606 - La recherche qualitative avec les populations en contexte de vulnérabilité économique et sociale : entre ajustements mutuels et influences réciproques

Mot de bienvenue et conférence d’ouverture

• Communication orale 08 h 35
  Conférence d'ouverture: La vulnérabilité, un témoin des évolutions sociales
  Sylvain Bourdon (UdeS - Université de Sherbrooke), Marjorie Vidal (Université de Sherbrooke)

  Pour cette conférence d’ouverture, les présentateurs ont décidé d’expliquer leur choix de proposer un colloque sur la notion de vulnérabilité. Cette présentation servira donc de point d’appui au lancement des deux journées de conférences. Il s’agira de comprendre pourquoi et comment l’idée de vulnérabilité est devenue « en vogue » dans de nombreux domaines de recherche, en particulier en sciences sociales, où elle occupe aujourd’hui une place de choix. En quoi la vulnérabilité favorise-t-elle la compréhension des phénomènes sociaux ? Des évolutions sociétales ? Et parallèlement, quelles sont les critiques que cette notion soulève ? Pour éclaircir ces différents points, nous aborderons les enjeux politiques, pratiques et scientifiques que recouvre la mobilisation de cette notion et tenterons d’en apprécier son rayon d’action.

Bloc 1 : La définition et l’appréhension de l’objet de préoccupation

• Communication orale 09 h 15
  Comment enquêter auprès de populations vulnérabilisées par décision administrative? Saisir les expériences biographiques de chômeurs exclus pour défaut de recherche d’emploi
  Didier Demaziere (Centre national de la recherche scientifique), Marc Zune (Université catholique de Louvain)

  Le durcissement de la politique d’activation des chômeurs en Belgique a fait croitre le nombre de radiations après contrôle de la recherche d’emploi. Nous avons réalisé une enquête par entretiens biographiques avec des chômeurs qui ont été vunérabilisés par une décision administrative qui les prive du statut de demandeur d’emploi, des allocations chômage et des services d’accompagnement vers l’emploi. L’objectif était de comprendre les expériences de ces chômeurs, en explorant leurs manières de réagir à cette exclusion, leurs façons d’interpréter leur situation et leurs rapports aux normes sociales encadrant la condition de chômeur.

  Notre proposition est centrée sur l’enquête elle-même plus que sur ses résultats. S’agissant de populations vulnérabilisées (souvent qualifiées d’exclues, sans-voix, acteurs faibles, etc.) les sociologues insistent sur les difficultés d’une relation d’enquête définie comme un rapport de domination. Notre expérience a été différente, aussi nous caractériserons en d’autres termes la relation d’enquête. Et nous aborderons d’autres moments de l’enquête, souvent occultés. En amont se posent des problèmes de repérage, prise de contact et échantillonnage car les chômeurs exclus ont été invisibilisés. En aval, l’analyse de leurs récits d’expérience confronte au risque de les réduire au rang de victimes impuissantes. Cette phase de la recherche doit donc être guidée par une conceptualisation théorique solide de la notion d’expérience de la vulnérabilité.

• Communication orale 10 h 00
  Qui est vraiment vulnérable? Regard sur des intervenants travaillant auprès des populations «vulnérables»; une étude ethnographique de l'itinérance à Marseille
  Mathieu Isabel (Université McGill)

  Les interventions médico-sociales avec des populations dites « vulnérables » invitent à une réflexion sur la définition même de la vulnérabilité. Cette présentation explorera une vision sociale de la vulnérabilité. En effet, une lecture systémique élargie, au delà de l'aspect individuel de "l’être vulnérabilisé"(Soulet 2008), tout comme un angle théorique relationnel, plutôt qu'une analyse centrée sur l'individu (Damon 2002), permettent une lecture différente des enjeux propres à la vulnérabilité. Basée sur les résultats d’un terrain de recherche de trois mois dans le cadre d’une maîtrise en anthropologie médicale, cette présentation relatera l'ethnographie que j'ai réalisée dans un centre d'hébergement d'urgence pour hommes en situation d'itinérance à Marseille (France). Je partagerai d'abord les enjeux de postures identitaires auxquels j'ai été confronté de par ma double formation de médecin (bien que n'ayant pas pratiqué à Marseille) et de jeune chercheur. Tout particulièrement, je me suis attardé à la question de qui est réellement vulnérable en contexte de vulnérabilité, en ciblant surtout mes observations sur les intervenant.es de ce centre d'hébergement. À l'aide de données empiriques, j'explorerai aussi le concept de la nature circulatoire des vulnérabilités (Lévy-Vroelant, Joubert et Reinprecht 2015), à savoir une diffusion de l'impuissance et des difficultés d'action entre les individus «vulnérables» et les intervenants chargés de les accompagner.

