Charles Morin
[Depuis 2013, le prix Marcel-Vincent des sciences sociales porte le nom de Thérère Guouin-Décarie]
Le lauréat est considéré mondialement comme le chercheur contemporain ayant le plus contribué à l’avancement des connaissances sur l’insomnie. L’originalité de ses travaux tient au fait qu’il a constamment privilégié la voie des interventions psychologiques, plutôt que la traditionnelle solution pharmacologique. Ses travaux ont démontré que, si la médication s’avère utile à brève échéance, les effets thérapeutiques résultant de l’approche comportementale sont néanmoins beaucoup plus durables.
Charles Morin a complété une formation doctorale en psychologie clinique (PhD., 1986) à la Nova Southeastern University en Floride, précédé par un internat prédoctoral à la University of Mississippi Medical Center; s’est ajouté aussi un stage postdoctoral sur les troubles du sommeil à la Virginia Commonwealth University où il a aussi œuvré (de 1987 à 1994) comme professeur, chercheur et psychologue. À son retour au Québec après un séjour de 12 ans aux États-Unis, il a fondé le Centre d’étude des troubles du sommeil, qu’il dirige depuis 1995.
Le caractère unique de sa contribution découle vraisemblablement de son ouverture à l’interdisciplinarité. Pionnier dans la comparaison systématique de l’effet des traitements comportementaux des insomnies par rapport aux hypnotiques (somnifères), il n’a pas hésité à construire des ponts avec les milieux médicaux et pharmacologiques.
Depuis une décennie, l’équipe du professeur Morin mène des travaux auprès d’une cohorte de 4000 adultes canadiens, ce qui est probablement la plus vaste étude longitudinale sur l’insomnie. Jusqu’à maintenant, ils ont non seulement permis d’établir la prévalence et l’incidence des troubles du sommeil au Canada – un problème de santé publique qui affecte au moins 10% de la population –, mais aussi de documenter l’histoire naturelle de l’insomnie et d’en identifier certaines conséquences à long terme, notamment les risques accrus de troubles physiques et mentaux. Par exemple, qui sait qu’à l’heure actuelle, les difficultés du sommeil constituent le plus commun symptôme de la présence d’un désordre mental? Qui sait à quel point ces mêmes troubles diminuent la réponse aux traitements chez certaines femmes atteintes de cancer du sein? On est bien loin ici des simples perturbations du fonctionnement nocturne…
Le professeur Morin n’a jamais hésité à moduler ses connaissances en fonction des situations extrêmement diverses qui se sont présentées à lui depuis 25 ans. Il a mis au point une méthode éprouvée pour faciliter le sevrage de personnes ayant développé une dépendance aux hypnotiques, en particulier les aînés. De même, avec des collègues québécois et américains, il a contribué au développement et à la validation d’interventions brèves (tel un manuel d’auto traitement sur Internet) plus accessibles pour les intervenants et les personnes souffrant d’insomnie.
Depuis 2008, il a fait partie d’un groupe de travail de l’Association américaine de psychiatrie chargé de réviser les critères diagnostiques des troubles du sommeil en vue de la publication prochaine de la 5e édition du DSM, le compendium des maladies mentales. « Il est en outre éditeur associé de la publication scientifique Sleep, la revue ayant actuellement la plus haute cote d’impact en recherche sur le sommeil », souligne dans sa lettre d’appui, le Dr Jacques Montplaisir - l’autre sommité québécoise en ce domaine. On ne soulignera jamais assez à quel point la position de leader de Charles Morin sur la scène internationale a permis de donner, à la psychologie et aux sciences sociales, un prestige inégalé dans le domaine des troubles du sommeil.