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Informations générales

Événement : 82e congrès de l'Acfas

Type : Colloque

Section : Section 400 - Sciences sociales

Description :

L’un des éléments les plus visibles et les plus controversés de l’intervention policière est certainement l’usage de la force envers des citoyens. Des cas récents ont démontré la vigueur de l’opposition populaire à ce qui est souvent perçu comme de la « brutalité policière ». Par exemple, les vidéos mettant en vedette Matricule 728 ont amplement circulé sur les réseaux sociaux et tous ont une opinion sur les interventions policières lors des manifestations du Printemps Érable. Au-delà des vives émotions que suscitent de telles interventions, l’emploi de la force reste un phénomène relativement rare, une anecdote dans le travail quotidien des policiers. Ce colloque vise à mettre en contexte et à comprendre l’usage de la force par la police au Québec. Contrairement à la croyance populaire, l’usage de la force est encadré par plusieurs lois et procédures. Ce qui n’empêche pas la population et les chercheurs de se poser plusieurs questions. Quelle est la fréquence de l’emploi de la force par la police? Quelles sont les différentes formes que peuvent prendre cette force et dans quels contextes est-elle utilisée? Les facteurs individuels ont-ils une influence sur le niveau de force utilisé? Quelles sont les blessures provoquées par ces interventions? Quel est l’influence de la formation des policiers sur la façon de mener des interventions? Qu’arrive-t-il aux policiers lorsqu’ils font un usage inapproprié de la force? Toutes ces questions seront au cœur des présentations des conférenciers provenant des milieux académiques autant que des milieux de pratique du Québec.

Date :
Responsable :

Programme

Communications orales

Comprendre le niveau de force utilisé lors d'une intervention policière

  • L'emploi de la force : cadre de référence enseigné aux aspirants policiers
    Bruno Poulin (École nationale de police du Québec)

    Tel que défini dans le guide du Modèle national de l'emploi de la force, le recours à la force réfère aux options qui vont de la présence et de l'aspect physique du policier, jusqu'à la force mortelle, en passant par la communication, le contrôle physique, et les armes intermédiaires. Les diverses options d'emploi de la force peuvent être utilisées seules ou de façon combinée pour maîtriser une situation impliquant une dynamique de confrontation (ou de résistance) entre un(des) sujet(s) et un(des) policier(s). Les options choisies dépendront du processus d'évaluation continu fait par le policier en tenant compte de la situation, de sa perception, du comportement du sujet, et des considérations tactiques (ENPQ, 2013). Cette communication portera sur l'enseignement de ce cadre de référence aux aspirants policiers québécois.

  • Force et résistance : analyse des facteurs situationnels et individuels qui influencent l'intervention policière
    Rémi Boivin (UdeM - Université de Montréal)

    Règle générale, les policiers sont autorisés à utiliser une force raisonnable lorsqu'ils le jugent nécessaire. La résistance du sujet a longtemps été le principal, sinon le seul, critère de détermination du niveau de force adéquat : plus grand est le niveau de résistance, plus « musclée » sera la réponse policière. Ce modèle en escalade est aujourd'hui en voie d'être remplacé par un modèle situationnel dans lequel d'autres éléments peuvent être pris en compte. Ce changement de philosophie est-il basé sur la réalité des policiers? Pour le savoir, plus de 1000 interventions policières ayant eu lieu dans une grande ville canadienne entre 2007 et 2011 ont été analysées. Le but de l'analyse présentée n'était pas d'identifier les facteurs liés au niveau de force utilisé par la police lors d'une intervention mais plutôt de comparer trois catégories d'interventions : celles où le niveau de force utilisé était proportionnel au niveau de résistance, celles où la force utilisée excédait la résistance et celles où le niveau de force utilisé était inférieure à la résistance du sujet. Les résultats obtenus suggèrent que plusieurs facteurs liés à la situation mais aussi aux caractéristiques individuelles des policiers et des sujets sont liés à la proportionnalité entre la force et la résistance. Ces résultats appuient le changement philosophique d'intervention prôné, entre autres, par l'École nationale de police du Québec.

  • Les facteurs contextuels influencent-ils le niveau de force utilisé par les policiers?
    Rémi BOIVIN (Centre international de criminologie comparée), Patricia Obartel (UdeM - Université de Montréal)