• Communication orale 10 h 30
  Définir la vulnérabilité sous le prisme de la précarité économique : une fausse évidence ?
  Marjorie Lelubre (Observatoire de la santé du hainaut)

  Notre proposition s’ancre au sein du projet européen « Alimentation Durable Inclusive » qui interroge les conditions d’accès à l’alimentation durable pour les populations en vulnérabilité. Cette communication s’axe sur le passage d’une conception théorique du public-cible du projet vers son opérationnalisation sur le terrain. Alors que les opérateurs du projet ont opté pour une définition large de la « population en situation de vulnérabilité », les actions sont centrées sur des personnes en précarité économique. Nous proposons d’interroger le lien conceptuel entre ces notions de « vulnérabilité » et « précarité économique », et la part que prend cette précarité économique dans les discours des acteurs sociaux pour expliciter la « vulnérabilité » des populations, et leur moindre accès à l’alimentation. Hypothèse dont nous remettons en cause l’évidence pour interroger le contexte sociétal dans lequel cette notion de vulnérabilité s’inscrit et la manière dont les personnes elles-mêmes perçoivent cette vulnérabilité. Nous abordons également les questionnements que soulève une recherche sur l’alimentation de qualité lorsque le droit à une alimentation tout court n’est pas assuré. Le protocole méthodologique est construit autour d’entretiens semi-directifs menés auprès du public cible et des acteurs sociaux en lien avec ce public-cible. Pour les opérateurs de projet, nous procédons par observation directe et analyse documentaire. Des cahiers de terrain sont rédigés à cet effet.

• Communication orale 11 h 00
  L’articulation de la sexualité et du handicap dans la recherche
  Pascal Gagné (Université d’Ottawa)

  Depuis les discussions sur l’intersectionnalité (Crenshaw 1991), un terrain mitoyen entre la théorie queer et les études sur les handicaps a émergé: la théorie crip (McRuer 2006). Ce courant de pensée tente de déconstruire les pratiques hétéronormatives qui participent d’un culte de l’aptitude; il critique la réhabilitation à un ordre normal, en insistant sur les modes de résistance face aux dangers de normaliser la sexualité ou le corps en santé. Les ouvrages méthodologiques s’inspirant du féminisme et du postcolonialisme (Butler-Kisber 2010) reformulent ainsi les objectifs de la recherche en défense des opprimés (Sandoval 2000).

  Ces considérations éthiques ne peuvent que perturber la conduite de la recherche qualitative traditionnelle. Soulignons, entre autres : 1) les rapports intimes entre acteurs, de même que la confidentialité des propos et faits des participants à la recherche, dictés selon un partage des espaces sociaux; 2) la posture et la performance du chercheur déviant de la norme, spécialement en regard des critères traditionnels pour évaluer le protocole de la recherche; 3) l’étude de populations dites vulnérables (déficience intellectuelle, jeunes itinérants et toxicomanes, personnes démentes, réfugiés, etc.) sans traiter également des enjeux de la voix, du danger ou du privilège. Enfin : 4) une remise en cause de la normativité au sein de la recherche qualitative afin d’apprécier et de critiquer l’objet de la connaissance comme positivité.

Discussion et dîner

Bloc 2a : La disponibilité au terrain d’enquête, fragilisations sociales des adultes

• Communication orale 13 h 00
  Les émotions dans l’enquête auprès de personnes en situation de vulnérabilité : l’exemple d’une recherche sur la douleur chronique chez les personnes utilisatrices de drogues
  Lise Dassieu (UdeS - Université de Sherbrooke)

  Cette présentation aborde la gestion des émotions négatives dans la recherche auprès de personnes en situation de vulnérabilité sociale. Elle s’appuie sur mon travail mené par entrevues semi-dirigées, portant sur l’expérience de la douleur chronique chez les personnes utilisatrices de drogues. Les personnes rencontrées font face à de multiples situations de vulnérabilité : en tant que personnes atteintes de douleurs chroniques bénéficiant rarement d’un soulagement satisfaisant, et d’autre part en tant que personnes utilisatrices de drogues confrontées à des conditions de vie difficiles (marginalisation, itinérance, travail du sexe, VIH…). Durant les entrevues, certaines personnes entreprennent un retournement du stigmate, en mettant en avant leur capacité d’endurance face à leur situation. Leur résistance à l’étiquette de "personnes vulnérables" constitue un résultat en soi, mais pose aussi des défis importants pour la relation d’enquête, puisqu’il devient plus difficile d’aborder les sujets ressentis comme des signes de faiblesse, sources de honte pour les personnes (incapacités, impuissance face à la maladie…). Une approche empathique et compréhensive est donc nécessaire pour permettre la production de récits émotionnellement chargés, tant pour l’enquêté.e que pour le/la chercheur.e. De nouveaux défis se posent alors : comment faire face à la charge émotionnelle dans la relation d’enquête, et que faire des émotions ressenties sur le terrain lors de l’analyse des données ?

• Communication orale 13 h 30
  Recherche évaluative auprès de jeunes adultes en situation de handicap : quels écueils méthodologiques?
  David Baril (UdeS - Université de Sherbrooke), Sylvain Bourdon (Université de Sherbrooke)

  Cette communication jettera un regard rétrospectif sur les embûches méthodologiques rencontrées et les ajustements opérés pour mener à bien une recherche évaluative d’une démarche partenariale visant à soutenir la transition vers l’âge adulte de jeunes en situation de handicap (physique, intellectuel ou fonctionnel) (Bourdon, Lessard et Baril, 2015). Inscrits dans le contexte social du passage à la vie adulte, lequel est caractérisé par la construction identitaire, l’instabilité, l’augmentation des moments de choix et l’accroissement des transitions dans les diverses sphères de vie, la situation de handicap de ces jeunes recèle de potentialités particulièrement importantes de vulnérabilité et de dépendance. On comprend alors toute l’importance d’offrir et de mettre en place des formes singulières de soutien dans la préparation de ce passage, de l’adolescence jusqu’à l’âge adulte. Seront exposés deux aspects du social dont nous avons dû tenir compte méthodologiquement : 1) à un niveau macro, nous examinerons les enjeux politiques entre les chercheurs et le comité aviseur de recherche, lesquels ont eu un effet durable sur notre entrée au terrain et la constitution de notre échantillon, 2) à un niveau micro, il sera question du rapport intervieweur-interviewé et des régulations ayant été nécessaires lors de la conduite d’entretiens à la fois auprès de jeunes en situation de handicap et de leurs parents; l’accent sera mis sur les biais que peuvent introduire ce type d’entretien.

