Le prix ACFAS Denise-Barbeau 2016 pour la recherche au collégial est remis à Catherine Fichten, professeure de psychologie au Collège Dawson.
Deux grands domaines de recherche ont occupé les jours, et peut-être les nuits, de la lauréate depuis 40 ans : les troubles du sommeil et le soutien aux étudiants en situation de handicap. Côté jour, sa volonté exemplaire d’intégrer les étudiants ayant une limitation fonctionnelle a mené, entre autres, à la création du Réseau de recherche Adaptech. Ce sont les étudiants collégiaux et universitaires, canadiens ou étrangers, qui aujourd’hui profitent ainsi d’un accès à des technologies d’adaptation gratuites ou peu coûteuses. Côté nuit, sa recherche novatrice sur les troubles du sommeil a conduit à d’importants progrès en produisant des résultats concrets au profit des personnes souffrant d’apnée du sommeil, d’insomnie ou du syndrome de fatigue chronique. En somme, un programme de recherche varié qui exerce une influence tant dans le réseau des collèges et des universités, que dans le champ de la psychologie clinique, ici comme à l’international.
Si Catherine Fichten a obtenu un doctorat en psychologie clinique de l’Université McGill, après une maîtrise en psychologie expérimentale à l’Université Concordia, c’est au collège Dawson qu’elle réalise sa carrière. Elle y amorce son mandat d’enseignante, en 1969, l’année même de l’inauguration de l’établissement. Et très tôt, elle jumellera enseignement et recherche. Deux domaines constitueront ses champs d’études.
Elle travaille d’abord sur les questions de troubles sexuels et de thérapie sexuelle; puis sur le sommeil et l’insomnie, et plus particulièrement sur les aspects de la médecine comportementale et de la psychologie de la santé liés à ceux-ci. Elle se penche, notamment, sur les causes et les traitements de l’insomnie et des troubles du sommeil primaire, ainsi que sur le sommeil et le fonctionnement diurne des personnes atteintes d'apnée obstructive du sommeil. On peut retenir de ces travaux que le style de vie des retraités atteints d’insomnie n’est pas responsable de leurs problèmes de sommeil et que les personnes atteintes d’apnée obstructive du sommeil ne sont pas nécessairement somnolentes, fatiguées ou dangereuses au volant.
Puis, elle s’intéressera au rôle des préjugés en ce qui concerne les étudiants postsecondaires en situation de handicap et, plus tard, à l’appui des technologies de l’information et des communications (TIC) aux personnes en situation de handicap. Ses visées sont, entres autres, d’amener ces étudiants à être pleinement inclus dans leur collectivité, notamment en leur facilitant l’accès à l’enseignement supérieur.
La lauréate et son équipe ont ainsi grandement soutenu et appuyé l’inclusion dans la société des personnes en situation de handicap, et ce, de manière pratique et appliquée. En 1996, elle cofondait le Réseau de recherche Adaptech, dont le siège est situé au collège Dawson. L’objectif d’Adaptech et des enseignants, étudiants et acteurs communautaires qui le composent, est de fournir des données empiriques permettant une prise de décision éclairée en ce qui a trait à l’instauration de nouvelles politiques et de nouvelles pratiques d’adoption de TIC. Adaptech veut s’assurer que celles-ci répondent aux besoins d’étudiants en situations diverses de handicap, mais aussi aux besoins des professeurs qui enseignent à ces étudiants, de même qu’aux conseillers. Les recherches transformatives et appliquées menées par Adaptech ont eu un impact considérable sur ce domaine de recherche comme sur la société en général, améliorant de façon manifeste la vie de nombreux Canadiens en situation de handicap. À titre d’exemple, depuis 1999, Adaptech a établi et mis à jour une base de données comportant des TIC gratuites ou peu coûteuses à l’usage des personnes en situation de handicap, et a produit des vidéos d’accompagnement visant à expliquer leur mode d’utilisation.
Difficile d’imaginer que ses rôles de chercheuse, d’enseignante engagée et de codirectrice d’Adaptech laissent encore à la professeure Fichten le temps de porter d’autres chapeaux. Pourtant, elle occupe aussi les fonctions de psychologue clinicienne dans l’Unité de psychothérapie comportementale et de recherche du Département de psychiatrie de l’Hôpital général juif de Montréal, de professeure agrégée au Département de psychiatrie de l’Université McGill, d’enquêteuse principale à l’Institut Lady Davis de recherches médicales et de membre de plusieurs réseaux de recherche et associations. On peut citer parmi ces derniers le Centre d’études sur l’apprentissage et la performance (CEAP) de l’Université Concordia et du Centre de recherche interdisciplinaire en réadaptation du Montréal métropolitain (CRIR), ou encore l’Association québécoise des étudiants ayant des incapacités au postsecondaire (AQEIPS), où elle siège au conseil d’administration. Bâtisseuse, elle a aussi soutenu la création de l’Association pour la recherche au collégial (ARC), de même que le développement des pratiques et de l’infrastructure de la recherche au collégial en général.
Madame Fichten publie fréquemment des articles et des ouvrages, en français comme en anglais, et ce, en collaboration avec des étudiants et des collègues partout dans le monde. Et quand la publication se fait dans la langue de Shakespeare, elle a toujours ce souci de rendre une version disponible pour Molière. En marge des nombreuses distinctions récompensant ses travaux de recherche, son dévouement au rayonnement de son réseau lui a valu de recevoir plusieurs prix. La qualité de ses réalisations, sa volonté de mener de front une recherche fondamentale et des applications soucieuses des utilisateurs, et son attachement à ses étudiants font d’elle, sans contredit, le modèle de la chercheuse collégiale de haut niveau et engagée au sein de la communauté.