    L'intervention policière est souvent comprise en fonction de la situation immédiate et des caractéristiques des personnes impliquées. Lorsque des policiers perçoivent une menace ou un danger, ils ont le devoir d'intervenir pour maintenir l'ordre public et assurer la sécurité. Le Modèle national de l'emploi de la force, qui est enseigné à tous les policiers du Québec, prévoit d'ailleurs une adaptation constante des policiers face à l'évolution d'une situation. Or, un nombre grandissant de travaux a démontré que le lieu pouvait influencer le déroulement de l'intervention : par exemple, certains travaux américains suggèrent que le niveau de force utilisé est plus grand si l'intervention se déroule dans un quartier socialement désavantagé. Cette présentation a pour objectif de mieux comprendre l'impact potentiel des facteurs environnementaux sur le niveau de force utilisé lors d'interventions policières au Québec. Pour ce faire, quatre facteurs sociodémographiques ont été sélectionnés, soit la proportion de familles monoparentales, la mobilité résidentielle, l'hétérogénéité ethnique et le taux de chômage. L'impact du taux de criminalité a aussi été mesuré. L'utilisation de modèles hiérarchiques (« multiniveaux ») permet l'isoler l'effet du quartier. Les résultats suggèrent que les policiers tiennent surtout compte de la situation immédiate, mais indiquent qu'ils sont aussi influencés par l'endroit où ils se trouvent.


Communications orales

Gérer et expliquer la force

  • Comprendre l'usage et le non-usage de la force par les policiers auprès des personnes en situation de crise suicidaire
    Elsa EUVRARD (UdeM - Université de Montréal), Chloe Leclerc (UdeM - Université de Montréal)

    La présentation vise à décrire les pratiques policières quant à l'usage de force auprès des personnes en crise suicidaire. Ces interventions policières sont intéressantes pour comprendre l'usage de la force parce qu'elles impliquent bien souvent des niveaux de force assez faibles (présence physique, négociation, menace de recourir à la force, etc.), une partie du continuum de l'usage de la force qui est très peu explorée. Des entrevues auprès d'une douzaine de patrouilleurs de police permettront de comprendre comment ils utilisent et perçoivent ces différents niveaux de force et comment ils arrivent généralement à éviter d'avoir à recourir à la force physique, même dans les interventions où les personnes sont initialement plutôt réticentes à les suivre. Les résultats montrent que, bien que les policiers utilisent des niveaux de force assez faibles (par exemple la menace de recourir à la force), ils le font bien souvent dans des contextes où ils n'ont pas l'autorité légale pour le faire. La conférence se termine sur ce qui pourrait expliquer que les policiers adoptent une politique de zéro prise de risque avec toutes les personnes suicidaires alors que la loi P-38 leur demande plutôt d'agir uniquement dans des contextes de danger grave et imminent.

  • Analyse des systèmes d'enquête sur la police : une comparaison interprovinciale pancanadienne
    Massimiliano Mulone (UdeM - Université de Montréal), Marc-Angel SIMONIN-COMPAGNA (UdeM - Université de Montréal)

    Au Canada, comme ailleurs dans le monde, la question du contrôle des actions policières illégitimes revient régulièrement au cœur du débat public, habituellement pour en dénoncer les failles. Que ce soit pour enquêter sur des manquements au code de déontologie ou sur des déviances plus sévères, les critiques s'adressent ordinairement au manque de transparence, d'indépendance et plus généralement d'impartialité qui caractériserait le traitement réservé aux officiers de police. Cela étant dit, si ces velléités de réformes apparaissent fondées d'un point de vue moral, force est de constater que sur le plan empirique les données sur lesquelles appuyer la réflexion demeurent bien peu nombreuses. Certains systèmes d'enquête sur la police favorisent-ils les agents de la paix ? Quelles caractéristiques des entités chargées de réagir aux déviances policières ont un impact significatif sur le traitement des plaintes ? Pour cette conférence, nous allons présenter les résultats d'une analyse comparative interprovinciale des systèmes d'enquêtes sur la police. En nous appuyant sur les données publiques des divers organismes provinciaux en charge d'enquêter sur les inconduites policières, nous allons pouvoir vérifier si les différences en terme de transparence, d'indépendance et de ressources créent des variations dans le nombre de plaintes, la nature de ces dernières, leur traitement et, enfin, leur issue.

  • Le rôle du témoin expert en emploi de la force policière
    Martin Blanchette (Service de police de la ville de Montréal)

    Le recours à la force, par le policier, est interdit à moins que cette force soit nécessaire pour accomplir son travail. En ce sens, chaque cas est un cas d'espèce et doit être étudié en fonction du contexte d'intervention. Lorsque la force est utilisée sans nécessité apparente ou encore lorsque le policier utilise un niveau de force supérieur à que ce qui semble nécessaire, ce dernier peut, entre autres, faire l'objet d'accusations en vertu du code criminel, répondre de poursuites civiles ou encore se voir cité devant le comité de déontologie policière. Pour éclairer les tribunaux, il arrive que les parties impliquées aient recours à l'opinion d'un témoin expert en emploi de la force afin d'aider le juge des faits à savoir si la force était nécessaire, si son utilisation convenait à la situation et si son application était raisonnable. En ce sens, le témoin expert analyse la situation et émet une opinion qui permet de mieux comprendre les options disponibles au moment de l'action et de trancher si le comportement observé répond aux standards attendus. Cette conférence permettra de déterminer le rôle de l'expert et son apport dans la compréhension des situations de recours à la force par les policiers.