• Communication orale 14 h 00
  Appréhender les critères de la réussite socioprofessionnelle de personnes en situation de grande vulnérabilité : un défi éthique et méthodologique
  Sylvain Bourdon (Université de Sherbrooke), Patricia Dionne (UdeS - Université de Sherbrooke), Maria Eugenia Longo (INRS)

  Les personnes en situation de grande vulnérabilité (extrême pauvreté, itinérance, maladies chroniques, etc.) peuvent expérimenter des situations sociales éprouvantes comme la perte de contacts familiaux et la difficulté d’accès aux services publics. Souvent invisibilisées dans nos sociétés de performance et de productivité, le pouvoir d’agir sur leur situation semble souvent leur échapper. Les méthodes qualitatives, et notamment le groupe de discussion, peuvent ouvrir des espaces d’échange autour de leurs perspectives et préoccupations, et légitimer leur crédibilité dans la production de connaissances sur leurs situations particulières. Dans le cadre d’une recherche sur les normes sociales de réussite et les aspirations socioprofessionnelles, nous avons mené des groupes de discussion avec des personnes en situation de grande vulnérabilité pour documenter et comprendre leurs modèles de réussite, ce qu’elles conçoivent comme une vie désirable et digne d’être vécue, et les rapports qu’elles entretiennent avec les référents normatifs qui les entourent à cet égard. Cette communication sera l’occasion d’examiner les choix éthiques et méthodologiques qui ont entouré la réalisation de ces groupes de discussion sur une thématique au grand potentiel de résonance avec leur situation de vulnérabilité.

Bloc 2b : La disponibilité au terrain d’enquête, fragilisations sociales des enfants et familles

• Communication orale 13 h 00
  Réflexions éthiques, considérations méthodologiques : aborder l’histoire de parents d’enfants placés par les services de protection de la jeunesse à partir de leur récit de vie
  Amilie Dorval (UdeM - Université de Montréal)

  Les parents d’enfants placés représentent une population assez vulnérable, et ce, sur différents aspects sociaux : vulnérabilité socio-économique, difficultés au plan de la santé mentale, isolement, problèmes de toxicomanie, instabilité de logement, etc. De plus, ce sont des acteurs peu entendus autant dans le système de protection de la jeunesse que dans la littérature scientifique les concernant. Il est bien connu, le système de protection québécois vise d’abord et avant tout la protection des enfants. De ce fait, les parents sont continuellement évalués, questionnés, regardés, jugés, mais sont-ils réellement pris en considération et entendus? Les écrits scientifiques portant sur les parents d’enfants placés rapportent principalement la vulnérabilité exposée précédemment, mais tendent à taire leur histoire individuelle et collective. Dans le cadre d’une thèse doctorale en travail social, l’objectif est de comprendre l’expérience de la parentalité de parents d’enfants placés, et ce, à partir de récit de vie. La méthodologie adoptée privilégie deux entretiens avec chacun des parents : le premier étant un entretien très peu structuré visant à récolter l’histoire du parent. Le deuxième entretien vise à redonner le récit au parent soit en lui présentant et en lui permettant de valider ce dernier. Cette méthodologie nous apparaît plus éthique et tout appropriée pour aborder la réalité des parents et ainsi leur permettre de se raconter différemment.

• Communication orale 13 h 30
  Processus et enjeux des interventions visant le développement du pouvoir d'agir chez les familles issues de communautés vulnérables
  Sylvie Hamel (Université du Québec à Trois-Rivières), Maud Pellerin (UQTR - Université du Québec à Trois-Rivières)

  Le but de cette recherche était de comprendre comment cinq familles issues de secteurs d’habitation à loyer modique de la région de Trois-Rivières, ont été touchées par un programme auquel elles ont participé. Celui-ci visait à développer leurs compétences à communiquer et à vivre ensemble. La recherche s’est inspirée de la méthode Photovoice, offrant à ces familles la photographie comme moyen de s’exprimer sur leurs forces et leurs faiblesses. C’est en partant des images qu’ils avaient prises en famille que les participants se sont exprimé dans le cadre d’entretiens ayant aussi été effectués en famille. Ceci pour explorer 1) les perceptions que ces familles entretiennent à propos de ce qu’elles sont en tant qu’unité familiale et 2) comment ces elles perçoivent leurs liens avec la communauté, pour considérer si leur renforcement pourrait avoir une incidence sur leur capacité à s’ouvrir sur leur communauté. L’analyse thématique des entretiens indique la grande importance que revêt l’identité familiale chez les participants et que celle-ci primerait sur l’identité communautaire, avec les engagements et les solidarités qui pourraient en découler. De tels résultats donnent à réfléchir sur les processus pouvant contribuer au pouvoir d’agir chez de telles familles. Et cette réflexion concerne particulièrement les professionnels qui ont aussi participé à cette recherche (entretien de groupe) en s’exprimant sur les mêmes questions pour lesquelles les familles ont été sollicitées.

