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Clémence Cireau, Stagiaire en journalisme scientifique
Les immigrantes algériennes sont près 35000 au Québec, selon une estimation de Patrice Brodeur, chercheur en sciences des religions de l’Université de Montréal. Et plusieurs d’entre elles utilisent le droit québécois pour s’émanciper lors d’un divorce qui leur serait défavorable en Algérie.

8 mai 2012, 80e Congrès de l'Acfas  Samia Amor, doctorante en droit à l’Université de Montréal, combat les préjugés au sujet des femmes musulmanes. « Leur image est complètement erronée. On les représente souvent comme des femmes soumises, notamment à cause des polémiques autour du port du voile. Mais, c’est faux ». Elle explique que, par exemple, de nombreuses femmes algériennes divorcent selon la loi québécoise afin de « réaliser leur droit à l’égalité ».

Elle présentait ces recherches au 80e Congrès de l’Acfas, dans le cadre du colloque Les migrations des croyants/croyantes et des croyances : entre inculturation et acculturation.

Selon elle, « on met toujours plus en avant le paraître de ces femmes, et on rend invisible leurs actions. À travers toutes ces initiatives de rupture conjugale, elles sont pourtant très actives. Elles prennent en charge leur destin et se construisent une individuation au sein de la famille ».

La chercheuse constate que ces femmes connaissent très bien le droit québécois. Elles l’utilisent. « Elles savent pertinemment qu’en prenant l’initiative du divorce en Algérie, elles n’auraient pas tous les avantages. Elles devraient rembourser le mahr ». Le mahr est une dot offerte par l’époux lors du mariage qui protège la femme au cas où le mari demande le divorce unilatéralement. En effet, en Algérie, l’homme peut divorcer sans passer par le processus judiciaire… qui ne vient que confirmer le divorce, après coup.

Par contre, l’idée que la femme divorce n’est presque pas concevable. Si elles veulent divorcer, il faut que cela s'inscrive dans des cas de figure prévus par la loi, comme l’impossibilité de l’homme à « offrir un enfant à sa femme». Sinon, elles doivent rompre leur union par le khul’, une forme de dissolution du mariage, et rendre la dot au mari.

Samia Amor explique que le code de la famille algérien entretient un ordre social établi favorable aux hommes, en le légitimant par la norme religieuse. Mais, elle se demande « quel est le fondement religieux du divorce par le khul’. Ce divorce fait appel à un hadith (paroles du prophète) et à une interprétation des versets du Coran pour justifier le remboursement du mahr. Or cette interprétation vient en contradiction avec d’autres versets coraniques qui justement mettent en garde l’homme de redemander ce qu’il a offert à la femme. »

En tant que croyantes, ces femmes vivent pleinement ce paradoxe. « Elles veulent sortir d’une relation, mais sans trahir leur pratique religieuse », explique Samia Amor, tout en racontant que souvent ces femmes demandent leur divorce en Algérie, après l’avoir obtenu au Québec.

La doctorante regrette qu’on pose toujours la question d’égalité dans le cas des Québécoises musulmanes et non des autres Québécoises, comme si tout était déjà acquis. Mais leur situation n’est pas si différente. « Le droit a contribué énormément à l’autonomie des femmes, à leur libération. Le patrimoine familial assure un équilibre. Il permet de ne pas sortir d’une relation conjugale complètement démunie ».


  • Clémence Cireau
    Stagiaire en journalisme scientifique

    Clémence Cireau part durant sa dernière année de licence en information et communication à l’Université de Bordeaux, en échange au Québec. Elle y réalise alors une maîtrise en journalisme scientifique à l’Université Laval. Elle a travaillé pendant deux ans à la Chaire de journalisme scientifique de l’Université Laval. Désormais, elle écrit des articles en journalisme scientifique, en parallèle de son poste d’adjointe de direction au sein du magazine Médecine Sciences Amérique.

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