pensée gestionnaire confrontée à la pratique des arts -
Biofertilisants et biostimulants microbiens : pour la santé des sols et des cultures
Infolettre