• Communication orale 14 h 00
  La recherche participative auprès des femmes séropositives et des enfants séropositifs et des enfants microbes dans la commune d’ABOBO (Côte d’Ivoire) : entre accès au terrain d’enquête et considérations éthiques
  Armelle Tania Andoh (Université Félix-Houphouët-Boigny)

  En sociologie, la vulnérabilité est perçue comme l’insécurité du bien-être des individus, des ménages et groupes face à un environnement changeant. Cette vulnérabilité sociale est différente de la vulnérabilité économique. Dans le domaine du VIH, le concept de vulnérabilité concerne les femmes et les enfants. La transmission mère-enfant demeure la principale cause d’infection au VIH. La première étude s’intéresse aux patients qui observent le traitement ARV afin de les maintenir dans le programme. La deuxième étude cherche à comprendre le phénomène des enfants « microbes » dans la capitale ivoirienne. Ce terme désigne des gangs d’enfants et adolescents qui multiplient les agressions. Âgés de 8 à 17 ans, ils sévissent par des agressions violentes à l’arme blanche. Ces études qualitatives s’inscrivant dans la recherche-action visent à mettre en relation les préoccupations du commanditaire (UNICEF) des deux études et les préoccupations des chercheurs. L’approche méthodologique participative a été utilisée avec la mobilisation, la participation, l’engagement et le dialogue des différents acteurs sur le terrain et avec des considérations éthiques. Nous avons utilisés des focus groups et des récits de vie. Notre communication vise donc à répondre aux questions: comment avons-nous eu accès à ces groupes ? Quelles sont les stratégies pour entrer en contact eux ? Quelles ont été les relations d’enquête? Et quels étaient les enjeux liés à leur participation?

Bloc 3a : Les positions et les identités, le rapport à l’autre

• Communication orale 15 h 00
  Le corps en recherche: réflexions autour de la recherche avec des femmes incarcérées
  Catherine Chesnay (UQAM - Université du Québec à Montréal), Sylvie Frigon (Université d'Ottawa)

  Faire de la recherche avec des femmes qui sont incarcérées comportent des enjeux importants. De par la nature même de la prison, l’accès à cette population, l’établissement de rapports égalitaires et le maintien de la confidentialité à toutes les étapes de la recherche sont des défis de taille. Ainsi, la position sociale de la chercheure par rapport aux participantes, les rapports qui se développent lors processus de recherche et les questionnements éthiques qui en découlent ont été documentés. Cependant, bien que les recherches qui portent sur les femmes incarcérées traitent de la question de leur corporalité, peu d’auteures ont interrogé la question de la corporalité de la chercheure dans le processus de recherche. C’est précisément la corporalité de la chercheure qui sera l’objet de cette présentation article. Nous faisons l’hypothèse que tout comme la position sociale de la chercheure et son identité contribuent au développement des savoirs issus de la recherche, nous soutenons que la corporalité de la chercheure constitue et est constituée dans le processus de recherche, contribuant ainsi au développement des savoirs.

• Communication orale 15 h 30
  Au confluent des « catégories émiques » et des « catégories étiques » dans la recherche qualitative sociale en environnement : Cas des migrants burkinabè dans l’Ouest Ivoirien
  Kabran Aristide Djane (Université Peleforo Gon Coulibaly de Korhogo)

  La volonté de se soustraire à la vulnérabilité économique conduit les communautés migrantes à investir la réserve de biosphère du Parc du Mont Sangbe à l’Ouest de la Côte d’Ivoire. Des crises de confiance constante dégénérant entre conflits ouverts entre ces communautés burkinabè migrantes et les autochtones Yacoubas sont constamment observées. Enquêter dans cet espace a relevé d’un défi épistémique et méthodologique compte tenu des suspicions que les migrants burkinabè ont des investigations sur leurs communautés. Afin de résoudre, ce dilemme face à ces populations migrantes, nous avons convoqué dans notre approche de négociation des données, de mise en confiance des enquêtés, de collecte et d’ajustement, les concepts développés par Jean Olivier de Sardan sur les « catégories émiques » et « catégories étiques » tout au long de cette recherche qualitative sociale en environnement. Cette production permet ainsi de saisir comment la logique de la construction des catégories émiques, son influence sur les catégories étiques, et vis-versa, tant dans l’administration des instruments d’enquête dans cet espace sensible, que dans l’analyse des données que nous avons recueillies se socioconstruit. Elle reconstruit ainsi l’écart parfois décrié par Jean Olivier De Sardan.

• Communication orale 16 h 00
  Je pensais que ça ne servait pas à grand-chose : une recherche centrée sur la voix d’élèves du secondaire au sujet de la présence d’un stagiaire
  Annie Malo (UdeM - Université de Montréal)

  Les programmes scolaires au Québec placent les élèves au centre de leur apprentissage (MEQ, 2000). Cependant, les élèves constituent encore un groupe vulnérable, en position désavantageuse (Pires, 1997). Par exemple, le fait d’exprimer un point de vue, divergent de la norme véhiculée par un adulte en position d’autorité, peut parfois entraîner une sanction à leur égard. Par ailleurs, la formation à l’enseignement tient peu compte du point de vue des élèves (Clift et Brady, 2005; Schultz, 2011), notamment lors des stages (Malo, 2014). En outre, les recherches sur les élèves restent majoritairement «adulto-centrée» (Delalande, 2006; Delgado, 2006). Une recherche qualitative a été menée avec un groupe de quatre élèves à l’hiver 2016 et de neuf élèves à l’automne 2016. Deux cycles de trois entretiens de groupe avaient pour objectif de faire participer les élèves à l’amélioration d’un outil visant la prise en compte du point de vue des élèves sur la présence d’un stagiaire pendant leur année scolaire. Le but de la présentation est montrer, par un retour réflexif sur la démarche (Spyrou, 2011), comment les choix méthodologiques et les décisions éthiques ne sont pas réglés avant d’entrer sur le terrain, mais se négocient et s’ajustent en cours de processus, et ce, afin de mettre en place et de conserver des conditions permettant aux élèves de rendre compte de leur monde, notamment ceux dont la voix est particulièrement silencieuse.

Bloc 3b : Les positions et les identités, espaces sociaux vulnérables

• Communication orale 15 h 00
  Positionnements éthique et politique en recherche auprès de personnes vulnérables : le cas d'une recherche auprès de locataires vivant des problèmes de salubrité
  Renaud Goyer (UdeM - Université de Montréal)

  En 1967, Howard Becker, appelait les chercheurs à se demander : de quel côté sont-ils? Cette présentation découle d'une recherche qualitative réalisée en partenariat avec le Comité logement Saint-Laurent et s'appuyant sur des entrevues semi-dirigées et plusieurs heures d'observation à travers les activités du Comité. Les résultats de la recherche ont documenté comment la question de salubrité construit l'expérience des locataires d'une part, et en quoi, dans certains cas, elle empêche les locataires de contrôler leur espace intime et de s'inscrire plus largement dans l'espace social.

  Le travail de recherche sur et en compagnie des personnes marginalisées ou vulnérables exigent du chercheur de se positionner sur deux plans. Sur le plan éthique, comment s'assurer que les droits des participants soient respectés et que leur point de vue soit défendu? Sur le plan politique, comment peut-on s'assurer que la recherche permette aux participants de questionner leur situation, de reprendre du pouvoir sur celle-ci voire même se politiser ou contribuer la politisation de l'enjeu? Nous chercherons donc dans cette présentation à, dans un premier temps, évoquer les questionnements éthiques qui ont orienté notre entrée sur le terrain et, dans un deuxième temps, à questionner en quoi la salubrité représente une expérience à partir duquel la politisation est complexe. En bref, nous cherchons à répondre à la question : de quel côté étions-nous?

• Communication orale 15 h 30
  L'entretien biographique compréhensif dans un contexte de vulnérabilité économique et sociale au Maroc : une négociation des positions et des identités entre chercheur et interviewés
  Khalid Gueddari (UdeM - Université de Montréal)

  La présente communication revient sur les tensions qui entourent le processus de collecte de données en milieu rural au Maroc (Gueddari, 2016). En effet, le milieu rural marocain est habité pour l’essentiel par des populations qui vivent une grande vulnérabilité économique et sociale selon le conseil économique, social et environnemental (CESE, 2017). Pour y étudier le phénomène de l’abandon scolaire, j’ai mobilisé un dispositif d’entretien biographique compréhensif qui s’est révélé le lieu d’une négociation des positions et des identités entre chercheur et populations concernées. Cette communication revient sur les ressources méthodologiques mises de l’avant pour contrebalancer un rapport inégal qui pose le chercheur comme un éternel étranger aux yeux des interviewés, alors qu’il est originaire de la région. En mettant la focale sur les différents moments méthodologiques-clé qui ont débouché sur une « compréhension partagée », je déplie la façon dont l’entretien biographique compréhensif, en tant qu’interaction s’inscrivant dans des rapports sociaux distribuant des rôles, des pouvoirs et des ressources (Demazière, 2011), a favorisé la négociation d’une symétrisation (Morrissette & Diédhiou, 2015) entre le chercheur et les familles interviewées.

  Présentation Slideshare

Remise du prix Jean-Marie Van der Maren et cocktail de l’Association pour la recherche qualitative

Bloc 1 : La disponibilité du chercheur face au groupe

• Communication orale 09 h 00
  Les enseignants migrants vulnérabilisés dans les écoles québécoises. Les apports d’une recherche qualitative fondée sur des entretiens de groupe favorisant l’intercompréhension
  Didier Demazière (Sciences Po, Paris), Joëlle Morrissette (UdeM - Université de Montréal)

  Cette communication s’appuie sur une recherche qualitative centrée sur la socialisation professionnelle d’enseignants migrants travaillant dans les écoles québécoises. Ils sont vulnérabilisés dans ces contextes : leurs conditions d’emploi sont dégradées car ils sont recrutés sur des statuts précaires et souvent affectés à des postes hors de leur expertise disciplinaire, de plus leur place dans les relations professionnelles est fragile car, faute d’expérience au Québec, ils ne partagent pas d’emblée les conventions locales de travail et sont alors faiblement intégrés dans leur écologie professionnelle. Aussi leurs activités sont marquées par des chocs et surprises, mais aussi par des « faux-pas » perçus comme des transgressions des normes en vigueur.

  Notre dispositif d’enquête, fondé sur des entretiens de groupe associant des enseignants migrants et des partenaires de travail, conduit à réévaluer ces expériences et situations. En effet, les échanges font émerger les significations sous-jacentes aux pratiques professionnelles divergentes et rendent visibles la consistance et la cohérence des deux systèmes de normes qui s’entrechoquent. L’enquête favorise donc l’intercompréhension entre un groupe minoritaire potentiellement fragilisé et un groupe majoritaire qui détient le pouvoir de dire comment le travail doit être fait. Elle contribue à cette tradition de la recherche qualitative qui participe à l’émancipation des acteurs inscrits dans des contextes de vulnérabilité.

• Communication orale 09 h 30
  Comment les entretiens collectifs saisissent-ils des identifications collectives ? Les leçons d’une enquête dans une association de solidarité accueillant des populations en situation de précarité sociale
  Caroline Arnal (Université de Versailles Saint Quentin en Yvelines), Florence Haegel (Sciences Po Paris, Centre d’Études Européennes)

  La littérature sur les entretiens collectifs a depuis longtemps défendu l’intérêt de cette méthode pour étudier des populations marginalisées ou minoritaires. En suscitant une dynamique de groupe, ce type d’entretiens contribuerait en effet à construire une expérience commune et une forme d’identification à un « nous », susceptible de réduire l’asymétrie de la relation enquêteur/enquêté. S’appuyant sur cette littérature et sur une enquête sur la participation politique et citoyenne de personnes en situation de grande précarité accueillies dans une association de solidarité parisienne, cette communication s’attachera plus spécifiquement à saisir les effets des choix méthodologiques sur les dynamiques d’identification collective de cette population. Dans un premier temps, nous montrerons que la réalisation de ces entretiens collectifs (mode de recrutement, cadre et dynamique de la discussion, etc.) a permis l’émergence d’une identification à un « nous » forgé à partir du cadre associatif et centré sur un modèle familial de protection et de dépendance. Dans un deuxième temps, nous mettrons en lumière les freins à l’expression à la fois d’une identification collective construite autour de la catégorie de précaires et de logiques d’action collective et d’émancipation. Nous soulignerons, en particulier, la manière dont les choix d’animation et de scénario ont permis de rendre visibles les divisions liées à des expériences diverses de la précarité ou à des désaccords politiques.

Bloc 2 : Les considérations éthiques

• Communication orale 10 h 15
  Décisions éthiques au long d’une enquête de terrain à Ma place au soleil : le devis éthique, entre contrainte et ressource
  Jean-Pierre Mercier (UdeS - Université de Sherbrooke)

  Les jeunes mères non diplômées vivent des précarités (Bourdon et Bélisle, 2015), influencées par le contexte social et touchant plusieurs sphères de vie : logement, parentalité, revenu, obstacles à la participation, santé, par exemple. Conduire une enquête de terrain auprès de ces femmes demande des précautions éthiques spécifiques. L’étude de cas ethnographique que j’ai conduite auprès d’un groupe de jeunes mères de Ma place au soleil a demandé de prendre de nombreuses décisions éthiques avant et pendant l’enquête. Si les devis éthiques dans la recherche auprès d’êtres humains peuvent être vus comme contraignants, le mien a néanmoins constitué une ressource dans la prise des décisions. Il a contribué (et continue de contribuer) à établir et à maintenir le lien de confiance avec les interlocutrices et interlocuteurs de terrain (jeunes mères, personnes intervenantes et organismes) et à tirer le plein potentiel des méthodes prévues et annoncées. Dans une perspective de « vigilance ethnographique » (Morrissette, Demazière et Pepin, 2014, p. 10), cette communication vise à objectiver et à restituer, en un récit, l’expérience singulière de l’enquête, ses conditions et les influences des interlocutrices et interlocuteurs dans les prises de décisions éthiques. Ce récit sera construit à partir des traces de mes réflexions laissées dans le journal de terrain autour de ces décisions et dans le propos des personnes interlocutrices sur leur participation à l’étude.

• Communication orale 10 h 45
  Comment expliquer les enjeux éthiques d’une recherche à des enfants: présentation d’un « protocole » visant à s’assurer de leur consentement éclairé
  Viviane Boucher (UQAM - Université du Québec à Montréal)

  Cette communication souhaite démontrer concrètement comment une chercheuse a pris en compte la situation de vulnérabilité des jeunes participants de sa recherche et comment elle a créé un « protocole » tenant compte de leur réalité pour s’assurer de leur consentement éclairé. En effet, en raison des dynamiques de pouvoir inhérentes au contexte scolaire et au contexte de recherche, il était nécessaire de prendre certaines précautions. D’abord, des éléments théoriques concernant le droit fondamental des enfants d’être impliqués dans les décisions qui sont prises les concernant (Bragg, 2007), des initiatives permettant qu’ils s’investissent dans les recherches auxquelles ils participent (Kellet, 2010) ainsi que des méthodes qui permettent de leur donner une voix seront exposées (Clark, 2005; Kirshner, 2005; Masny, 2012; Ruglis, 2011). Ensuite, les éléments théoriques explicités précédemment seront mis en relation concrètement par la présentation du « protocole » qui a été utilisé dans cette étude durant laquelle des données provenant d’un journal de bord, d’observations participantes, d’artéfacts variés et d’entretiens ont été collectées. Cette recherche vise à identifier des pistes pédagogiques plus équitables qui offrent aux enfants d’origines linguistiques et culturelles variées une multitude de moyens de s’exprimer et de développer des pratiques de communication diverses à l’intérieur d’une société hétérogène et utilisant les technologies (Dagenais, 2012).

• Communication orale 11 h 15
  Une recherche inclusive accepte sa propre vulnérabilité
  Jean Horvais (UQAM - Université du Québec à Montréal)

  Cette communication a pour objectif de clarifier les conditions de définition et de réalisation d'une recherche inclusive qui accepte sa propre vulnérabilité. Elle prend appui sur une recherche portant sur l'apprentissage tout au long de la vie de personnes vivant avec une déficience intellectuelle, visant à leur donner la parole sur leurs attentes, leurs désirs (Horvais, 2012). Or, cette vulnérabilité n’est pas seulement attachée à celle supposée des sujets. Certes, ces personnes DI voient leur liberté, leur capacité d’exprimer leurs attentes et leurs désirs limités par un environnement socio-économique qui leur est à la fois hostile et protecteur. C’est ainsi qu’elles peuvent être vues comme vulnérables. Cependant, le chercheur aussi ressent sa propre vulnérabilité dès lors qu’il veut les rencontrer avec sincérité, tact, respect. Il doit alors accepter un déroulement méthodologique qui prend son temps et passe par des étapes ethnographiques de familiarisation réciproque, d’observation et prise de notes en s’inscrivant progressivement comme un partenaire dans des activités. Viennent ensuite des propositions de rencontres individuelles faisant appel à la vidéo des activités partagées comme support à des entretiens individuels et focus-groupes semi-dirigés. Nous proposerons donc dans notre communication d’examiner ce qui dans les actions concrètes nécessitées par cette recherche et sa méthodologie donne corps aux 5 « arcs-boutants » de la société inclusive (Gardou, 2012).

Discussion et dîner

Bloc 3a : Les retombées sociopolitiques, « empowerment » (appropriation)

• Communication orale 13 h 00
  Les défis méthodologiques à relever dans le cadre d'une recherche-action qualitative auprès de jeunes réfugiés: les acteurs scolaires fragilisés par leur vulnérabilité.
  Vanessa Lemire (Université de Montréal), Caterina Mamprin (Université de Montréal), Garine Papazian-Zohrabian (UdeM - Université de Montréal), Alyssa Turpin-Samson (Université de Montréal)

  En 2015-2016, alors que le Québec a accueilli plus de 7583 réfugiés syriens, plusieurs écoles ont dû mobiliser leurs ressources pour recevoir ces nouveaux élèves (MIDI, 2017). Toutefois, en considérant les conditions d’adversité rencontrées par ces élèves ainsi que les deuils et les traumatismes pré, péri et post-migratoires vécus (Pacione, 2012), l’accueil de ces élèves était entrevu comme un défi pour les écoles québécoises. Nous avons mené une recherche-action qualitative en ayant comme objectif de documenter l’influence d’une action scolaire visant l’amélioration du bien-être et le sentiment d’appartenance à l’école des jeunes réfugiés syriens, en ayant une perspective systémique. L’action consistait à mener des groupes de parole dans des classes d’accueil ayant accueilli ces réfugiés et à offrir un accompagnement psychosocial à des élèves en mal-être. Nos résultats nous ont, entre autres, permis de constater l’amélioration de leur bien-être et de leur sentiment d’appartenance à la classe. Cette recherche nous a également permis d’identifier des défis d’ordre méthodologique, dus, par exemple, à la vulnérabilité des élèves et de leurs parents. Par ailleurs, plusieurs enjeux méthodologiques relevés ont touché une catégorie de participants non préalablement identifiés comme vulnérables : les acteurs scolaires.

• Communication orale 13 h 30
  Étude qualitative, participative et visuelle sur les regards associés à la santé mentale
  Lyne Douville (Université du Québec à Trois-Rivières), Marie-pier Sylvestre (UQTR - Université du Québec à Trois-Rivières)

  À travers l’ensemble des canadiens, le taux de troubles mentaux est plus élevé chez les populations autochtones. Bien que la proportion des troubles de santé mentale soit plus élevée chez les peuples autochtones, une sous-utilisation des services sociaux est observée parmi ceux-ci. Cette réalité serait principalement liée à un manque d’adaptation des services aux particularités culturelles et sociales de ces peuples. Dans l’optique d’apporter des changements sociaux, Photovoice est une méthode qui est de plus en plus utilisé auprès des populations marginalisées. Il s'agit principalement de donner la voix, à travers la photographie, aux personnes vulnérables. Cette étude porte sur l’utilisation de Photovoice auprès de 8 femmes étudiantes au collège de Kiona dans le cadre d’un cours de psychologie. De point de vue qualitatif, je m’intéresse à la question qui suit : Quelle est la perception des sujets sur le processus de la méthode Photovoice à partir du début de l’expérimentation jusqu’à l’exposition de photos dans la communauté ?

• Communication orale 14 h 00
  Le recours à des cartographies participatives pour mieux comprendre les réalités de vulnérabilité sociale : réflexions sur la coconstruction d’approches et de savoirs.
  Émilie Dufour (MRC de Charlevoix), Sophie Dupéré (Université Laval), Lucie Gélineau (UQAR - Université du Québec à Rimouski), Julie Richard (Université Laval)

  Comment, dans un projet de recherche, mettre l’accent non pas sur les manques, mais sur les stratégies, les ressources et les savoirs d’individus dits vulnérables et les engager dans la réflexion et l’analyse ? Nous souhaitons ici poursuivre notre compréhension des motifs et mécanismes nous ayant menées à penser et utiliser avec les premiers concernés des approches de cartographie participative. Nous souhaitons explorer les forces et les limites de ces approches pour comprendre les situations qui entretiennent la vulnérabilité sociale perçue sous l’angle des capabilités (Sen, 2012) c’est à dire l’intérêt de considérer à la fois les dimensions personnelles et structurelles qui influent sur l’(in)égalité des chances. Quels sont les motifs éthiques et épistémologiques qui nous ont menées à privilégier ces approches ? Comment ces dernières furent-elles pensées AVEC et quels furent les défis de cette coconstruction ? Quelles furent les percées permises, en matière de savoirs, notamment sur le rapport des personnes à leur territoire et leurs environnements (Mathieu, 1997)? Et enfin, permettent-elles l’émergence d’une plus grande sensibilité envers les terrains d’enquête et qui sait, d’imagination sociologique (Mills, 2006)? La réflexion s’appuie sur deux projets, un portant sur les stratégies d’accès à l’alimentation en milieux urbain et rural et un second sur la place des jeunes en région. Contribueront à cette réflexion, deux praticiennes.

Bloc 3b : Les retombées sociopolitiques, « empowerment » (appropriation) et territoires

• Communication orale 13 h 00
  Enjeux éthiques et méthodologiques d'une étude qualitative en milieu HLM
  Roxane Meilleur (UdeS - Université de Sherbrooke)

  Les offices d'habitation (OH) sont des entreprises publiques mandatées par la Société d'habitation du Québec (SHQ) pour gérer les habitations à loyer modique (HLM), des logements sociaux destinés aux personnes vivant sous le seuil de la pauvreté. Les OH font face au défi de concilier la gestion immobilière et la gestion sociale, qui consiste à soutenir la vie associative et mettre en œuvre des activités pour contribuer au mieux-être de cette population souvent stigmatisée. Favoriser la participation citoyenne des locataires constitue un moyen innovant pour y arriver, tout en contribuant à l'empowerment des communautés. La transformation des rapports de pouvoir que cela implique représente cependant un défi, que Morin et ses collaborateurs (2014) qualifient de changement culturel. L'étude qualitative présentée vise à comprendre les processus par lesquels la culture organisationnelle d'un OH produit des effets, souhaités ou non, sur le développement de la participation citoyenne, spécifiquement en HLM Familles. Les données sont issues d'observations, de focus groups et d'entrevues semi-structurées (locataires, employés, gestionnaires) puis soumises à une analyse par théorisation ancrée. Trois enjeux mis en lumière par cette expérience de recherche sont exposés : 1) les limites de l'engagement dans une recherche collaborative; 2) la posture du chercheur lorsque les rapports de pouvoir entre participants sont inégaux; et 3) la gestion des attentes en contexte de vulnérabilité.

• Communication orale 13 h 30
  Groupe mixte de codéveloppement clinique: Regards croisés sur l'intervention de proximité avec les enfants et les familles en situation de vulnérabilité sur un territoire donné
  Catherine Bélanger Sabourin (UQAM - Université du Québec à Montréal)

  Dans le cadre du Service aux collectivités de l’UQAM, un projet s’est coconstruit avec le milieu associatif d’un territoire montréalais. Depuis 2012, impliquant des activités formatives et réflexives, il a culminé avec la mise sur pied d’un groupe mixte de codéveloppement clinique en communauté. Ce groupe est composé d'intervenants issus des divers milieux partenaires. D’un même territoire, ils sont tous impliqués dans des interventions de proximité avec des enfants/familles en situation de vulnérabilité économique et sociale. Il s’agit d’un groupe d’analyse et de transformation des pratiques qui a pour buts de créer un espace réflexif/formatif sur mesure avec ces intervenants sociaux et de coconstruire des connaissances concernant les interventions de proximité avec ces enfants/familles. Cet espace réflexif commun vise à permettre aux intervenants de mieux composer, individuellement et collectivement, avec les situations qu’ils rencontrent dans leur pratique. Ce groupe s’intéresse aux situations complexes qui posent des enjeux relatifs à la collaboration entre les multiples acteurs impliqués dans la vie de ces enfants/familles. Cette communication abordera la co-construction du projet, ses inspirations théoriques/méthodologiques et la pertinence d’y adjoindre une recherche-action collaborative. Répondant à des visées formatives, réflexives et de co-production de connaissances, ce type de recherche présente une double pertinence pour les mondes pratique et académique.

• Communication orale 14 h 00
  Implantation d’une initiative en contexte d’itinérance : un projet d’évaluation développementale
  Lara Maillet (IUPLSSS - Institut universitaire de première ligne en santé et services sociaux), Luiza Maria Manceau (Université de Sherbrooke)

  Cette évaluation développementale vise à comprendre et soutenir en temps réel les processus de développement et d’implantation d’une initiative à l’intention des personnes en situation d’itinérance ou à risque de l’être et permettre, ultimement, la diffusion de celle-ci à d’autres contextes. Elle s’inscrit dans une démarche de recherche participative qui mise sur l’implication des acteurs qui en sont responsables. Pour réaliser l’évaluation, nous optons pour trois sources de données : une collecte documentaire, des observations participantes lors des activités tenues par les responsables de l’initiative et des entrevues individuelles semi-dirigées structurées avec les différents acteurs impliqués ou concernés par l’initiative (N=20). Nous observons notamment l’implication de partenaires intersectoriels et la participation des usagers dans les différents comités de travail et de prise de décisions mis en place. Nous avons mis en relief des enjeux organisationnels et éthiques tels que l’escalade de la non-décision et l’éloignement de l’usager des lieux de prises de décisions. Nous estimons que le fait de miser sur l’intersectorialité dans une initiative basée sur les besoins d’une population ne suffit pas à la faire avancer. Cela nécessite non seulement la collaboration de l’organisation de santé concernée, mais aussi celle du milieu dans lequel l’initiative s’insère.

  Présentation Slideshare

Conférence de clôture de Didier Demazière